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VOYAGE APOSTOLIQUE À RIO DE JANEIRO
À L'OCCASION DE LA XXVIIIe JOURNÉE MONDIALE DE LA JEUNESSE

 

CONFÉRENCE DE PRESSE DU SAINT-PÈRE
DURANT LE VOL DE RETOUR

Dimanche 28 juillet 2013

 

Père Lombardi :

Alors, chers amis, pendant ce voyage de retour nous avons la joie d’avoir le Saint-Père François avec nous ; il a été assez aimable pour nous donner un bon moment pour faire avec nous un bilan du voyage et répondre en totale liberté à vos questions. Je lui donne la parole pour une petite introduction et puis ensuite nous commencerons avec la liste de ceux qui se sont inscrits pour parler et nous les prendrons un peu des divers groupes nationaux et linguistiques. Alors, Sainteté, à vous la parole pour commencer.

Pape François :

Bonsoir et merci beaucoup. Je suis content. Ce fut un beau voyage, spirituellement il m’a fait du bien. Je suis fatigué, assez, mais avec le cœur joyeux, et je vais bien, bien : il m’a fait du bien spirituellement. Rencontrer les gens fait du bien, parce que le Seigneur travaille en chacun de nous, il travaille dans le cœur, et la richesse du Seigneur est telle que nous pouvons toujours recevoir tant de belles choses des autres. Et cela me fait du bien. Cela, comme un premier bilan. Ensuite je dirais que la bonté, le cœur du peuple brésilien est grand, c’est vrai : il est grand. C’est un peuple très aimable, un peuple qui aime la fête, qui même dans la souffrance trouve toujours une route pour chercher le bien de quelque façon. Et cela c’est bien : c’est un peuple joyeux, le peuple a tant souffert !

Elle est contagieuse la gaieté des Brésiliens, elle est contagieuse ! Et il a un grand cœur, ce peuple. Ensuite, je parlerai des organisateurs, aussi bien de notre part que de la part des Brésiliens ; mais j’ai senti que je me trouvais devant un ordinateur, cet ordinateur incarné… Mais vraiment ! Tout était chronométré, non ? Mais beau. Ensuite, nous avons eu des problèmes avec les hypothèses de sécurité : la sécurité par ci, la sécurité par là ; il n’y a pas eu un incident dans tout Rio de Janeiro, ces jours-ci, et tout était spontané. Avec moins de sécurité, j’ai pu être avec les gens, les embrasser, les saluer, sans voiture blindée… c’est la sécurité de faire confiance à un peuple. C’est vrai qu’il y a toujours le danger qu’il y ait un fou… eh, oui, qu’il y ait un fou qui fasse quelque chose ; mais il y a aussi le Seigneur ! Mais, mettre un espace de blindage entre l’Évêque et le peuple c’est une folie, et je préfère cette folie : dehors, et courir le risque de l’autre folie. Je préfère cette folie : dehors. La proximité fait du bien à tous.

Ensuite, l’organisation des Journées, non pas quelque chose de précis, mais tout : la partie artistique, la partie religieuse, la partie catéchétique, la partie liturgique… cela a été très beau ! Ils ont une capacité de s’exprimer dans l’art. Hier, par exemple, ils ont fait des choses très belles, très belles ! Ensuite, Aparecida : Aparecida est pour moi une expérience religieuse forte. Je me souviens de la Cinquième Conférence. J’y ai été pour prier, pour prier. Je voulais aller seul, un peu en cachette, mais il y avait une foule impressionnante ! Mais, ce n’est pas possible, cela je le savais avant d’arriver. Et nous avons prié, nous. Je ne sais pas … une chose … mais aussi de votre côté. Votre travail a été – m’a-t-on dit – je n’ai pas lu les journaux ces jours-ci, je n’avais pas le temps, je n’ai pas regardé la TV, rien –, mais on m’a dit que cela a été un bon travail, bon, bon ! Merci, merci pour la collaboration, merci d’avoir fait cela. Ensuite le nombre, le nombre des jeunes. Aujourd’hui – je ne peux pas le croire – mais aujourd’hui le Gouverneur parlait de trois millions. Je ne peux pas le croire. Mais depuis l’autel – c’est vrai ! – je ne sais pas si vous, certains de vous, avez été à l’autel : de l’autel, à la fin, il y avait toute la plage pleine, jusqu’au virage ; plus de quatre kilomètres. Mais, beaucoup de jeunes. Et on dit, Mgr Tempesta m’a dit qu’ils étaient de 178 pays : 178 ! Même le Vice-Président m’a donné ce chiffre : il est sûr. C’est important ! Fort !

Père Lombardi :

Merci. Alors, donnons la parole d’abord à Juan de Lara, qui est de Efe, il est espagnol, et c’est le dernier voyage qu’il fait avec nous : donc nous sommes contents de lui donner cette possibilité.

Juan de Lara :

Sainteté, bonne nuit. Au nom de tous les collègues nous voulons vous remercier pour ces journées que vous nous avez offertes à Rio de Janeiro, pour le travail que vous avez fait et la peine que vous vous êtes donnée. Et aussi, au nom de tous les journalistes espagnols, nous voulons vous remercier des prières et des gestes pour les victimes de l’accident ferroviaire de Saint-Jacques de Compostelle. Merci beaucoup. La première question n’a pas grand-chose à voir avec le voyage, mais nous saisissons l’occasion qui nous donne cette possibilité, et je voudrais vous demander : Sainteté, au cours de ces quatre mois de Pontificat, nous avons vu que vous avez créé diverses commissions pour réformer la Curie. Je voudrais vous demander : quel type de réforme avez-vous à l’esprit, prévoyez-vous la possibilité de supprimer l’IOR, ce qu’on appelle la Banque du Vatican ? Merci.

Pape François :

