The Holy See
back up
Search
Conseil Pontifical pour la Pastorale des Migrants et des Personnes en déplacement
 

XVII Session Plénière

Vatican 15 - 17 mai 2006

Thème :

 « Migration et déplacement à partir et vers les pays à majorité islamique » 

Document final  

LÂ’événement 

Signe des temps, le phénomène de la mobilité humaine pose de nombreux problèmes, notamment religieux et spirituels, en plus des problèmes sociaux, économiques et politiques. Quand il sÂ’agit de « Migration et déplacement à partir et vers les pays à majorité islamique », la complexité, lÂ’actualité et lÂ’importance du sujet se présentent de plus aux yeux de tous. CÂ’est sur cette problématique quÂ’a porté la XVIIème Session Plénière du Conseil Pontifical pour la Pastorale des Migrants et des Personnes en déplacement, avec la participation des membres et des consulteurs du Dicastère, ainsi que dÂ’agents pastoraux et dÂ’experts. 

En saluant les participants, au Vatican, Sa Sainteté le Pape Benoît XVI a affirmé que le dialogue interreligieux fait partie intégrante de lÂ’engagement ecclésial au service de lÂ’humanité aujourdÂ’hui et constitue presque le « pain quotidien » de ceux qui Âœuvrent au contact des migrants, des réfugiés et des itinérants. « Chaque chrétien – a ajouté le Saint-Père – est appelé à ouvrir ses bras et son coeur à chaque personne, – en particulier aux petits et aux pauvres – quel que soit le pays dont elle provient, en laissant ensuite aux autorités responsables de la vie publique le soin d'établir dans ce domaine les lois considérées comme opportunes pour une saine coexistence », dans le respect des droits humains de tous. Le Pape Benoît XVI a ainsi conclu : « Il faut bien sûr espérer que les chrétiens qui émigrent vers les pays à majorité islamique y trouvent lÂ’accueil et le respect de leur identité religieuse ». Il a également qualifié la pastorale pour les migrants et les personnes en déplacement de « frontière significative de la nouvelle évangélisation dans lÂ’univers actuel mondialisé ». 

Dans la lignée de ce quÂ’a affirmé le Saint-Père, le Président du Dicastère, le Cardinal Renato Raffaele Martino, introduisant les travaux avec un discours intitulé «Le thème de la Plénière, à partir de nos documents et congrès récents » , a relevé que pour résoudre positivement les problèmes soulevés par le nombre toujours croissant de migrants et de personnes en déplacement à partir et vers les pays à majorité islamique, un dialogue interreligieux franc et loyal, un témoignage vécu de charité et dÂ’accueil, le respect scrupuleux de la liberté religieuse, une juste intégration sociale et culturelle, en observant les lois civiles en vigueur, et une réciprocité correctement comprise sont nécessaires. Parmi les points marquants du discours du Cardinal, soulignons le souhait que, non seulement du côté catholique, mais aussi du côté musulman, il y ait « une prise de conscience toujours plus grande quÂ’on ne peut remettre en question lÂ’exercice des libertés fondamentales, des droits inviolables de la personne, de lÂ’égale dignité de lÂ’homme et de la femme, du principe démocratique du gouvernement de la société et dÂ’une saine laïcité de lÂ’État » (Erga migrantes caritas Christi – que lÂ’on désignera par EMCC – 66). 

Pour sa part, le Secrétaire-Archevêque du Conseil Pontifical, S. Exc. Mgr Agostino Marchetto, dans son intervention intitulée « Les changements, la pensée et lÂ’Âœuvre du Conseil Pontifical depuis la dernière Session Plénière », a souligné que parmi les objectifs de cette réunion figurait celui de convaincre de lÂ’importance dÂ’un vrai dialogue, au rayonnement toujours plus vaste, permettant de tirer des conclusions concrètes pour garantir lÂ’accueil et la compréhension de ceux qui vivent une mobilité humaine à partir et vers les pays à majorité islamique. A ces personnes, ou groupes, il est par ailleurs demandé dÂ’offrir leur contribution loyale et généreuse au bien de la communauté qui les accueille et à lÂ’Eglise locale elle-même. Mgr Marchetto a ensuite ajouté que les communautés les plus stables sont invitées à comprendre les besoins particuliers des « hôtes » ou des immigrés, en développant un grand sens de solidarité. De la sorte, tous ensemble, habitants du lieu et nouveaux arrivants, peuvent contribuer à réaliser une culture de coexistence, de compréhension et de paix, dans le respect des droits humains de chacun. Partant dÂ’une analyse plus critique des événements historiques qui conditionnent aujourdÂ’hui encore la mobilité, le Secrétaire du Dicastère a attesté quÂ’il est possible pour les Eglises (a qua et ad quam) dÂ’apporter leur contribution indispensable à la société, pour un juste règlement de la mobilité et pour la protection des personnes qui y sont impliquées, et à tous. Avec pour fondements le respect réciproque et la justice dans les traitements juridico-religieux. « La réciprocité est aussi une attitude du cÂœur et de lÂ’esprit qui permet de vivre ensemble et en étant partout à parité de droits et de devoirs » (EMCC 64). 

