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JEAN-PAUL II - JOHN PAUL II - JUAN PABLO II Les grands signes de la présence de l'Esprit Il n'est certes pas possible de comprendre l'action de l'Esprit dans l'Église et dans le monde à travers des analyses statistiques ou à travers les apports des sciences humaines, parce qu'elle se situe à un autre niveau, qui est celui de la grâce, et est perçu par la grâçe. Il s'agit d'une action souvent cachée, mystérieuse, mais assurément efficace. L'Esprit Saint n'a pas perdu la force dynamique qu'il avait à l'époque de l'Église naissante : il agit aujourd'hui comme aux temps de Jésus et des Apôtres. Les merveilles qu'Il accomplit, qui sont racontées dans les Actes des Apôtres, se répètent de nos jours, mais restent souvent méconnues, puisque, dans de nombreuses parties du monde, l'humanité vit désormais dans des cultures sécularisées, qui interprètent la réalité comme si Dieu n'existait pas. [...] La conscience que l'Esprit agit dans le cÂur des croyants et qu'il agit dans les événements de l'histoire, invite à l'optimisme de l'espérance. Le premier grand signe de cette action, que je voudrais proposer à la réflexion commune, est paradoxalement cette crise elle-même que traverse le monde moderne : phénomène complexe qui, dans sa négativité, suscite souvent, par réaction, des invocations inquiètes à l'Esprit vivifiant, qui révèlent le désir poignant de la Bonne Nouvelle du Christ Sauveur, qui est présent dans le cÂur des hommes. Comment ne pas rappeler, à cet sujet, la sage lecture du monde contemporain réalisée par le Concile Âcuménique Vatican II dans la Constitution Pastorale Gaudium et spes (nn. 4-10)? Durant ces dernières décennies, la crise de notre temps, qui y est analysée, est devenue plus aiguë : le vide d'idéaux et de valeurs s'est bien souvent élargi ; le sens de la Vérité a diminué, et le relativisme moral s'est développé ; il semble souvent que prévaut une éthique individualiste, utilitaire, sans points fermes de référence ; beaucoup soulignent que l'homme moderne, quand il refuse Dieu, se retrouve moins homme, rempli de peurs et de tensions, fermé sur lui-même, insatisfait, égoïste. Les conséquences pratiques sont bien visibles : le modèle d'une utilisation exagérée des biens de consommation, même s'il est grandement critiqué, domine toujours plus ; les préoccupations, souvent légitimes, à l'égard des nombreux problèmes matériels, risquent d'être tellement absorbantes, que les rapports humaines deviennent froids, difficiles. Les personnes découvrent qu'elles sont renfermées, agressives, incapables de sourire, de saluer, de dire " merci ", de s'intéresser aux problèmes de l'autre. En raison d'une série complexe de facteurs économiques, sociaux et culturels, les sociétés les plus évoluées enregistrent une " stérilité " préoccupante, qui est à la fois spirituelle et démographique. Mais c'est précisément de ces situations, qui conduisent les personnes à la limite du désespoir, que naît souvent la réaction d'invoquer Celui qui est Seigneur et qui donne la vie, parce que l'homme ne peut vivre sans idéal et sans espérance. Un deuxième grand signe de la présence de l'Esprit est la renaissance du sens religieux chez les peuples. Il s'agit d'un mouvement qui n'est pas sans ambiguïtés, comme le montre à l'évidence en effet l'insuffisance théorique et pratique de philosophies et d'idéologies athées, des matérialismes qui réduisent l'horizon de l'homme aux choses de la terre. L'homme ne se suffit pas à lui-même. C'est désormais une conviction bien répandue que la domination de la nature et du cosmos, les sciences et les techniques les plus perfectionnées ne suffisent pas à l'homme, parce qu'elles ne sont pas en mesure de lui révéler la signification ultime de la réalité : ce sont de simples instruments, et non pas des fins pour la vie de l'homme et pour le cheminement de l'humanité. Et, à côté du réveil religieux, il est important de relever " dans les peuples, la reconnaissance croissante des valeurs évangéliques que Jésus a incarnées dans sa vie : paix, justice, fraternité, attention aux plus petits " (Redemptoris missio, n. 3). Si nous considérons l'histoire des deux derniers siècles, nous nous rendons compte combien se sont accrus chez les peuples la conscience de la valeur de la personne humaine et des droits de l'homme et de la femme, l'aspiration universelle à la paix, le désir de dépasser les frontières et les divisions raciales, la tendance à la rencontre entre peuples et cultures, la tolérance à l'égard de ceux qui sont considérés comme différents, l'engagement dans des actions de solidarité et de volontariat, le refus