Les pas que j’ai faits au cours de ces quatre mois et demi viennent de deux côtés : le contenu de ce qu’on devait faire, tout, vient du côté des Congrégations générales des Cardinaux. Il y avait des choses que nous Cardinaux avons demandées à celui qui serait devenu le nouveau Pape. Je me rappelle que j’ai demandé beaucoup de choses, pensant que ce serait un autre… Nous demandions de faire cela, par exemple la Commission de huit Cardinaux, nous savons que c’est important d’avoir un Conseil outsider, non les Conseils qu’il y a déjà, mais outsider. Cela va chaque fois dans la ligne – ici je fais comme une abstraction, en pensant, mais je la fais pour l’expliquer – dans la ligne de la maturation de la relation entre synodalité et primat. C’est-à-dire, ces huit Cardinaux favorisent la synodalité, aident les divers épiscopats du monde à s’exprimer dans le gouvernement-même de l’Église. Il y a beaucoup de propositions qui ont été faites et qui toutefois n’ont pas encore été mises en pratique, comme la réforme du Secrétariat du Synode, dans la méthodologie ; comme la Commission post-synodale, qu’elle ait un caractère permanent de conseil ; comme les consistoires cardinalices, avec des thématiques qui ne soient pas si formelles – comme par exemple la canonisation, mais aussi d’autres thématiques, etc. Bien, le côté des contenus vient de là ! Le second côté est l’opportunité. Je vous confesse qu’il ne m’a pas coûté, le premier mois de pontificat, d’organiser la Commission des huit Cardinaux, qui est un premier point. La partie économique, je pensais la traiter l’année prochaine, parce que ce n’est pas la chose la plus importante qu’il faut traiter. Mais l’agenda a changé à cause des circonstances que vous connaissez et qui sont du domaine public ; des problèmes qui devaient être affrontés sont apparus. Le premier : le problème de l’IOR, c’est-à-dire, comment le mettre en route, comment en tracer le contour, comment le reformuler, comment assainir ce qui est à assainir, et ici il y a la première Commission de référence, c’est son nom. Vous connaissez le Chirographe, ce qu’on demande, ceux qui en font partie, tout. Puis nous avons eu la réunion de la Commission des 15 Cardinaux qui s’occupent des aspects économiques du Saint-Siège. Ils proviennent de toutes les parties du monde. Et là, en préparant cette réunion, on a vu la nécessité de faire une unique commission de référence pour toute l’économie du Saint-Siège. C'est-à-dire que fut affronté le problème économique hors agenda, mais ces choses arrivent quand au bureau du gouvernement l’un va dans un sens, mais les autres tirent un coup dans un autre sens, et tu dois le parer. N’est-ce pas ainsi ? Donc, la vie est ainsi, mais c’est aussi la beauté de la vie. Je répète la question que vous m’avez faite sur l’IOR, excusez-moi, je parle en castillan. Excusez-moi la réponse me venait en castillan.

En réponse à cette question que vous m’avez faite sur l’IOR, je ne sais pas comment finira l’IOR ; certains disent que, peut-être, il vaut mieux que ce soit une banque, d’autres que ce soit un fond d’aide, d’autres disent de le fermer. Bah ! On entend ces voix. Je ne sais pas. Je fais confiance au travail des personnes de l’IOR qui travaillent sur cela, et aussi à la Commission. Le Président de l’IOR demeure, le même qui l’était avant ; par contre le Directeur et le vice-directeur ont donné leur démission. Mais cela, je ne saurais dire comment finira cette histoire, mais cela aussi est beau, parce qu’on trouve, on cherche ; nous sommes des humains, en cela ; nous devons trouver le meilleur. Mais, cela oui ; mais les caractéristiques de l’IOR – que ce soit une banque, un fond d’aide, quoi que ce soit – transparence et honnêteté. Cela doit être ainsi. Merci.

Père Lombardi :  

Merci beaucoup, Sainteté. Alors, maintenant nous passons à une personne des représentants du groupe italien, et nous avons quelqu’un que vous connaissez bien : Andrea Tornielli, qui va poser une question au nom du groupe italien

Andrea Tornielli :

Saint-Père, j’aurais une question peut-être un peu plus indiscrète : votre photo, quand nous sommes partis, alors que vous  montez la passerelle de l’avion en portant une sacoche noire, a fait le tour du monde et il y a eu des articles dans le monde entier qui ont commenté cette nouveauté : oui, du Pape qui monte… il n’arrivait pas, disons, que le Pape monte avec son bagage à main. Alors, il y a eu des hypothèses sur ce que contenait la sacoche noire. Alors mes questions sont : un, pourquoi avez-vous porté votre sacoche noire et non un collaborateur, et deux, pouvez-vous nous dire ce qu’il y avait dedans… Merci.

Pape François :

Ce n’était pas la clé de la bombe atomique ! Bah ! Je la portais parce que j’ai toujours fait ainsi : moi, quand je voyage, je la porte. Et dedans, qu’est-ce qu’il y a ? Il y a mon rasoir, il y a le bréviaire, il y a l’agenda, il y a un livre à lire – j’en ai porté un sur sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus dont je suis dévot. J’ai toujours été avec ma sacoche quand je voyage : c’est normal. Mais nous devons être normaux … Je ne sais pas … c’est un peu étrange pour moi ce que tu me dis, que cette photo a fait le tour du monde. Mais nous devons nous habituer à être normaux. La normalité de la vie. Je ne sais pas, Andrea, si je t’ai répondu…

Père Lombardi :

Alors, maintenant nous donnons la parole à une représentante de langue portugaise, Aura Miguel, qui est de Radio Renascença :

Aura Miguel :

Sainteté, je voulais vous demander pourquoi vous demandez avec autant d’insistance que l’on prie pour vous ? Ce n’est pas normal, habituel, d’entendre ainsi un Pape demander autant de prier pour lui…

Pape François :

J’ai toujours demandé cela. Quand j’étais prêtre je le demandais, mais pas si fréquemment ; j’ai commencé à le demander avec une certaine fréquence dans mon travail d’Évêque, parce que je sens que si le Seigneur n’aide pas dans ce travail d’aider le Peuple de Dieu à aller de l’avant, une personne seule ne peut pas… Vraiment moi je me sens avec tant de limites, tant de problèmes, et aussi pécheur – vous le savez ! – et je dois demander cela. Mais, cela me vient de l’intérieur ! Je demande aussi à la Vierge de prier le Seigneur pour moi. C’est une habitude, mais c’est une habitude qui me vient du cœur et aussi de la nécessité que j’ai pour mon travail. Je sens que je dois demander… Je ne sais pas, c’est comme ça…

Père Lombardi :

Maintenant nous passons au groupe de langue anglaise, et nous donnons la parole à notre collègue Pullella de Reuters, qui est ici devant.

Philip Pullella :

Sainteté, merci pour votre disponibilité, au nom du groupe anglais. Le collègue de Lara a déjà posé la question que nous voulions poser, donc je poursuis un peu dans cette ligne là, un peu, mais : dans votre recherche pour faire ces changements, je me souviens que vous avez dit au groupe d’Amérique latine qu’il y a beaucoup de saints qui travaillent au Vatican, mais aussi des personnes qui sont un peu moins saintes, non ? Avez-vous trouvé de la résistance à votre désir de changer les choses au Vatican ? Avez-vous trouvé de la résistance ? La deuxième question est : vous vivez de façon très austère, vous êtes resté à Sainte-Marthe, etc… Voulez-vous que vos collaborateurs, même les Cardinaux, suivent cet exemple et peut-être vivent en communauté, où est-ce seulement pour vous ?

