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DISCOURS DU PAPE PAUL VI
AU COMITÉ POUR L’ANNÉE INTERNATIONALE DE LA FEMME

Vendredi 18 avril 1975 

 

Soyez les bienvenues, chères Filles, et avec vous, tous ceux qui composent ce Comité pour l’Année Internationale de la Femme ou qui, dans votre Commission, représentent les Dicastères du Saint-Siège ou d’autres organismes internationaux.

Le 17 novembre 1973, nous avions défini la tâche confiée à la Commission d’étude sur le rôle de la Femme dans la société et dans l’Eglise: au plan de la documentation et de la réflexion, au plan de l’étude pour la promotion effective de la dignité et de la responsabilité des femmes. Ces buts vous sont certainement présents à l’ésprit. Cette œuvre de promotion demande une maturation progressive, qui ne brûle pas les étapes. Il s’agit en effet de discerner avec sagesse. Les questions sont délicates; parler d’égalisation des droits ne résous pas le problème, qui est beaucoup plus profond: il faut viser une complémentarité effective, afin que les hommes et les femmes apportent leurs richesses et leur dynamisme propres à la construction d’un monde, non pas nivelé et uniforme, mais harmonieux et unifié, selon le dessein du Créateur, ou, pour reprendre les termes de l’Année Sainte, renouvelé et réconcilié. Par ailleurs, il faut agir à bon escient, non pas échafauder des programmes utopiques, conçus au sommet par une élite et pour une élite, mais correspondre aux vrais besoins du peuple, pour faire cheminer celui-ci ensemble, à travers des étapes opportunes et réalistes. Il y a tant à faire en ce domaine! Faut-il mentionner qu’il y a encore des millions de femmes qui ne jouissent pas des droits essentiels ni des égards élémentaires?

La mise en route du travail de la Commission d’étude a coïncidé très heureusement avec la préparation dans le monde de l’Année Internationale de la Femme, proclamée par les Nations Unies pour cette année 1975.

Et nous avons déjà dit le 6 novembre dernier combien l’Eglise se sentait solidaire des buts assignés à cette Année Internationale de la Femme. Le Saint-Siège est heureux d’accueillir l’invitation qui lui est faite par l’Organisation des Nations Unies d’y collaborer à son niveau, mais c’est toute l’Eglise qui est concernée; c’est dans les communautés locales qu’il faut susciter une révision de vie sur la façon dont sont respectés et promus les droits et les devoirs respectifs de l’homme et de la femme, et sur la participation des femmes à la vie sociale d’une part, à la vie et à la mission de l’Eglise d’autre part.

Parlons d’abord de ce dernier secteur, bien qu’il ne faille pas y limiter votre ambition. L’un ne va pas sans l’autre. Le Concile Vatican II a rappelé solennellement le droit et le devoir qu’ont tous les baptisés, hommes et femmes, de prendre part, comme membres responsables du Peuple de Dieu, à la mission de l’Eglise, et il a précisé en outre: «Comme de nos jours les femmes ont une parte de plus en plus active dans toute la vie de la société, il est très important que grandisse aussi leur participation dans les divers secteurs de l’apostolat de l’Eglise» (Apostolicam Actuositatem, 9).

Beaucoup de groupes cherchent aujourd’hui l’inspiration de ce renouveau dans la Parole de Dieu. Comment ne pas s’en réjouir, tant qu’elle est interprétée avec rectitude, sans passion, dans la tradition vivante de l’Eglise? On se plaît à relever l’exemple de Jésus: la nouveauté - l’audace même par rapport aux mœurs de son temps - de son comportement vis-à-vis des femmes. Si les femmes ne reçoivent pas l’appel à l’apostolat des Douze et donc aux ministères ordonnés, elles sont cependant conviés à suivre le Christ comme disciples et collaboratrices. Les femmes qui avaient accompagné Jésus depuis la Galilée sont présentes à la Croix (Luc. 23, 49); elles observent l’ensevelissement de Jésus et sont de nouveau là au matin de la résurrection (Ibid. 24, 1-10). On peut dire avec raison: si le témoignage des apôtres fonde l’Eglise, le témoignage des femmes contribue grandement à nourrir la foi des communautés chrétiennes.

Nous ne pouvons pas changer le comportement de Notre-Seigneur ni son appel aux femmes; mais nous devons reconnaître et promouvoir le rôle des femmes dans la mission d’évangélisation et dans la vie de la communauté chrétienne. Ce ne sera pas une nouveauté dans l’Eglise; on en trouve des traces même dans les communautés primitives; et ensuite dans beaucoup de pages de l’histoire de l’Eglise à travers les siècles, sous différents modes. Mais aujourd’hui une plus nette avancée se dessine.

Effectivement, depuis plusieurs décennies, très nombreuses sont les communautés chrétiennes qui bénéficient de l’engagement apostolique des femmes, tout spécialement dans le domaine capital de la pastorale familiale. Actuellement, certaines femmes sont même appelées à participer aux instances de réflexion pastorale, soit au niveau des diocèses, soit à l’échelon des paroisses et des doyennés.

Il va de soi que ces nouvelles expériences ont besoin de mûrir. Le Siège Apostolique a lui-même appelé, vous le savez, quelques femmes particulièrement qualifiées à prendre place dans certains de ses organismes de travail.

Ce qui urge le plus, présentement, c’est, de toute évidence, l’immense travail d’éveil et de promotion féminine, à la base, dans la société civile tout autant que dans l’Eglise. C’est la tâche que nous avons nous-mêmes fortement soulignée, dans le discours adressé aux juristes italiens, le 7 décembre dernier: travailler partout à faire découvrir, respecter, protéger les droits et les prérogatives de toute femme, dans sa vie célibataire, conjugale, éducative, professionnelle, civique, sociale, religieuse.

Mais l’Année Internationale ne vise pas seulement à obtenir pour la femme l’égalité des droits; elle vise aussi à assurer la pleine intégration des femmes dans l’effort global de développement et leur contribution croissante au renforcement de la paix entre les hommes, entre les peuples. Ce dernier but a une résonance toute particulière pendant cette Année Sainte. Dans la famille, comme éducatrices, et dans tous les secteurs de la société, les femmes chrétiennes ont un apport irremplaçable à fournir à la paix du monde et à la construction d’une société plus juste et plus fraternelle. Sans cet apport spécifique - nous en sommes convaincu et l’expérience des peuples est là pour le confirmer - le progrès ne sera pas pleinement humain.

Oui, femmes chrétiennes, l’avenir de la société civile et de la communauté ecclésiale attend beaucoup de votre sensibilité et de votre capacité de compréhension, de votre douceur et de votre persévérance, de votre générosité et de votre humilité. Ces vertus, si bien accordées à la psychologie féminine, et magnifiquement épanouies dans la Vierge Marie, sont aussi des fruits de l’Esprit Saint. Cet Esprit Saint vous guidera sûrement dans le plein épanouissement, dans la promotion que vous cherchez, que nous cherchons tous.

Avec notre Bénédiction Apostolique.

 



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