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SACRÉE CONGRÉGATION POUR LA DOCTRINE DE LA FOI

INSTRUCTION SUR LES MARIAGES MIXTES

 

Le sacrement du mariage, que Notre-Seigneur Jésus-Christ a institué comme symbole de son union avec l’Église, pour qu’il puisse exercer pleinement son efficacité sanctifiante, et devienne ainsi pour les conjoints ce grand mystère (cf. Ep 5, 32) en vertu duquel leur communion de vie intime représente l’amour avec lequel le Christ s’offrit pour le salut des hommes, exige plus que tout autre chose la concorde pleine et parfaite des conjoints, spécialement sur le plan religieux. « Car le lien des cœurs se rompt d’ordinaire, il se relâche tout au moins, quand interviennent, dans les choses suprêmes que l’homme vénère, c’est-à-dire dans les vérités et les sentiments religieux, la dissemblance des esprits et la diversité des volontés » (Pie XI, Encyclique Casti connubii). Pour ces raisons, l’Église estime qu’il est de son grave devoir de sauvegarder et de maintenir le bien de la foi aussi bien chez les conjoints que chez les enfants. C’est pour cela précisément qu’elle s’emploie par tous les moyens à faire en sorte que les catholiques ne se marient qu’avec des catholiques.

Une preuve évidente de cette sollicitude de l’Église est la discipline ecclésiastique des mariages mixtes, sanctionnée dans les dispositions du Code de droit canonique, qui se réalise de façon concrète dans le double empêchement de religion mixte et de disparité de culte. Le premier de ces empêchements interdit les mariages des catholiques avec des non-catholiques baptisés, le mariage demeurant cependant valide (canons 1060-1064). Le deuxième empêchement rend invalide le mariage contracté par un catholique avec une personne non baptisée (canons 1070-1071).

Une autre marque évidente du souci de l’Église de préserver la sainteté du mariage chrétien, c’est la forme juridique de la manifestation du consentement. En effet, bien que dans le passé il y eût des règles différentes à ce sujet, on a toujours veillé à ce que ne fussent pas permis les mariages clandestins.

Guidés par cette même sollicitude, tous les pasteurs devront veiller à instruire les fidèles sur l’importance et l’excellence de ce sacrement. Qu’ils les avertissent des difficultés et des dangers que présente le mariage d’un catholique avec un chrétien non catholique, et à plus forte raison avec un non-chrétien. Que par tous les moyens opportuns, ils fassent en sorte que les jeunes gens se marient avec des catholiques.

On ne saurait toutefois nier que les conditions caractéristiques de notre temps, qui ont rapidement amené des transformations radicales dans la vie sociale et familiale, rendent plus difficile que par le passé l’observance de la discipline canonique concernant les mariages mixtes.

En vérité, dans les circonstances actuelles, les relations entre catholiques et non-catholiques sont beaucoup plus fréquentes, les modes de vie et les usages se sont rapprochés, de sorte que naît plus facilement entre eux l’amitié dont découle de plus fréquentes occasions de mariages mixtes, comme le montre l’expérience.

C’est pourquoi la sollicitude pastorale de l’Église exige aujourd’hui plus que jamais que la sainteté du mariage, en conformité avec la doctrine catholique, et la foi du conjoint catholique soient pleinement sauvegardées également dans les mariages mixtes, et que l’éducation catholique des enfants y soit assurée avec les plus grandes diligence et efficacité possibles.

Cette sollicitude pastorale est d’autant plus nécessaire que, comme on le sait, les non-catholiques ont des positions différentes aussi bien sur l’essence du mariage que sur ses propriétés, notamment sur l’indissolubilité, et donc sur le divorce et le remariage après divorce (civil).

Par conséquent, l’Église considère qu’il est de son devoir de prémunir ses fidèles afin qu’ils n’aient pas à courir de dangers touchant la foi ou à subir des dommages aussi bien d’ordre spirituel que d’ordre matériel.

Que l’on veille par conséquent à instruire comme il faut les fiancés sur la nature, les propriétés et les obligations du mariage, ainsi que sur les dangers à éviter.

De plus, on ne peut ignorer ici l’attitude que les catholiques doivent maintenant avoir avec les frères séparés de l’Église catholique, attitude qui a été solennellement tracée par le Concile œcuménique dans le Décret sur l’œcuménisme. Cette nouvelle discipline suggère que soient atténuées les rigueurs de la législation en vigueur sur les mariages mixtes, non pas certes pour ce qui est de droit divin, mais pour certaines normes de droit ecclésiastique par lesquelles souvent les frères séparés se sentent offensés. Il est aisé de comprendre que ce très grave problème n’a échappé en aucune façon au deuxième Concile œcuménique du Vatican qui fut convoqué par Notre prédécesseur Jean XXIII, d’heureuse mémoire, précisément pour répondre aux besoins actuels du peuple chrétien. De fait, les Pères conciliaires ont exprimé à ce propos différents avis qui ont été pesés attentivement, comme il se devait.

Par conséquent, après avoir consulté les Pasteurs sacrés intéressés à la matière, et après avoir attentivement évalué toutes les circonstances, les deux empêchements de religion mixte et de disparité de culte étant maintenus (mais la faculté étant accordée aux Ordinaires des lieux d’en dispenser, conformément aux dispositions contenues dans la Lettre apostolique Pastorale munus, n. 19 et 20, lorsqu’il existe des causes graves, et à condition que soient observées les prescriptions de la loi), et la législation propre à l’Église orientale étant sauve, en vertu de l’autorité de S. S. le Pape Paul VI, les dispositions suivantes sont prises et, si l’expérience est positive, elles seront définitivement introduites dans le Code de droit canonique dont la révision est actuellement en cours.