Pape François :

Les changements… les changements viennent aussi de deux côtés : celui que nous Cardinaux avons demandé et celui qui vient de ma personnalité. Vous parliez du fait que je suis resté à Sainte-Marthe : mais je ne pourrais pas vivre seul au Palais, et il n’est pas luxueux. L’appartement pontifical n’est pas très luxueux ! Il est vaste, il est grand, mais il n’est pas luxueux. Mais je ne peux pas vivre seul ou avec un tout petit groupe ! J’ai besoin de gens, de trouver des gens, de parler avec les gens… Et pour cela quand les jeunes des écoles jésuites m’on posé la question : « Pourquoi vous ? Par austérité, par pauvreté ? » Non, non : pour des motifs psychologiques, simplement, parce que psychologiquement je ne peux pas. Chacun doit aller de l’avant, avec sa façon de vivre, d’être. Les Cardinaux qui travaillent à la Curie ne vivent pas en riches, de manière fastueuse : ils vivent dans un petit appartement, ils sont austères, eux, ils sont austères. Ceux que je connais, ces appartements que l’APSA donne aux Cardinaux. Puis, il me semble qu’il y a autre chose que je voulais dire. Chacun doit vivre comme le Seigneur lui demande de vivre. Mais l’austérité – une austérité générale – je crois qu’elle est nécessaire pour nous tous qui travaillons au service de l’Église. Il y a tant de nuances sur les austérités… chacun doit chercher son chemin. Quant aux saints, c’est vrai, il y en a, des saints : des cardinaux, des prêtres, des évêques, des sœurs, des laïcs ; des gens qui prient, des gens qui travaillent beaucoup, et aussi qui vont chez les pauvres, en cachette. Je sais de certains qu’ils se préoccupent de donner à manger aux pauvres et puis, dans le temps libre, ils vont faire du ministère dans une église ou une autre… Ils sont prêtres. Il y a des saints à la Curie. Et il y en a aussi qui ne sont pas très saints, et ce sont ceux qui font le plus de bruit. Vous savez qu’un arbre qui tombe fait plus de bruit qu’une forêt qui pousse. Et cela me fait de la peine quand il y a ces choses. Mais il y a certains qui font scandale, certains. Nous avons ce monseigneur en prison, je crois qu’il est encore en prison ; il n’est pas allé en prison parce qu’il ressemblait à la bienheureuse Imelda précisément, ce n’était pas un bienheureux. Il y a des scandales, qui font mal. Une chose – cela je ne l’ai jamais dit, mais je m’en suis aperçu – je crois que la Curie a un peu perdu le niveau qu’elle avait autrefois, au temps des vieux curialistes… le profil du vieux curialiste, fidèle, qui faisait son travail. Nous avons besoin de ces personnes. Je crois… il y en a, mais ils ne sont pas aussi nombreux qu’autrefois. Le profil du vieux curialiste : je dirais ainsi. Nous devons en avoir plus, de ceux-là. Si je trouve de la résistance ? Bah ! S’il y a de la résistance, je ne l’ai pas encore vue. C’est vrai que je n’ai pas encore fait grand-chose, mais on peut dire que oui, j’ai trouvé de l’aide, et j’ai aussi trouvé des gens loyaux. Par exemple, j’aime quand une personne me dit : « Je ne suis pas d’accord », et cela je l’ai trouvé. « Mais cela je ne le vois pas, je ne suis pas d’accord : je le dis, vous faites ». C’est un vrai collaborateur. Et celui-là je l’ai trouvé en Curie. Et c’est bon. Mais quand il y a ceux qui disent : « Ah, que c’est bien, que c’est bien, que c’est bien », et ensuite par ailleurs disent le contraire… je ne m’en suis pas encore aperçu. Peut-être oui, il y en a certains, mais je ne m’en suis pas aperçu. La résistance : en quatre mois on ne peut en trouver beaucoup.

Père Lombardi :       

Alors, maintenant passons à une Brésilienne, cela me semble juste. Alors, il y a Patricia Zorzan, que s’approche volontiers Izoard ainsi ensuite nous aurons aussi un Français.

Patricia Zorzan :

Je parle au nom des Brésiliens. La société est changée, les jeunes sont changés et on voit beaucoup de jeunes au Brésil. Vous n’avez pas parlé de l’avortement, du mariage entre personnes du même sexe. Au Brésil a été approuvée une loi qui élargit le droit à l’avortement et a permis le mariage entre personnes du même sexe. Pourquoi n’avez-vous pas parlé de cela ?

Pape François :

L’Église s’est déjà parfaitement exprimée sur cela. Il n’était pas nécessaire d’y revenir, de même que je n’ai pas parlé non plus de la fraude, du mensonge et d’autres choses sur lesquelles l’Église a une doctrine claire !

Patricia Zorzan :

Mais c’est un sujet qui intéresse les jeunes…

Pape François :

Oui, mais ce n’était pas nécessaire d’en parler, mais bien des choses positives qui ouvrent le chemin aux jeunes. N’est-ce pas vrai ? En outre, les jeunes savent parfaitement quelle est la position de l’Église !

Patricia Zorzan :

Quelle est la position de Votre Sainteté, pouvez-vous en parler ?

Pape François :

Celle de l’Église. Je suis fils de l’Église.

Père Lombardi :

Alors, revenons au groupe espagnol : Dario Menor Torres… ah, excusez, Izoard, que nous avons déjà convoqué, ainsi nous avons quelqu’un du groupe français… et ensuite, Dario Menor.

Antoine-Marie Izoard :

Bonjour, Sainteté. Au nom des collègues de langue française du vol – nous sommes 9 sur ce vol. Pour un Pape qui ne veut pas faire des interviews, nous vous en sommes vraiment reconnaissants. Depuis le 13 mars déjà, vous vous présentez comme l’Évêque de Rome, avec une très grande, une très forte insistance. Donc, nous voudrions comprendre quel est le sens profond de cette insistance, si, par hasard, plus que de collégialité on parle peut-être d’œcuménisme, par hasard, d’être primus inter pares de l’Église ? Merci.

Pape François :

Oui, à ce sujet, on ne doit pas aller au-delà de ce qui se dit. Le Pape est évêque, Évêque de Rome, et parce qu’il est Évêque de Rome, il est successeur de Pierre, Vicaire du Christ. Il y a d’autres titres, mais le premier titre est « Évêque de Rome », et de là dérive tout. Parler, penser que cela veuille dire être primus inter pares, non, ce n’est pas une conséquence de cela. Simplement, c’est le premier titre du Pape : Évêque de Rome. Mais il y en a d’autres… Je crois que vous avez dit quelque chose sur l’œcuménisme : je crois que cela favorise un peu l’œcuménisme. Mais, seulement cela…

Père Lombardi :

Maintenant, Dario Menor de La Raz?n, de l’Espagne :

Dario Menor Torres :

Une question sur vos sentiments. Il y a une semaine, vous avez fait un commentaire sur le fait qu’un enfant vous a demandé comment vous vous sentez, si quelqu’un pouvait s’imaginer être Pape et si on pouvait désirer l’être. Vous avez dit qu’il fallait être fou pour cela. Après votre première expérience au milieu d’une multitude de gens, comment ont été ces jours à Rio, pouvez-vous raconter comment vous vous sentez être Pape, si c’est très dur, si vous êtes heureux de l’être, et si encore, en quelque manière, cela a augmenté votre foi ou, au contraire, vous avez eu quelque doute ? Merci.

Pape François :

Faire le travail d’évêque est une belle chose, elle est belle. Le problème c’est quand quelqu’un cherche ce travail : cela n’est pas tellement beau, cela n’est pas du Seigneur. Mais, quand le Seigneur appelle un prêtre à devenir évêque, cela est beau. Il y a toujours le danger de se considérer un peu supérieur aux autres, pas comme les autres, un peu comme un prince. Ce sont les dangers et les péchés. Mais le travail d’évêque est beau : c’est aider les frères à avancer. L’évêque devant les fidèles, pour indiquer le chemin ; l’évêque au milieu des fidèles, pour aider la communion ; et l’évêque derrière les fidèles, parce que les fidèles ont souvent le flair du chemin. L’évêque doit être ainsi. La question disait si cela me plaisait ? Faire l’évêque me plaît, ça me plaît. À Buenos Aires j’étais très heureux, très heureux ! J’ai été heureux, c’est vrai. Le Seigneur m’a assisté en cela. Mais comme prêtre j’ai été heureux, et comme évêque j’ai été heureux. En ce sens je dis : ça me plaît.

