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Pontifical Council for the Pastoral Care of Migrants and Itinerant People

People on the Move - N° 85, April 2001

 

Le pèlerin des années 2000


P. Philippe BLANC
Président de l’Association Nationale
des Directeurs Diocésains de Pèlerinages (ANDDP), France

[Italian summary, English summary]

 

Après 52 congrès vécus dans différentes villes ou sanctuaires de France et d’Europe, c’est à Lourdes, du 20 au 23 novembre 2000, que notre Association Nationale des Directeurs Diocésains de Pèlerinages (ANDDP) a organisé son congrès de l’année jubilaire. Avec plus de 315 participants, nous nous sommes rassemblés pour vivre ensemble un événement pastoral ! Depuis 1936, date de la « réunion-congrès des directeurs de pèlerinages », c’était la première fois de son histoire que l’ANDDP organisait sa réunion annuelle en ce lieu. Il fallait bien une année sainte pour cela !

« Le pèlerin des années 2000 »Â… tel était le thème retenu pour l’année 2000, première étape d’une réflexion qui se terminera à Nantes cette année 2001. Qui est ce pèlerin et, plus largement, qui est pèlerin ? Pour nous, le pèlerinage, son actualité et son renouveau, n’est pas qu’un fait de société, une mode du moment. Le pèlerinage appartient au patrimoine chrétien qui nous est commun. « Avec d’autres traditions, ce patrimoine fait partie de l’héritage religieux qui a contribué à ce que la civilisation européenne soit ce qu’elle est » (Mgr Louis-Marie Billé, Assemblée plénière 2000, Discours de clôture).

Les conférences, les rencontres en régions, les dialogues et échanges en assemblée nous ont permis de mieux dessiner la physionomie de celui qui donne une certaine raison d’être à notre mission : le pèlerin. Notre assemblée n’a pas seulement été la réunion annuelle statutaire que toute association doit organiser, mais avant tout un outil pastoral proposé à chacun de nos services diocésains ou nationaux de pèlerinages.

Le congrès a témoigné de la vitalité et de l’engagement missionnaire de notre association, tout en reconnaissant que les temps sont rudes et que de nouveaux défis nous attendent. Il a été aussi l’occasion de réaffirmer notre désir d’être à part entière un service d’Église conformément à la mission pastorale reçue de nos évêques ou de nos supérieurs légitimes. Dans la dynamique de la proposition de la foi à la société d’aujourd’hui, nos pèlerinages proposent et suscitent « des temps nouveaux pour l’évangile ». Pour beaucoup le pèlerinage a une dimension catéchuménale. Des hommes et des femmes de tous les âges se mettent en marche en recherche de sens, assoiffés de raisons de vivre et d’espérer. Chercheurs de Dieu, ils avancent à la rencontre de Celui qui par amour pour eux est venu partager leur humanité, prenant sans cesse l’initiative de la rencontre et de l’alliance. « Il faut qu’il y ait des lieux où tout homme, quel qu’il soit, puisse toucher le surnaturel dans la mesure où Dieu le veut » (François Mauriac).

C’est l’amour du Christ qui nous presse et qui nous pousse à sans cesse passer sur l’autre rive à la rencontre de communautés humaines et ecclésiales pour raviver nos racines en ces lieux de foi et de témoignage où la grâce se fait comme plus proche. Nos chemins de pèlerinages ne sont pas des sentiers sans issues : ils nous conduisent à la rencontre de l’autre et de nous-mêmes et sont orientés vers le face à face avec le semblable et le Tout-Autre. Ce ne sont pas des chemins virtuels et, même si nous ne sommes que de passage, nous sommes en marche vers une Cité sainte où toutes les pierres vivantes s’assemblent et se retrouvent autour de la pierre d’angle, le Christ.

La marche du pèlerin le maintient en bonne forme humaine et spirituelle. Comme le dit un livre récent : « Marcher donne du tonus. Favorise la croissance chez l’enfant. Équilibre l’adolescent. Régénère l’adulte. Ralentit la décrépitude au troisième âge. Retarde la ruine au quatrième. Même les morts vont mieux pourvu qu’ils se lèvent et remuent les jambes : voyez Lazare ! » (Yves Paccalet, Le Bonheur en marchant, JC Lattès, 2000, pp. 176-177). Il n’y a donc plus de raison de retarder notre mise en route ! « Dans la mesure où nous nous orientons vers Dieu, nous nous enracinons plus profondément dans la vie ».

