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INTERVENTION DU SAINT-SIÈGE
AU DÉBAT DE POLITIQUE GÉNÉRALE DE LA 34e SESSION
DE LA CONFÉRENCE GÉNÉRALE DE L’UNESCO

INTERVENTION DE MGR FRANCESCO FOLLO*

Paris, France
Lundi 22 octobre 2007

 

Monsieur le Président,

Je m'associe bien volontiers aux orateurs qui m'ont précédé pour exprimer les félicitations de la Délégation du Saint-Siège pour votre élection à la Présidence de la Conférence générale de l'UNESCO, tâche que – sans aucun doute – vous saurez accomplir de manière excellente, mettant au service de notre assemblée et de la Communauté internationale les connaissances qui sont les vôtres.

Permettez-moi, Monsieur le Directeur Général, de vous remercier également pour les paroles par lesquelles, en décembre 2006, vous avez exprimé votre appréciation pour la contribution intellectuelle que le Saint-Siège apporte, depuis plus de 50 ans, à cette Organisation, que vous savez si bien conduire.

Parmi les points d’attention de l’UNESCO, il y a la question de l’éducation, que le Saint-Siège suit toujours avec grand intérêt, créant et accompagnant dans différents pays des projets éducatifs. Plus que jamais, en effet, il nous faut mettre la formation et l’éducation des jeunes et des adultes, au sens large du terme, parmi les priorités de la Communauté internationale, comme le soulignait la Déclaration mondiale sur l’éducation pour tous. En effet, c’est un des aspects essentiels de la promotion des personnes et des peuples, ainsi que du développement de la culture et de l’établissement de la paix. Nous devons soutenir les projets tels qu’ils sont par exemple indiqués dans le Cadre d’action établi en l’an 2000 à Dakar, malgré les difficultés qui peuvent se présenter. Dans cet esprit, le Continent africain doit être pour l’Occident une priorité, sachant que le nombre de personnes, notamment de jeunes et d’enfants, qui n’ont pas accès à l’éducation primordiale est encore très élevé. Plus l’éducation sera favorisée, plus les cultures locales seront promues, plus les personnes accéderont au bien-être, plus la vie sociale et économique des peuples en tirera des fruits. Il nous faut reconnaître que rien ne changera vraiment dans notre monde tant que tous ses habitants n’auront pas accès à un système éducatif de qualité. Le Saint-Siège ne peut donc qu’encourager toutes les initiatives en ce sens, qui prennent soin de la formation non seulement intellectuelle, mais aussi de la formation humaine et morale des individus. Le développement global des personnes et des peuples ne peut se limiter aux notions scientifiques et économiques. Il comprend les dimensions morale et spirituelle, qui permettent aux personnes d’apprendre à bien se conduire, à agir en fonction d’une espérance en l’avenir et à avoir le souci du bien commun. C’est déjà ce que soulignait Mgr Angelo Roncalli, premier Observateur permanent du Saint-Siège auprès de l’UNESCO et futur Pape Jean XXIII : «Il existe certains principes élémentaires de caractère moral et religieux, qui constituent le patrimoine de tous les peuples et sur lesquels on suppose une entente comme une base inévitable de vie commune pour réussir la construction du véritable ordre social et mondial de justice et de paix». Le développement authentique des personnes et des peuples ne peut se faire que dans la perspective d’une reconnaissance et du développement de l’être intégral de chacun, de sa dignité fondamentale et du respect intrinsèque qui lui est dû. Que nos contemporains ne perdent jamais de vue que l'éducation doit être intégrale, c'est-à-dire avoir comme objectif de permettre le plein développement d'un être, qui vise un humanisme intégral, qui garde le sens de la transcendance de l'homme sur le monde et de Dieu sur l'homme. Permettez-moi aussi, à ce propos, de souligner l’importance d’une attention toujours plus grande à l’égalité des sexes dans les domaines de l’éducation, qui doit être promue dans tous les projets élaborés. Nous savons la place toujours plus importante que la femme est appelée à tenir dans la vie sociale et économique dans toutes les sociétés, notamment en Afrique, pour ne pas négliger cet aspect des choses. Mais il importe aussi de promouvoir l’éducation en s’appuyant sur la famille, cellule de base de la société, et sur les parents à qui il revient, de droit, d’être les premiers éducateurs de leurs enfants.