Demande spontanée :

Et faire le Pape ?

Pape François :

Aussi, aussi ! Quand le Seigneur te met là, si tu fais ce que le Seigneur veut, tu es heureux. C’est mon sentiment, ce que je ressens.

Père Lombardi :

Maintenant, un autre du groupe italien : Salvatore Mazza di « Avvenire ».

Salvatore Mazza :

Je n’arrive même pas à me lever. Je m’excuse, je n’arrive même pas à me mettre debout à cause de tous les fils que j’ai sous les pieds. Nous avons vu ces jours-ci, nous vous avons vu plein d’énergie aussi tard le soir ; nous vous voyons maintenant avec l’avion qui tremble, que vous êtes tranquillement debout, sans un instant d’hésitation. Nous voudrions vous demander : on parle beaucoup des prochains voyages. On parle de l’Asie, de Jérusalem, de l’Argentine. Avez-vous déjà un calendrier plus ou plus défini pour l’année prochaine, ou tout reste-t-il encore à programmer ?

Pape François :

De défini-défini, il n’y a rien. Mais je peux vous dire ce à quoi je pense. C’est défini – excusez – le 22 septembre à Cagliari. Ensuite, le 4 octobre à Assise. Dans mon esprit, à l’intérieur de l’Italie, je voudrais aller visiter les miens, une journée : aller avec l’avion le matin et revenir avec l’autre, parce que, les pauvres, ils m’appellent et nous avons de bonnes relations. Mais seulement une journée. Hors d’Italie : le Patriarche Bartholomée I veut faire une rencontre pour commémorer les 50 ans d’Athenagoras et Paul VI à Jérusalem. Le Gouvernement israélien a aussi fait une invitation spéciale pour aller à Jérusalem. Je crois que le Gouvernement de l’Autorité palestinienne a fait de même. On pense à cela : on ne sait pas bien si ça ira ou si ça n’ira pas… Ensuite, en Amérique latine, je pense qu’il n’y ait pas de possibilité d’y retourner, parce que le Pape latino-américain, le premier voyage en Amérique latine … au revoir ! Nous devons attendre un peu ! Je crois pouvoir aller en Asie, mais tout cela est dans l’air. J’ai reçu une invitation pour aller au Sri Lanka et aux Philippines. Mais en Asie on doit y aller. Car le Pape Benoît n’a pas eu le temps d’aller en Asie, et c’est important. Il est allé en Australie et puis en Europe et en Amérique, mais l’Asie… Aller en Argentine : en ce moment je crois que ça peut attendre un peu, parce que tous les voyages ont une certaine priorité. Je voulais aller à Constantinople, le 30 septembre, pour rendre visite à Bartholomée I, mais ce n’est pas possible, ce n’est pas possible à cause de mon agenda. Si nous nous voyons, nous le ferons à Jérusalem.

Demande spontanée :

Fatima ?

Pape François :

Fatima, j’ai aussi une invitation pour Fatima, c’est vrai, c’est vrai. Il y a une invitation à aller à Fatima.

Demande spontanée :

30 septembre ou 30 novembre ?

Pape François :

Novembre, novembre : Saint André.

Père Lombardi :

Bien. Alors, maintenant repassons aux États-Unis, et nous appelons Ada Messia de la CNN à vous faire une demande.

Ada Messia :

Salut… Vous vous tenez mieux que moi… Non, non, non : ça va bien, ça va bien. Ma demande est : quand vous avez rencontré les jeunes argentins, en blaguant un peu, peut-être un peu sérieusement, vous leur avez dit que vous aussi, quelquefois, vous vous sentez en cage : nous voudrions savoir ce à quoi vous faites allusion, exactement.

Pape François :

Vous savez bien combien de fois j’ai voulu aller dans les rues de Rome, parce que ça me plaisait, à Buenos Aires, d’aller dans les rues, cela me plaisait beaucoup ! En ce sens, je me sens un peu en cage. Mais, je dois le dire, car ces hommes de la Gendarmerie vaticane sont très bons, ils sont bons, bons, bons et je leur en suis reconnaissant. Maintenant, ils me laissent faire quelque chose en plus. Je crois… le devoir c’est de garder la sécurité. En cage, en ce sens. Ça me plairait d’aller dans les rues, mais je comprends que ce n’est pas possible : je comprends. C’est en ce sens que je l’ai dit. Parce que mon habitude était – comme nous le disons, nous de Buenos Aires – j’étais un prêtre callejero

Père Lombardi :

Maintenant, nous appelons de nouveau un Brésilien : il y a Marcio Campos, et je demande aussi à Guénois de s’approcher pour le prochain tour, pour les Français.

Pape François :

Je demandais l’heure, parce qu’ils doivent servir le dîner, mais avez-vous faim ?

Réponse spontanée :

Non, non…

Marcio Campos :

Sa Sainteté, Saint-Père, je veux dire, quand vous aurez la nostalgie du Brésil, du peuple brésilien, joyeux, embrassez le drapeau que je vous ai remis. Je voudrais aussi remercier mes collèges des quotidiens Folha de Sa?o Paulo, Estado, Globo et Veja, au nom desquels je fais cette demande. Saint-Père, c’est difficile d’accompagner un Pape, très difficile. Nous sommes tous fatigués, vous vous portez bien et nous sommes fatigués… Au Brésil, l’Église catholique a perdu des fidèles ces dernières années. Le Mouvement du Renouveau charismatique est-il une possibilité pour éviter que les fidèles fréquentent l’Église pentecôtiste ou les autres Églises pentecôtistes ? Merci beaucoup de votre présence et merci beaucoup d’être avec nous.

Pape François :

C’est très vrai ce que vous dites sur la baisse du nombre des fidèles : c’est vrai, c’est vrai. Il y a des statistiques. Nous avons échangé avec les évêques brésiliens sur le problème, dans une réunion que nous avons eu hier. Vous demandiez à propos du Mouvement du Renouveau charismatique. Je vous dis une chose. Dans le temps, à la fin des années soixante-dix, début des années quatre-vingt, je ne pouvais pas les voir. Une fois, en parlant d’eux, j’avais dit cette phrase : « Ceux-ci confondent une célébration liturgique avec une école de samba ! ». Cela je l’ai dit. Je me suis repenti. Ensuite, j’ai mieux connu. C’est aussi vrai que le mouvement, avec l’aide de bons conseillers, a marché sur un bon chemin. Et maintenant, je crois que ce mouvement fait beaucoup de bien à l’Église, en général. À Buenos Aires, je les réunissais souvent et une fois l’an, je célébrais une Messe avec eux tous en la cathédrale. Je les ai toujours favorisés, quand je me suis converti, quand j’ai vu le bien qu’ils faisaient. Car dans le contexte actuel de l’Église – et ici j’élargis un peu la réponse – je crois que les mouvements sont nécessaires. Les mouvements sont une grâce de l’Esprit. « Mais, comment peut-on soutenir un mouvement qui est très libre ? ». L’Église aussi est libre ! L’Esprit Saint fait ce qu’il veut. Ensuite, il  fait œuvre d’harmonie, mais je pense que les mouvements sont une grâce, ces mouvements qui ont l’esprit de l’Église. C’est pourquoi, je crois que le Mouvement du Renouveau charismatique ne sert pas seulement à éviter que certains passent aux confessions pentecôtistes. Mais non ! Il sert à l’Église même ! Il nous renouvelle. Et chacun cherche son mouvement selon son propre charisme, là où le porte l’Esprit.