LÂ’après-midi du premier jour, dans son intervention, le P. Maurice Borrmans, M. Afr., professeur émérite de lÂ’Institut Pontifical dÂ’Etudes Arabes et Islamiques, a fourni un cadre complet (numériquement et géographiquement) et détaillé (statistiquement) des dimensions  actuelles du « Â“ vivre ensemble Â” dans les pays de population musulmane majoritaire et de présences chrétiennes minoritaires, anciennes ou récentes ». Selon le P. Borrmans, à lÂ’avenir, la possibilité de ce « vivre ensemble » est rendue très précaire par les heurts entre diverses factions et par les attentats terroristes de ces dernières années. De fait – a-t-il affirmé – « ce sont toujours les minoritaires qui risquent de devenir des “ boucs émissaires ”, suite aux généralisations faciles et aux amalgames simplistes qui redonnent vie aux vieux préjugés et aux rêves de croisades ou de jihâd ». Le monde islamique nÂ’est pas monolithique. La mobilité humaine a renouvelé les problématiques du « vivre ensemble ». Il en résulte un rapport original et parfois contradictoire entre religion, culture, Etat et ordonnancement juridique, dÂ’autant plus que dans lÂ’accueil de la modernité, de la démocratie et de la laïcité chaque pays réalise une synthèse totalement contextualisée. 

Le Secrétaire du Conseil Pontifical pour le Dialogue Interreligieux, S. Exc. Mgr Pier Luigi Celata, qui est intervenu ensuite, a fait observer que « le phénomène croissant de la mobilité humaine continue de déterminer le dépassement des frontières géopolitiques qui constituaient autrefois, dans bien des cas, les lignes de séparation entre le monde chrétien et le monde islamique ». Pour parvenir à une coexistence pacifique, lÂ’archevêque a rappelé cette affirmation du Pape Benoît XVI : « Le dialogue est une nécessité vitale », surtout pour les chrétiens, qui sont appelés à aimer le prochain, avec la force et à lÂ’exemple du Christ. Se référant à lÂ’enseignement du Saint-Père dans son discours adressé aux musulmans à Cologne lÂ’an dernier, Mgr Celata a mis en lumière les défis communs auxquels les chrétiens sont appelés à apporter une réponse. Parmi ceux-ci figure, avant tout, le terrorisme. Pour le combattre, il faut parvenir à « extirper des cÂœurs le sentiment de rancÂœur, à combattre toute forme dÂ’intolérance et à nous opposer à toute manifestation de violence ». Il a ensuite souligné lÂ’importance de la collaboration entre chrétiens et musulmans pour garantir les valeurs qui portent atteinte à la dignité de la personne humaine, comme la liberté religieuse, le respect réciproque, la solidarité et la paix. Se référant ensuite aux tensions héritées du passé, le Secrétaire du Conseil Pontifical pour le Dialogue Interreligieux a invité à faire nôtre la volonté exprimée par le Saint-Père de « rechercher des voies de conciliation et apprendre à vivre en respectant chacun lÂ’identité de lÂ’autre ». En outre, dans le relativisme cognitif et moral et dans le sécularisme immanentiste, si diffus aujourdÂ’hui dans nos sociétés, Mgr Celata a vu un défi, pour les chrétiens et les musulmans, à témoigner ensemble du transcendant. Par ailleurs, face à la difficulté, assez répandue parmi les musulmans, de comprendre et de vivre le principe dÂ’une saine laïcité, ainsi quÂ’en considération de la nécessité de leur intégration correcte dans les sociétés occidentales, nous sommes interpellés en tant que chrétiens et en tant que Â‘citoyensÂ’ « pour leur offrir, grâce à une Âœuvre adéquate de dialogue et dans une attitude de respectueuse amitié, le témoignage de notre expérience ». 

Au cours de la deuxième journée de la Plénière, affrontant le thème des migrations à partir des pays à majorité islamique, le Secrétaire Général du Conseil des Conférences Episcopales Européennes, Mgr Aldo Giordano, au nom du P. Hans Vöcking, M. Afr., empêché de participer à la Session, a présenté la situation des immigrés musulmans en Europe. Leur présence sÂ’est en effet accrue fortement, en contribuant à rendre la société européenne multi-religieuse. Le point fort auquel les musulmans sont confrontés dans la diaspora européenne est celui de la modernité et de la post-modernité. Bien sûr, certains musulmans entrevoient la voie dÂ’une « inculturation » dans la société européenne (« Islam des lumières »), mais la majorité considèrent en termes très problématiques la culture européenne et aspirent à un retour au modèle médiéval de lÂ’islam, avec un lien fort entre la religion, la société et la politique. Selon le P. Vöcking, pour trouver un chemin dÂ’intégration, la garantie de la liberté religieuse apparaît importante, de même que lÂ’indépendance par rapport aux financements étrangers, la création de structures pour la formation des responsables, lÂ’attention à lÂ’éducation civique, à la démocratie et aux droits de lÂ’homme, le dialogue entre les religions, ainsi quÂ’une information correcte dans les médias. De la sorte – a-t-il conclu – on trouvera la voie dÂ’une interprétation de lÂ’islam qui tienne compte des valeurs plus que des lois, des choix personnels plus que de la nostalgie dÂ’un « âge dÂ’or ». 

Au Brunei, la présence des migrants représente pour lÂ’Eglise locale un défi pour exprimer sa solidarité de façon tangible et fraternelle, et – a souligné S. Exc. Mgr Cornelius Sim, Vicaire Apostolique – même lÂ’Eglise, répondant à leurs besoins spirituels, garantit un service encore plus nécessaire que lÂ’aide matérielle. « Les travailleurs migrants trouvent dans lÂ’Eglise une voie pour servir leurs compagnons catholiques, enrichissant ainsi lÂ’expérience mutuelle du fait dÂ’être Eglise » et participant à la promotion culturelle et économique du pays. 