de l'autoritarisme politique avec la consolidation de la démocratie, et l'aspiration à une justice internationale plus équitable dans le domaine économique. Comment ne pas voir en tout cela l'action de la Providence Divine, qui oriente l'humanité et l'histoire vers des conditions de vie plus dignes pour tous? Nous ne pouvons en conséquence être pessimistes. La foi en Dieu invite plutôt à l'optimisme, cet optimisme qui jaillit du message évangélique : " Si l'on regarde superficiellement notre monde, on est frappé par bien des faits négatifs qui peuvent porter au pessimisme. Mais c'est là un sentiment injustifié : nous avons foi en Dieu... Dieu est en train de préparer pour le christianisme un grand printemps que l'on voit déjà poindre " (Redemptoris missio, n. 86). [...] Il est hors de doute que le Troisième Millénaire se présente comme un appel renouvelé à la mission universelle, et, en même temps, à l'inculturation de l'Évangile de la part des différentes Églises locales. Message pour la Journée missionnaire mondiale, 31-5-1998. Le concept chrétien d'homme a marqué la culture européenne La paix véritable naît du cÂur. " Au milieu du continent tu es présent, semblable à un cÂur fort ", dit votre hymne fédéral. Au cours des dernières années, ce pays au cÂur de l'Europe s'est uni à la communauté de ceux qui se sont mis en marche vers un but déterminé : l'unification du continent. Pour édifier la nouvelle Europe, il faut de nombreuses mains mais surtout de nombreux cÂurs qui ne battent pas que pour la carrière et l'argent, mais bien pour l'amour de Dieu et de l'homme. Mons souhait est que le cÂur de l'Europe reste fort et sain. Je prie précisément pour cela afin que la pensée et l'action de tous les Autrichiens, hommes et femmes, soient inspirées de la ferme volonté de respecter la dignité de chaque homme et d'accepter la vie sans réserves, sous toutes ses formes et à tous ses stades. En effet, parmi les richesses du patrimoine chrétien c'est tout d'abord le concept d'homme qui a profondément marqué la culture européenne. Pour projeter de façon appropriée une maison, il faut un instrument de mesure adapté. Les constructeurs de la maison européenne disposent de l'image de l'homme que le christianisme a inculquée dans l'antique culture du continent, jetant les bases à partir desquelles agir avec la créativité que tous admirent. Le concept de l'homme créé à l'image et à la ressemblance de Dieu n'est donc pas une Âuvre de musée, mais représente la clef de voûte de l'Europe d'aujourd'hui, dans laquelle les nombreuses pierres de construction des divers peuples, cultures et religions peuvent être unies pour l'édification du nouvel édifice. Sans ce critère de mesure, la maison européenne en construction risque de ne pas durer et de s'effondrer. Discours lors de la cérémonie de bienvenue en Autriche, 19-6-1998. La escuela debe ayudar a desarrollar todas la dimensiones de personalidad El comienzo de un año escolar brinda la ocasión para reflexionar en lo que la escuela está llamada a ser. En la organización escolar muchas cosas se pueden y, probablemente, se deben mejorar. Pero debe quedar clara una cosa: la escuela no puede limitarse a ofrecer a los jóvenes nociones en los diversos campos del conocimiento; también debe ayudarles a buscar, en la dirección correcta, el sentido de la vida. De ahí deriva su responsabilidad, especialmente en una época como la actual, en la que los grandes cambios sociales y culturales amenazan a veces con poner en duda incluso los valores morales fundamentales. La escuela debe ayudar a los muchachos a saber captar esos valores, favoreciendo el desarrollo armonioso de todas las dimensiones de su personalidad: la física, la espiritual, la cultural y la relacional. Cumple esa función acompañando a la familia, a la que corresponde la tarea primaria e inalienable de la educación. Por eso los padres tienen, entre otras cosas, el derechoÂdeber de elegir la escuela que responda mejor a sus propios valores y a las exigencias pedagógicas de sus hijos. Ángelus en Castelgandolfo, 13-9-1998. FIDES ET RATIO Pluralisme des cultures et valeurs universelles On peut sans doute objecter que, dans la situation actuelle, plutôt qu'à la philosophie, le théologien devrait recourir à d'autres formes de savoir humain, telles l'histoire et surtout les sciences, dont tous admirent les récents et extraordinaires développements. D'autres personnes, en fonction d'une sensibilité croissante à la relation entre la foi et la culture, soutiennent que la théologie devrait se tourner plus vers les sagesses traditionnelles que vers une philosophie d'origine grecque et eurocentrique. D'autres