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MESSAGE DU PAPE JEAN-PAUL II
AU MOUVEMENT INTERNATIONAL «LA VIE MONTANTE»

Jeudi 12 mars 1982

 

Aux chers Frères et Sœurs de “La Vie Montante”,

1. Voici que votre mouvement chrétien des retraités célèbre près de Paris le vingt-cinquième anniversaire de sa fondation. Je m’associe très volontiers à ce Jubilé. Je félicite tous ceux qui ont contribué au cours de cette période au progrès de “La Vie Montante”, en France et en un certain nombre de pays représentés parmi vous, au point d’atteindre des centaines de milliers de membres actifs. Je me réjouis de penser que tant de personnes du troisième et du quatrième âge, grâce aux moyens de ce mouvement -réunions de réflexion et de prière, lecture des publications, liens d’amitié -, peuvent vivre plus intensément unies à Dieu, approfondir leur foi et en témoigner, s’entraider et proposer leurs services à la société et à l’Eglise, accueillir dans la sérénité et l’espérance le passage vers la vie éternelle. Puisse votre mouvement garder son dynamisme, animé du dedans par ses propres membres, apôtres de leurs semblables! Puisse-t-il s’ouvrir à d’autres, sans rien perdre de son inspiration chrétienne, et rayonner largement, comme la lumière et le sel de l’Evangile, dans le monde des retraités!

2. Déjà à Rome, le 4 octobre 1982, j’avais eu la joie de m’entretenir avec vos pèlerins, et de préciser en quel sens “La Vie Montante” pouvait justifier son appellation, et apporter une contribution originale sur le plan de la spiritualité, de l’apostolat, de l’amitié. Tous les aspects alors soulignés, toutes les orientations alors tracées, gardent leur valeur pour l’avenir de votre mouvement, et je vous invite à les approfondir et à les vivre. Je le dis avec conviction: l’étape que vous vivez, malgré une certaine souffrance d’avoir une activité réduite et des responsabilités plus discrètes, et malgré bien d’autres épreuves, est aussi un temps de grâce: vous disposez de loisir et d’une liberté d’esprit que ne vous laissaient pas la vie professionnelle et la vie familiale avec les jeunes enfants; vous pouvez mieux vous mettre à l’écoute de la Parole de Dieu, vous livrer davantage à la prière personnelle et communautaire, vous cultiver, réfléchir aux événements sous le regard de Dieu, les envisager avec une nouvelle ouverture d’esprit, c’est-à-dire avec plus de recul et de confiance en Dieu, entretenir des relations humaines avec une plus grande disponibilité, et participer d’une autre manière au service de l’Eglise ou des hommes dans le besoin.

3. Au seuil de la nouvelle étape de “La Vie Montante”, j’estime utile de souligner en outre deux domaines particuliers où le mouvement peut déployer son action et présenter un témoignage très précieux pour la société et pour l’Eglise.

En France notamment, des gens de plus en plus nombreux prennent leur retraite, volontairement ou à cause de la crise de l’emploi, dès l’âge de 60 ans, parfois à 55 ans ou même à 50 ans. Ces jeunes retraités, peut-être un peu désemparés au début, peuvent et doivent, comme d’ailleurs leurs aînés et sans se substituer aux jeunes adultes qui ont assumé leurs propres responsabilités, jouer un rôle réel dans l’aménagement plus humain du monde qui les entoure et dans la vitalité de la communauté ecclésiale. Tout en étant heureusement plus présents dans leur foyer, ils doivent éviter de vivre repliés sur eux-mêmes ou sur leur famille. Ils sont tout naturellement insérés dans les multiples clubs ou associations d’anciens, et ils peuvent prendre aussi toutes sortes d’initiatives utiles aux autres membres de la société. Ils occupent une position charnière entre les générations et sont à même de contribuer à rendre plus harmonieux les rapports souvent difficiles entre elles. Il y va de la paix de la société, de la compréhension mutuelle, du dialogue constructif respectueux de chacun, de la convivialité, dans le souci des valeurs morales dont la vie de foi et l’expérience humaine ont montré le prix et qui sont nécessaires à un progrès équilibré.

