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MESSAGE DU PAPE JEAN-PAUL II,
SIGNÉ DU CARDINAL SECRÉTAIRE D'ÉTAT,
À LA CONFÉRENCE DES ORGANISATIONSS
INTERNATIONALES CATHOLIQUES (O.I.C.)

Samedi 25 juin 1983

 

Cher Monsieur le Président,
Chers Délégués et Membres des Organisations Internationales Catholiques,

Vous aviez vivement souhaité que Sa Sainteté adresse à votre Assemblée générale de Vienne le précieux témoignage de sa confiance et le réconfort de ses encouragements à avancer sur les chemins de l'évangélisation du monde contemporain.

Le Saint-Père, heureux de répondre à votre attente, m'a demandé de vous adresser tout d'abord ses salutations très cordiales et ses vœux fervents pour le déroulement efficace de votre Conférence. Son désir, qui correspond, j'en suis certain, aux sentiments de tous les participants, est que j'exprime aussi sa très vive gratitude et celle de l'Église à Monsieur André Schafter pour son service généreux, compétent et désintéressé des OIC pendant de longues années. J'accomplis cette mission de tout cœur. Et maintenant, je m'efforcerai de vous exposer, en m'inspirant de la pensée du Saint-Père, quelques orientations concrètes, destinées à stimuler et féconder vos engagements personnels et communautaires dans les différentes OIC.

Nul ne peut contester que la vie internationale a pris en notre temps des dimensions de plus en plus importantes. L'interdépendance accrue des peuples et des événements, les tensions parfois très graves, et même les ruptures qui se sont produites, requièrent de toute urgence un immense et persévérant effort de compréhension et de solidarité à travers le monde entier. Cet état de choses presse aussi l'Église, en continuel état de mission, d'être « le sacrement, c'est-à-dire à la fois le signe et le moyen de l'union intime avec Dieu et de l'unité de tout le genre humain... Il faut en effet que tous les hommes, désormais plus étroitement unis entre eux par les liens sociaux, techniques, culturels, réalisent également leur pleine unité dans le Christ ».(1)

Cette vie internationale semble se manifester d'abord à l'occasion des fréquents forums intergouvernementaux. Leurs programmes, très diversifiés, abordent des thèmes cruciaux, tels que la paix, le désarmement, la défense et la promotion des droits de la personne humaine, le dialogue Nord-Sud, le développement, la lutte contre la faim et la maladie, l'attention aux expressions culturelles et la judicieuse communication entre elles.

Mais il convient de le préciser sans attendre : ce phénomène du développement de la vie internationale courrait des risques d'appauvrissement et de stagnation s'il se limitait à des relations au niveau des Gouvernements. Ces relations sont nécessaires mais insuffisantes. Une vie internationale digne de ce nom a besoin de refléter et d'exprimer la participation démocratique, aussi vaste que possible, des individus et des peuples. Il s'agit donc d'un concert, non seulement des « forces politiques » au sens strict du mot, mais aussi des forces intellectuelles et populaires, des forces culturelles et religieuses, etc., qui tissent ensemble l'existence quotidienne et dont nous avons tous besoin.

Face aux lourds problèmes qui hypothèquent l'avenir de l'humanité, toute approche qui se limiterait aux seuls moyens « technocratiques » ou à une idéologie réductrice, court-circuiterait la recherche de solutions concrètes qui doivent avoir comme référence fondamentale « la personne humaine ». C'est pourquoi, il est tout a fait urgent de donner une nouvelle impulsion aux énergies culturelles, éthiques et religieuses, qui sont des valeurs essentiellement humaines et capables de permettre une approche authentique et solidaire des problèmes concernant l'homme et les nations en notre temps, et donc d'avancer sur une route de véritable progrès humain.

