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MESSAGE DU CARDINAL TARCISIO BERTONE
À L'OCCASION DE LA JOURNÉE MONDIALE DU TOURISME

 

Monsieur,

Le 27 septembre prochain, sera célébrée la Journée mondiale du Tourisme. A cette occasion, le Saint-Père désire vous faire parvenir, par mon intermédiaire, son salut cordial, ainsi que le souhait que cette occasion contribue à développer les valeurs positives du phénomène du tourisme.

L'un des phénomènes socio-culturels les plus marquants que le XX siècle ait transmis au XXI siècle est l'affirmation progressive de la femme comme sujet créateur dans l'histoire humaine. Le Bienheureux Jean XXIII signalait déjà dans son Encyclique Pacem in terris l'"entrée de la femme dans la vie publique" comme signe caractéristique des temps modernes et soulignait:  "De plus en plus consciente de sa dignité humaine, la femme n'admet plus d'être considérée comme un instrument; elle exige qu'on la traite comme une personne aussi bien au foyer que dans la vie publique" (n. 41). C'est donc de façon opportune que l'Organisation mondiale du Tourisme propose cette année comme thème de réflexion:  Le tourisme, une porte ouverte pour les femmes. Il s'agit là d'une heureuse et importante occasion de réfléchir sur les divers aspects du problème, non seulement en ce qui concerne la réalité complexe du tourisme moderne, mais également pour prendre en considération de façon plus générale la reconnaissance concrète des exigences découlant de la dignité propre à la femme.

Les statistiques les plus récentes publiées par l'Organisation mondiale du Tourisme montrent que, en dépit des variations selon les pays et les zones géographiques, environ 46% de la force de travail de l'industrie touristique dans le monde sont des femmes. Toutefois, les modalités d'emplois varient en raison de la très forte incidence des facteurs culturels, sociaux et religieux sur la situation historique de la femme. Les résultats positifs obtenus, sur le plan économique et financier, dans le secteur public et privé, ainsi que l'extrême flexibilité du secteur touristique, expliquent cette croissance mondiale et rapide. C'est pour cette raison que le tourisme, bien qu'ayant encore grand besoin de garanties législatives, culturelles et morales, représente toutefois une porte ouverte offrant des occasions propices pour l'affirmation des femmes, partout dans le monde.

Tous  ceux  qui  entreprennent   un voyage dans le cadre du tourisme, du travail ou des vacances, gardent en mémoire l'image de femmes qui sont intervenues au cours des divers moments du voyage pour accomplir une fonction spécifique. Ce peut être l'employée de l'agence, l'hôtesse de l'avion, l'accompagnatrice du tour, la serveuse du restaurant, la femme de chambre, la directrice de l'hôtel, le guide d'un musée, ou encore l'humble marchande de produits et d'objets d'artisanat locaux:  il s'agit de présences ayant des rôles divers, qui ne doivent toutefois jamais s'opposer à la dignité propre à toute femme. Il faut malheureusement reconnaître que, en dépit de cette présence nombreuse et efficace des femmes, persiste dans de nombreux cas une discrimination verticale de la femme dans la gestion directoriale et dans la responsabilité managériale du secteur du tourisme. Ce phénomène négatif doit être attribué aux profonds préjugés qui contribuent encore à la persistance de stéréotypes et à l'assignation traditionnelle des rôles subalternes selon le genre. Cela est vrai partout, mais en particulier dans les parties du monde où la considération morale, culturelle et civile de la femme la place en condition de minorité et de profonde injustice. Toutefois, la grande quantité d'hommes et de femmes qui parcourent le monde dans le cadre du tourisme, suscite une confrontation des mentalités, conduit à l'internationalisation croissante des modèles de vie et fait découvrir des coutumes différentes.

Tout cela laisse supposer de possibles développements positifs. Pour les réaliser, les responsables de l'Organisation mondiale du Tourisme, les Etats nationaux et les Organismes régionaux, les grandes entreprises du secteur, les syndicats, et les Associations du tourisme doivent créer des structures et consacrer des ressources économiques pour protéger, développer et maintenir vivante l'exigence morale, culturelle et sociale du respect de la femme et de sa croissance réelle dans ce secteur.

Chaque touriste, quels que soient la religion, la classe sociale ou le continent auxquels il appartient, doit également se sentir en conscience interpellé par cet engagement responsable de protection et de promotion de la femme:  personne ne peut s'en considérer exempté! A cet égard, il faut œuvrer en vue d'une égalité réelle des droits des femmes, en garantissant leur parité dans le travail, leur liberté religieuse, le respect de leurs exigences liées à la maternité et un salaire équitable. Il faut favoriser de façon concrète le droit aux études et à la qualification professionnelle de la jeune fille et de la femme, en luttant au moyen d'une législation positive et concordante contre toute forme d'exploitation injuste de son genre et de commerce indigne de son corps. En effet, il faut dénoncer le scandale intolérable d'un certain tourisme sexuel qui humilie les femmes, les réduisant pratiquement à l'état d'esclavage. Il faut faire tout le nécessaire afin que le tourisme ne tombe pas dans une telle dérive, mais vise toujours à être l'occasion d'un dialogue fructueux entre des civilisations diverses qui puissent, grâce à cette rencontre, s'ennoblir et s'enrichir réciproquement.

Bien sûr, l'Eglise, dans sa vision articulée et multipolaire, tend toujours à conserver un horizon ouvert et critique de l'humanisation du tourisme en raison des opportunités de croissance, de développement et de perfectionnement de la personne qu'il offre. En ce qui concerne la femme en tant que telle également, le tourisme, s'il est correctement conçu sur le plan éthique et anthropologique, peut contribuer de façon efficace au développement de ses potentialités, de sa nature relationnelle, de sa perception en tant que femme de la valeur de la vie et de l'esprit, et de sa conception du travail et de son profit. A cet égard, il ne faut pas oublier que, dans le Message pour la Journée mondiale de la Paix de cette année, le Saint-Père a dénoncé la prise en considération insuffisante de la condition féminine comme conséquence de "perspectives anthropologiques persistantes dans certaines cultures, qui réservent aux femmes une place encore fortement soumise à l'arbitraire de l'homme, avec des conséquences qui portent atteinte à leur dignité de personne et à l'exercice des libertés fondamentales elles-mêmes" (n. 7). Ce n'est qu'en dépassant ces formes de discrimination qu'il sera possible de faire du tourisme une carte gagnante pour conjuguer de façon opportune la gestion de la vie du touriste et la garantie de la qualité de vie pour les résidents. De cette façon, le tourisme peut devenir une occasion de jouir de façon authentique et partagée du temps libre et de la nature, une expérience et une pratique d'une hospitalité capable de créer une culture de l'accueil, une recherche de la beauté et de la sagesse dont la tradition biblique et chrétienne est riche.

Dans cette perspective, le Saint-Père, tout en souhaitant d'abondants dons de sagesse, de générosité et de courage pour tous ceux qui sont engagés dans un secteur si important de la vie moderne, invoque sur vous, Monsieur le Secrétaire général, ainsi que sur vos collaborateurs, les bénédictions de Dieu, -"Père des lumières, chez qui n'existe aucun changement, ni l'ombre d'une variation" (Jc 1, 17).

En unissant mes vœux personnels pour le succès de cette Journée, je profite de cette occasion pour vous présenter l'expression de mes sentiments les plus respectueux.

 

 

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