encore, à partir d'une conception erronée du pluralisme des cultures, vont jusqu'à nier la valeur universelle du patrimoine philosophique accueilli par l'Église. Les éléments précédemment soulignés, déjà présentés d'ailleurs dans l'enseignement conciliaire, (cf. Gaudium et Spes, 15 ; Ad Gentes, 22) contiennent une part de vérité. La référence aux sciences, utile dans de nombreuses circonstances parce qu'elle permet une connaissance plus complète de l'objet d'étude, ne doit cependant pas faire oublier la médiation nécessaire d'une réflexion typiquement philosophique, critique et à visée universelle, requise du reste par un échange fécond entre les cultures. Je tiens à souligner le devoir de ne pas s'arrêter aux aspects singuliers et concrets, en négligeant la tâche première qui consiste à manifester le caractère universel du contenu de la foi. On ne doit pas oublier en outre que l'apport particulier de la pensée philosophique permet de discerner, dans les diverses conceptions de la vie comme dans les cultures, " non pas ce que les hommes pensent, mais quelle est la vérité objective " ( S. Thomas d'Aquin, De cælo, 1, 22). Ce ne sont pas les opinions humaines dans leur diversité qui peuvent être utiles à la théologie, mais seulement la vérité. Rencontre de l'Évangile avec les cultures Le thème de la relation avec les cultures mérite ensuite une réflexion spécifique, même si elle n'est pas nécessairement exhaustive, pour les implications qui en découlent du point de vue philosophique et du point de vue théologique. Le processus de rencontre et de confrontation avec les cultures est une expérience que l'Église a vécue depuis les origines de la prédication de l'Évangile. Le commandement du Christ à ses disciples d'aller en tous lieux, " jusqu'aux extrémités de la terre " (Ac 1, 8), pour transmettre la vérité révélée par lui, a mis la communauté chrétienne en état de vérifier très rapidement l'universalité de l'annonce et les obstacles qui découlent de la diversité des cultures. Un passage de la lettre de saint Paul aux chrétiens d'Éphèse donne un bon éclairage pour comprendre comment la communauté primitive a abordé ce problème. L'Apôtre écrit : " Or voici qu'à présent, dans le Christ Jésus, vous qui jadis étiez loin, vous êtes devenus proches, grâce au sang du Christ. Car c'est lui qui est notre paix, lui qui des deux peuples n'en a fait qu'un seul, détruisant la barrière qui les séparait " (2, 13-14). À la lumière de ce texte, notre réflexion s'élargit à la transformation qui s'est produite chez les Gentils, lorsqu'ils ont accédé à la foi. Devant la richesse du salut opéré par le Christ, les barrières qui séparaient les diverses cultures tombent. La promesse de Dieu dans le Christ devient maintenant un don universel : elle n'est plus limitée à la particularité d'un peuple, de sa langue et de ses usages, mais elle est étendue à tous, comme un patrimoine dans lequel chacun peut puiser librement. Des divers lieux et des différentes traditions, tous sont appelés dans le Christ à participer à l'unité de la famille des fils de Dieu. C'est le Christ qui permet aux deux peuples de devenir " un ". Ceux qui étaient " les lointains " deviennent " les proches ", grâce à la nouveauté accomplie par le mystère pascal. Jésus abat les murs de division et réalise l'unification de manière originale et suprême, par la participation à son mystère. Cette unité est tellement profonde que l'Église peut dire avec saint Paul : " Vous n'êtes plus des étrangers ni des hôtes ; vous êtes concitoyens des saints, vous êtes de la maison de Dieu " (Ep 2, 19). Par une mention aussi simple, une grande vérité est décrite : la rencontre de la foi avec les différentes cultures a donné naissance de fait à une nouvelle réalité. Lorsqu'elles sont profondément enracinées dans l'humain, les cultures portent en elles le témoignage de l'ouverture spécifique de l'homme à l'universel et à la transcendance. Elles présentent toutefois des approches diverses de la vérité, qui se révèlent d'une indubitable utilité pour l'homme, auquel elles donnent des valeurs capables de rendre son existence toujours plus humaine (Cf. Gaudium et spes, nn. 53-59). Du fait que les cultures se réfèrent aux valeurs des traditions antiques, elles sont par elles-mêmes  sans doute de manière implicite, mais non pour autant moins réelle  liées à la manifestation de Dieu dans la nature, comme on l'a vu précédemment en parlant des textes sapientiaux et de l'enseignement de saint Paul. L'Évangile et les cultures Étant en relation étroite avec les hommes et avec leur histoire, les cultures partagent les dynamismes mêmes selon lesquels le temps humain