4. Je pense, d’autre part, aux personnes plus âgées, qui ont besoin d’un accompagnement dans leur vie éprouvée par la solitude, la maladie, les séparations, la perspective de la mort qui se fait plus proche. Cette étape est souvent plus longue que par le passé grâce aux progrès de la médecine. La société s’efforce généralement d’aider ces personnes sur le plan économique et crée pour elles de maisons de retraite. Mais elles n’en continuent pas moins de connaître les autres épreuves. Et à ce point de vue, elles ont grand besoin d’affection, de sécurité, d’espérance dans le sens de la vie et de considération pour ce qu’elles peuvent apporter à la société par leur témoignage. Dans la mesure où elles sont comme exclues du festin de la vie, de l’estime, de la présence et de l’entraide des jeunes générations ou des adultes qui privilégient la force: et l’efficacité, elles peuvent être considérées comme les plus pauvres.

Et on ne peut s’accommoder de cette situation sans contradiction avec l’Evangile. Il y va du respect de l’homme et de la vie jusqu’à son terme. “La Vie Montante”, par sa valorisation des personnes âgées, par son souci d’en faire des partenaires actifs et pas seulement des assistés, par son attention à leur vie, par ses réseaux d’amitié et ses liens spirituels, témoigne grandement de ce respect. Je vous encourage à continuer d’accompagner ainsi vos frères et sœurs aînés et à faire prendre conscience à la société et aux chrétiens de ce devoir primordial.

5. Enfin, puisque la foi chrétienne inspire votre mouvement, il est important qu’il offre à tous ses membres l’annonce de la Bonne Nouvelle: l’Evangile les assure qu’ils sont toujours aimés de Dieu qui ne les laisse jamais seuls, qui leur accorde toujours sa grâce et au besoin son pardon, et qui les appelle à partager éternellement sa Vie. L’Eglise, tous les croyants, ont mission de donner au monde le témoignage de cette foi en la vie éternelle. Même si certains de vos compagnons et compagnes, à un moment de leur vie active, ont perdu quelque peu cette conviction de foi, dans une atmosphère de sécularisation et de mal-croyance, au fur et à mesure qu’ils s’acheminent dans leur pleine maturité vers le soir de leur vie terrestre, ils ont davantage l’occasion de s’ouvrir à cette vérité. Et je suis sûr que, sur la route resserrée et difficile qui monte mystérieusement vers cette plénitude de vie (Mt 7, 14), beaucoup sont capables, avec la grâce de Dieu, de se préparer à la Rencontre décisive. Après être “montés” dans l’amour de Dieu et dans l’amour des autres au cours de leur vie - ou même au dernier moment comme le Bon Larron -, ils auront la joie de voir Celui qui est l’Amour. Quel service d’accompagner ainsi les dernières étapes de l’existence, de permettre de les vivre dans la sérénité de la foi!

6. Votre Congrès jubilaire coïncide avec la fête de l’Annonciation. Marie vous montre le chemin à l’approche de l’Année mariale. Je le disais à Annecy: nous sommes tous les hommes ou les femmes de l’Annonciation. Comme Marie, nous avons eu la grâce de recevoir le message du salut. Comme elle, nous y répondons par la foi. Comme elle, nous tressaillons de joie parce que le Seigneur fait pour nous des merveilles. Devant elle, comme à Cana, nous présentons tous les besoins de nos frères. Avec elle nous nous tenons près de la Croix de son Fils, en acceptant avec patience et en offrant les limites et les dépouillements de la vieillesse, en faisant de notre vie un don suprême au Seigneur, par amour. Avec elle, nous cheminons vers la vie glorieuse qu’elle partage avec le Christ ressuscité, dans la pleine lumière.

7. Chers Frères et Sœurs de “La Vie Montante”, que ce message vous manifeste ma sollicitude affectueuse! L’Eglise compte sur vous. Vous constituez des cellules d’Eglise, en lien avec la vie de tout le Corps mystique du Christ. Que le Père vous attire vers sa lumière! Que le Christ soit votre force dans l’épreuve! Que l’Esprit Saint vous maintienne dans une joie discrète et rayonnante! Dans le sillage de l’Apôtre Pierre, “l’Ancien, témoin des souffrances du Christ et de la gloire du Christ” (1 P 5, 1), je vous bénis au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit.

Du Vatican, le 12 mars 1987.



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