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CONFÉRENCE DE PRESSE DE PRÉSENTATION 
DU JUBILÉ DES FAMILLES 

 
(14-15 OCTOBRE 2000) 


3 octobre 2000

 

INTERVENTION DE S.EM. LE CARD. ALFONSO LÓPEZ TRUJILLO

Le thème choisi par le Saint-Père pour la célébration du Jubilé des Familles et la IIIème Rencontre mondiale des Familles, est:  Les enfants, printemps de la famille et de la société.

Depuis le début, en ce qui concerne ce grand Jubilé, nous nous sommes efforcés de tout fonder sur le mystère du Sauveur, né à Bethléem, dans une famille, celle de Nazareth, qui a son centre dans l'Enfant Jésus, dans le "Divino Niño", comme il est appelé et loué chez nous, en Amérique latine, avec une joie chargée d'espérance qui est précisément celle de Noël. Voilà pourquoi nous avons préparé comme affiche l'icône de Noël, qui est également imprimée sur le foulard que porteront les familles les samedi 14 et dimanche 15 octobre, comme un souvenir, mieux encore, comme un message, qu'ils pourront ensuite accrocher dans leur foyer, tel un drapeau d'espérance.

Nous voudrions qu'il s'agisse véritablement d'un Message de foi et d'espérance à travers les différentes étapes de ce Jubilé:  le Congrès théologique et pastoral, la Via Crucis, le Concert des Pueri Cantores de Vienne, les célébrations du samedi matin dans les grandes Basiliques et dans les diverses églises de Rome, les témoignages et les expressions artistiques et festives du samedi après-midi, la célébration du dimanche, au cours de laquelle le Pape bénira des mariages. Les moments les plus riches de signification seront ces deux derniers, en présence du Saint-Père; les familles du monde entier attendront la parole pleine de vérité du Successeur de Pierre. C'est la vérité du Christ qui interpelle, atteint le coeur et libère; c'est la proclamation de la vérité de la famille, de l'homme, sans lesquelles l'humanité chemine dans les ténèbres. "Voilà pourquoi - écrit le Pape - l'Eglise ne se lasse jamais d'enseigner cette vérité [...]. L'Eglise est convaincue de devoir demeurer absolument fidèle à la vérité sur l'amour humain:  s'il en était autrement, elle se trahirait" (Lettre aux Familles Gratissimam sane, n. 11).

Même si nos rencontres sont récentes, la première à Rome, en 1994, très encourageante, et la seconde à Rio de Janeiro, en 1997, qui dépassa largement les deux millions de participants, nous pouvons dire que ces moments forts et expressifs représentent une source abondante d'animation, d'énergies nouvelles et d'engagements significatifs, un enrichissement pastoral très positif, particulièrement pour la pastorale des familles et de la vie qui sont si étroitement liées et qui sont la raison d'être de notre Conseil pontifical créé par le Saint-Père. Il s'agit donc d'une occasion de transmettre un message qui touche la famille humaine et pas seulement les catholiques, car la famille, le mariage et la vie représentent de grandes causes et engagements pour tous, croyants et non-croyants. Ils ne sont pas l'apanage exclusif de l'Eglise, mais de toute l'humanité. Certes, notre foi est source d'illumination, d'inspirations, d'énergies et de grâces qui accroissent la responsabilité des chrétiens. A l'entrée de l'imposant Dôme de Ferrare, il y a deux sculptures:  un homme qui soutient avec une main le poids de la Cathédrale monumentale, qui est la raison, et l'autre sculpture qui soutient, plus fermement, avec les deux mains, la raison et la foi. Nous sommes ainsi tous invités à apporter de façon responsable, dans les diverses situations, cette unique vérité de la famille et de la vie sans lesquelles l'homme n'aura pas d'avenir digne, et, pour utiliser une expression forte de Romano Guardini, l'homme serait inhumain. Le Saint-Père, dans son service extraordinaire pour la famille et la vie, a promu cette cause, qui pour l'Eglise, occupe la première place au plus haut niveau en faveur de toute l'humanité.

Le thème de la Rencontre, ainsi lié au mystère de l'Incarnation, Les enfants, printemps, représente un moment privilégié de réflexion, de contemplation, de conversion, de semence et de récolte, le printemps.

Mais l'objection suivante pourrait s'élever presque spontanément:  est-il possible de parler de printemps, de floraison, de chants, de joie, et donc d'espérance, lorsque la situation de tant d'enfants dans le monde conduirait plutôt à admettre avec honte et avec l'amertume de la défaite, qu'il s'agit d'un hiver rude, prolongé, et même cruel? Comment nier le vide immense dans le coeur de l'homme, à cause de son égoïsme, de son manque de tendresse, de responsabilité, dans un panorama qui nous fournit des informations bouleversantes?