L'Église, quant à elle, se sent vivement interpellée par les nouvelles conditions et par les mutations incessantes de la vie internationale. Elle désire offrir, plus que jamais, sa contribution originale et indispensable en tant qu'« experte en humanité » grâce à sa présence évangélisatrice au cœur de toutes les nations et de toutes les cultures. Sa vocation n'est certes pas de viser le pouvoir, ni de défendre des intérêts politiques, économiques et militaires. Sa vocation est de servir l'homme en proclamant le message salvifique et libérateur de l'Évangile, et l'anthropologie qui en découle au-delà de tout matérialisme. La dignité de toute la personne humaine et de tous les hommes sans exception provient du fait qu'ils sont « créés à l'image de Dieu » et appelés à une plénitude de Vérité et de Vie, données dans et par le Christ. C'est bien cette réalité fondamentale qui permet de parler d'une certaine filiation divine à propos de tous les hommes, et par conséquent d'une fraternité universelle entre eux tous.

L'existence et les activités des Organisations Internationales Catholiques sont précisément une forme de la présence de l'Église dans la vie internationale. Bien qu'étant par définition non gouvernementales, les OIC participent aux forums internationaux dans des domaines aussi divers que le sont par exemple la culture, les communications, l'éducation, la jeunesse, la famille, la femme, le troisième âge. Et cette présence de l'Église constitue un domaine essentiel de l'engagement des laïcs, qui, déjà inscrit dans la tradition de l'Église, a reçu un éclairage et un encouragement considérables de la part du Concile Vatican II.(2)

Quelques orientations concrètes seront, je l'espère, susceptibles de valoriser l'action si importante des OIC.

Que les OIC évitent l'isolement. Certes, elles sont autonomes. Pourtant, malgré leurs généreux efforts, elles ne pourront assurer qu'une fraction des immenses besoins auxquels il faut faire face.

L'harmonisation des programmes, des orientations et des réalisations des OIC peut être poussée plus loin, grâce à la collaboration des consulteurs et à la précieuse contribution des Centres de Paris, Genève et New York. Il sera certainement bénéfique aux OIC de veiller, chacune selon le but qu'elle poursuit, à la grande compétence de ses membres grâce à la mise en œuvre de moyens efficaces de formation à la vie internationale, et à la recherche de modes de présence vraiment opératoires et qui tiennent compte de la mission de l'Église face aux problèmes mondiaux.

De même les OIC gagneront à avoir des relations avec d'autres institutions, capables d'apporter le concours de leur expérience et de leur compétence. Il serait souhaitable également de tenir compte des mouvements ou de nouvelles formes associatives catholiques, qui, sans faire partie des OIC, ont des activités qui touchent le domaine de l'une ou de l'autre. Il faut encore mentionner que la présence et les activités des OIC seront d'autant plus enrichissantes pour l'Église et sa mission dans le monde qu'elles participeront activement à la vie des communautés ecclésiales des nations où elles sont implantées et qu'elles seront capables de communiquer à celles-ci leur expérience « catholique » dans le secteur de leur compétence particulière. Enfin, le Pape demande aux OIC qui œuvrent à l'évangélisation du monde selon une vision intégrale de l'homme et de la société, de raviver leur conviction que le Christ est réellement et effectivement le Rédempteur de l'homme et la source toujours jaillissante du salut des nations. Les OIC, si besoin est, ont à dépasser tout sentiment d'impuissance ou toute tentation d'alignement sur les courants idéologiques dominants dans les milieux internationaux, afin de chercher et de trouver, en temps voulu, les moyens opportuns permettant de proclamer la foi dans le Christ, Seigneur de l'histoire. Pourquoi le nom de Dieu ne serait-il pas opportunément prononcé dans les forums internationaux ?

Tels sont les réflexions et les souhaits que Sa Sainteté m'a chargé de vous transmettre, en vous renouvelant sa confiance et en invoquant sur votre Assemblée les meilleures bénédictions du Seigneur.

Veuillez agréer, Monsieur le Président, chers Délégués et Membres des OIC avec mes vœux personnels pour l'excellent déroulement de votre Congrès, l'assurance de mes sentiments cordialement dévoués.

AGOSTINO Card. CASAROLI

(1) Lumen Gentium, 1

(2) Cf. Apostolicam Actuositatem

 

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