Pour la protection et la promotion des cultures, nous connaissons tous l’importance de la religion et des croyances, qui font partie des domaines essentiels de la vie de tout homme et de toute société. Dans notre monde post-moderne où les religions et les idéologies sont aussi à l’origine d’affrontements sanglants entre personnes, entre peuples, parfois au sein même des différentes cultures, il importe de voir comment il est possible de faire en sorte que la démarche religieuse soit vraiment intégrée à la vie des personnes et des peuples, ainsi qu’à la vie de la cité. Dans le passé, la tentation de renvoyer le religieux dans la sphère du privé a conduit à nier une part importante des cultures. Pour que se développe une culture de la paix et de la fraternité, il est urgent d’éduquer l’homme moderne à la reconnaissance du fait religieux, comme réalité non seulement individuelle, mais aussi sociale, comme élément fondamental de l’édification et de la maturation des personnes, mais encore comme moyen de construction de la convivialité sociale. La reconnaissance du fait religieux induit aussi la reconnaissance de la liberté religieuse, qui ne peut se limiter à la croyance, mais qui comprend encore la liberté de professer et de pratiquer publiquement sa foi, dans le respect des autres traditions religieuses et des principes de base de la société. Avec la vision qui leur est propre, les religions peuvent de même avoir une influence positive sur la vie en société et sur la place des individus dans la cité.

Notre monde actuel est un monde de plus en plus urbain, avec le développement de grandes mégapoles, qui sont à la fois des lieux riches de culture et de civilisation, mais où se développent aussi des phénomènes de violence, d’incivilité, et où de plus en plus de familles et de jeunes sont mis aux marges de la société. Dans ce sens, la proposition du Brésil de réaliser une Conférence sur le développement des villes est particulièrement opportune. La ville, qui est le lieu des réseaux de relations, peut être aussi le lieu d’une grande solitude des personnes. Les faits divers qui en rendent compte ne manquent pas. Dans les villes, il faut créer des lieux de culture, de relations, d’éducation, pour que les hommes se parlent, échangent, se reconnaissent comme frères et comme partenaires de la construction sociale, qu’ils soient attentifs aux plus petits, aux plus pauvres, aux laisser-pour-compte. Dans cet esprit, il nous revient de soutenir toutes les propositions qui feront de la planète un lieu où il fait bon vivre. Comment ne pas évoquer la question du développement durable, des programmes pour les énergies renouvelables, telle la proposition faite pour l’Asie centrale par le Kazakhstan. L’exigence qui sous-tend toutes ces démarches consiste à donner à l’homme des lieux vraiment humains, pour aujourd’hui et pour l’avenir. Nous sommes tous responsables de la protection de la planète et nous nous devons de développer une culture de la sauvegarde de la terre. Même si l’urbanisation occupe beaucoup de place aujourd’hui, il importe cependant de prendre aussi en compte le monde agricole et les habitants des campagnes, car ils ont un rôle dans la protection de la nature et ils peuvent nous aider à éduquer les jeunes générations à être toujours plus responsables de notre terre. Il faut souhaiter que, dans tous les continents, se développe toujours davantage cette culture de l’éducation, afin que tous aient le sens de la grandeur de l’homme et de l’importance de la création. Comme nous le rappelait le Pape Jean-Paul II, «l'avenir de l'homme dépend de la culture» (Discours à l'UNESCO, 2 juin 1980, n. 28), et – j’oserai encore ajouter – l’avenir de la planète dépend la culture. Je vous remercie de votre attention.


*L'Osservatore Romano 27.10.2007 p.2.

L'Osservatore Romano. Edition hebdomadaire en langue française n.44 p.10.

La Documentation catholique, n.2392 p.1093-1095

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