Dans la publication du Conseil pontifical pour la Famille, pour contribuer à une vision globale de ce thème, "Les enfants:  don précieux pour la famille et pour la société", à caractère général, j'ai recueilli certaines informations qui montrent avec évidence ce naufrage dramatique, pour employer l'expression d'un écrivain, Hans Blumenberg, naufrage de la confusion d'un "monde sans frein" (Anthony Giddens). "Nous aimerions - dit-il - connaître la vague qui nous emporte à la dérive sur l'océan; sauf que cette vague, c'est nous". Déjà, le martyr du totalitarisme nazi, Dietrich Bonhoeffer, écrivait à propos de cette décadence humaine:  "Etant donné qu'il n'existe rien de durable, il manque ce fondement de la vie historique, c'est-à-dire la confiance sous toutes ses formes. Et, étant donné que l'on a pas confiance dans la vérité, on la remplace par le sophisme et la propagande".

Dans la Lettre aux Familles, le Saint-Père écrit:  "Qui pourrait nier que notre époque est une époque de grave crise qui se manifeste en premier lieu sous la forme d'une profonde "crise de la vérité". Crise de la vérité, cela veut dire d'abord crise des concepts. Les termes "amour", "liberté", "don désintéressé", et même ceux de "personne", de "droits de la personne" expriment-ils vraiment ce que par nature ils signifient?" (Gratissimam sane, n. 13). La dénonciation de Jean-Paul II indique le vide anthropologique dans une civilisation des "choses" et non des "personnes", une civilisation dans laquelle les personnes s'utilisent comme des choses (cf. Gratissimam sane, n. 13).

Il est donc vrai que sous divers aspects, cet hiver n'est pas terminé, et semble devenir plus rigoureux. C'est l'hiver du crime dû au manque de respect de la vie humaine qui naît, au crime de l'avortement (précisément aujourd'hui, où les journaux nous informent que la pillule RU486 sera mise en vente aux Etats-Unis et également en Italie), à la terrible guerre chimique (cf. Centesimus annus, n. 39), dont parlait Paul VI, comme peine capitale pour les innocents. Les peuples qui assassinent les enfants, n'ont pas droit à l'avenir, proclamait le Pape Jean-Paul II en Pologne. On parle d'hiver démographique car les cercueils sont plus nombreux que les berceaux; hiver et maladie de l'esprit qui font de l'enfant conçu, du nouveau-né, de l'embryon humain, qui est une personne, un instrument d'expérimentation et de ses organes, des biens sur un marché. D'autre part, le débat sur les cellules-souches est vif et actuel. L'être humain, les enfants utilisés non pas comme personnes mais comme choses! Hiver dans la famille, qui permet tout cela, et où le fleuve de séparations dont sont victimes les enfants ne semble pas s'arrêter. Il est presque ironique qu'au Royaume-Uni, l'on prépare les enfants au divorce de leurs parents. Hiver terrible des adoptions accordées aux couples de fait, même lorsque les soit-disant couples ne possèdent pas les qualités morales pour pouvoir éduquer de façon humaine leurs enfants et de les respecter dans leur "Bien supérieur". Hiver de la pauvreté, aggravée par les nombreuses formes d'idéologie et de mondialisation, qui oublie les pauvres et les soumet à tant de formes d'exploitation.

Déjà, Jean-Paul II dénonçait dans la Lettre aux Enfants diverses formes d'inhumanité, faisant également référence à l'exploitation, sous sa pire forme, des enfants, qui avilit les auteurs. Ainsi, le Saint-Père écrit dans la Lettre aux Enfants:  "Mes chers amis, dans l'histoire de l'Enfant de Bethleem, vous pouvez reconnaître le sort des enfants du monde entier. S'il est vrai qu'un enfant représente non seulement la joie de ses parents, mais aussi celle de l'Eglise et de la société tout entière, il est vrai également qu'à notre époque, il y a malheureusement beaucoup d'enfants qui, en divers endroits du monde, souffrent et sont menacés:  ils endurent la faim et la misère, ils meurent de maladie et de malnutrition, ils tombent victimes des guerres, ils sont abandonnés par leurs parents et condamnés à rester sans toit, privés de la chaleur de leur famille; ils subissent de nombreuses formes de violence et d'oppression de la part des adultes. Comment est-il possible de rester indifférent face à la souffrance de tant d'enfants, surtout quand, d'une manière ou d'une autre, elle est provoquée par les adultes?" (Lettre du Pape aux Enfants, ORLF n. 51 du 20 décembre 1994). Il s'agit d'une liste indicative, à laquelle peuvent s'ajouter d'autres délits qui vont de soi:  les enfants victimes d'enlèvement, les enfants-soldats, etc. Il s'agit d'une humanité qui "vide la vie, "tue la vie", "élimine la vie", observe Ernesto Sabato dans son récent livre:  "La Resistenza".