À une telle école, nous découvrons que toute notre vie peut devenir pèlerinage. Lorsqu’il traduit les béatitudes, Chouraqui emploi l’expression « en marche » ! Finalement, le pèlerin ne serait-il pas l’homme des béatitudes ? Le pèlerin des années 2000, riche de l’expérience et des témoignages de ceux et celles qui l’ont précédé, riche de ces sentiers déjà parcourus ou encore à explorer, est invité à faire de sa vie une vie « en marche ». Le pèlerinage est alors une école de vie et de sainteté pour tous les hommes et femmes au cœur disponible et doux, pour les artisans de réconciliation et de paix, pour les assoiffés de justice et de vérité. La vie du pèlerin est déjà une vie béatifiée !

Le pèlerin de l’an 2000 est un bâtisseur de paix, prêt à l’émerveillement et au partage, disponible aux appels de l’Esprit et aux soifs de ses frères et sœurs en humanité, toujours en marche, chaque jour davantage pèlerin.

Durant ces quelques jours de notre congrès, nous avons eu devant nos yeux et à l’horizon de notre responsabilité pastoral le pèlerin des années 2000. Au-delà des calculs, des raisonnements, des prévisions… nous sommes les uns et les autres invités à une disponibilité. Disponibilité à l’aujourd’hui d’une mission reçue de nos évêques ou de nos supérieurs. Comme un écho, nous entendons la Vierge Marie nous inviter à dire avec elle : « que tout se passe pour moi selon ta Parole ». Disponibilité aussi à l’accomplissement d’une tâche, d’une ministère. Cette fois, Marie murmure à nos oreilles : « tout ce qu’il vous dira, faites-le ».

Notre objectif n’est pas de dessiner une figure idéale de pèlerin, ni même d’imaginer un prototype de pèlerin. Nous voulons simplement rejoindre des hommes et des femmes qui se trouvent sur notre route ou, quelquefois, arrêtés au bord du chemin, et leur proposer d’aller un peu plus loin. Peut-être n’irons-nous pas jusqu’au bout de la route avec eux, peut-être ne seront-ils que des gens de passage mais ce qui nous est demandé est de faire au moins un pas de plus avec eux.

Notre spiritualité n’est pas celle du « poteau indicateur », qui indique la route mais qui reste lui-même sur place ; notre spiritualité est celle du chercheur, du marcheur, du témoin qui s’avance avec ceux et celles qu’il invite. Notre proposition rejoint « tout homme et tout l’homme » et, si nous transmettons une parole, c’est pour susciter une communion. En ce sens, nous prenons au sérieux la dimension catéchuménale du pèlerinage : une proposition qui rejoint l’homme tel qu’il est, là où il en est et qui l’invite à grandir encore, à se laisser dépouiller pour accueillir la vraie liberté, celle que seul le Christ peut lui donner.

Tout être humain est aimé de Dieu, il est un pèlerin en devenir et en puissance car c’est dans ce regard d’amour qu’il va découvrir qu’il doit aller plus loin, se mettre en route vers un ailleurs où Dieu et l’homme se révèlent. Les appels du Christ s’adressent toujours à ses amis d’aujourd’hui : « viens », « va », « passe sur l’autre rive , je vous envoie »Â… L’ami de Dieu est toujours en mouvement et, dans ce mouvement, il accueille l’aujourd’hui de Dieu.

L’itinéraire du pèlerinage n’est pas déterminé à l’avance, figé et décidé d’une façon immuable ; il n’est pas un moule par lequel il faudrait passer et qui serait obligatoire et unique pour tous. Ce chemin s’éclaire à chaque instant à travers la découverte du sens de ce que nous sommes et de ce que nous vivons. Il est porteur d’espérance car l’homme est alors libéré de ses peurs et de ses angoisses, car les murs de la division et les pierres de tous les enfermements éclatent grâce à la douceur de la tendresse de Dieu.

Le pèlerin n’est ni un frileux, ni un peureux. Il est audacieux comme le Christ ouvrant tous les chemins de dialogues et de rencontres. Au « toujours plus vite », le pèlerin répond par la valeur du temps donné aux autres et au Tout-Autre. Face aux séductions du « virtuel », le pèlerin choisit le contact humain et affirme l’harmonie de la création. À toutes les solitudes qui isolent, le pèlerin préfère l’expérience humaine et le partage entre frères. Devant le « tout, tout-de-suite », le pèlerin s’avance sur des chemins de fidélité inscrits dans la durée de l’amour. Face à la dispersion et à l’instantané, le pèlerin est l’homme qui respire au rythme d’une histoire et d’une tradition vivante.