Question spontanée :

Pape François :

Je suis fatigué.

Père Lombardi :

Alors, Guénois du Figaro pour le groupe français.

Jean-Marie Guénois :

Saint-Père, une question avec mon collègue de La Croix, aussi : Vous avez dit que l’Église sans la femme perd sa fécondité. Quelles mesures concrètes prendrez-vous ? Par exemple, le diaconat féminin ou une femme comme chef d’un dicastère ? Et une toute petite question technique : Vous avez dit que vous êtes fatigué. Avez-vous un aménagement spécial pour le retour ? Merci, Sainteté.

Pape François :

Commençons par la dernière. Cet avion n’a pas d’aménagements spéciaux. Je suis devant, un beau fauteuil, commun, mais commun, celui que tous ont. J’ai fait écrire une lettre et un appel téléphonique pour dire que je ne voulais pas d’aménagements spéciaux dans l’avion : c’est clair ? Ensuite, la femme. Une Église sans les femmes est comme le Collège apostolique sans Marie. Le rôle de la femme dans l’Église n’est pas seulement la maternité, la mère de famille, mais c’est plus fort : elle est vraiment l’icône de la Vierge, de la Madone ; celle qui aide l’Église à croître ! Mais, pensez que la Madone est plus importante que les Apôtres ! Elle est plus importante ! L’Église est féminine : elle est Église, elle est épouse, elle est mère. Mais la femme, dans l’Église, non seulement doit…. je ne sais pas comment on le dit en italien…. le rôle de la femme dans l’Église ne doit pas seulement finir comme mère, comme travailleuse, limitée… Non ! C’est une autre chose ! Mais les Papes… Paul VI a écrit une très belle chose sur les femmes, mais je crois qu’on doit avancer dans l’explicitation de ce rôle et de ce charisme de la femme. On ne peut pas comprendre une Église sans femmes, mais des femmes actives dans l’Église, avec leur profil, qui font avancer. Je pense à un exemple, qui n’a rien à voir avec l’Église, mais c’est un exemple historique : en Amérique Latine, le Paraguay. Pour moi, la femme du Paraguay est la femme la plus glorieuse de l’Amérique Latine. Es-tu paraguayo ? Elles sont restées, après la guerre, huit femmes pour chaque homme, et ces femmes ont fait un choix un peu difficile : le choix d’avoir des enfants pour sauver : la Patrie, la culture, la foi et la langue. Dans l’Église, on doit penser à la femme dans cette perspective : des choix risqués, mais comme femmes. On doit l’expliciter davantage. Je crois que nous n’avons pas encore fait une profonde théologie de la femme, dans l’Église. Seulement elle peut faire ceci, elle peut faire cela, maintenant elle fait la servante de messe, maintenant elle lit la Lecture, elle est la présidente de la Caritas… mais, il y a plus que ça ! Il faut faire une profonde théologie de la femme. C’est ce que je pense.

Père Lombardi :

Pour le groupe espagnol, alors, nous avons maintenant Pablo Ordas, d’El Pa?s.

Pablo Ordas :

Nous voudrions savoir quelle est la relation de travail, non seulement d’amitié, et de collaboration avec Benoît XVI. Auparavant, il n’y avait jamais eu une circonstance semblable ; et si vous avez des contacts fréquents et s’il vous aide dans ce travail. Merci beaucoup.

Pape François :

Je pense que la dernière fois où il y avait deux Papes, ou trois Papes, ils n’ont pas parlé entre eux, ils luttaient pour voir celui qui était l’authentique. Ils sont arrivés à être trois durant le Schisme d’Occident. Il y a quelque chose…

Il y a quelque chose qui qualifie ma relation avec Benoît : je l’aime beaucoup. Je l’ai toujours aimé. Pour moi, c’est un homme de Dieu, un homme humble, un homme qui prie. J’ai été très heureux quand il a été élu Pape. En outre, quand il a donné sa démission, il a été pour moi un exemple de grandeur. Un grand. Seulement un grand fait cela ! Un homme de Dieu et un homme de prière. Il habite maintenant au Vatican, et certains me disent : mais comment cela peut-il se faire ? Deux Papes au Vatican ! Mais, il ne t’encombre pas, lui ? Mais, il ne fait pas la révolution contre toi ? Toutes ces choses qu’on dit, non ? J’ai trouvé une phrase pour dire cela : « C’est comme avoir un grand-père à la maison », mais le grand-père sage. Quand dans une famille le grand-père est à la maison, il est vénéré, il est aimé, il est écouté. Il est un homme prudent ! Il ne se mêle pas. Je lui ai dit plusieurs fois : « Sainteté, accueillez, faites votre vie, venez avec nous ». Il est venu pour l’inauguration et la bénédiction de la statue de saint Michel. Voilà, cette phrase dit tout. Pour moi c’est comme avoir le grand-père à la maison : mon papa. Si j’avais une difficulté ou une chose que je ne comprenais pas, j’appellerais : « Mais, dites-moi, puis-je faire cela ? ». Et quand je suis allé lui parler de ce gros problème, de Vatileaks, il m’a tout dit avec simplicité…. au service. C’est une chose que je ne sais pas si vous le savez, je crois oui, mais je ne suis pas sûr : quand il nous a parlé, dans son discours de congé, le 28 février, il nous a dit : « Parmi vous il y a le prochain Pape : je lui promets obéissance ». Mais c’est un grand ; c’est un grand !

Père Lombardi :

Alors, redonnons maintenant la parole à une brésilienne, Ana Fereira ; et alors que s’approche aussi Gianguido Vecchi pour l’italien.

Ana Fereira :

Saint-Père, bonsoir. Merci. Je voudrais dire « merci » plusieurs fois : merci d’avoir porté beaucoup de joie au Brésil, et merci aussi d’avoir répondu à nos questions. Ça nous plaît à nous journalistes de poser des questions. Je voudrais savoir, pourquoi hier, vous avez parlé aux évêques brésiliens de la participation des femmes dans notre Église. Je voudrais comprendre mieux : comment doit être cette participation de nous femmes dans l’Église ? Et vous, que pensez-vous de l’ordination des femmes ? Comment doit être notre position dans l’Église ?