Face à ces phénomènes également, nous sommes convaincus qu'il est possible de parler d'un printemps que Dieu nous offre et auquel il nous invite, au moyen de l'Eglise, à collaborer.
Il s'agit d'un printemps qui viendra, qui est en train de venir, dont nous avons la certitude dans l'Enfant Jésus, dans le "puer natus" à Bethleem, qui est le Seigneur de la vie. C'est Jésus-Christ qui va à la rencontre des époux, dans le mystère de l'Alliance, dans leur don réciproque. "Elle trouve sa nature communautaire, ou plutôt son caractère de "communion" dans la communion fondamentale des époux, qui se prolonge avec les enfants" (Gratissimam sane, n. 8). C'est là, dans la famille, qu'est semé ce printemps lorsque l'on offre aux enfants qui sont "fils", aimés en premier lieu par Dieu, le milieu propice, humain, pour croître comme image de Dieu.

Aucune autre institution ne peut substituer la famille dans sa mission d'éducation des enfants! Reconnu par tant d'experts, cela a été indiqué clairement par le Pape:  "Car, plus que tout autre réalité humaine, la famille est le milieu dans lequel l'homme peut exister "pour lui-même" par le don désintéressé de soi. C'est pourquoi elle reste une institution sociale qu'on ne peut pas et qu'on ne doit pas remplacer:  elle est le "sanctuaire de la vie"" (Gratissimam sane, n. 11).

Il faudrait suivre de près tout ce que Jean-Paul II a dit en parlant de la "généalogie"  de  la  personne:   "Dans  la constitution personnelle de chacun est inscrite la volonté de Dieu" (Gratissimam sane, n. 9). Chaque personne, chaque enfant, est aimé et voulu personnellement par Dieu! Tous, "y compris ceux qui naissent avec des maladies ou des infirmités" (Ibid.).

Printemps lorsque l'Eglise, coeur du monde, porte et proclame avec force la dignité sacrée de tout enfant et les devoirs et les droits de la famille. Printemps lorsque les peuples, les gouvernants, les législateurs décident de croire dans la vérité de l'homme, à le défendre, à le respecter et lorsque les lois iniques et criminelles sont remplacées par des lois au service de la famille, et des enfants, afin que le bien le plus précieux, les enfants, soit aimé, défendu, respecté comme un trésor, avenir de l'humanité. Les conjoints voient dans les enfants "le couronnement de leur amour réciproque. Ils les désirent pour la famille, comme un don très précieux" (Gratissimam sane, n. 9).

Il faut rappeler que cette expression est tirée de Gaudium et spes (n. 18). Voilà pourquoi, selon Gaudium et spes, la "valorisation de la dignité du mariage et de la famille" est "un devoir de l'Eglise et de l'Etat" (Gratissimam sane, n. 11).

Ce printemps n'est pas du domaine de la rhétorique. Nous pouvons et nous devons même en voir les signes partout:  dans l'engagement pastoral de l'Eglise, dans les Conférences épiscopales, dans les diocèses et paroisses, dans les Mouvements apostoliques, notamment ceux à la dynamique croissante en faveur de la famille, ainsi que dans les Mouvements pour la Vie. Le Conseil pontifical pour la Famille a préparé ces célébrations dans le monde, à travers des catéchèses traduites dans de nombreuses langues pour réfléchir sur ce thème.

Nous voyons dans tant de lieux se former le visage d'une nouvelle humanité dans les foyers, dans les Eglises domestiques et dans les Sanctuaires de la vie.

Chers journalistes, nous vous invitons à nouveau à poursuivre votre généreuse collaboration à cette très noble et urgente cause qui explique l'importance historique de la III Rencontre mondiale. Nous sommes pleinement persuadés qu'"en réalité, le mystère de l'homme ne s'éclaire vraiment que dans le mystère du Verbe incarné" (Gaudium et spes, n. 22) et que "par son incarnation, le Fils de Dieu (né dans la famille de Nazareth)  s'est  uni  d'une  certaine façon à  tout  homme"  (Gaudium  et spes, n. 22). De l'Eglise et pour toute l'humanité, de la place Saint-Pierre, le Successeur de Pierre, proclamera de nouveau que nous croyons dans la famille, que nous croyons dans l'homme, dans les enfants, merveilleux don de Dieu. Ainsi, avec le Concile, "on peut légitimement penser que l'avenir est entre les mains de ceux qui auront su donner aux générations de demain des raisons de vivre et d'espérer" (Gaudium et spes, n. 31).

 

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