Cultures et foi - Cultures and Faith - Culturas y fe - 3/1996 - Plenaria 1997
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PLENARIA '97


PASTORALE ET CULTURE: QUÉBEC-CANADA

Guy MARCHESSAULT

Université Saint-Paul, Ottawa

1ère question: Quelle vision de l'humain?
Un changement profond de paramètre

Nous vivons en des temps de changements nombreux et profonds. Qu'arrive-t-il alors au chrétien, à la chrétienne, soumis à un tel brassage culturel? Comment vivent-ils leur foi? La foi chrétienne arrivera-t-elle seulement à se communiquer en langage d'aujourd'hui, pour les gens d'aujourd'hui, spécialement les nouvelles générations?

Il est clair que, dans la culture d'ici (et même d'un peu partout), le chrétien et la chrétienne sont à la recherche de leur identité, qu'ils découvrent non plus surtout à travers des institutions et sagesses transmises, mais plutôt dans le vécu et les expériences qui sont les leurs ici et maintenant.

Une des principales résultantes du Siècle des Lumières et du rationalisme scientifique, c'est le désir d'autonomie réflexive de chacun-chacune, qui se veut libre dans ses choix. C'est pourquoi les arguments d'autorité sont dorénavant massivement rejetés. Les «valeurs reçues» cèdent le pas devant les faits, nouveaux définisseurs de situations, créant un contexte plus proche de l'indifférence et du relativisme face à toute foi religieuse. De même, les principes se révèlent impuissants à contenir les attirances d'une société de consommation qui déferle avec tous ses attraits sur nos vies.

Cela pose une question délicate sur la transmission des héritages, entre autres la foi chrétienne, ainsi que sur le rôle des institutions, dont l'Église. Ces données expliquent aussi, sans doute, une désertion de plus en plus accélérée des pratiques religieuses, un refus net des réponses dogmatiques toutes faites ou des interventions autoritaires de tous ordres, chez des esprits formés à des choix personnels, de plus en plus individualistes.

La base de la culture actuelle, c'est donc le «sujet interprétant». Ce sujet passe tout ce qui lui arrive au crible de son besoin d'autonomie, en même temps que de sa sensibilité personnelle et de son authenticité. Finis les principes et les idées pures; tout doit prendre racine dans son vécu et ses expériences.

Quelques caractéristiques majeures

À partir de ce constat général, essayons de cerner un peu mieux quelques caractéristiques principales de la culture d'ici. Nous parlerons plus de culture populaire (anthropologique) que de cultures cultivée (humaniste) et scientifique. Et nous tenterons de décrire davantage le Canada français, conscient toutefois que les principaux traits qui s'en dégagent ressemblent de plus en plus à de grands mouvements à l'échelle planétaire.

Les profonds changements sociaux produits depuis les années 1950 ont provoqué la mise en place de plus d'autonomie personnelle et le déclin des autorités. Toute la culture s'est transformée rapidement tout en s'uniformisant: éloignement de la vie traditionnelle et de ses valeurs, concurrence plutôt que permanence, etc. En même temps, les façons de s'habiller, de circuler, d'acheter, de consommer, d'écouter la musique, etc. se sont standardisées sur toute la planète, souvent en fonction des modes.

Il en découle un certain nombre de comportements-types: le personnel devient plus important que le communautaire; le privé l'emporte sur le public; l'affectif touche plus que le notionnel; l'expression particulière a plus d'impact que la religion civile; l'autonomie individuelle est facilement heurtée par toute autorité; les approches pratiques sont mieux reçues que les mystiques.

La recherche de sens apparaît à la fois rationaliste, individualiste, syncrétique (elle puise allègrement dans le marché des opinions), affective, accessible à tous, dynamique et efficace. Fait à noter: la culture savante s'est départie de la question du sens: chaque chercheur creuse son domaine particulier, souvent en deçà des questions éthiques qu'il soulève; les universités se déclarent incompétentes à discerner le sens de l'existence humaine ou le sens de l'univers. Cette situation révèle bien l'impuissance devant les nouvelles questions soulevées par les progrès des sciences et des techniques.

Toutes ces caractéristiques trouvent leur point d'expression culminant dans la culture médiatique, cette «superculture» (Hervé Carrier) qui, tablant sur un extraordinaire marché des opinions, est en train d'englober tous les autres aspects.

Les principaux indicateurs de crise

Ces changements drastiques entraînent ce qu'on a souvent dénommé la crise actuelle. Cette crise s'exprime durement; ses répercussions sont importantes, entre autre en ce qui concerne la religion au Canada français: défection des appartenances et des réseaux de liens affectifs qui constituent le tissu social; multiplication des cultures parallèles et sectaires; besoin de se réapproprier le savoir, besoin de donner un nouveau sens à la vie; croissance et expansion des nouvelles formes de pouvoirs; distances entre les générations.

