 |
Thèmes du Jubilé - Il Lunario Romano (L'Almanach Romain)
Sept siècles de pèlerinages du Latium vers Rome
Déjà entre le IIème et le IIIème siècle il existe des témoignages de voyages vers Rome pour vénérer les dépouilles des Apôtres; toujours plus intenses depuis l'an 1300
Card. Vincenzo Fagiolo
Le "Lunario Romano" de 1999, par le groupe culturel de Rome et du Latium, reconstitue l'histoire du pèlerinage vers Rome à partir des plus lointains centres de la région. Des récits, des chroniques, des anecdotes, des parcours, des rencontres, des fatigues, des satisfactions, des célébrations liturgiques et des processions d'une Basilique romaine à l'autre, des bénédictions et des audiences papales: une série de rendez-vous, d'épisodes et de souvenirs tout au long de plusieurs siècles. Nous publions des passages de la préface de ce volume, par le Cardinal Vincenzo Fagiolo. "Si la procession sied à Rome" (ainsi écrivait Armando Ravaglioli, en présentant il "Lunario Romano" de l'année dernière), d'autant plus les jubilés siéent à Rome et à la région qui l'environne. Si d'autres villes peuvent également se vanter et se glorifier d'expressions et de mémoires culturelles liées aux Sanctuaires chrétiens (Lunario Romano 1992), aux bois et parcs (1993), aux routes (1994) et rappeler les tristes épisodes de la guerre 1943-1994 (1996), seule Rome peut, d'une manière unique, se présenter au monde en tant que siège primordial, autonome et originaire des Jubilés. Les autres sont des dérivations, des ramifications, des rayonnements du Siège Mère, de cette Rome "où le Christ aussi est Romain", de cette Romaine papale, caput mundi, de cette Urbs qui unique regarde et illumine l'Orbis. Et la raison unique et suprême réside dans la réalité, historique et d'institution divine, de Rome siège des Vicaires du Christ, du successeur de Pierre, du Pasteur des Pasteurs, du Serviteur des serviteurs de Dieu, du détenteur des clefs du Royaume des cieux. Si les "Romei" venaient "de loin" (comme Jean-Paul II eut le loisir de le dire le soir de son élection), ceux plus proches étaient moins fatigués mais avec la même foi, le même comportement humble, modeste et confiant; depuis Alatri, Carpineto, Segni, Ferentino, Anagni, Sezze, etc., ils allaient vers Rome, avec le désir d'obtenir miséricorde et pardon auprès de la tombe du Prince des Apôtres. Il fallait donc qu'il y ait une histoire des "Jubilés dans le Latium", à laquelle pourvoit maintenant ce volume du groupe culturel de Rome et du Latium avec le "Lunario Romano" 1999. Les "Romei" du latium, soit en petits groupes, parfois seulement les membres d'une famille, soit en communautés paroissiales ou diocésaines, trouvaient presque toujours et de partout accueil et solidarité, à moins de tomber dans les mains des brigands, ce qui n'était pas rare spécialement au cours des siècles qui sont plus proches de nous. Significatif est le comportement des habitants de Zagarolo qui accueillirent avec une disponibilité affective et effective les pèlerins qui, depuis Alatri, s'y arrêtèrent avant de reprendre leur route vers Rome, en l'année jubilaire 1625. Ils en rapportèrent un si agréable souvenir que la municipalité de Alatri décrèta, que "soit accordé aux citoyens de Zagarolo de participer au Conseil Communal... qu'ils soient déclarés exempts de toutes taxes et bénéficient des autres exemptions, honneurs, grâces et privilèges dont jouissent les citoyens et les nobles de Alatri...". Mais le "désir" d'aller en pèlerinage vers Rome pour être purifié "par un saint pardon" a toujours envahi et contaminé tout le Latium, depuis l'an 1300 jusqu'à nos jours. Nous voulons clore ces évocations qui nous sont fournies par d'éminents experts, en se rapportant à ce qui est souligné au début sur l'entité théologique, morale, spirituelle, historique et sociale que Rome représente pour la chrétienté et comme il est impossible de concevoir un jubilé, événement de pardon et de rémission également de peine pour les péchés commis, sans une liaison substantielle avec le Pontife Romain, à qui le Christ a conféré le pouvoir des clefs du salut et de puiser au trésor des mérites du Christ lui-même pour la concession des indulgences. Ce sont les réflexions que fait A. Ravagnoli dans son étude "La ville de Rome et les Jubilés". La première affirmation centre déjà très bien le problème du point de vue de la théologie et du droit canon avec le principe de la connexion intime du jubilé avec la ville de Rome. L'analyse historique en met en évidence la tangibilité spirituelle et la forte charge religieuse qui poussaient les pèlerins à vénérer la tombe du Prince des Apôtres. Rome apparaissait comme un phare qui projette de la lumière sur les ténèbres et comme le prélude de la nouvelle Europe. Ayant survécu à l'écroulement de l'empire autour de son Evêque, Rome restait la dépositaire de la plus authentique civilisation et culture de la capitale de l'empire et la garantie des reconquêtes que l'humanité aurait pu accomplir. L'Europe médiévale s'était consolée de l'idée d'avoir à Rome les témoignages de sa propre foi religieuse et de la valeur, non seulement religieuse, des sépultures de Pierre et Paul. Les valeurs de la culture classique, de la sage Grèce et du savoir juridique de Rome, se côtoyaient dans l'Urbe avec la foi chrétienne et rayonnaient dans l'Orbe. De l'analyse historique des jubilés célébrés au vingtième siècle, et en allant à rebours, de ceux qui ont été célébrés aux cours des siècles précédents, Ravaglioli conclut que "durant les cent dernières années, la ville de Rome a vu s'accroître, dans la considération catholique, l'importance qui lui vient du fait d'être le lieu privilégié du rachat des fautes et de l'apaisement spirituel face aux grandes thématiques des buts de la vie humaine. Cette réflexion permet de relier la Rome de notre siècle avec l'Urbe de Boniface VIII qui mérite une reconnaissance inoubliable comme promoteur de l'image de Rome dans le monde". La conclusion historique ne peut, selon moi, qu'être unique, celle qui tout en étant consciente de toutes les déviances et misères des hommes et des choses, reprend la donnée de fond que l'on ne peut supprimer, celle d'une Rome "noble" de par ses origines, non purement humaine, et par le patrimoine chrétien qu'elle a toujours su conserver intègre à l'appui des faiblesses humaines, et par un destin de l'homme ouvert sur des horizons ultraterrestres avec une espérance pleine d'immortalité. La Rome vraie et éternelle est ici, et ne pourra jamais être diverse car elle a avec elle la parole qui est le chemin, la vérité, la vie!
|