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NOTRE CHEMIN D’EMMAÜS

José Prado Flores,
Fondateur de l’École d’évangélisation Saint-André

Québec, 20 juin 2008

 

Ici à l’autel, nous avons la Parole de Dieu. J’aimerais que nous nous mettions debout pour faire une vénération de cette Parole. Inclinons notre tête, trois secondes, afin d’accueillir cette Parole. Que cette Parole fasse partie de nous-mêmes. Qu’elle entre en nous comme dans le ventre virginal de Marie. Accueillons la Parole maintenant. Je vais débuter ce matin en vous racontant ce que Dieu a fait dans ma vie, mais pas nécessairement ce que j’ai fait pour Lui. Je veux ici devant vous rendre gloire à son nom. J’aimerais prendre le passage des disciples d’Emmaüs qui se trouve dans Luc 24, 13-35. Il raconte l’évènement d’une façon belle et pittoresque. Dans ma vie, moi aussi j’ai parcouru ce chemin d’Emmaüs. Ce sont des disciples qui s’en vont à leur village, tristes, frustrés, déçus, se traînant les pieds pour retourner à leurs routines de tous les jours. Ils sont déçus par Dieu, déçus d’eux-mêmes.

Il s’est passé la même chose dans ma vie. J’ai vécu une étape où je me croyais disciple de Jésus, mais je vivais sans force, sans enthousiasme. Ma vie chrétienne était seulement une tradition. Je me suis habitué aux choses de Dieu. Je peux le dire par un symbole. Ma vie était comme ceci, c’est-à-dire ce que je tiens dans mes mains. Une cannette tiède, légère. Ma vie manquait de calories. J’avais étudié la philosophie, la théologie, je lisais la Bible. Tout était dans ma tête sans arriver à rejoindre mon coeur. J’avais eu l’occasion de fréquenter de grands maîtres au Mexique, mais toujours sans aucune calorie. Je me suis habitué aux choses de Dieu. Tomber dans la routine ou dans l’habitude, c’est le pire qui peut nous arriver. La compagnie Boeing fabrique des avions. Elle a fait un concours parmi ses pilotes pour savoir quel était le principal problème des avions. Pour des répondants, c’était le terrorisme, pour d’autres le prix de l’essence, et même la sécurité aérienne. Le pilote qui a gagné a répondu que le problème principal était de s’habituer à voler et tomber dans la routine. Cela nous arrive à nous aussi dans notre relation à Dieu. Nous nous habituons aux choses saintes. Comme les disciples d’Emmaüs, nous retournons à Emmaüs sans rien de plus. Lorsque nous essayons de transmettre aux autres ce que nous possédons, nous transmettons si peu. Je veux parler de moi-même.

Les disciples d’Emmaüs étaient fantastiques, ils étaient très bons, trop bons. Le compagnon de Cléophas, c’est un type qui n’a pas de nom, c’est une figure sans nom. On lui donnerait une chaire en christologie. Il avait été témoin de la mort de Jésus. Mais il n’était qu’un reporter. Il savait tout ce qu’on peut savoir sur Jésus. Il l’avait vu mourir sur la croix, il pouvait décrire ce qu’il avait souffert avant d’expirer. Mais lorsqu’il parlait de la résurrection, il ne pouvait pas en être témoin. Il transmettait en reporter ce que ses correspondants lui avaient dit, ce que les femmes avaient dit, ce que l’ange leur avait dit.

Moi aussi j’étais comme cela. Je n’avais pas l’expérience de Jésus ressuscité. Je répétais ce que j’avais lu, ce que j’avais étudié et ce qu’on m’avait enseigné à l’école. Quant à la résurrection, je m’en lavais les mains. Je disais « Les femmes disent que les anges ont dit qu’il est ressuscité ». Alors, qu’est-ce que je transmettais ? Ce que j’avais dans ma tête, une théorie froide avec zéro de calorie. J’étais comme ce bifteck congelé. Il a les mêmes propriétés qu’un steak sur le barbecue. Mais, je ne pouvais ni le manger ni le digérer ni le donner aux autres. (M. Flores se donne un coup de steak sur la tête…) Il est dur... Aie, aie ! Je pensais que j’avais la tête moins dure que cela. Combien de fois donnons-nous aux autres des choses rigides qu’ils ne comprennent pas. Souvent, c’est dans un langage incompréhensible. Pourquoi ? Parce que c’est congelé dans notre tête ou dans notre coeur.Qu’est-ce que je peux transmettre en ces conditions-là? Tout ce qui est en moi est gelé. Mais Dieu est miséricorde. Il a eu pitié.