Un certain nombre d'indicateurs révèlent aujourd'hui les principales conséquences de cet état de crise caractérisant notre culture. Retenons les plus importants:

1. Superficialité de la vie. La société de consommation oriente vers le matérialisme. On se réfugie dans la consommation sans limite, ce qui fait plaisir au système de production. Tout est orienté vers «la qualité totale», «la qualité de vie», la performance, le divertissement, de quoi capter les intérêts et acculer les gens à l'incroyance pratique. Le bonheur est défini pour ici-bas et accessible tout de suite et tout le temps. Quand on rencontre des obstacles (par ex. dans les relations humaines), on cherche alors des recettes, des trucs pour s'en sortir à court terme.

2. Nombreux revers dans les vies affectives. La relation de couple devient périlleuse. Les échecs familiaux se multiplient. L'approche prônée par l'Église est perçue comme totalement dépassée et est en pratique refusée parce qu'elle traîne des sous-entendus inacceptables: suspicion du corps et de la sexualité, pressions sur le for interne. etc.

3. Contestation des jeunes générations vis-à-vis des «baby-boomers», et maintenant des personnes âgées. Dénonciation du moralisme antérieur: trop souvent basé sur la culpabilité, l'obsession, l'hypocrisie. Déçus des comportements de leurs aînés, dénonçant les valeurs matérialistes et les institutions dominantes, les jeunes se réfugient dans les seuls lieux qu'ils peuvent investir en toute impunité: leur vie privée et leur corps. Cela conduit à une crise des normes éthiques: démoralisation des consciences (perte du sens de l'amour, de la fidélité, du mariage, avortement). Cela conduit aussi à une recherche des sensations fortes à tout prix: tout, tout de suite et tout le temps (sexualité, musique, drogues, aventures... ).

4. Le social, le politique, le communautaire en prennent un coup. D'autant plus que les leviers de pouvoir appartiennent à des groupes financiers sans figure obéissant aux lois économiques internationales du plus fort visant le rendement à court terme (c'est ce qu'on exige des gestionnaires) et ne laissant prise à aucune action concrète. De plus en plus, les puissances de l'argent et du rendement dominent, créant une mentalité fataliste chez les laissés-pour-compte: autochtones, immigrants, assistés sociaux, chômeurs...

5. Montée du chômage. Suite aux jeux économiques sans frontières, les pays écopent, les chômeurs se multiplient, surtout chez les jeunes, dont l'avenir apparaît souvent bouché. Les économies, même les plus fortes, deviennent fragiles, instables. L'état-providence est minimisé, à cause de ses débordements bureaucratiques, au profit des lois du marché libre et sauvage de la concurrence.

6. Des réactions de fond, cependant, se manifestent peu à peu. Elles se préoccupent de recherche des racines, ou d'un sens à la vie. Sous l'abondance des biens matériels, on sent la crise du spirituel. Tout a été «désenchanté». Bien des gens espèrent maintenant une nouvelle source d'enchantement: à travers le nouvel âge, des sectes, des expériences touchant le mysticisme, bien souvent à travers un sacré «sauvage». Ainsi naît comme une nouvelle conscience des humains, au-delà des valeurs matérialistes, au-delà de la consommation. Le bonheur est ailleurs. Mais les Églises chrétiennes ne savent pas quoi faire pour se réajuster à ces nouvelles attentes et rêvent encore le plus souvent d'attirer des gens à la paroisse: elles n'ont pas saisi qu'il faut aller vers les autres, et non essayer d'attirer les autres vers soi; l'esprit institutionnel l'emporte encore sur l'esprit de mission.

7. Pendant ce temps, plein de nouveaux lieux significatifs naissent. Des réactions se manifestent partout. Par exemple, les mouvements pacifistes ont dénoncé avec un certain succès l'usage des techniques à des fins militaires. Le mouvement écologiste prône le respect de la nature, de l'environnement, et critique le système industriel déshumanisé; mais la droite revient en force, triomphe à nouveau, contraignant le mouvement écologique à des reculs. Les femmes revendiquent un nouveau rebalancement des rapports avec les hommes, aux niveaux légal, familial, du travail, etc. L'expression artistique n'a jamais connu autant d'ébullition, même si elle est quelquefois récupérée par les industries culturelles. On repense l'éducation, la santé, la culture.