Pape François :

Je voudrais expliquer un peu ce que j’ai dit sur la participation des femmes dans l’Église : on ne peut pas se limiter au fait qu’elle fasse l’enfant de chœur ou la présidente de la Caritas, la catéchiste… Non ! ça doit être plus que ça, profondément plus, aussi mystiquement plus, c’est en ce sens que j’ai parlé de la théologie de la femme. Et, faisant allusion à l’ordination des femmes, l’Église a parlé et dit : « Non ». Jean-Paul II l’a dit, mais avec une formulation définitive. Elle est fermée, cette porte, mais, à propos, je veux te dire une chose. Je l’ai dit, mais je le répète. La Madone, Marie, était plus importante que les Apôtres, les évêques et les diacres et les prêtres. La femme, dans l’Église, est plus importante que les évêques et les prêtres ; comment, c’est ce que nous devons chercher à mieux expliciter, parce que je crois qu’il manque une explication théologique de cela. Merci.

Père Lombardi :

Gianguido Vecchi, du Corriere della Sera: je demande à Madame Pigozzi et à Nicole de s’approcher, puis, après.

Gianguido Vecchi :

Saint-Père, durant ce voyage, vous avez aussi parlé plusieurs fois de la miséricorde. À propos de l’accès des divorcés remariés aux Sacrements, y-a-t-il la possibilité que quelque chose change dans la discipline de l’Église ? Que ces Sacrements soient une occasion pour rapprocher ces personnes, plutôt qu’une barrière qui les divisent des autres fidèles ?

Pape François :

C’est un sujet qu’on demande toujours. La miséricorde est plus grande que le cas que vous posez. Je crois que ce temps est le temps de la miséricorde. Ce changement d’époque, aussi beaucoup de problèmes de l’Église – comme le mauvais témoignage de certains prêtres, de même que les problèmes de corruption dans l’Église, le problème du cléricalisme, pour donner un exemple – ont laissé beaucoup de blessés, beaucoup de blessés. Et l’Église est Mère : elle doit aller soigner les blessés, avec miséricorde. Mais si le Seigneur ne se lasse pas de pardonner, nous n’avons pas d’autre choix que celui-ci : avant tout, soigner les blessés. Elle est mère, l’Église, et elle doit aller sur ce chemin de la miséricorde. Et trouver une miséricorde pour tous. Mais, je pense que, quand le fils prodigue est revenu chez lui, son père ne lui a pas dit : « Mais toi, écoute, assois-toi : qu’as-tu fait de l’argent ? ». Non ! Il a fait la fête ! Ensuite, peut-être, quand le fils a voulu parler, il a parlé. L’Église doit faire de même. Quand il y a quelqu’un… ne pas les attendre seulement : aller les trouver ! C’est cela la miséricorde. Et je crois que ce soit un kair?s : ce temps est un kair?s de miséricorde. Mais c’est Jean-Paul II qui a eu cette première intuition, quand il a commencé avec Faustine Kowalska, la Divine Miséricorde… il avait quelque chose, il avait l’intuition que c’était une nécessité de ce temps. En référence au problème de la Communion pour les personnes vivant une deuxième union : afin que les divorcés puissent communier, il n’y a pas de problème, mais quand ils vivent en seconde union, ils ne le peuvent pas. Je crois que c’est nécessaire de regarder cela dans la totalité de la pastorale matrimoniale. Et c’est pourquoi c’est un problème. Mais aussi – entre parenthèses – les Orthodoxes ont une praxis différente. Ils suivent la théologie de l’économie, comme ils l’appellent, et ils donnent une seconde possibilité, ils le permettent. Mais je crois que ce problème – je ferme la parenthèse – on doit l’étudier dans le cadre de la pastorale matrimoniale. Et pour cela, deux choses ; premièrement : un des thèmes de consultation avec ces huit du Conseil des Cardinaux, avec lesquels nous nous réunirons le 1er, le 2 et le 3 octobre, c’est comment aller de l’avant dans la pastorale matrimoniale, et ce problème y émergera. Et, une deuxième chose : est venu me voir, il y a quinze jours, le Secrétaire du Synode des évêques, pour le thème du prochain Synode. C’était un thème anthropologique, mais en parlant et en reparlant, en faisant le tour, nous avons trouvé ce thème anthropologique : comment la foi aide la planification de la personne, mais dans la famille, et aller donc dans le domaine de la pastorale matrimoniale. Nous sommes en marche pour une pastorale matrimoniale plus profonde. Et c’est un problème de tout le monde, parce qu’ils sont nombreux, non ? Par exemple, j’en cite un seulement : le Cardinal Quarracino, mon prédécesseur, disait que pour lui, la moitié des mariages sont nuls. Mais il disait cela, pourquoi ? Parce qu’on s’épouse sans maturité, on s’épouse sans se rendre compte que c’est pour toute la vie, ou bien on s’épouse parce que socialement on doit s’épouser. Et cela fait aussi partie de la pastorale matrimoniale. Et aussi le problème juridique de la nullité du mariage, on doit le revoir, car les Tribunaux ecclésiastiques ne suffisent pas pour cette question. C’est complexe, le problème de la pastorale matrimoniale. Merci.

Père Lombardi :

Merci. Alors nous avons maintenant Madame Pigozzi qui est de Paris Match, c’est encore le groupe français…

Caroline Pigozzi :

Bonsoir, Saint-Père. Je voudrais savoir si vous vous sentez encore jésuite, depuis que vous êtes Pape.

Pape François :

C’est une demande théologique, parce que les jésuites font vœu d’obéir au Pape. Mais si le Pape est jésuite, il doit, peut-être, faire vœu d’obéir au Général des jésuites… Je ne sais pas comment on résout cela… Je me sens jésuite dans ma spiritualité ; dans la spiritualité des Exercices, la spiritualité, celle que j’ai dans mon cœur. Mais je me sens tellement ainsi que dans trois jours j’irai fêter avec les jésuites la fête de saint Ignace : je dirai la Messe le matin. Je n’ai pas changé de spiritualité, non. François, franciscain : non. Je me sens jésuite et je le pense comme jésuite. Pas de manière hypocrite, mais je le pense comme jésuite. Merci à vous.

Père Lombardi :

Si vous avez encore de l’énergie, il y a encore quelques questions. Maintenant, Nicole Winfield, qui est de l’Associated Press, et il y a … mais elle n’y était pas…. Mais, j’ai eu une liste et ici vraiment, je croyais que vous vous étiez organisés…. Alors, ça va, Élisabeth, inscris-toi aussi sur la liste, excuse.

Nicole Winfield :

Sainteté, merci encore d’être venu « parmi les lions ». Sainteté, au quatrième mois de votre pontificat, je voulais vous demander de faire un petit bilan. Pouvez-vous nous dire qu’elle a été la meilleure des choses d’être Pape, une anecdote, et quelle est la pire des choses, et quelle est la chose qui vous a le plus surpris en cette période ?