Je vous raconte brièvement ce que fut le processus de l’oeuvre de Dieu en moi. D’abord, j’ai pris conscience de mon péché. Le péché des bons. Le péché des bonnes personnes. Moi, je me trouvais bon, parce que je n’avais pas fait de conneries bien graves.Le péché des gens qui sont bons est parfois le pire. Le péché des bonnes personnes est de s’habituer aux choses de Dieu. M’habituer à avoir la Parole de Dieu dans ma vie, m’habituer à la prière, m’habituer aux mystères de la foi et tomber dans une routine. Me refroidir peu à peu et faire d’une façon naturelle ce qui devrait être de l’extraordinaire dans ma vie. Voilà mon péché. Comme Cléophas, je voulais enseigner les choses à Jésus-Christ, enseigner au maître des maîtres les choses, comme elles devraient être. Je suis tombé dans le péché des bonnes personnes. Parler plus de Jésus que parler avec Jésus.

Moi, je fus un maître merveilleux pour parler de Jésus. Je parlais très peu avec Jésus et j’écoutais encore moins ses paroles. Je les lisais, je les enseignais, mais ça n’arrivait pas au fond de mon coeur. On dit que la distance la plus grande à parcourir est celle entre le cerveau et le coeur. Ce qui est dans notre tête doit descendre, se rendre jusqu’à notre coeur. J’essayais d’enseigner Jésus plutôt que de me laisser enseigner par sa Parole. La plupart du temps, j’étais un simple reporter qui ne faisait que répéter ce que d’autres avaient dit. Dans ma situation de pécheur, comme bonne personne, je voulais contrôler Dieu. Le manipuler pour qu’il fasse ce que je voulais, pour que je puisse suivre les plans que moi je faisais, enfin, pour que Lui m’aide à faire ce que moi je pensais être bon.

Le vent violent de la Pentecôte, ce vent impétueux, la rûah de Dieu, a envahi les 120 personnes qui étaient dans la chambre haute. Pourquoi ? Pour les bousculer, les contrôler, les transformer dans un air conditionné. Pour éviter cela, il faut une télécommande qui aide à transformer ce vent violent en un air confortable pour ma commodité, pour que ça ne me dérange pas, pour qu’il n’y ait pas trop de changement, pour que je n’aie pas trop de problèmes, pour que je sois tranquille, confortable. C’est moi qui emploie la télécommande. Mais, grâce à Dieu, parce qu’il est Dieu, il ne se laisse pas manipuler par une télécommande. C’était cela, c’est moi qui avais le contrôle, c’est moi qui décidais. Et je suis bon en plus de tout cela. Voilà le péché des bonnes personnes! Bien sûr, Dieu a commencé à faire son travail en moi. Il ne s’est pas laissé manipuler, même si j’essayais de le manipuler moi-même. Cependant, un jour, je crois que j’ai été authentique et même malin. Je lui ai dit : « C’est bien Seigneur, c’est toi qui vas diriger l’auto de ma vie, je te donne les clefs, je te donne le volant, assieds-toi à ma place pour diriger ma voiture, prends le volant. Moi je m’assois de l’autre côté, toi tu vas diriger ma voiture ».

Savez-vous ce que j’ai fait ? Le péché des bonnes personnes. Seigneur, toi tu vas avoir le volant, moi je vais avoir la carte routière. Je vais te tracer le chemin. Combien de fois j’ai dit au Seigneur qu’il avait le contrôle de m vie, mais moi je voulais garder la carte routière. C’est moi qui disais, s’il fallait aller à gauche, à droite, arrêter, accélérer, ralentir. Mais, béni soit le nom de Dieu, Dieu est Dieu et il ne se laisse pas manipuler. Béni soit son nom! Mais Dieu a manifesté sa miséricorde envers moi.

Il a commencé la même démarche que les disciples d’Emmaüs. En premier lieu, il a fait brûler mon coeur par le feu de sa Parole. Le Christ a célébré une longue Eucharistie avec les disciples d’Emmaüs, pour leur expliquer les Écritures, leur enseigner qu’il était le fils de Dieu, mais surtout pour leur brûler le coeur par le feu de sa Parole. C’est cela que j’ai vécu moi aussi dans ma conversion à travers la liturgie de l’Eucharistie avec un coeur et des yeux ouverts. J’ai dû commencer à allumer le feu du barbecue pour faire chauffer ce steak gelé. Alors ce steak sur le barbecue a commencé à se transformer en steak argentin. Il a commencé à faire de la fumée partout.

