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MESSAGE  DU PAPE JEAN PAUL II 
AU CONSEIL EXÉCUTIF DE L'UNION INTERNATIONALE 
DES SUPÉRIEURES GÉNÉRALES (UISG)


A l'Union internationale des Supérieures générales

1. C'est avec grande joie que je m'adresse à vous, chères Supérieures, venues de toutes les parties du monde pour votre habituelle rencontre de l'Union internationale des Supérieures générales. Vous avez été convoquées pour réfléchir aux problèmes et aux espérances de la vie consacrée au début du troisième millénaire, de façon à pouvoir continuer à être, en pleine fidélité à vos charismes, un signe de l'amour du Christ. Ne pouvant vous accueillir en audience en raison de mon pèlerinage sur les pas de saint Paul, qui me portera dans les prochains jours à Athènes, à Damas et à Malte, je vous adresse bien volontiers ce message, grâce auquel je peux me trouver, au moins spirituellement, parmi vous.

Vous êtes rassemblées à Rome pour réfléchir sur un thème qui unit merveilleusement non seulement la diversité enrichissante de vos charismes dans l'Eglise, mais aussi le pluralisme des cultures qui rendent vos différentes traditions significatives. Le désir de l'apôtre Paul vous réunit en un seul coeur:  "Charitas Christi urget nos!" (2 Co 5, 14). En ce monde, déchiré par tant de contradictions, vous vous proposez, dans votre identité de "femmes", d'"être une présence vivante de la tendresse et de la miséricorde de Dieu". Seule la charité du Christ permet aux communautés religieuses de répondre efficacement aux défis du monde moderne et de devenir annonce vivante de communion pour une nouvelle humanité, qui naît de la miséricorde et de la tendresse de Dieu.


2. Votre vie consacrée est caractérisée par la communion avec Dieu Amour, à qui vous voulez réserver la priorité dans tous vos choix. Ce Dieu auquel vous vous êtes données de façon libre et consciente, est le Dieu de Jésus-Christ, Dieu d'Amour, Dieu de Relation, Dieu-Trinité. Il fait participer notre petitesse à sa propre dynamique d'amour et d'unité. Mais comment appartenir à un Dieu de communion si nous ne communiquons pas la communion à celui que nous approchons, en l'exprimant concrètement dans la vie? Dans l'Exhortation post-synodale Vita consecrata j'ai voulu souligner que "la communion fraternelle, avant d'être un moyen pour une mission déterminée, est un lieu théologal où l'on peut faire l'expérience mystique du Seigneur ressuscité" (n. 42) et, dernièrement, dans la Lettre apostolique Novo millennio ineunte, j'ai observé que "spiritualité de la communion" signifie "regard du coeur porté sur le mystère de la Trinité qui habite en nous, et dont la lumière doit aussi être perçue sur le visage des frères qui sont à nos côtés" (n. 43). L'appel même que Jésus vous a adressé, et auquel chacune d'entre vous a répondu par le don de sa propre vie, ne peut se réaliser sans entrer en communion avec le monde entier, par amour de Dieu.


3. Pour reconnaître le Christ et l'Eglise, le monde a besoin aussi de votre témoignage. Ne vous découragez donc pas si vous rencontrez des difficultés. Parfois, il peut sembler que l'amour, la justice, la fidélité ne soient plus présents dans le monde d'aujourd'hui. N'ayez pas peur; le Seigneur est avec vous, il vous précède et vous suit dans la fidélité à son amour. Témoignez par votre vie de ce en quoi vous croyez!

Le témoignage fort et libre de votre voeu de pauvreté, vécu avec amour et dans la joie, est nécessaire pour que vos soeurs et vos frères comprennent que Dieu avec son amour salvifique est l'unique "trésor". La pauvreté conserve la chasteté et vous empêche de devenir esclaves des besoins créés artificiellement par la civilisation du bien-être. Libérées de tout le superflu, vous donnerez à votre pauvreté le visage évangélique de la liberté et de la confiance de celui qui est sûr que Dieu pourvoit aux besoins de ses fils. Il ne vous est pas demandé d'être puissantes mais d'être saintes!

Il y a besoin de votre chasteté fidèle et claire qui "annonce", dans le silence de son don quotidien, la miséricorde et la tendresse du Père et crie au monde qu'il existe un "amour plus grand" qui remplit le coeur et la vie, parce qu'il laisse de la place au frère ainsi que le suggère l'Apôtre:  "Portez les fardeaux les uns des autres" (Ga 6, 2). N'ayez pas peur de témoigner de ce grand don de Dieu. La jeunesse vous observe; puisse-t-elle apprendre de vous qu'il existe un amour différent de celui que le monde proclame, un amour fidèle, total, capable de prendre des risques. La virginité, vécue par amour de Jésus, est prophétique aujourd'hui plus que jamais!