I. – 1) On ne devra jamais perdre de vue qu’il est nécessaire d’éloigner du conjoint catholique le danger pour sa foi et qu’il faut veiller avec diligence à l’éducation des enfants dans la religion catholique (cf. canon 1060).

2) L’Ordinaire du lieu ou le curé de la partie catholique devra avoir soin d’inculquer en termes graves l’obligation d’assurer pleinement le baptême et l’éducation des enfants dans la religion catholique. L’accomplissement de cette obligation sera garanti par une promesse explicite de la part du conjoint catholique c’est-à-dire par le moyen de cautions.

3) La partie non catholique devra être informée, avec la délicatesse voulue, mais en termes clairs, de la doctrine catholique touchant la dignité du mariage et surtout les principales propriétés de celui-ci qui sont l’unité et l’indissolubilité.

Cette même partie devra être informée de la grave obligation pour le conjoint catholique de protéger, conserver et professer sa foi, et de faire baptiser et élever en elle les enfants à naître.

Étant donné que cette obligation doit être garantie, la partie non catholique doit être invitée à promettre, ouvertement et sincèrement, qu’elle ne fera pas obstacle à l’accomplissement de ce devoir. Si la partie non catholique pense qu’elle ne peut pas faire cette promesse sans blesser sa conscience, l’Ordinaire doit soumettre ce cas au Saint-Siège avec tous ses éléments.

4) Bien que normalement ces promesses doivent être faites par écrit, l’Ordinaire a le pouvoir de décider – soit par des règles de caractère général, soit pour des cas particuliers – si ces promesses de la partie catholique ou de la partie non catholique, ou des deux, doivent être faites ou non par écrit. Il peut de même indiquer comment on doit en faire mention dans les actes de mariage.

II. – S’il arrive, comme c’est parfois le cas dans certaines régions, que l’éducation catholique des enfants soit rendue impossible, non pas tant par la volonté délibérée des conjoints que par les lois ou les coutumes des peuples, auxquelles les parties ne peuvent se soustraire, l’Ordinaire du lieu, tout bien considéré, pourra dispenser de cet empêchement, à condition que la partie catholique soit disposée, dans la mesure où elle le sait et le peut, à faire tout son possible pour que les enfants qui naîtront soient baptisés et élevés catholiquement et que soit garantie la bonne volonté de la partie non catholique.

En accordant ces atténuations, l’Église est animée aussi de l’espoir que soient abrogées les lois civiles contraires à la liberté humaine, telles que celles qui interdisent l’éducation catholique des enfants ou l’exercice de la religion catholique, et que par conséquent en cette matière on reconnaisse la force du droit naturel.

III. – Dans la célébration du mariage mixte, on doit observer la forme canonique prescrite par le canon 1094. Cela est requis pour la validité.

Mais si des difficultés se présentent, l’Ordinaire soumettra le cas au Saint-Siège avec tous ses éléments.

IV. – Quant à la forme liturgique, par dérogation aux canons 1102, 3 et 4, et 1109, 3, les Ordinaires des lieux pourront permettre, également pour la célébration des mariages mixtes, l’usage des rites sacrés, avec les bénédictions habituelles et l’allocution.

V. – Il faut absolument éviter toute célébration d’un mariage devant un prêtre catholique et un ministre non catholique qui accomplissent ensemble chacun son propre rite. Cependant, rien n’empêche qu’après la cérémonie religieuse, le ministre non catholique adresse des paroles de vœux et d’exhortation et que l’on récite en commun des prières avec les non-catholiques. Toutes ces choses sont permises avec l’approbation de l’Ordinaire du lieu et en prenant les précautions voulues pour éviter le danger d’étonnement.

VI. – Les Ordinaires des lieux et les curés veilleront attentivement à ce que les familles issues de mariages mixtes mènent une vie sainte, conformément aux promesses faites, spécialement pour ce qui est de l’instruction et de l’éducation catholique des enfants.

VII. – L’excommunication prévue par le canon 2319, § 1, n° 1, pour ceux qui contractent mariage devant un ministre non catholique, est abrogée. Les effets de cette abrogation sont rétroactifs.

En établissant ces règles, l’Église, comme nous l’avons dit plus haut, se propose de mieux répondre aux besoins actuels des fidèles et d’imprégner d’une charité plus intense les relations entre les catholiques et les non-catholiques.

Que ceux qui ont la mission d’enseigner aux fidèles la doctrine catholique, les curés surtout, se consacrent à cette tâche de toute leur âme et avec une sollicitude constante.

Qu’ils s’efforcent de s’en acquitter, en faisant preuve de la plus grande charité envers les fidèles et en tenant compte toujours du respect dû aux autres, c’est-à-dire aux non-catholiques et aux convictions qu’ils professent de bonne foi.

Les conjoints catholiques devront veiller enfin à affermir et à accroître en eux-mêmes le don de la foi. En menant toujours une vie familiale conforme aux vertus chrétiennes, ils donneront toujours à la partie non catholique et aux enfants un noble exemple.

Donné à Rome le 18 mars 1966.

 

Alfredo Card. Ottaviani
Pro-Préfet

Pietro Parente
Secrétaire