8. Enfin, le pluralisme s'impose partout. Le lieu par excellence de son expression, ce sont les médias de communication de masse. Cette libre circulation des opinions, autrefois restreinte par l'Église dans le but de sauvegarder la doctrine... et aussi son pouvoir, se voit maintenant ouverte à tous, en principe. En pratique, elle demeure soumise à de nouveaux censeurs: les responsables des médias, les «gate-keepers», dont la tâche est de juger, dans l'ensemble des prises de parole et des faits humains en circulation, ce qui mérite d'être exposé au grand public à travers les médias. Dans cette nouvelle agora, tous ont le droit d'avancer toute réflexion, de telle sorte qu'à une minute d'avis, des opinions absolument contradictoires seront exposées, sans que personne d'autre que les publics ne décident par eux-mêmes de leur pertinence. Finis, donc, les monopoles idéologiques, moraux, doctrinaux, religieux. Dorénavant, pour exposer ses points de vue, il faut apparaître sur l'agora médiatique, la foi représentant dorénavant seulement un participant parmi bien d'autres, comme lorsque chaque groupe d'intérêt possède un kiosque parmi des centaines d'autres dans une foire.

L'influence déterminante des médias

Les médias constituent donc le principal lieu (pas l'unique) de production ou de reflet du sens personnel et collectif. Ils assurent la «construction sociale de la réalité», au quotidien. Ils se trouvent ainsi en quasi-constante contestation de toute vision fermée du monde (c'est ainsi que se présente encore souvent la vision chrétienne). La culture médiatique populaire se caractérise, entre autres, par deux traits essentiels à l'expression culturelle d'ici: le libre marché, le désir inconscient.

Les médias obéissent eux aussi aux lois de l'offre et de la demande. Loin d'être critiques de l'économie, ils en vivent et l'encouragent (par la publicité). Ils obéissent à certains postulats, toujours les mêmes: les propriétaires, pour faire le plus d'argent possible, entendent recueillir le plus de publicité possible, et pour cela doivent rejoindre les auditoires les plus larges possibles, grâce au langage du spectacle divertissant. C'est la loi de l'offre et de la demande en pleine action.

Mais, derrière ces larges auditoires, se cachent bien des désirs inconscients. Les innombrables modèles offerts en pâture rejoignent tôt ou tard chacun d'entre nous: qu'ils soient de l'ordre de la persuasion (propagande, publicité, relations publiques, information) ou de l'imaginaire (jeux, divertissements, happenings, fictions). Il s'agit de règles à la fois d'ajustement à la réalité et d'échappatoire dans le rêve: désirs d'être à la fois «in» et «out», besoins vécus à travers des sortes de transferts psychologiques d'ordre mimétique ou cathartique.

Les médias sont alors à la fois définisseurs et miroirs de toutes ces tendances qu'on a décrites ci-haut. Point de surprise qu'on leur en tienne rigueur. Ce sont eux qui ont fait sauter le monopole du pouvoir religieux contrôlant la prise de parole dans l'opinion publique. Ce sont eux qui se révèlent être le «marché ouvert» de toutes les idéologies en circulation sur la planète. C'est à travers eux que s'exprime le monde des désirs de consommation, semant une certaine superficialité en même temps qu'un engouement intempestif pour la surconsommation (ex. par la publicité). Ce sont eux, aussi, qui présentent des modèles de comportement dont l'influence, difficilement mesurable, n'en est pas moins réelle. Ce sont eux, enfin, qui offrent à leurs auditoires une variété croissante de «visions du monde», souvent en parfaite contradiction les unes avec les autres, mais toujours laissées au libre-choix des publics, considérés adultes. Nous sommes renvoyés une fois de plus à l'agora publique.

Mais, contrairement à la vision trop souvent purement pessimiste manifestée dans l'Église, cette culture, nourrie de «in» et de «out», de désir du réel et de l'imaginaire, peut aussi rejoindre directement, dans ses modèles proposés, le besoin actuel de recherche de sens, de vision du monde, de «spiritualité». Et cela au-delà de toutes les frontières. D'ailleurs, à l'intérieur de tout moment culturel naissent des contre-cultures, sortes d'antidotes prophétiques nécessaires à l'engourdissement, contestations parallèles, dont les formes donneront à leur tour naissance aux nouvelles expressions culturelles. C'est ainsi, par exemple, qu'il faut réinterpréter positivement les contestations des jeunes vis-à-vis de leurs aînés.

Une nouvelle culture basée sur le provisoire ne cesse de se manifester chez nous, avec ou contre les forces du marché. Les arts en sont témoins. Théâtre, films, danse, poésie, littérature (tous bien près des médias), etc., cherchent de nouvelles révélations esthétiques, qui leur permettent de dire des valeurs neuves, ou de dire nouvellement d'anciennes valeurs redécouvertes. Les témoins - y compris évangéliques - y ont tout naturellement leur place. dans la mesure même de leur charisme prophétique.