Votre obéissance responsable et entièrement disponible à Dieu, à travers les personnes qu'il met sur votre route, est nécessaire. Vous êtes appelées à montrer par votre vie, que la vraie liberté consiste à entrer avec décision sur le chemin marqué et béni de l'obéissance, le chemin de mort et de résurrection que Jésus nous a indiqué par son exemple. Ayez son cri en mémoire, un cri de solitude et d'abandon au Père à la fois:  "Mon Père, s'il est possible, que cette coupe passe loin de moi! Cependant non pas comme je veux, mais comme tu veux" (Mt 26, 39) (cf. Novo millennio ineunte, n. 26). Vous vivez l'obéissance dans la communion. Ne laissez pas l'individualisme miner vos communautés. Que celles qui assument le service de l'autorité s'engagent toujours afin que leurs consoeurs témoignent d'une profonde communion avec le Magistère de l'Eglise,  notamment lorsqu'une mentalité sécularisée et hédoniste tente de remettre en cause les vérités fondamentales et les normes morales. Que votre obéissance soit, comme celle de Jésus, un abandon sans mesure aux desseins du Père.


4. Cet abandon à l'amour du Père renforce la charité envers le prochain. "C'est l'heure d'une nouvelle "imagination de la charité"" (Novo millennio ineunte, n. 50) qui se déploie non seulement dans l'organisation de secours, même s'ils sont nécessaires, mais "dans la capacité de se faire proche, d'être solidaire de ceux qui souffrent, de manière que le geste d'aide soi ressenti non comme une aumône humiliante, mais comme un partage fraternel" (Ibid.). La vie religieuse, pour se retrouver elle-même, doit redécouvrir le contact avec les personnes afin que celles-ci puissent la connaître telle qu'elle est:  un don de Dieu fait aux hommes dans le mystère de communion qui vivifie l'Eglise. Vous comprendrez d'autant plus profondément dans sa vitalité le charisme que Dieu vous a donné à travers vos Fondateurs et vos Fondatrices, que vous vous mettrez au service des autres, à commencer par les plus pauvres. Chaque charisme est donné pour la vie du monde. La contemplation comme l'évangélisation, l'assistance aux marginaux et aux malades comme l'enseignement, sont toujours un dialogue avec l'humanité, celle-là même pour laquelle Dieu n'a pas hésité à envoyer son Fils, pour qu'il donne la vie par sa rédemption.

Combien de fois a-t-il été dit qu'aujourd'hui, on ressent davantage le besoin de témoins que de maîtres! Soyez donc des témoins de l'Evangile, fidèles à Dieu et fidèles à l'homme. La vie religieuse, de par la force de la foi en la présence du Christ dans son Eglise - "Et voici que je suis avec vous pour toujours jusqu'à la fin du monde" (Mt 28, 20) -, vivra alors avec toute la communauté ecclésiale "un élan renouvelée pour la vie chrétienne" (Novo millennio ineunte, n. 29), faisant de la présence divine la force d'inspiration de son chemin.

La certitude de la présence de Dieu dans votre vie vous aide à comprendre le rapport existant entre la vie consacrée et l'annonce de l'Evangile. Dieu veut avoir besoin de votre disponibilité personnelle et communautaire à son Esprit, pour que l'humanité se rende compte et découvre finalement sa miséricorde et sa tendresse pour toute créature. Saint Paul affirme:  "Lorsque je suis faible, c'est alors que je suis fort" (2 Co 12, 10). Pourquoi? Parce que Dieu n'a pas peur de la faiblesse de l'homme, pourvu que celui-ci accueille sa miséricorde.


5. Chères Supérieures générales, je suis présent parmi vous spirituellement et je vous accompagne par la prière, en pensant que toute vocation religieuse dans l'Eglise porte un message d'espérance toujours renouvelé. On pourrait penser que le cœur de la femme a été créé pour apporter au monde le message de la miséricorde et de la tendresse de Dieu. Je vous confie volontiers à la Vierge Marie, la première consacrée qui, dans l'obéissance, est devenue Mère de Dieu. Et je vous répète avec confiance:  "Allons de l'avant dans l'espérance! ... N'est-ce pas pour reprendre contact avec cette source vive de notre espérance que nous avons célébré l'Année jubilaire? Maintenant le Christ, contemplé et aimé, nous invite une nouvelle fois à nous mettre en marche (Novo millennio ineunte, n. 58).

Que Marie vous aide à aimer, au prix de n'importe quel sacrifice, et même jusqu'à l'héroïsme, comme ont su le faire tant de vos consoeurs. Que sa présence soit pour chacune de vous un guide et un soutien.

Avec de tels sentiments, je vous donne à toutes une Bénédiction spéciale que j'étends volontiers à vos communautés et à chacune de vos Soeurs, comme expression de l'amour de Dieu qui vous suit chacune avec une fidélité éternelle.

Du Vatican le 3 mai 2001

 



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