Intervenant sur lÂ’accueil de nos jours dÂ’un grand nombre de réfugiés musulmans, le prof. Stefano Zamagni, Président de la Commission Catholique Internationale pour les Migrations, a fait remarquer en revanche quÂ’ils apportent avec eux des conceptions de vie et des croyances religieuses profondément différentes de celles des autochtones. Il a donc invité à éviter les deux écueils qui entravent leur insertion harmonieuse dans le tissu social, à savoir le syncrétisme relativiste – pour lequel toutes les religions se vaudraient – et lÂ’assimiliationnisme plus ou moins forcé. Il a ensuite incité à élaborer un modèle de dialogue interculturel pour proportionner la réponse, notamment en ressources publiques, au degré dÂ’« acceptabilité » (« morale conséquentielle ») de leurs requêtes. 

LÂ’archevêque de Bobo-Dioulasso, au Burkina Faso, S. Exc. Mgr Anselme T. Sanon – dans lÂ’impossibilité dÂ’être présent – a envoyé son exposé sur le thème de lÂ’accueil des réfugiés chrétiens dans les pays dÂ’Afrique de lÂ’Ouest à majorité islamique. Il a été lu par S. Exc. Mgr Béchara Raï, évêque de Jbeil, au Liban. LÂ’intervention a mis en évidence et synthétisé, dans une perspective structurée, les diverses situations qui caractérisent ces entrées. En outre, soulignant le rôle important qui revient à lÂ’Eglise dans ce contexte, on a offert une gamme de réponses pastorales à apporter, notamment la création, en particulier dans les diocèses, dÂ’une aumônerie pour les réfugiés, afin de chercher à répondre à leurs besoins. En même temps, on a sollicité un engagement responsable de la part des Institutions internationales et une Âœuvre précieuse de sensibilisation des moyens de communication. 

Le Dr Michael Galligan-Stierle, Secrétaire adjoint pour la Pastorale Universitaire de la Conférence épiscopale des Etats-Unis dÂ’Amérique, a présenté la situation des étudiants étrangers (internationaux) aux E-UA qui proviennent des pays islamiques. Il a brièvement résumé lÂ’histoire des multiples rencontres, des consultations et des déclarations conjointes dans le dialogue entre musulmans et catholiques, à partir de 1987. Il a ensuite souligné les données statistiques relatives aux 16.300.000 étudiants de son pays, dont 591.188 sont étrangers (internationaux). Il a ensuite indiqué certaines des principales préoccupations qui concernent les musulmans, avec une considération prioritaire pour le lieu où prier sur les Campus, mentionnant un grand nombre de programmes offerts à la population estudiantine musulmane, grâce aux réponses à un questionnaire envoyé aux 1200 aumôniers de la pastorale universitaire. Enfin, il a recommandé que tous les projets pastoraux pour les étudiants étrangers (internationaux) soient une expression de respect, de dialogue, dÂ’ouverture culturelle et de liberté. 

Illustrant la situation des étudiants étrangers (internationaux) en Algérie, dont le nombre est en augmentation, le P. Bernard Lapize de Salée, S.J., a rapporté que là-bas lÂ’Eglise considère leur présence comme une grande grâce et un excellent témoignage dans lÂ’Algérie musulmane. De fait, même si les musulmans sont les plus nombreux, beaucoup dÂ’étudiants sont chrétiens, en provenance essentiellement des pays francophones dÂ’Afrique de lÂ’ouest. Ils participent activement à la vie de lÂ’Eglise et constituent lÂ’élément le plus jeune des communautés chrétiennes dans le pays. En outre, ils offrent leur expérience directe avec la jeunesse algérienne musulmane, avec laquelle ils sont en contact dans les cités universitaires. Le P. Lapize de Salée a conclu quÂ’une collaboration – ou au moins des contacts - serait souhaitable entre les Eglises des pays dÂ’origine et celles du Maghreb (Afrique du nord), collaboration qui existe déjà en partie. 

Passant aux personnes en déplacement à partir et vers les pays à majorité islamique, sur la problématique des Roms, Mme Hannelore Valier, de lÂ’Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe, a relevé que la majeure partie dÂ’entre eux, si lÂ’on exclut lÂ’Inde, vit en Europe centrale et en Europe de lÂ’est. Bien quÂ’ils soient communément associés au nomadisme, ils vivent de façon stable dans des pays européens depuis des centaines dÂ’années. Parmi les problèmes auxquels ils doivent faire face il y a la marginalisation, la xénophobie et le racisme, ainsi que le bas niveau dÂ’instruction, le chômage élevé (de 50% à 90%), lÂ’assistance santé insuffisante et les conditions de logement très pauvres. Malgré tout cela, la volonté de survivre a constitué lÂ’élan qui a guidé les Roms au cours des siècles. Quoi quÂ’il en soit, la communauté internationale travaille actuellement à améliorer leur intégration sociale, dans le respect de leur identité culturelle, en se basant sur le principe dÂ’un traitement équitable. Il est donc nécessaire de renforcer la maturité des sociétés démocratiques et leur capacité de comprendre et de respecter la diversité sociale, culturelle et religieuse des Tsiganes. 