En cela, les médias provoquent un renouvellement incessant, qui s'exprime à travers l'esthétique et la créativité. En même temps, les médias ouvrent aussi vers plus de conscientisation, à travers l'information notamment. Ils nourrissent et renouvellent les contestations nécessaires: pacifisme, environnement, nouvelles visions du monde. Au-delà du danger de nivellement par le bas lié à l'industrialisation de la culture, ils se révèlent souvent comme les langages neufs venant de la base, qui nous parlent de rupture, de nouvelles symboliques, de besoin de créativité: des thèmes bien évangéliques. Dans cette perspective précise, on peut les considérer comme des lieux extraordinaires d'éveil de spiritualité.

Quelles sont les idées propagées et les attitudes adoptées en contradiction avec la vraie conception de l'homme révélée en Jésus-Christ et proclamée par l'Église? demandait la première question. Après ce qu'on vient de dire, il apparaîtra clairement que, l'idée fondamentale de toute notre approche, c'est justement de renoncer à étaler comme certitude qu'il n'y ait qu'une seule «vraie conception de l'homme révélée en Jésus-Christ et proclamée par l'Église». C'est justement cela qui n'est plus reçu aujourd'hui. Ce qui n'enlève rien, par ailleurs, à la qualité de la vision du monde propre aux chrétiens, qui garde toute sa valeur. Une valeur à proposer, et plus jamais à imposer.

2e question: Quelle culture?

De notre réponse à la première question, on aura vite compris que, dans la culture qui est la nôtre ici, il n'est plus question de faire «la promotion d'une culture chrétienne»; mais plutôt, qu'il y ait des chrétiennes et chrétiens témoignant en pleine culture populaire. C'est déjà assez dramatique que, notamment depuis l'arrivée des médias de masse au XVIe siècle, l'Église ait à ce point défendu une «culture chrétienne» toujours en marge des cultures courantes. Elle en porte aujourd'hui les conséquences: elle se voit tous les jours plus marginalisée par rapport à la culture populaire, sans parler des scientifiques, des artistes...

L'option d'évangélisation doit ici être établie sans équivoque: va-t-on vers le monde, vers les gens chez eux («ad gentes»)? ou continue-t-on à vouloir attirer les gens chez soi, dans l'Église? Si on choisit la deuxième option, c'est la fin, tout au moins dans notre culture. Si l'on choisit l'option plus orientée vers le peuple, il semble qu'il serait approprié de renverser complètement l'ordre de présentation des choix d'agirs pastoraux indiqués dans la question pour attribuer de nouvelles priorités, en ne négligeant pas de les situer toujours d'abord dans le «ad gentes»: l'expression artistique, l'action sociale (notamment auprès des plus démunis), le dialogue philosophique et interculturel, la recherche anthropologique et historique, la façon de vivre la foi, l'expérience des communautés de foi, la réflexion théologique, la proclamation de la Parole et la catéchèse, les célébrations liturgiques.

Ce mouvement de présence des chrétiens et chrétiennes à leurs cultures doit prendre en compte la démarche classique d'acculturation-inculturation. Elle doit aussi assurer un respect intégral de chaque groupe culturel dans ses valeurs les plus structurantes.

3e question: Quelle pastorale de la culture?

L'institution ecclésiale d'ici est encore bien timide dans son approche à la culture. Elle a vécu trop longtemps en marge. Par contre, l'Église, c'est d'abord les chrétiens et chrétiennes, qui eux et elles sont intimement impliqués dans leurs cultures respectives. On ne part donc pas de rien.

L'idée, c'est non pas de fonder des activités culturelles religieuses en parallèlle, en marge encore une fois, mais bien plutôt d'être là, en pleine pâte culturelle, comme le levain de l'évangile, au coeur de sa culture. Les expressions religieuses traditionnelles transmises de générations en générations ont inspiré pendant des siècles les expressions culturelles globales du Canada français. Mais, elles ont vieilli; malheureusement, peu d'esprit de créativité a pu s'exercer et s'apprendre devant l'immutabilité des formules culturelles chrétiennes antérieures. Dorénavant, on aura besoin de nouvelles expressions culturelles à inventer, et c'est un défi très compliqué, car les vieilles générations restent bloquées sur les anciennes formules, tandis que les plus jeunes ne savent pas encore nommer leur foi en termes culturels actuels.

