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ADRESSE D'HOMMAGE DU DOYEN
DU CORPS DIPLOMATIQUE PRÈS LE SAINT-SIÈGE,
S.E. M. ANTONIO FARIA CARNEIRO PACHECO,
AMBASSADEUR DU PORTUGAL
*

Lundi 25 février 1946

 

Très Saint Père,

Je remercie la Providence divine du privilège insigne d’être, devant Votre Sainteté, entourée du Sacré-Collège et de la noble antichambre pontificale – cadre digne de Raphaël, – et à ce moment de la vie de l’humanité, l’interprète des sentiments dévoués et de l’admiration révérente que lui consacrent ceux qui ont l’honneur de représenter près le Saint-Siège un nombre si élevé de nations.

Il est dans la tradition que les rares démonstrations collectives de ce genre se réalisent à l’occasion d’événements ou actes publics remarquables, en particulier quand ils peuvent avoir une expression historique.

Témoins en personne de votre pontificat, unis en communion de sensibilité – que ni même la variété de croyances ne pourrait amoindrir, – nous sommes tous convaincus que la solennité exceptionnelle de ce Consistoire, autant que le sens éclairé du choix des nouveaux sénateurs de l’Église, méritent d’être enregistrés par l’histoire.

À peu de distance d’une guerre dont on mettra tant d’années à réparer les ruines, morales et matérielles, et au milieu des inquiétudes qu’elle a laissées aux hommes de bonne volonté qui s’adonnent à la besogne ardue de bâtir la paix, les catholiques du monde entier trouveront, sans doute, dans la liturgie grandiose que l’Église a déployée ces derniers jours, de nouvelles et profondes raisons d’espérer.

Ceux mêmes, toutefois, qui ne partagent pas leur Credo verront, assurément, au-delà et au-dessus de la création des nouveaux cardinaux – de vertu exemplaire et de mérite éminent – originaires et venus des plus variées et lointaines régions, une leçon transcendante d’universalité qui est, en même temps, une persuasive invitation à l’union de tous les peuples, en sincère collaboration internationale, sous la primauté de l’esprit.

À Votre Sainteté était dû cet hommage, que nous lui rendons avec conviction et respect.

Il nous offre en plus l’occasion de satisfaire un impératif de conscience, rappelant ce que la pauvre humanité a dû à Votre Sainteté pendant ces longues années de guerre, à laquelle l’ont entraînée quelques égoïsmes insensés ; surtout à la vue du contraste entre la petitesse des ressources dont Votre Sainteté disposait et l’énormité des passions qu’il a fallu combattre.

On passe sous silence les faits, pour ne pas attrister cette heure de lumière...

Mais la postérité saura que la grande tragédie assombrissant presque depuis la première heure le glorieux pontificat de Votre Sainteté, a trouvé, dans son cœur ouvert, l’écho le plus compatissant, par la participation anxieuse à toutes les angoisses et par l’emploi journalier et ininterrompu de tous les efforts, en vue de porter secours aux plus grands malheurs et aux souffrances les plus aiguës.

Ce furent les appels véhéments et réitérés aux sentiments d’humanité et de charité chrétienne, aux principes élémentaires de l’ordre moral, aux droits de la vérité et cite la justice, à la conscience universelle. Si la voix de Votre Sainteté n’a pas été toujours écoutée, jamais elle ne fut sans un écho profond dans les consciences ni n’a manqué d’être le soutien et la force pour l’âme des opprimés.

Ce furent les prodiges de charité de toute sorte, matérielle et spirituelle, sans distinction de race et de croyance, d’école philosophique ou de tendance politique, de nation ou d’individu, autant pour la défense de la vie et de la dignité de la personne humaine dans ses libertés essentielles, que pour celle des droits de la famille. Et à l’effort charitable, Votre Sainteté joignait toujours avec abnégation, pour la misère d’autrui, l’intention du sacrifice de soi-même.

Ce furent les torrents de consolation et de grâce que Votre Sainteté a versés dans tant de cœurs qui l’ont approchée avec leurs problèmes délicats - combien de fois à la veille de l’holocauste d’une vie...

À cause de tout cela, les yeux humides, nous avons vu passer près des marches du trône de Votre Sainteté – qui les bénissait et les serrait également sur son cœur – l’interminable théorie des hommes de toute race et nationalité , de toute langue et religion, de toute profession et classe, soldat ou civil, ecclésiastique ou laïc, chacun et tous amenés par la seule sollicitation intérieure de leur respect, de leur reconnaissance et de leur justice.

Très Saint Père, la guerre finie, le désir le plus fervent de Votre Sainteté est aujourd’hui que la paix, création de l’esprit, descende des lèvres au cœur des hommes pour le désarmement des âmes, et que les hommes puissent la vivre en esprit de fraternité chrétienne, fondement indispensable de tout vrai ordre social.

Tous représentants de peuples et de nations qui aiment la paix, il nous est extrêmement agréable d’assurer Votre Sainteté de notre compréhension et de notre louange, en même temps que nous formulons nos vœux les plus sincères, pour la toujours plus rayonnante gloire de son Pontificat.


* L’Osservatore Romano, 27.2.1946.

Actes de S.S. Pie XII, Tome VIII, p.94-96.

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