Dans le secteur de lÂ’Apostolat de la Mer, le diacre Ricardo Rodriguez Martos, de Barcelone (Espagne), a rapporté que cette action pastorale offre des services fondamentalement égaux pour tous les marins, quelle que soit leur religion. Selon les calculs statistiques, 18% des marins marchands seraient musulmans, soit environ 200.000 personnes. En général, ils sont très religieux et pratiquants. Les musulmans ne demandent cependant pas dÂ’assistance spirituelle aux chrétiens et, si elle leur est proposée, (par exemple en fournissant un contact avec une mosquée), ils la déclinent généralement. Ils apprécient toutefois une aide matérielle – lorsquÂ’elle est nécessaire – et les témoignages de charité et dÂ’amitié. Ces dernières années, lÂ’Apostolat de la Mer a sollicité, en vain, la coopération des mosquées de Barcelone. Toutefois, le Conseil Islamique de la ville sÂ’est récemment montré favorable à une collaboration qui conduira lÂ’Apostolat de la Mer à orienter vers leur communauté locale les marins musulmans qui demandent une assistance. 

Pour sa part, le Rév. P. Xavier Pinto, C.Ss.R., Directeur national de lÂ’Apostolat de la Mer en Inde, a déclaré que 70% des marins qui visitent là-bas les centres Stella Maris sont Philippins, tandis que les Indiens, les Bangladais et les Pakistanais – dans lÂ’ordre – se partagent la majeure partie des 30% restants. Selon le conférencier, pour de nombreux musulmans Jésus est un exemple de sainteté et de piété, qui aurait vécu lÂ’Islam véritable. Ce serait le point de départ permettant une interaction avec les musulmans et un travail ensemble. Il a ajouté que pour pouvoir exercer lÂ’apostolat pour les marins en navigation et dans les ports, il est avant tout nécessaire de respecter les lois du pays dÂ’accueil et de réussir à intégrer lÂ’Apostolat de la Mer dans la pastorale dÂ’ensemble de lÂ’Eglise locale, dans les pays à majorité islamique aussi. 

SÂœur Patricia Ebegbulem, SSL, sÂ’intéressant à lÂ’assistance des « femmes de la rue » nigérianes, aussi bien dans leur pays quÂ’en terre étrangère, a expliqué que la plupart dÂ’entre elles sÂ’orientent vers le triste commerce de leur corps pour des raisons de pauvreté et de discrimination. LÂ’Eglise catholique est à lÂ’avant-garde dans la réhabilitation et la promotion de la dignité des femmes et de la féminité (avec citation de lÂ’Exhortation apostolique de Jean-Paul II Ecclesia in Africa, n° 121). SÂœur Patricia a proposé que lÂ’année 2010 soit proclamée année de la Dignité des Femmes et a invité à soutenir cette proposition. 

Le P. Martin McDermott, S.J., qui se référait au Liban, a relevé quÂ’actuellement il existe deux sortes de « femmes de la rue » dans le pays : les anciennes domestiques à la merci de leur « protecteurs », aussi bien musulmans que chrétiens, et celles quÂ’on appelle les artistes. La prostitution est théoriquement interdite, mais en pratique elle est réglementée. Une fois parvenues au Liban, ces femmes se trouvent dans lÂ’impossibilité de changer de vie et même de se déplacer à lÂ’intérieur du pays, avec un mécanisme qui les prive de leurs droits, de leurs papiers et donc de liberté. 

Dans son intervention, Mme Thérèse Farra, Libanaise, a désigné les pèlerinages « partagés » Â– cÂ’est-à-dire faits ensemble – comprenant chrétiens et musulmans, comme une occasion de tisser des amitiés durables et dÂ’établir un réseau de relations constructives. LÂ’organisation « Darb Maryam » (Le chemin de Marie), qui travaille dans ce domaine, se propose dÂ’offrir un milieu de rencontres pour pratiquer le « dialogue de vie » et encourager la recherche des valeurs communes. Les participants y découvrent la religion des autres, en cheminant et en priant ensemble pour la paix, côte à côte, en essayant de la construire entre eux et de la répandre autour dÂ’eux. 

Mgr Liberio Andreatta, Administrateur délégué de lÂ’« Opera Romana Pellegrinaggi », affrontant le thème des pèlerinages catholiques dans les pays à majorité islamique, a fait remarquer que la rencontre avec les musulmans est assez fréquente à différentes étapes du pèlerinage. Ces occasions permettent de nouer des conversations, dialogues, parfois même des discussions, qui ne conduisent cependant pas à un rapprochement des positions religieuses ou des idées, tant les convictions sont profondément enracinées. En outre, il est possible, et cÂ’est même un devoir, que les chrétiens en pèlerinage redécouvrent leur identité de disciples de Jésus-Christ, engagés dans la « mission ad gentes ». Il est certain que lÂ’archétype du pèlerinage réside dans le fait dÂ’aller à la recherche du visage du Christ en la personne des frères. 