Pape François :

Mais je ne sais pas comment répondre à cela, vraiment. De grosses choses, de grosses choses il n’y en a pas eu. De belles choses, oui ; par exemple, la rencontre avec les évêques italiens a été très belle, très belle. Comme Évêque de la Capitale d’Italie, je me suis senti chez moi parmi eux. Et cela a été beau, mais je ne sais pas si cela a été le meilleur. Aussi une chose douloureuse, mais qui a assez touché mon cœur, c’est la visite à Lampedusa. Mais cela faisait venir les larmes aux yeux, mais m’a fait du bien. Mais quand arrivent ces barques, on les [immigrés] laisse à quelques miles avant la côte et ils doivent, avec la barque, arriver seuls. Et cela me cause de la douleur parce que je pense que ces personnes sont victimes d’un système socio-économique mondial. Mais la pire des choses – je m’excuse – est que j’ai eu une sciatique – vraiment ! – je l’ai eue le premier mois parce que, pour faire les interviews, je m’asseyais dans un fauteuil et cela m’a fait un peu mal. C’est une sciatique très douloureuse, très douloureuse ! Je ne la souhaite à personne ! Mais ces choses : parler avec les gens ; la rencontre avec les séminaristes et les religieuses a été très belle, a été très belle. De même que la rencontre avec les élèves des collèges jésuites a été très belle, de bonnes choses.

Demande :

Qu’est-ce qui vous a surpris le plus ?

Pape François :

Les personnes, les personnes, les bonnes personnes que j’ai trouvées. J’ai trouvé beaucoup de bonnes personnes au Vatican. J’ai pensé quoi dire, mais cela est vrai. Je fais justice, en disant ceci : beaucoup de bonnes personnes. Beaucoup de bonnes personnes, beaucoup de bonnes personnes, mais bonnes bonnes bonnes !

Père Lombardi :

Élisabeth, mais celle-ci vous la connaissez et aussi Sergio Rubini, qu’il s’approche volontiers, ainsi nous avons les argentins.

Elisabetta Piqué :

Pape François, avant tout, au nom des 50 000 argentins que j’ai rencontrés et qui m’ont dit : « Tu vas voyager avec le Pape, s’il te plaît, dis-lui qu’il a été fantastique, génial ; demande-lui quand il viendra », mais vous avez déjà dit que vous n’irez pas… Je vous pose donc une question plus difficile. Avez-vous été effrayé quand vous avez vu le rapport sur Vatileaks ?

Pape François :

Non. Je te raconte une anecdote sur le rapport « Vatileaks ». Quand je suis allé trouver le Pape Benoît, après avoir prié dans la chapelle, nous sommes restés dans son bureau et j’ai vu une grande boîte et une grosse enveloppe. Excusez…

Benoît m’a dit, il me disait : « Dans cette grande boîte il y a toutes les déclarations, les choses que les témoins ont dites, tout est là. Mais le résumé et le jugement final se trouvent dans cette enveloppe. Et ici on dit ceci cela… ». Il avait tout en tête. Mais quelle intelligence ! Tout en mémoire, tout ! Mais non, je ne me suis pas effrayé, non. Non, non. C’est un gros problème, hein. Mais je ne me suis pas effrayé.

Sergio Rubin :

Sainteté, deux choses. Voici la première : Vous avez beaucoup insisté sur le fait d’arrêter le départ des fidèles. Au Brésil, il a été très fort. Espérez-vous que ce voyage puisse contribuer au retour des gens à l’Église, qu’ils se sentent plus proches ? Et la seconde, plus personnelle : Vous aimiez beaucoup l’Argentine, et vous aviez Buenos Aires au cœur. Les Argentins se demandent si Buenos Aires ne vous manque pas; vous la parcourriez en autobus, en car, vous marchiez dans les rues. Merci beaucoup.

Pape François :

Je pense qu’un voyage papal fait toujours du bien. Et je crois qu’au Brésil celui-là fera du bien ; mais pas seulement la présence du Pape, mais tout ce qui s’est fait en ces Journées de la Jeunesse ; ils se sont mobilisés et ils feront beaucoup de bien, peut-être aideront-ils beaucoup l’Église. Mais ces fidèles qui en sont partis, beaucoup ne sont pas heureux parce qu’ils se sentent appartenir à l’Église. Je pense que cela sera positif, non seulement pour le voyage, mais surtout pour les Journées : les Journées ont été un évènement merveilleux. À propos de Buenos Aires, oui, parfois elle me manque. Et cela se sent. Mais c’est un manque serein, c’est un manque serein, c’est un manque serein. Mais je crois que vous, Serge, vous me connaissez mieux que tous les autres, vous pouvez répondre à cette question, avec le livre que vous avez écrit.

Père Lombardi :

Alors nous avons le russe et ensuite c’est Valentina, qui était la doyenne et qui veut conclure.

Alexey Bukalov :

Bonsoir Saint-Père. Saint-Père, revenant à l’œcuménisme : les orthodoxes fêtent aujourd’hui les 1025 ans du christianisme, il y a de grandes festivités dans de nombreuses capitales. Si vous voulez faire un commentaire sur cet événement, j’en serai heureux. Merci.

Pape François :

Dans les Églises orthodoxes, on a conservé cette antique liturgie si belle. Nous, nous avons perdu un peu le sens de l’adoration. Eux le conservent, ils louent Dieu, ils adorent Dieu, ils chantent, le temps ne compte pas. Le centre c’est Dieu, et cela est une richesse que je veux dire à l’occasion de la demande que vous me faites. Une fois, en parlant de l’Église occidentale, de l’Europe occidentale, surtout l’Église qui s’est le plus développée, on m’a dit cette phrase : « Lux ex oriente, ex occidente luxus ». L’esprit de consommation, le bien-être, nous ont fait beaucoup de mal. En revanche, vous, vous conservez cette beauté de mettre Dieu au centre, comme référence. Quand on lit Dostoïevski – je crois que pour nous tous il doit être un auteur à lire et à relire, parce qu’il a une sagesse – on perçoit quelle est l’âme russe, l’âme orientale. C’est une chose qui nous fera beaucoup de bien. Nous avons besoin de ce renouvellement, de cet air frais de l’Orient, de cette lumière de l’Orient. Jean-Paul II l’avait écrit dans sa Lettre. Mais souvent le luxus de l’Occident nous fait perdre l’horizon. Je ne sais pas, il m’est venu de dire cela. Merci.

Père Lombardi :

Et maintenant nous concluons avec Valentina qui, puisqu’elle avait commencé dans le voyage de départ, conclut dans le voyage de retour.

Valentina Alazraki :

Sainteté, merci d’avoir tenu la promesse  de répondre à nos questions au retour…

Pape François :

Je vous ai fait retarder le dîner…

Valentina Alazraki :

Peu importe, peu importe…. La question, de la part de tous les mexicains, serait : quand irez-vous à Guadalupe ?... Mais ça c’est la demande des mexicains… La mienne est : vous allez canoniser deux grands papes : Jean XXIII et Jean-Paul II. Je voudrais savoir quel est – selon vous – le modèle de sainteté qui ressort de l’un et de l’autre, et quel est l’impact qu’ils ont eu sur l’Église et sur vous.