De timides essais ont pourtant été mis en branle ici et là. Au niveau social: des centres d'éducation populaire (le Centre Saint-Pierre, à Montréal, par exemple), des coops de tous genres, l'accompagnement des groupes défavorisés qui se prennent en main, des témoignages d'autorités ecclésiales en faveur des démunis... Les communautés religieuses de femmes et d'hommes y ont joué un rôle-clé. C'est probablement le plus important lieu d'intervention ecclésiale structurée dans la nouvelle culture. Il conserve à l'Église institution une crédibilité morale certaine.

D'autres organismes assurent un minimum de références à des personnes en cheminement dans leur foi: centres de consultation, pour les nouvelles religions, de catéchèse des adultes, etc.

Un effort remarquable a été tenté par l'épiscopat du Québec, au cours des dernières années, vis-à-vis des médias de masse: sondage sur la perception publique de l'Église québécoise, contacts avec les journalistes à Montréal et en régions, formation intensive de 170 cadres supérieurs (incluant les évêques) de l'Église québécoise à l'intervention médiatique compétente. Un important colloque se déroule en juin 1996, dont le thème est justement consacré aux valeurs de création dans les médias: le colloque est sous la responsabilité de l'Office des communications sociales, le lieu de rasssemblement des catholiques francophones canadiens concernant les médias.

Enfin, différents groupes, encore clairsemés, tentent des rapprochements avec les artistes, ou donnent leur chance à quelques-uns d'entre eux: musique, chant, peinture, etc. Il y aurait ici beaucoup à développer. Car, finalement, ce sont les artistes qui un jour ou l'autre trouveront les nouvelles formules, les nouveaux symboles, les nouvelles métaphores, assez signifiants pour définir les imaginaires collectifs, dont on peut rêver que la foi chrétienne ne soit pas tout à fait absente (après avoir connu des instants si glorieux ici par le passé).

Somme toute, c'est surtout grâce à des témoins prophétiques, en paroles et en actions, que l'Église en agir pastoral peut rejoindre le «sujet interprétant» de la culture actuelle chez nous, y compris à travers les médias de communication de masse, ces dangereux mais merveilleux marchés ouverts des visions du monde.


PROMOTING CHRISTIAN CULTURE IN THE UNITED STATES

Kevin L. FLANNERY, S.I.

Pontifical Gregorian University

1. In the United States of America where I was born and brought up there has always been a general presupposition that religion is a good thing. There has never really existed the social phenomenon of anti-clericalism, although certainly there have been anticlerical individuals in our nation's history and there has been a good amount of institutional anti-Catholicism. Thus, there is a basic openness to religion which makes the Unites States at least potentially fertile ground in which the Catholic faith might continue to flourish and grow.

There are however a number of factors working against this prospect. One is certainly materialism: the ideals propounded in the media most often represent simply the satisfaction of hedonistic and selfish desires. Newspapers are full of stories about those who have "made their million" (or millions) and who have therefore reached the empyrean, as it is perceived, of American culture. One finds this materialistic mind-set throughout American culture, so it is not just something that the media force upon the American people; it is part of American society itself and needs to be cut through if the Gospel is to take root and grow.

Another factor that stands in the way of future evangelization is the coverage in the media of priest-pederasty cases. The many reports of priests who have molested children, especially boys, has done much certainly to discourage vocations to the priesthood and male religious life. Most healthy young American men of the age when they might choose a vocation think twice about joining an organization (religious order or diocese) which they perceive to contain a significant number of men with sexual difficulties of this sort. This perception may or may not always be a correct one; the problem still exists.

Another factor working against the Gospel in American culture is the insistence, especially in academic circles, on "political correctness." "Political correctness" is basically a list of doctrines rather unthinkingly regarded as what the thinking person ought to think. These doctrines very often conflict with Church teaching, particularly with respect to so-called "women's issues" (abortion, sexual freedom) and academic freedom. The agenda of the politically correct is often explicitly anti-Catholic.

Another factor comes from within the Church itself. Within certain quarters of the Catholic Church there is so much antipathy for Catholic teaching that often people who develop an interest in the faith are either put off by the lack of unity that they actually find among Catholics or, having been convinced by the arguments made against Catholicism by Catholics, they decide that the Catholic faith is not worth bothering about.

Despite these factors, however, there are still many conversions to the Catholic faith in the United States. These may be attributable to the inherently religious character of the American people which I mentioned above or to dissatisfaction with the often simplistic understanding of Christianity coming from the major Protestant churches. Or they may be attributable to dissatisfaction with materialism and political ideology. Any such factors must, however, of course, be considered less important than the ultimate cause of conversion, the grace of God.