Enfin, dans le domaine de lÂ’aviation civile, le P. Paschal Ryan, aumônier de lÂ’aéroport de Heathrow, à Londres, a fait observer quÂ’en raison de la mondialisation les aéroports sont devenus des carrefours de la civilisation contemporaine. Ils ne reflètent pas seulement leur communauté locale, mais aussi la communauté globale. Les aéroports voient également transiter de nombreux croyants de diverses religions, qui voyagent aussi pour motifs religieux, dans la mesure où la notion de pèlerinage est commune aux chrétiens, aux juifs, aux hindous, aux musulmans et à dÂ’autres. En outre, dans lÂ’islam, les croyants sont fortement invités à se rendre dans les sanctuaires liés au prophète Muhammad, au moins une fois dans leur vie. Par ailleurs, 65/70.000 personnes travaillent à lÂ’aéroport de Heathrow. La caractéristique des aéroports réside certainement dans la nature fugace de tant de rencontres entre les personnes, puisque des millions de passagers y transitent rapidement chaque année. Malgré cela, cette situation insolite permet de rencontrer lÂ’étranger et de comprendre que les contacts entre chrétiens et croyants dÂ’autres religions peuvent mener à une collaboration féconde. En outre, en voyant des hommes et des femmes de diverses religions, races et classes sociales travailler ensemble, ou bien en partageant le même espace de prière multi-religieuse, on peut imaginer comment pourrait, ou mieux, comment devrait être le monde. 

Au cours de la journée finale de la Plénière, S. Exc. Mgr Giovanni Lajolo, Secrétaire pour les Rapports avec les Etats de la Secrétairerie dÂ’Etat, a affirmé quÂ’au-delà des craintes et des perplexités, une gestion prudente et transparente des migrations pourrait être profitable aussi bien aux pays dÂ’origine quÂ’à ceux de destination. Il a abordé le thème débattu dans différentes nations européennes, qui craignent dÂ’ouvrir leur territoire tout en ayant des besoins chroniques de main dÂ’Âœuvre jeune, flexible et à bon marché, et dont lÂ’embauche semble nÂ’avoir que des retombées limitées sur lÂ’emploi des travailleurs autochtones. « LÂ’Eglise – a dit lÂ’archevêque – conformément à la nature catholique de sa mission et à son choix préférentiel pour les pauvres, est en faveur de lÂ’affirmation du droit dÂ’émigrer et de la tutelle des droits des migrants. Cela nÂ’ôte en rien aux hommes politiques le grave devoir de régler lÂ’importance et la forme des flux migratoires, de sorte que les immigrés puissent se sentir accueillis humainement avec dignité et que la population du pays qui les reçoit ne soit pas placée dans des conditions objectivement favorables au rejet, avec les conséquences néfastes pour les immigrés, ni même pour la culture humaine de la population dÂ’accueil et pour les rapports entre les peuples ». Remarquant que la religion constitue pour beaucoup de gens en provenance des pays à majorité islamique un élément de profonde identification, lÂ’archevêque a réaffirmé la nécessité dÂ’un respect rigoureux et réciproque de la liberté religieuse, impliquant la défense des minorités et de leurs droits humains. « Si de différentes parts – a relevé Mgr Lajolo – on invoque au moins la réciprocité du respect et des concessions (liberté de culte, construction de lieux de culte, Â…), toutefois ce concept, parmi de nombreux Etats de divers continents, semble pour lÂ’heure étranger en matière religieuse à une grande partie des pays musulmans, qui invoquent pour les citoyens à lÂ’étranger la plénitude des droits quÂ’ils ne reconnaissent pas, en revanche, aux migrants dÂ’autres religions sur leur propre territoire ». Selon Mgr Lajolo, le Saint-Siège continuera dÂ’affirmer sa ferme opposition à toute tentative dÂ’utiliser la religion pour justifier le terrorisme et la violence. Enfin, le Secrétaire pour les Rapports avec les Etats a évoqué le délicat problème de la protection des chrétiens en pays à majorité islamique, car lÂ’absence de cette protection est en train de pousser des milliers de fidèles à quitter leur patrie. 

Enfin, le Secrétaire de la Congrégation pour lÂ’Evangélisation des Peuples, S. Exc. Mgr Robert Sarah, après avoir tracé un profil des migrants en provenance dÂ’Afrique subsaharienne, a expliqué que les causes de leur exode étaient liées à lÂ’histoire, à la situation socio-politique, à des situations dramatiques dÂ’insécurité et de guerre, aux conditions économiques et à des phénomènes culturels comme la mondialisation. Par ailleurs, à la suite des guerres civiles dans certains pays, plus de 4 millions de personnes ont fui. Mgr Sarah a donc expliqué que lÂ’état chronique de pauvreté et dÂ’insécurité, qui maintient le continent africain dans un état de sous-développement permanent, influe négativement sur les personnes et les institutions, réduit les investissements étrangers, fait croître la criminalité, etc. Â… Retraçant ensuite le parcours que les migrants effectuent pour se rendre au Maghreb, il a qualifié de véritable chemin de croix la tragédie vécue par ces personnes, traitées à leur arrivée de façon humiliante et inhumaine. Après avoir mentionné les principaux problèmes que doivent affronter les migrants, Mgr Sarah a livré quelques solutions et perspectives. « LÂ’Eglise, en particulier celle dÂ’Afrique, a le devoir dÂ’assumer toujours plus intégralement le rôle du bon Samaritain ». Pour leur part, les chrétiens sont invités à jouer leur rôle à lÂ’égard des immigrés et des réfugiés, avec clarté et dévouement. Les Conférences épiscopales des pays de départ et dÂ’arrivée pourraient apporter leur contribution en aidant et en accompagnant ceux qui veulent émigrer en toute légalité. Une attention particulière devrait être accordée à lÂ’aide à lÂ’intégration, dans le respect de la culture, de la religion et des valeurs humaines fondamentales. Mgr Sarah a donc invité à encourager le dialogue social, interculturel, ainsi que le dialogue interreligieux. 

