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DISCOURS DU PAPE PIE XII
AU PREMIER REPRÉSENTANT DIPLOMATIQUE DU
PARAGUAY
PRÈS LE SAINT-SIÈGE,
S.E.M.
JULIÁN AUGUSTO SALDÍVAR, *

Mardi 12 juillet 1949

En recevant les Lettres de Créance par lesquelles Votre Excellence est constituée premier Envoyé Extraordinaire et Ministre Plénipotentiaire de son noble pays auprès de ce Siège Apostolique, il Nous semble que Nous voyons arriver à un heureux terme ces relations diplomatiques entre ce Siège de Pierre et la République du Paraguay, qui, dans les temps modernes, eurent leur début en 1920, arrivèrent ensuite en 1941 à l’ouverture d’une Nonciature permanente à l’Asunción, et aboutirent enfin en 1948 à l’érection de cette Légation.

Il faudrait remonter bien plus loin, comme Votre Excellence vient de le faire, si on voulait évoquer le souvenir de la première présence de l’Église catholique en votre belle nation, puisque le diocèse de Paraguay, effectivement le plus ancien de la Plata, fut érigé rien moins que le 1er juillet 1547. De là part toute une histoire, où l’Église catholique n’a jamais été absente, une histoire où l’Église a laissé des chapitres d’une transcendance mondiale : Nous faisons allusion aussi aux très fameuses « Doctrinas Guaranies », où, parmi d’innombrables difficultés, et gravitant plutôt sur le moral que sur le matériel, le labeur civilisateur de l’Évangile arriva à des réalisations sociales telles, que, éliminant les défauts inhérents à toutes les choses humaines, elles sont restées là pour l’admiration du monde, l’honneur de votre pays et la gloire de l’Ordre illustre qui les réalisa, non moins que pour celle de l’Église catholique, puisqu’elles surgirent de son sein maternel. L’expérience se chargea de montrer combien ce système était génial.

Les paroles que Votre Excellence vient de prononcer sont pour Nous une preuve palpable de ce que, dans son esprit, sont vivants non seulement ces souvenirs d’un glorieux passé et les enseignements qui en découlent, mais aussi la claire vision de la tâche imposante que les besoins du moment et la lutte en vue d’améliorer l’avenir réservent à son généreux peuple.

Toutes les nations, – aussi bien celles qui prirent part à la guerre comme celles qui purent se maintenir neutres – se voient aujourd’hui enveloppées, qu’elles le veuillent ou non, dans les effroyables répercussions matérielles et spirituelles, qui sont l’écho inévitable de pareil choc entre les forces d’une telle puissance dévastatrice.

Pour obtenir que l’ordre, après ce chaos, la santé, après une si terrible maladie, et la paix, après une si longue et douloureuse après-guerre, recommencent à embellir la face de la terre, il faudra que l’esprit d’un véritable et sincère sentiment de fraternité entre les peuples, les nations et les races, arrive à réaliser, dans un progrès ininterrompu, de nouvelles et décisives conquêtes. On sera forcé de reconnaître aussi que, quoique le chemin soit hérissé d’obstacles et se montre fécond en réactions inattendues, quelques pas, encore vacillants peut-être, sont déjà réalisés, mais ils devront être suivis d’autres et en grand nombre.

Nous ne pouvons pas douter que ces pas se feront avec cette patience dans la persévérance, avec cette prudence dans la méthode et avec cette courageuse énergie, sans lesquelles on ne pourra jamais espérer la victoire du bien sur les forces de l’opposition, elle ne sera jamais, non plus, ni complète ni opportune.

Dans l’histoire du peuple paraguayen, le maternel et généreux amour de l’Église envers les pauvres et les souffrants est gravé en caractères indélébiles.

Tous en votre nation, gouvernants et gouvernés, peuvent être sûrs que l’amour et la paternelle affection que lui voua la lumineuse figure de Notre Prédécesseur Pie IX, de sainte mémoire, – qui se trouvant à Montevideo en 1824, désira même passer sa vie à évangéliser le Paraguay – ont passé intégralement dans le cœur de ses Successeurs comme un précieux héritage. Notre pensée, aussi bien que la sienne, se lance volontiers vers votre terre privilégiée, vrai centre d’un continent qui est l’espoir de l’Église, et se plaît à songer à ce coin fortuné du monde, divisé en deux par les eaux abondantes du fleuve qui vous a donné son nom, et qui avance souriant dans une végétation exubérante, ayant d’un côté les collines orientales d’une rare fertilité, et de l’autre des plaines imposantes, aussi riches en bois qu’en pâturages ; pays qui, par la richesse de son sol, l’abondance de ses eaux, et même par la beauté des oiseaux qui peuplent son ciel limpide, est justement admiré par tous ceux qui le connaissent.

Les desseins inscrutables du Seigneur Nous font occuper aujourd’hui ce même Siège d’où sortirent des lèvres de ce grand Pontife des expressions si aimables que votre fidèle peuple les a toujours présentes. Eh bien, que les fils de votre lointaine patrie sachent qu’en ce lieu, aujourd’hui comme jadis, bat toujours un cœur de Père qui, dans tous les problèmes qui préoccupent et divisent parfois les nations, par dessus tous les partis et toutes les intentions, placé plus haut que tous les conflits d’intérêts ou d’opinions, il se laisse guider uniquement par cette expression de l’Apôtre : la charité du Christ.

Maintenant que le représentant officiel du Paraguay occupe déjà la place qui lui correspond dans le sein de l’illustre Corps diplomatique accrédité auprès de Nous, le soin et le développement des confiantes et fructueuses relations entre l’Église et l’État en votre pays, pourront se compléter et se perfectionner plus efficacement chaque jour.

À cause de cela Nous désirons vous demander de bien vouloir vous faire l’interprète de Notre reconnaissance, auprès de Monsieur le Président de la République et de son gouvernement, pour ses vœux fervents si dignement manifestés, auxquels Nous désirons correspondre de tout cœur, en les étendant à tout le tant aimé Paraguay, que Nous bénissons paternellement.

Votre Excellence, Monsieur le Ministre, doit être sûre que, pour sa part, Elle pourra compter sur Notre plus bienveillant appui en tout ce qui pourra réellement servir au vrai bonheur, au progrès, à la perfection et à la pénétration du sentiment religieux dans sa belle et chère Patrie.


* Documents Pontificaux 1949, p.289-292.

 



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