2. The most important "privileged way" by means of which the Church promotes Christian culture is certainly the Eucharist. This is the means by which she has drawn people to herself from the beginning. One need only recall the many Catholic convert authors who say that they were attracted to the Church by the Mass.

The Church, however, I believe, must be very careful not to think of the Eucharist primarily as a means of attracting people. The focus must always be on the God we worship, from whom we ask forgiveness of our sins and help in our difficulties. Otherwise the Mass becomes mere theater. Theater, of course, can and does often attract spectators; but it is not especially good at nurturing faith and prayer. That comes rather from realizing that the God of the universe is present in our churches. This realization might be promoted by ensuring that our churches are houses primarily of prayer, places in which others feel the indwelling presence of the Holy Spirit.

It might also be promoted by better translations of the prayers used during the Church's liturgy. The English language Sacramentary, as it now stands, can best be described as "secularized." As many references as possible to the transcendence of the God we worship have been systematically eliminated in its translation. I am afraid that the use of so-called "inclusive language" is of a piece with this movement away from the sacred. Whatever the merits of inclusive language (and, stylistically, they are certainly few), it introduces into worship itself a political agenda. Such language, and the ideology it promotes, may attract a certain class of activist; but, again, it does little to promote prayer and awareness of our utter dependence on God our Father.

As for other cultural exchanges that might promote the faith, the most important thing, I believe, is for bishops especially to explain clearly why the Church takes the stands it does, especially when these stands contradict the standard or politically correct opinions of those who control the media (including often the Catholic media). It is truly extraordinary, for instance, how little success the Church has had in getting across to the American population why women cannot be ordained to the priesthood. Of course, loyal Catholics simply accept the Church's teaching in this regard; but they can rarely explain why this teaching does not constitute an injustice.

3. One important means of evangelization are the documents published by the United States Catholic Conference (i.e., the Conference of Bishops). These are often discussed in media (especially in newspapers and opinion magazines), and this discussion (one hopes) eventually has its effect on the more general population. The bishops need to be careful, however, I believe, that their message is primarily a religious message, otherwise their teaching will be put in the same category as any other type of political advocacy. For the moment, I believe they have avoided such a situation.

I might add too that the collective nature of a conference of bishops can make difficult - if not impossible - a clear and incisive type of evangelization. The documents that a conference produces must obviously be "committee documents." Thus, there is certainly room for initiatives by individual bishops. A good example of this type of evangelization would be the document authored by Bishop Myers (Peoria) on abortion. I understand that he is presently working on a pair of documents on catechesis. One hopes that they may enjoy the same success (even fame) that his letter on abortion had.

There are, of course, in the United States a number of Catholic cultural centers, and various groups sponsor "Catholic culture weeks," art exhibits and the like. But I should think that the most important such means of evangelization are our permanent institutions: Catholic high schools and universities in their everyday operation. The effectiveness of this work, of course, depends upon the extent to which teachers and professors are truly committed to the Catholic faith.


EL EVANGELIO, FUENTE DE CULTURA VERDADERA

Mons. Fernando-Antônio FIGUEIREDO

Obispo de Santo Amaro (Brasil)

1. ¿Cuál es la visión del hombre?

Podemos decir que, después del ocaso de ciertas ideologías que marcaron el siglo XX, el hombre de nuestro tiempo decidió llevar adelante un proceso de autocrítica de los supuestos iluministas que generaron tales ideologías. Sin embargo, considerando que el sustento básico del Iluminismo fue la conceptualización del hombre en cuanto sujeto autoreferido, ciertas perspectivas autodenominadas postmodernas han extrapolado este proceso proclamando la necesidad de un adelgazamiento del sujeto (Vattimo) que se coloca en el horizonte de ya conocidos planteamientos antifundacionalistas (Wittgenstein, Heidegger) o antihumanistas (Foucault, Derrida).

Parece abrirse, pues, un horizonte nihilista que —en una sintomática resurrección de perspectivas nietzscheanas— amenaza la comprensión del hombre en cuanto persona; esto es, en cuanto fundamento de todos los posibles dinamismos sociales, culturales y económicos. Ello no sería tan preocupante si se planteara tan sólo en el ámbito de las teorías filosóficas; sin embargo, estas perspectivas se expresan en dinamismos concretos de rechazo de la dignidad de la persona, como las prácticas de la ingeniería genética o la presentación del mercado o de la tecnología como únicos referenciales configuradores de la sociedad adveniente, capaces de disolver en sí mismos a la persona o de tornarla una simple metáfora o epifenómeno de sus procesos inmanentes.