Au terme de ces interventions, les participants à la Plénière ont dialogué sur le thème qui leur était proposé cette année en vue de la rédaction de certaines conclusions et recommandations, et ont approuvé le texte qui suit.

 

Conclusions et Recommandations

Migrants musulmans dans les pays à majorité chrétienne

1)        A ce propos, on a observé une augmentation de lÂ’immigration des musulmans vers les pays européens et lÂ’Amérique du Nord, de vieille tradition chrétienne (cf. EMCC 59 et 65), en quête de travail ou de démocratie ou pour des raisons de regroupement familial.

2)        Ceci a fait apparaître lÂ’encouragement en faveur dÂ’une intégration (pas assimilation) des musulmans immigrés (cf. EMCC 2, 60-61).

3)        En conséquence, les catholiques en particulier sont appelés à être solidaires et ouverts au partage avec les immigrés musulmans, à la fois en connaissant mieux leur culture et leur religion et en témoignant de leurs valeurs chrétiennes, notamment dans la perspective dÂ’une nouvelle évangélisation, respectueuse – certes – de la liberté de conscience et de religion (cf. EMCC 59 et 69).

4)        Les chrétiens doivent donc approfondir leur identité (cf. EMCC 60) de disciples du Christ, en la témoignant dans la vie et en redécouvrant leur rôle dans cette nouvelle évangélisation (cf. EMCC 86-88).

5)        Il est donc apparu important dÂ’affirmer la nécessité du respect mutuel et de la solidarité humaine, dans un climat de paix, basé sur le caractère central de la personne humaine, de sa dignité et de ses droits-devoirs.

6)        Naturellement les droits de lÂ’homme et les libertés de chacun vont de pair avec ceux des autres personnes.

Dialogue

7)        Parmi les participants à la Plénière sÂ’est manifestée fortement la conscience de la nécessité dÂ’un dialogue authentique entre croyants de diverses religions et, en particulier, entre chrétiens et musulmans (cf. EMCC 69).

8)        Dans ce contexte, un rapport basé sur lÂ’« émulation spirituelle » a été considéré comme étant important.

9)        Ainsi, si le dialogue entre chrétiens et musulmans est partout nécessaire, il lÂ’est spécialement dans les sociétés occidentales pour y améliorer la connaissance réciproque, la compréhension, le respect mutuel et la paix.

10)      En tous les cas, alors quÂ’il est nécessaire dÂ’accueillir les immigrés musulmans en respectant leur liberté religieuse, il apparaît également indéniable quÂ’ils respectent lÂ’identité culturelle et religieuse des sociétés qui les accueille.

11)      En outre, lÂ’importance de savoir distinguer ce que ces sociétés peuvent tolérer ou non de la culture islamique est clairement ressorti, de même que ce qui doit être respecté ou partagé en ce qui concerne les croyants dÂ’autres religions (cf. EMCC 65 et 66), avec la possibilité de fournir des indications à cet égard, notamment aux hommes politiques, pour une juste formulation de la législation civile, dans le respect des compétences de chacun.

12)      Cela signifie quÂ’il faille aussi proposer un modèle de dialogue religieux qui ne soit pas une simple conversation, ou une simple écoute réciproque, mais qui parvienne à révéler réciproquement les profondes convictions spirituelles de chacun.

13)      Il est donc important dÂ’accompagner le partenaire du dialogue dans le processus de réflexion sur les dimensions éthiques et actuelles, et non seulement théologiques et religieuses, des conséquences des demandes faites à la société civile, dans le respect naturellement de la distinction entre le dialogue civil et le dialogue religieux.

14)      Etant donné lÂ’importance, réaffirmée, du principe de réciprocité (cf. EMCC 64) confirmé par le Saint-Père dans son discours aux participants à la Plénière, il résulte donc nécessaire de procéder à une distinction entre la sphère civile et la sphère religieuse dans les pays islamiques aussi.

15)      En tous les cas, il est fondamental, dans ce contexte, de distinguer Occident et Christianisme, car souvent les valeurs chrétiennes nÂ’inspirent plus des attitudes, des positions ou des actions (en lien notamment avec lÂ’opinion publique) dans ce quÂ’on appelle le monde occidental (cf. EMCC 60).

16)      Les participants à la Plénière ont également exprimé lÂ’espoir que là où chrétiens et musulmans vivent ensemble, ils puissent unir leurs efforts à ceux des autres concitoyens pour garantir à chacun, sans distinction de religion, le plein exercice de ses droits et de ses libertés individuelles, en tant que personne et en tant que membre dÂ’une communauté. 

Situation dans certains pays à majorité islamique

17)       DÂ’autre part, dans des pays à majorité islamique, il ressort que les chrétiens, et en général les travailleurs immigrés pauvres et sans véritable pouvoir contractuel, connaissent de graves difficultés pour la reconnaissance de leurs droits humains. En outre, ces derniers ont peu de possibilités de faire valoir leur cause en justice, car ils peuvent facilement être punis ou expulsés.

18)       LÂ’Eglise est donc appelée à aider les migrants chrétiens dans ces pays, ainsi que dans lÂ’univers monde, dans le respect de la légalité et en manifestant son intérêt pour la rédaction dÂ’une juste législation ayant trait à la mobilité humaine et pour la protection légale de ceux qui sont concernés. Certains nÂ’ont pas manqué de rappeler quÂ’à lÂ’intérieur des différents pays il devrait y avoir une situation telle quÂ’elle ne pousse pas ses propres citoyens à se rendre à lÂ’étranger pour survivre.