s'exprime. On enregistre par conséquent des transformations et des progrès dus aux rencontres que les hommes développent et aux échanges qu'ils réalisent réciproquement dans leurs modes de vie. Les cultures se nourrissent de la communication des valeurs ; leur vitalité et leur subsistance sont données par leur capacité de rester accueillantes à la nouveauté. Quelle est l'explication de ces dynamismes? Situé dans une culture, tout homme dépend d'elle et influe sur elle. L'homme est à la fois fils et père de la culture dans laquelle il est immergé. Dans chacune des expressions de sa vie, il porte en lui quelque chose qui le caractérise au milieu de la création : son ouverture constante au mystère et son désir inextinguible de connaissance. Par conséquent, chaque culture porte imprimée en elle et laisse transparaître la tension vers un accomplissement. On peut donc dire que la culture a en elle la possibilité d'accueillir la révélation divine. La manière dont les chrétiens vivent leur foi est, elle aussi, imprégnée par la culture du milieu ambiant et elle contribue, à son tour, à en modeler progressivement les caractéristiques. À toute culture, les chrétiens apportent la vérité immuable de Dieu, révélée par Lui dans l'histoire et dans la culture d'un peuple. Au long des siècles, l'événement dont furent témoins les pèlerins présents à Jérusalem au jour de la Pentecôte continue ainsi à se reproduire. Écoutant les Apôtres, ils se demandaient : " Ces hommes qui parlent, ne sont-ils pas tous Galiléens? Comment se fait-il alors que chacun de nous les entende dans sa langue maternelle? Parthes, Mèdes et Élamites, habitants de la Mésopotamie, de la Judée et de la Cappadoce, des bords de la mer Noire, de la province d'Asie, de la Phrygie, de la Pamphylie, de l'Égypte et de la Libye proche de Cyrène, Romains résidant ici, Juifs de naissance et convertis, Crétois et Arabes, tous nous les entendons proclamer dans nos langues les merveilles de Dieu " (Ac 2, 7-11). Tandis qu'elle exige des personnes destinataires l'adhésion de la foi, l'annonce de l'Évangile dans les différentes cultures ne les empêche pas de conserver une identité culturelle propre. Cela ne crée aucune division, parce que le peuple des baptisés se distingue par une universalité qui sait accueillir toute culture, favorisant le progrès de ce qui, en chacune d'elles, conduit implicitement vers la pleine explication dans la vérité. En conséquence, une culture ne peut jamais devenir le critère de jugement et encore moins le critère ultime de la vérité en ce qui concerne la révélation de Dieu. L'Évangile n'est pas opposé à telle ou telle culture, comme si, lorsqu'il la rencontre, il voulait la priver de ce qui lui appartient et l'obligeait à assumer des formes extrinsèques qui ne lui sont pas conformes. À l'inverse, l'annonce que le croyant porte dans le monde et dans les cultures est la forme réelle de la libération par rapport à tout désordre introduit par le péché et, en même temps, elle est un appel à la vérité tout entière. Dans cette rencontre, les cultures non seulement ne sont privées de rien, mais elles sont même stimulées pour s'ouvrir à la nouveauté de la vérité évangélique, pour en tirer une incitation à se développer ultérieurement. Lettre encyclique Fides et Ratio, 69-71. L'Esprit du Seigneur et " les semences de vérité " dans la pensée et la culture humaine En reprenant une affirmation du Livre de la Sagesse (1, 7), le Concile Âcuménique Vatican II nous enseigne que " l'Esprit du Seigneur ", qui comble de ses dons le Peuple de Dieu en pèlerinage dans l'histoire, " replet orbem terrarum ", remplit tout l'univers (cf. Gaudium et spes, n. 11). Il guide sans cesse les hommes vers la plénitude de la vérité et de l'amour que Dieu le Père a communiquée en Jésus-Christ. Cette conscience profonde de la présence et de l'action de l'Esprit Saint illumine depuis toujours la conscience de lÂÉglise, faisant en sorte que tout ce qui est authentiquement humain trouve un écho dans le cÂur des disciples du Christ (cf. Ibid., n. 1). Déjà, dans la première moitié du II siècle, le philosophe saint Justin pouvait écrire : " Tout a toujours été affirmé de façon éminente et ce que découvrirent ceux qui font de la philosophie ou instituent des lois, a été accompli par eux à travers la recherche ou la contemplation d'une partie du Verbe " (II Apol., 10, 1-3). L'ouverture de l'esprit humain à la vérité et au bien s'accomplit toujours dans le cadre de la " Lumière véritable qui éclaire tout homme " (Jn 1, 9). Cette lumière est le Christ Seigneur lui-même, qui a illuminé dès les origines les pas de l'homme et qui est entré dans son " cÂur ". A travers l'Incarnation, dans la plénitude des temps, la Lumière est apparue au monde dans toute sa splendeur, brillant aux yeux de l'homme comme splendeur de la vérité (cf. Jn 14, 6). Déjà préannoncée dans l'Ancien Testament, la manifestation progressive de la plénitude de la vérité qu'est le Christ Jésus s'accomplit au cours des siècles par l'oeuvre de l'Esprit Saint. Cette action spécifique de l'" Esprit de Vérité " (cf. Jn 14, 17 ; 15, 26 ; 16, 13) concerne non seulement les croyants, mais, de façon mystérieuse, tous les hommes qui, ignorant lÂÉvangile sans faute de leur part, cherchent sincèrement la vérité et s'efforcent de vivre avec rectitude (cf. Lumen gentium, n. 16). Sur les traces des Pères de l'Église, saint Thomas d'Aquin peut considérer qu'aucun esprit n'est " aussi ténébreux qu'il ne puisse participer en rien à la lumière divine. En effet, toute vérité connue par quiconque est entièrement due à cette "lumière qui brille dans les ténèbres" ; car toute vérité, prononcée par quiconque, provient de l'Esprit Saint " (Super Ioannem, 1, 5 lect ; 3, n. 103). C'est pourquoi l'Église encourage chaque recherche authentique de la pensée humaine et elle estime sincèrement le patrimoine de sagesse élaboré et transmis par les diverses cultures. En celui-ci, l'intarissable créativité de l'esprit humain, guidé par l'Esprit de Dieu vers la plénitude de la vérité, a trouvé son expression. La rencontre entre la parole de vérité prêchée par l'Église et la sagesse exprimée par les cultures et élaborée par les philosophies, invite ces dernières à s'ouvrir et à trouver leur propre accomplissement dans la révélation qui vient de Dieu. Comme le souligne le Concile Vatican II, cette rencontre enrichit l'Église, la rendant capable de pénétrer toujours plus au cÂur de la vérité, de l'exprimer à travers les langages des diverses traditions culturelles et de la présenter  immuable dans la substance  sous la forme la plus adaptée au changement des temps (cf. Gaudium et spes, n. 44). La confiance dans la présence et dans l'action de l'Esprit Saint, également dans le ferment de la culture de notre temps, peut constituer, à l'aube du troisième millénaire, les prémisses pour une nouvelle rencontre entre la vérité du Christ et la pensée humaine. Dans la perspective du grand Jubilé de l'An 2000, il faut approfondir l'enseignement du Concile à propos de cette rencontre toujours renouvelée et féconde entre la vérité révélée, conservée et transmise par l'Église, et les multiples formes de la pensée et de la culture humaine. Malheureusement, la constatation de Paul VI dans son Exhortation apostolique Evangelii nuntiandi, selon laquelle " la rupture entre Évangile et culture est sans doute le drame de notre époque " (n. 20) est encore valable aujourd'hui. Pour remédier à cette rupture, qui comporte de graves conséquences pour les consciences et les comportements, il faut réveiller chez les disciples de Jésus-Christ ce regard de foi, en mesure de découvrir les " semences de la vérité " répandues par l'Esprit Saint chez nos contemporains. Nous pouvons également contribuer à leur purification et maturation à travers l'art patient du dialogue, qui vise en particulier à la présentation du visage du Christ dans toute sa splendeur. Il est en particulier nécessaire de bien garder à l'esprit le grand principe formulé par le dernier Concile, que j'ai voulu rappeler dans l'Encyclique Dives in misericordia : " Tandis que les divers courants de pensée, anciens et contemporains, étaient et continuent à être enclins à séparer et même à opposer théocentrisme et anthropocentrisme, lÂÉglise au contraire, à la suite du Christ, cherche à assurer leur conjonction organique et profonde dans l'histoire de l'homme " (n. 1). Ce principe se révèle fécond non seulement pour la philosophie et la culture humaniste, mais également pour les domaines de la recherche scientifique et de l'art. En effet, l'homme de science qui " s'efforce, avec persévérance et humilité, de pénétrer les secrets des choses, celui-là, même s'il n'en a pas conscience, est comme conduit par la main de Dieu, qui soutient tous les êtres et les fait ce qu'ils sont " (Gaudium et spes, n. 36). D'autre part, l'artiste véritable a le don de l'intuition et d'exprimer l'horizon lumineux et infini dans lequel l'existence de l'homme et du monde est plongée. S'il est fidèle à l'inspiration qui l'habite et le transcende, il acquiert une connaturalité secrète avec la beauté dont l'Esprit Saint revêt la création. Que l'Esprit Saint, Lumière qui illumine les esprits et divin " artiste du monde " (S. Bulgakov, Le Paraclet, Bologne 1971, p. 311), guide l'Église et