Le pèlerin des année 2000 attend de nous « des temps nouveaux pour l’Évangile ». « Tu ne me chercherais pas si tu ne m’avais déjà trouv頻… Nous partons bien souvent à la recherche de Celui qui est déjà au plus intime de nous-mêmes ; nous le cherchons au-dehors, ailleurs, alors qu’Il est là, en nous. Le pèlerin est un vivant, assoiffé ou saisi par l’amour et la tendresse de Dieu et donc libéré des peurs et des appétits de pouvoirs. Il est l’homme des béatitudes. Au service de ce pèlerin, nous n’avons pas toutes les réponses établies d’avance, nous ne disposons pas de toutes les recettes, nous avons simplement une certitude : Dieu marche avec son peuple, Dieu est proche de chacun de nous. Avec ce Dieu qui se fait pèlerin, toujours en recherche de notre humanité, mettons-nous en marche et laissons-nous conduire par l’Esprit qui se révèle le plus souvent dans la discrétion et la tendresse d’un cœur à cœur.

Finalement, ce pèlerin des années 2000 nous ressemble étrangement… car, ce pèlerin, c’est nous !


Il pellegrino degli anni 2000

Riassunto

E’ stato questo il tema del congresso giubilare realizzato dall’Associazione Nazionale dei Direttori Diocesani di Pellegrinaggi (ANDDP), congresso che ha permesso di meglio delineare la fisionomia di colui che costituisce la ragion d’essere della missione dell’associazione: il pellegrino.

Il pellegrinaggio appartiene al patrimonio cristiano comune, patrimonio che, con altre tradizioni, fa parte dell’eredità religiosa che ha contribuito a fare della civiltà europea quella che è.

Per molti il pellegrinaggio ha una dimensione catecumenale. Uomini e donne di ogni età si mettono in cammino per dare senso alla loro vita, assetati di ragioni per vivere e sperare. L’amore di Dio ci spinge a passare sull’altra riva per incontrare comunità umane ed ecclesiali e ravvivare le comuni radici in quei luoghi di fede e di testimonianza in cui la grazia sembra più vicina.

I nostri cammini di pellegrinaggio sono sentieri senza uscita, ma ci spingono all’incontro con l’altro e con noi stessi. Non sono cammini virtuali ; anche se siamo di passaggio, siamo in cammino verso una Città santa in cui tutte le pietre vive si riuniscono e si ritrovano attorno alla pietra d’angolo, Cristo.

Tutta la nostra vita può diventare un pellegrinaggio. Il pellegrino degli anni 2000, ricco dell’esperienza e della testimonianza di quanti lo hanno preceduto, è invitato a fare della sua vita una vita « in cammino ». Il pellegrinaggio è quindi una scuola di vita e di santità.

L’obbiettivo dell’asssociazione non è quello di delineare una figura ideale di pellegrino, né d’immaginarne un prototipo, ma semplicemente raggiungere gli uomini e le donne che si trovano sulla strada e proporre loro di andare un po’ più lontano. Forse non arriveremo fino alla fine della strada con loro, forse essi saranno soltanto gente di passaggio, ma quel che ci viene chiesto è di fare almeno un passo con loro.

L’itinerario del pellegrinaggio non è determinato prima, deciso in modo immutabile. E’ un cammino che si illumina ad ogni istante attraverso la scoperta del senso di ciò che siamo e di ciò che viviamo. Il pellegrino degli anni 2000 attende da noi tempi nuovi per il Vangelo. Egli stranamente ci rassomiglia, perché questo pellegrino siamo noi.


The pilgrim of the years 2000

Summary

This was the theme of the jubilee congress organised by the National Association of Diocesan Directors of Pilgrimages (ANDDP), the congress which gave the opportunity to define better the physiognomy of the man who constitutes the reason for the mission of the association: the pilgrim.

The pilgrim belongs to the common Christian patrimony, which with other traditions is part of the religious heredity, which has contributed to make the European civilization what it is. 

For many the pilgrimage has a catechumenal dimension. Men and women of every age set out to give sense to their life, thirsty of reasons to live and to hope. The love of God pushes us to go across to the other shore to meet human and ecclesial communities and to revive the common roots in those places of faith and testimony in which the graceseems closer.

Our paths of pilgrimages are not roads without exits, but they drive us to meet with the other and with ourselves. They are not virtual paths; even though we are in passing, we are going towards a holy City where all the living stones are reunited and find themselves around the corner stone, Christ.

All our life can become a pilgrimage. The pilgrim of the years 2000, rich in experience and in testimony of those who have preceded, is invited to make of his life a life “on the move”. The pilgrimage is therefore a school of life and holiness.

The scope of the association is not to define an ideal figure of pilgrim, nor to invent his prototype, but simply to reach the men and women who are on the road and to propose to them to go a little farther. Perhaps we will not reach till the end of the road with them, perhaps they will be only people on the move, but what is asked us is to make at least a step with them. 

The itinerary of the pilgrimage is not determined before, nor decided in an unchangeable manner. It is a path, which is illumined every moment by the discovery of the sense of which we are and of which we live. 

The pilgrim of the years 2000 expects from us new times for the Gospel. He strangely resembles us, because we are the pilgrims.

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