19)      En outre, conformément aux prescriptions du Décret conciliaire Christus Dominus (n° 18), lÂ’Eglise doit garantir, même à ceux qui éprouvent des difficultés ou qui ne peuvent pas bénéficier de la pastorale ordinaire, cÂ’est-à-dire territoriale, à cause de leur mobilité, une pastorale spécifique et même intégrée. Ceci vaut aussi pour les pays à majorité islamique.

20)      Dans ces pays, la tâche de lÂ’Eglise locale consiste à accueillir les immigrés et itinérants, malgré le manque de personnel et, peut-être même, de structures adéquates.

21)      A cet égard, le dialogue et la collaboration entre les Eglises locales dÂ’origine des migrants et des itinérants et celles de destination sont nécessaires pour leur assistance spirituelle, ce qui, du reste, est une règle générale pour tous les pays (cf. EMCC 70 et 50-55).

22)      Il faut, en outre, aider les migrants internationaux à apporter leur contribution à la communauté au sein de laquelle ils vivent et à la portion locale du Peuple de Dieu.

23)      En même temps, la communauté dÂ’accueil doit développer un sens de solidarité à lÂ’égard des immigrés ou de ceux qui se trouvent dans des circonstances semblables. 

Sollicitude de lÂ’Eglise dans les différents secteurs de la mobilité humaine

Par ailleurs, les participants à la Plénière ont attentivement considéré les différents secteurs de migration et de déplacement. Tous ont la conviction que pour les migrants :

24)      LÂ’Eglise doit veiller à leur juste intégration, avec le nécessaire respect de la culture et de la religion de chacun (cf. Message du Saint-Père pour la Journée Mondiale de la Paix 2001, n° 8 et Message du Saint-Père pour la Journée Mondiale du Migrant et du Réfugié 2005, n° 3).

25)      Par conséquent, lÂ’Eglise encourage un dialogue à la fois interculturel, social et religieux, dans le respect des distinctions qui doivent être faites (cf. Message du Saint-Père pour la Journée Mondiale de la Paix 2001, n° 12).

Pour les différents secteurs, il a surtout été relevé :

26)      La nécessité de créer des liens dÂ’amitié, dans une atmosphère de considération pour les différences culturelles et religieuses, même avec ceux qui pensent, en tant que migrants, à un retour vers leur lieu dÂ’origine, ou avec les étudiants étrangers (internationaux), qui seront les futurs leaders de leurs pays.

27)      Pour les réfugiés et les étudiants étrangers, mais pas seulement, la création dÂ’aumôneries a été souhaitée.

28)      Pour les pèlerinages, la nécessité a été soulignée que les pèlerins soient invités à chercher aussi le visage de Dieu dans les croyantes des autres religions.

29)      Dans les aéroports, carrefours de gens différents, et dans les gares ferroviaires, a été souhaitée la présence de chapelles spécifiquement catholiques, ou de lieux de prière, même multi-religieux, lorsque seulement cela est possible.

30)      Dans les centres « Stella Maris » (Apostolat de la Mer) il faudra continuer à accueillir les marins, même musulmans, avec une aide spirituelle respectueuse lorsque celle-ci est requise.

31)      A lÂ’égard de la population tsigane, objet de marginalisation, de xénophobie et de racisme, on estime nécessaire de renforcer la cohérente maturité des sociétés démocratiques, ainsi que leur capacité à comprendre et à respecter la diversité sociale, culturelle et religieuse des Tziganes (cf. Orientations pour une pastorale des Tsiganes 50).

32)      Pour les « femmes de la rue » – considérant que la plupart du temps la pauvreté et le trafic dÂ’êtres humains conduisent au commerce de leur propre corps et que la prostitution peut dépendre de chrétiens comme de musulmans – on estime nécessaire de former une conscience qui vise toute la société.

33)      Quoi quÂ’il en soit, un engagement renouvelé doit avoir lieu pour faire participer les femmes, en particulier aux décisions qui les concernent, ainsi que dans le travail pour convaincre les parents à donner aussi aux filles une éducation équivalente à celle des garçons, incluant naturellement la formation éthique.

Ecoles et éducation

Les participants à la Plénière ont fortement souligné le fait que :

34)      Il est important de garantir lÂ’éducation des nouvelles générations, notamment parce que lÂ’école joue un rôle fondamental pour vaincre le conflit de lÂ’ignorance et des préjugés et pour connaître correctement et objectivement la religion dÂ’autrui, avec une attention spéciale à la liberté de conscience et de religion (cf. EMCC 62). De plus, pour les chrétiens, on aura soin de fournir la base dÂ’un discernement évangélique de lÂ’expérience religieuse des autres croyants (cf. EMCC 65) et des signes des temps.

35)      Il apparaît donc indispensable de travailler pour une vérification des textes scolaires, notamment pour la présentation historique liée aux religions, qui forge lÂ’identité personnelle et transmet une image de lÂ’identité religieuse dÂ’autrui.

36)      En tous les cas, on estime nécessaire dÂ’approfondir les études, les enseignements et les recherches concernant les différents visages de lÂ’Islam historique et/ou contemporain, ainsi que dans son acceptation diversifiée dÂ’une saine modernité (cf. EMCC 66).