Pape François :

Jean XXIII est un peu la figure du « prêtre de campagne », le prêtre qui aime chacun de ses fidèles, qui sait prendre soin des fidèles, et cela il l’a fait comme évêque, comme nonce. Mais combien il a fait de faux témoignages de baptême en Turquie en faveur des juifs ! C’est un courageux, un bon prêtre de campagne, avec un sens de l’humour si grand, si grand, et une grande sainteté. Quand il était nonce, certains ne l’aimaient pas beaucoup au Vatican, et quand il arrivait pour apporter des choses ou pour demander, dans certains bureaux, on le faisait attendre. Jamais il ne s’est plaint : Il priait le rosaire, lisait le bréviaire, jamais. Un doux, un humble, quelqu’un aussi qui se préoccupait des pauvres. Quand le cardinal Casaroli était revenu de mission – je crois en Hongrie ou dans ce qui était la Tchécoslovaquie de l’époque, je ne me rappelle pas laquelle des deux – il était allé le voir pour lui expliquer comment s’était passée la mission ; c’était l’époque de la diplomatie des « petits pas ». Il a eu l’audience, 20 jours avant la mort de Jean XXIII, et alors que Casaroli s’en allait, il l’arrêta : « Ah Éminence – non, il n’était pas Éminence – Excellence, une question : vous continuez à aller chez ces jeunes ? » Parce que Casaroli allait à la prison des mineurs de Casal del Marmo et jouait avec eux. Et Casaroli a dit : « Oui, oui ». « Ne les abandonnez jamais ». à un diplomate, qui venait de faire une tournée diplomatique, un voyage très prenant, Jean XXIII a dit « n’abandonnez jamais les jeunes ». Mais c’est un grand, un grand ! Ensuite, il y a l’homme du Concile : c’est un homme docile à la voix de Dieu ; cela lui est venu du Saint Esprit, cela lui est venu, et il a été docile. Pie XII avait pensé le faire, mais les circonstances n’étaient pas mûres pour le faire. Je crois que celui-là [Jean XXIII] n’a pas pensé aux circonstances : il a senti cela, et il l’a fait. Un homme qui se laissait guider par le Seigneur. De Jean-Paul II j’ai envie de dire « le grand missionnaire de l’Église » : c’est un missionnaire, c’est un missionnaire, un homme qui a porté l’Évangile partout, vous le savez mieux que moi. Mais vous… Combien de voyages a-t-il fait ? Il allait ! Il sentait ce feu de porter en avant le Parole du Seigneur. C’est un Paul, c’est un saint Paul, c’est un homme de la sorte ; pour moi il est grand. Et faire la cérémonie de canonisation de tous les deux ensemble, je crois que c’est un message pour l’Église : ces deux sont bons, ils sont bons, ce sont deux bons. Mais la cause de Paul VI est en cours, ainsi que celle du Pape Luciani : ces deux là sont en cours. Mais il y a encore une chose, je crois, que j’ai dite, mais je ne sais pas si c’est ici ou ailleurs : la date de la canonisation. On pensait au 8 décembre de cette année, mais il y a un gros problème : ceux qui viennent de la Pologne, les pauvres ; parce que ceux qui ont les moyens peuvent venir en avion, mais ceux qui viennent, les pauvres, ils viennent en bus... Et déjà en décembre les routes sont gelées. Alors je pense qu’il faut revoir la date. J’ai parlé avec le cardinal Dziwisz et il m’a suggéré deux possibilités : ou bien le Christ Roi de cette année, ou bien le Dimanche de la Miséricorde de l’année prochaine. Je crois que cela fait trop peu de temps, le Christ Roi de cette année ; parce que le Consistoire sera le 30 septembre, et pour la fin d’octobre il y a peu de temps. Mais je ne sais pas ; je dois parler avec le cardinal Amato de cette question. Mais je crois que ce ne sera pas le 8 décembre.

Demande :

Mais ils seront canonisés ensemble ?

Pape François :

Ensemble, les deux ensemble, oui.

Père Lombardi :

Merci Sainteté. Qui reste-t-il encore ? Ilze ? Ensuite nous les avons tous entendus, et même plus que ceux qui s’étaient inscrits initialement…

Ilze Scamparini :

Je voudrais demander la permission de poser une question un peu délicate : Une autre image a fait un peu le tour du monde : celle de Mgr Ricca, ainsi que des informations sur sa vie privée. Je voudrais savoir, Sainteté, ce que vous comptez faire sur cette question ? Comment affronter cette question et comment Sa Sainteté entend-elle affronter la question du lobby gay ?

Pape François :

En ce qui concerne Mgr Ricca : j’ai fait ce que le Droit Canonique demande de faire : une investigatio previa. De cette investigatio, il n’y a rien de ce dont on l’accuse ; nous n’avons rien trouvé. Voilà la réponse. Mais je voudrais ajouter autre chose là-dessus : je vois que souvent dans l’Église, au-delà de ce cas et aussi dans ce cas, on va chercher les « péchés de jeunesse », par exemple, et on les publie. Pas les délits, eh ? Les délits c’est autre chose : l’abus sur mineurs est un délit. Non, les péchés. Mais si une personne, laïque ou prêtre ou sœur, a fait un péché, et ensuite s’est convertie, le Seigneur pardonne, et quand le Seigneur pardonne, le Seigneur oublie et cela est important pour notre vie. Quand nous allons nous confesser et que nous disons vraiment : « J’ai péché en ceci », le Seigneur oublie ; et nous, nous n’avons pas le droit de ne pas oublier, parce que nous courrons alors le risque que le Seigneur n’oublie pas nos péchés. C’est un danger. C’est important : une théologie du péché. Souvent je pense à saint Pierre : il a fait l’un des pires péchés, celui de renier le Christ ; et avec ce péché il a été fait Pape. Nous devons y penser beaucoup. Mais, revenant à votre question plus concrète : en ce cas j’ai fait l’investigatio previa et nous n’avons rien trouvé. Ça c’est la première demande. Ensuite, vous parlez du lobby gay. Bah ! On écrit beaucoup sur le lobby gay. Je n’ai encore trouvé personne au Vatican qui me donne sa carte d’identité avec « gay ». On dit qu’il y en a. Je crois que lorsqu’on se trouve avec une telle personne on doit distinguer le fait d’être « gay », du fait de faire un lobby ; parce que les lobbies, tous ne sont pas bons. Celui-ci est mauvais. Si une personne est gay et cherche le Seigneur, fait preuve de bonne volonté, qui suis-je pour la juger ? Le catéchisme de l’Église catholique l’explique de manière très belle, mais il dit, attendez un peu comment il dit… il dit : « Nous ne devons pas mettre en marge ces personnes pour cela, elles doivent être intégrées dans la société ». Le problème n’est pas d’avoir cette tendance, non, nous devons être frères, car ceci est une chose, mais s’il y a autre chose, autre chose. Le problème est de faire de cette tendance, un lobby : lobby des avares, lobby des politiciens, lobby des maçons, beaucoup de lobby. Voilà le problème le plus grave pour moi. Et je vous remercie beaucoup pour avoir fait cette demande. Merci beaucoup !

Père Lombardi :

Merci. Il me semble que l’on ne pouvait pas faire plus. Nous avons même abusé du Pape qui nous avait dit qu’il était un peu fatigué, et nous lui souhaitons maintenant de se reposer un peu.

Pape François :

Merci à vous, et bonne nuit, bon voyage et bon repos.

 



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