Así, la visión del hombre que se delinea, ya a finales de nuestro conturbado siglo XX, parece ser la desconfianza del hombre en relación a la dignidad de su propio ser. Ya no se trata, por tanto, de una simple desfiguración de la realidad humana, sino de una aterradora renuncia a la pregunta por aquello que hay de más específico en la criatura humana, para, de esa forma, abandonarla a los dinamismos de facto que presenciamos en el mundo contemporáneo.

En el ámbito pastoral, el contacto con tantos jóvenes que pierden el gusto por la vida o que encuentran el —ilusorio— sentido de la misma tan sólo en los dinamismos de consumo alentados por el mercado, suscita una honda pregunta acerca de si las perspectivas antes indicadas ya calaron en quienes constituyen la esperanza del mundo y de la Iglesia.

Sin embargo, en el mismo ámbito pastoral, encontramos que esos jóvenes dan todavía testimonio de aquella chispa divina que, configurando la interioridad humana, no se apaga tan fácilmente. Así, la inquietud, el hambre de infinito, la propia búsqueda de razones para vivir —aunque sean encontradas de modo pragmático y efímero— parecen confirmar que, como decía Pascal, «el hombre supera infinitamente al hombre».

El horizonte que percibimos no parece indicar, pues, que el hombre de hoy haya llevado adelante una simple apuesta irresponsable por el pesimismo; sino que es, esencialmente, la descripción viva del drama que se experimenta después de haber perdido de vista los fundamentos que le permiten al ser humano descubrir su inmenso valor. Y, en cuanto drama, no constituye de por sí una tragedia, sino, más bien, un desafío profundo a la Iglesia para que ella posibilite que, en el dinamismo tensional entre apuesta o renuncia por el hombre, venza —no sólo en el plano categorial, sino, sobre todo, en el ámbito vivencial de nuastros jóvenes— aquella Luz que impide que el hombre se perciba a sí mismo de modo negativo y autocondenatorio.

2. ¿Hacia qué cultura?

Si consideramos —como indicaba el Santo Padre en su memorable Discurso a la UNESCO de 1980— que «la cultura es aquello a través de lo cual el hombre, en cuanto hombre, se hace más hombre, "es" más, accede más al "ser"» (nº 7), entonces podríamos decir que la cultura hacia la cual debemos encaminarnos es, simplemente, la cultura esencialmente considerada, esto es, la cultura en cuanto proceso de humanización o personalización, dinamismos que siempre permean el lenguaje pontificio al caracterizar la cultura.

En ese sentido, cabría también preguntarse hasta qué punto el surgimiento de planteamientoss y prácticas antihumanistas no es reflejo de una profunda crisis en los propios dinamismos culturales, en la medida en que no consiguen diferenciar, en sí mismos, aquello que es verdaderamente cultural y aquello que desencadena un proceso de anticultura; o sea, aquello que verdaderamente humaniza y aquello que se vuelve contra el propio hombre.

Asumiendo esta esencial consideración preliminar, podemos destacar que, en medio de procesos despersonalizantes —sean estos filosóficos, económicos o tecnológicos— parece también necesario recuperar espacios de encuentro, en donde las personas sean capaces de reconocer mutuamente su dignidad, desplegando así auténticos dinamismos de humanización. Pensamos, por ejemplo, en la familia, las parroquias, los movimientos eclesiales, las escuelas, las universidades, que son, todos ellos, ámbitos en los que la Iglesia estuvo siempre presente, comprendiéndolos como auténticas comunidades en donde el hombre se cultiva en el reconocimiento y despliegue de su dignidad fundamental.

En ese sentido, si —a partir de nuestra observación inicial— la cultura es proceso de humanización, eqoV, esto es, dinamismo habitual, coincidente con un tipo de costumbre en la que el hombre descubre y cultiva su ser específico, reviste también particular importancia considerar que esta cultura sólo se despliega plenamente en cuanto se constituye —como indicamos en el párrafo anterior— en espacio de encuentro, esto es, en cuanto hqoV, que significa morada, ámbito en el cual y desde el cual el hombre descubre que puede habitar humanamente el mundo, diferenciándose de la naturaleza y otorgando sentido, desde esta habitación, a todo lo que aparece como inferior a él.

Sin entrar en consideraciones más detalladas sobre otros aspectos antropológicos que debieran ser rescatados y promovidos en los procesos contemporáneos que nos anuncian nuevas configuraciones culturales, creemos que estos procesos deben salvaguardar —al menos— los dos dinamismos esenciales antes descritos: el dinamismo de humanización o personalización, y, por eso mismo, el dinamismo de encuentro, que no es sino una ocasión para subrayar el carácter imprescindible del amor, sin el cual el hombre jamás podrá configurar una cultura a la altura de la dignidad humana revelada por Jesucristo.