37)      Les parents musulmans et leurs responsables religieux doivent être aidés à comprendre les intentions correctes des systèmes éducatifs occidentaux et les conséquences concrètes dÂ’un refus de lÂ’éducation impartie dans les écoles de ces systèmes, au sein desquels leurs enfants vivent. 

Les Etats et la liberté religieuse

38)      Etant donné que cÂ’est très souvent lÂ’Etat qui donne « forme » à lÂ’Islam dans une Nation déterminée à majorité islamique, qui organise le culte, en interprète lÂ’esprit et en transmet le patrimoine, en donnant à la société un caractère globalement islamique, les non-musulmans sÂ’y sentent très souvent des citoyens de seconde classe. Pour les immigrés chrétiens la difficulté est donc encore plus grande.

39)      Par conséquent, il est nécessaire de sÂ’engager partout pour faire prévaloir une culture de la coexistence entre autochtones et immigrés, dans un esprit de compréhension civile mutuelle et de respect des droits de lÂ’homme de tous. Il faut chercher des voies de réconciliation et de purification des mémoires (cf. EMCC 65) et faire en sorte de devenir des avocats de la défense de la liberté religieuse – notre impératif constant – et du bien commun pour tous dans le respect des minorités. Il sÂ’agit dans ce cas dÂ’un signe très clair dÂ’authentique civilisation.

40)      On a constaté avec satisfaction que de nombreux Etats à majorité islamique ont établi des relations diplomatiques avec le Saint-Siège, devenant ainsi plus sensibles aux droits de lÂ’homme et se montrant désireux dÂ’un dialogue interculturel et interreligieux, dans le cadre dÂ’une saine pluralité.

41)      Dans ce contexte, il faut déplorer, dans certains pays, les restrictions des droits de lÂ’homme, particulièrement liés aux différences religieuses, et lÂ’absence même de la liberté de changer de religion. Il faut espérer que les Autorités publiques des pays dÂ’origine des émigrés chrétiens aident leurs citoyens, dans les pays islamiques, à obtenir de pouvoir exercer effectivement leur droit à la liberté religieuse.

42)      Ces pays sont donc encouragés à créer des espaces de dialogue avec ceux à majorité islamique sur des questions ayant trait au bien commun universel, au respect des minorités, aux droits de lÂ’homme et plus spécifiquement à la liberté religieuse, fondement de toutes les libertés.

43)      Quoi quÂ’il en soit lÂ’Eglise doit poursuivre dans ses initiatives de dialogue interculturel et interreligieux à différents niveaux, surtout lorsque ceci est facilité par les responsables politiques.

44)      La coopération entre institutions chrétiennes et musulmanes pour lÂ’aide aux populations et aux individus nécessiteux, sans aucune discrimination, est un signe efficace capable de surmonter des préjugés et des fermetures pour parvenir à une ouverture réciproque et raisonnable.

45)      LÂ’extension croissante du « vivre ensemble » de musulmans et de chrétiens peut offrir une opportunité de collaborer ensemble en vue dÂ’un monde plus pacifique, respectueux de lÂ’identité de chacun et plus uni au service du bien commun, étant donné que nous formons une unique famille humaine, qui a besoin dÂ’espérance (cf. EMCC 101-103).

46)      Dans ce contexte, la collaboration est dÂ’une importance capitale, notamment entre les différents Dicastères de la Curie romaine, les Conférences épiscopales et les Eglises particulières.

47)      La conscience de la dignité de chaque personne humaine, quelle que soit son ethnie, sa culture, sa citoyenneté ou sa religion, sera un facteur dÂ’unité, dans les diversités légitimes. CÂ’est une valeur qui sÂ’affirme dÂ’une façon toujours plus universelle, en dépit de nombreuses incohérences et de reniements concrets dans lÂ’action quotidienne.

48)      Dans ce contexte, les participants à la Plénière ont accordé une attention particulière au Continent africain, où le besoin de stabilité politique et de coopération multilatérale se fait spécialement sentir, en vue dÂ’un développement pacifique et intégral.

49)      A cet égard aussi, plusieurs causes de tension et de conflit ont été considérées, avec le souhait de résoudre promptement ces situations avec justice et rapidité pour prévenir les guerres, la violence et le terrorisme. Il faudra en tout cas éviter que la religion soit utilisée dÂ’une manière abusive pour inculquer la haine envers les croyants dÂ’autres religions ou pour des raisons politiques ou idéologiques.

50)     On espère donc quÂ’intellectuels musulmans et chrétiens, au nom dÂ’un humanisme commun et de leurs croyances respectives, se posent les questions dramatiques liées à lÂ’usage de la violence, souvent encore perpétrée au nom de la religion.

Le rôle des médias

51)     Une particulière importance leur est reconnue pour la création dÂ’un climat adéquat de compréhension et de respect dans lÂ’information relative aux phénomènes religieux. Les journalistes et les agents des mass media en général doivent donc assumer leurs responsabilités, non seulement vis-à-vis de la liberté dÂ’expression, dans un monde toujours plus mondialisé, en particulier en ce qui concerne lÂ’information.

52)    Les médias peuvent également offrir une importante contribution à la « formation » (et, hélas, vice-versa, à la déformation) de chrétiens et de musulmans.

           Nous concluons ce communiqué en relevant la vive satisfaction des participants pour le contenu, la méthode de travail et lÂ’actualité de cette Session Plénière, qui a suscité un vif intérêt.

          Cité du Vatican, le 19 juin 2006

 

 

top