Les gens qui passaient en sentaient l’odeur. Pour paraphraser un peu Saint Paul, c’était la douce odeur du Christ. Il y a là une fête, allons voir. Jésus a fait brûler sa Parole dans mon coeur, a soigné mes yeux qui étaient fermés. J’avais besoin d’une vraie chirurgie pour faire tomber les écailles et les cataractes de mes yeux qui empêchaient de reconnaître que Dieu est Dieu. Cela, c’est une révélation. C’est l’Esprit Saint qui peut nous le révéler. Cela relève du mystère. L’Eucharistie, présence de Dieu au milieu de nous, est un mystère. La liturgie eucharistique dans le rythme oriental que nous avons vécu hier était si belle, nous a fait entrer un peu plus dans le mystère de Dieu. Parfois, nous sommes si sages et si savants que nous voulons tout expliquer. Nous pouvons oublier le mystère de l’Eucharistie qui nous accueille, nous transporte dans la dimension même de Dieu.

C’est Dieu qui a pris l’initiative dans ma conversion. C’est pourquoi le prophète Isaïe disait : « Convertis-moi, Seigneur, et je me convertirai ». Comme j’ai dit au début, j’étais bon. Je me croyais bon comme beaucoup de gens qui sont ici. Parce que je me croyais bon, je ne voyais pas le besoin de me convertir. Le pharisien disait: Seigneur, traite-moi pour ce j’ai fait. Il racontait à Dieu tout ce qu’il avait fait. Il transformait le Dieu donateur en Dieu endetté. Mais Dieu a eu pitié de moi. La transformation la plus importante n’est pas la transformation d’un pécheur en un homme juste, mais la transformation d’un juste en fils. Ça, c’est la plus grande conversion. Lorsqu’on est fils, on peut être héritier. Commencer à vivre comme fils, c’est être sous l’emprise de l’Esprit Saint qui pousse à dire papa, vivant ainsi l’expérience de la paternité amoureuse de Dieu. Ce dernier n’est pas mon chef, ni mon juge, mais bien mon père avant tout,c’est mon papa. C’est l’oeuvre de l’Esprit dans nos coeurs qui nous fait dire papa, mon petit papa. La dernière phase de ma conversion concerne le maître de la Parole

Je donnais des cours de Bible à Mexico dans des institutions religieuses et même à Rome. Je le dis avec honte, j’étais un maître de la Parole, au lieu d’être un disciple de la Parole, un serviteur de la Parole. Ce fut une conversion. Cesser d’être un maître pour devenir un serviteur et laisser Dieu être Dieu. C’est Dieu qui m’a transformé et je peux le dire en citant le prophète : « Tu m’as séduit Seigneur et je me suis laissé séduire et tu m’as gagné parce que tu es plus fort que moi par ta Parole ». C’est ça qui s’est produit. Ensuite nous revenons à Jérusalem avec les disciples d’Emmaüs pour rendre témoignage. C’est ainsi que l’évangélisation est née par l’école Saint-André fondée dans le but de former des évangélisateurs avec2000 écoles dans 61 pays. C’est une école d’évangélisation qui a une méthode objective et dynamique pour apprendre et surtout pour montrer comment enseigner. C’est ainsi qu’est née l’école d’évangélisation, petite comme une graine de moutarde et qui a grandi en cherchant et trouvant des prédicateurs. Dieu m’a fait le don de comprendre les choses, que je connaissais, bien sûr, intellectuellement, dans ma tête.

La Parole est inspirée par Dieu et la Bible est inspirée par Dieu. L’Esprit Saint inspire la Parole et la parole expire l’Esprit Saint dans nos vies. La Parole de Dieu est enceinte de l’Esprit Saint comme l’était Marie, lorsque la Parole, le Verbe s’est incarné en son sein. L’Esprit Saint est dans la Parole, la rûah de Dieu. Mais la Parole de Dieu expire l’Esprit Saint, exalte l’Esprit Saint Ceux qui ont écouté la Parole de Dieu ont été scellés par l’Esprit Saint. Cette Parole est remplie du vent de l’Esprit. Je voulais la contrôler, la limiter et ne pas laisser le vent de l’Esprit souffler comme Il veut, sans savoir d’où il vient ni où il va. Laisser l’Esprit Saint être Esprit Saint. C’est la force de Dieu pour le salut de ceux qui croient, comme dit Saint Paul. Si on ne l’attache pas, nous renonçons au contrôle et nous nous laissons contrôler par Lui. Alors, le temps est venu, vous pouvez souffler votre ballon. …. (Chaque participant avait déjà reçu un ballon avant le témoignage de M Flores).

Maintenant vous allez prendre une décision. Ou vous attachez votre ballon pour pouvoir le contrôler ou vous le laissez aller, poussé par le vent, afin qu’il aille où il voudra. (Les ballons colorés ont rempli la voûte du stade) Seigneur Dieu, je recommande cette assemblée à ta Parole, comme les apôtres d’Éphèse te l’ont recommandée. Prends soin de tes évêques, prends soin de ton Église, protège-la, Seigneur. Protège-nous tous ici selon ta Parole.

Amen.

 

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