3. ¿Con qué pastoral de la cultura?

Elaborar una pastoral de la cultura supone prestar atención a las situaciones específicas en que cada persona y cada pueblo plantea las preguntas sobre su propia condición humana, preguntas éstas cuyos intentos de respuesta redimensionan o inhiben sus peculiares situaciones culturales, esto es, sus particulares estilos de vida (Gaudium et spes, nº 53). En ese sentido, la eficacia de los programas de pastoral de la cultura parece depender, en gran medida, del vigor y de la coherencia de los testigos del Evangelio (obispos, presbíteros, religiosos, laicos, etc.) en cuanto están encarnados, compartiendo una misma cultura, una específica morada común.

Sin embargo, permítasenos plantear un cierto horizonte —que nos parece que debe estar presente en una pastoral más amplia y global de la cultura— a partir de un pasaje fundamental de la Constitución pastoral Gaudium et spes, que fue llamada por el Santo Padre —en un seminario internacional, realizado en noviembre del año pasado, conmemorando los 30 años de su promulgación— la carta magna para promover y defender la dignidad humana: «el hombre, que es la única criatura en la tierra a la que Dios ha amado por sí misma, no puede encontrarse plenamente a sí mismo sino en la donación sincera de sí mismo» (nº 24).

Este pasaje, citado en repetidas ocasiones por Juan Pablo II, nos parece que ofrece una clave pastoral que, por su honda perspectiva antropológica, permite, por eso mismo, defender y promover los dinamismos esenciales de la cultura que hemos destacado anteriormente: el dinamismo de humanización y el dinamismo de encuentro.

En relación con el dinamismo de humanización, el documento conciliar nos recuerda que el hombre es fin en sí mismo, nunca medio, ni siquiera para Dios, que ha querido dotar a su criatura de libertad. En el antes citado discurso a la UNESCO, Juan Pablo II reafirmaba esta radical apuesta que la Iglesia hace por el hombre, con las siguientes palabras: «Hay que afirmar al hombre por él mismo y no por ningún otro motivo o razón». Y añadía: «El conjunto de las afirmaciones que se refieren al hombre pertenece a la sustancia misma del mensaje de Cristo y de la misión de la Iglesia» (nº 10).

En ese sentido, el hombre es más él mismo en la medida en que se descubre desde Aquél que, amándolo, lo constituye en su dignidad. Fuera de Dios el hombre corre el riesgo de dudar de su propio valor, pues —sujeto únicamente a sus dinamismos contingentes— puede llegar a creer —como se descubre, por ejemplo, en la perspectiva sartreana— que su propia libertad carece de sentido, al carecer de un fundamento y de un horizonte que la oriente.

Así, la cultura, entendida como dinamismo de humanización, viene a solicitar, desde sus propias raíces, una pastoral que le descubra su sentido en Dios. No se trata, entonces, de la necesidad de estrategias pastorales que se coloquen en medio de las culturas, suplicando ser atendidas; sino de un profundo servicio a las propias culturas, que sin el Evangelio no pueden nunca alcanzar la plenitud de sus más genuinos anhelos de humanización.

Pero el pasaje de la Gaudium et spes continúa: «el hombre no puede encontrarse plenamente a sí mismo sino en la donación sincera de sí mismo». Y es aquí que aparece el fundamento antropológico de lo que hemos denominado dinamismo de encuentro como esencial a toda cultura en cuanto cultura. Si la cultura no se despliega en lazos de solidaridad, de reconciliación, de verdadero amor cristiano, entonces no consigue promover un auténtico proceso de humanización.

En nuestra cultura llamada postmoderna, la ilusión de que el hombre podría realizarse a sí mismo desencadenando procesos narcisistas, relativistas o individualistas, no es sino una señal de hasta qué punto el Evangelio del Amor se torna también indispensable para rescatar los auténticos dinamismos de encuentro y de comunión que caracterizan el sentido originario de toda cultura.

En la IV Asamblea General del Episcopado Latinoamericano se intuyó esta necesidad, proponiéndose como horizonte para los próximos años la configuración de una cultura de la reconciliación y de la solidaridad (Santo Domingo, nº 77). Ese horizonte que, por diversas razones, apela de un modo particular en nuestras tierras latinoamericanas, podría orientar una pastoral más amplia que salvaguarde a la cultura —en uno de sus dinamismos esenciales, el del encuentro— de las múltiples fragmentaciones, teóricas y prácticas, que amenazan, no simplemente una u otra cultura particular, sino la posibilidad antropológica misma de la configuración cultural en cuanto tal.

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