l'humanité de notre temps sur les sentiers d'une nouvelle rencontre surprenante avec la Splendeur de la Vérité. Allocution au cours de l'Audience générale, 16-9-1998. A culture which rejects God cannot be considered fully human In fact, there is no true progress without respect for the ethical dimension of culture, of scholarly research and of all human activity. TodayÂs ethical relativism, obscuring as it does moral values, leads to modes of behaviour which destroy the dignity of the person. This in turn creates serious problems for truly human development in every aspect of life. It is also clear that the good of the person, which is the ultimate goal of every cultural and scholarly enterprise, can never be sundered from consideration of the common good. In this regard, I recall the inscription found in the Great Council Hall in Dubrovnik: "Obliti privatorum, publica curate". It is my hope that the commitment of thinkers and scholars, inspired by true values, will always be seen as a generous and disinterested service of the human person and of society. It must never be bent to serve ends contrary to this supreme goal. Since culture has as its ultimate objective the service of the true good of the person, it is not surprising that, in seeking cultural progress, society finds the Church at its side. The Church too directs her pastoral care towards "the entire reality of the individual person, in the unity of body and soul, heart and conscience, intellect and will" (Gaudium et Spes, 3). The service of the human person is the meeting-point between the Church and the world of learning and culture. Down the course of the centuries, this meeting has proven to be singularly fruitful. With its treasury of luminous truths about the various aspects of life, the Gospel has very significantly enriched the answers devised by reason, ensuring that they match more exactly the deepest expectations of the human heart. Despite the misunderstandings which have arisen at different times, the Church has always been very sensitive to the values of culture and scholarly research. [Â
] In this region, where different world-views have mingled for centuries, there is need of a continuing common commitment in favour of culture, without indulging in sterile contrasts, but affirming instead attitudes of respect and conciliation. This does not mean a renunciation of oneÂs own identity and culture. The roots, the heritage and the identity of each people, in which there is something genuinely human, represent a great resource for the international community. [Â
] Universities are the privileged place for a dialogue which can work for the good of the new generation, giving young people direction in their moral choices and their active participation in society. [Â
] [The] new flourishing of values will be the strongest bastion against todayÂs challenges of consumerism and hedonism. Thus, on a sound basis of values, the human person, the family and society as a whole will be able to develop in accordance with the truth, experiencing joy and hope, with a gaze that is turned to the eternal destiny which God has prepared for every human being. Thus will be avoided in the future the drama of the separation between culture and the Gospel, which has so troubled our age (cf. Paul VI, Evangelii Nuntiandi, 20). A culture which rejects God cannot be considered fully human, because it excludes from its vision the One who has created man in his own image and likeness, has redeemed him through the work of Christ, and has consecrated him with the anointing of the Holy Spirit. This is why the human person, and every aspect of the person, must be the focus of culture in all its forms and the reference-point of every scholarly endeavour. [Â
] A special word finally to the men and women of learning and culture who are professing Christians: to them is entrusted the task of ceaselessly evangelizing the world in which they work. Their hearts therefore must be open to the promptings of the Holy Spirit, that "Spirit of truth" who guides us "to the fullness of truth" (cf. Jn 16:13). This lofty task requires constant study of all that is involved in our attachment in faith to Christ, "the true light who enlightens all people" (Jn 1:9), "the power and wisdom of God" (1 Cor 1:24). For "all things were created through him and for him; he is before all things and in him all things hold together" (Col 1:16-17). May each of you assume this lofty task with pride and make every effort to fulfill it with all generosity. Message to the world of culture and learning from Zagreb, 3-10-1998.
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