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INAUGURATION DE LA XXI CONFÉRENCE INTERNATIONALE SUR LE THÈME:
"LES ASPECTS PASTORAUX DU TRAITEMENT DES MALADIES INFECTIEUSES"
(CITÉ DU VATICAN, 23-25 NOVEMBRE 2006)

INTERVENTION DU CARDINAL JAVIER LOZANO BARRAGÁN

Salle du Synode
Jeudi 23 novembre 2006

 

 

Le thème de la XXI Conférence internationale de cette année est:  "Les aspects pastoraux du traitement des maladies infectieuses". Il s'agit d'un thème qui revêt une grande actualité et un grand intérêt pour l'Eglise. Les personnes touchées par le virus Ebola, le SRAS, le VIH ou par la grippe aviaire et qui se trouvent dans une situation de faiblesse, quel que soit le danger que présente leur infection, doivent être soignées, assistées et accompagnées spirituellement et pastoralement dans les Centres appartenant aux divers diocèses, Ordres et Congrégations religieuses de l'Eglise catholique.

Au cours de cette Conférence internationale du Conseil pontifical pour la Pastorale des Services de la Santé, nous nous engagerons à approfondir ce devoir qui se réalise de façon si efficace pour trouver une nouvelle lumière dans l'Evangile et pour améliorer ainsi notre action.

Comme c'est la coutume dans nos Conférences, après une introduction à la lumière de la Parole de Dieu, nous considérerons la réalité du problème que nous étudions, son explication et les perspectives pratiques d'action. Je me permets de placer l'introduction dans ce même mouvement qui caractérise toute la Conférence:  c'est-à-dire que je ferai référence à la réalité des maladies infectieuses dans le monde d'aujourd'hui; je m'efforcerai de réfléchir sur la profonde solidarité qui existe à la base de tout le Message évangélique et les maladies infectieuses, et je proposerai certaines lignes d'action. Il s'agit donc d'une première approche, qui sera développée par la suite de façon adéquate dans les trois parties de notre Conférence par les participants qualifiés qui nous honorent de leur présence.

I. La réalité:  problématique actuelle des maladies nouvelles

Il y a encore quelques années, les maladies infectieuses étaient considérées comme un problème du passé, mais la récente apparition du SIDA, la reprise de l'épidémie de la tuberculose, la diffusion de maladies bactériennes inhabituelles et la propagation de nouvelles infections virales, constituent de sérieuses menaces pour la santé publique mondiale.

On entend par maladie infectieuse une pathologie due à la contagion de l'organisme humain par des micro-organismes:  bactéries, virus, champignons, parasites, etc. accompagnée par l'apparition conséquente de symptômes caractéristiques de la maladie spécifique.

De tous temps, de grandes épidémies et pandémies provoquées par des agents pathogènes ont dévasté le monde:  peste, lèpre, variole, malaria, méningite, choléra, syphillis, gonorrhée, tuberculose, poliomyélite... La médecine espérait, après la découverte des antibiotiques, pouvoir un jour éradiquer toutes les maladies infectieuses. Mais les récents échecs, comme la menace de nouveaux agents pathogènes, le retour des anciens ennemis et le développement de nouvelles souches résistant aux antibiotiques, nous rappellent que nous ne devons jamais baisser la garde. La sagesse veut que, dans la guerre contre les germes, l'on ne se repose jamais sur ses lauriers. En effet, au cours des dernières années, sont apparues de nombreuses maladies, comme le SIDA à la fin du XX siècle, qui est devenue aujourd'hui une pandémie ayant contaminé 40 millions de personnes dans le monde et récemment, nous avons assisté à l'apparition du SRAS, du virus Ebola, et de la grippe aviaire.

Les micro-organismes sont partout. Ils vivent dans les organismes animaux et végétaux, dans la terre et dans l'eau, sont transportés par les courants d'air. Ils survivent en l'absence d'oxygène et de lumière solaire. Ils forment des colonies denses sur tout type de superficie artificielle et leur cycle vital leur permet d'avoir un cycle de reproduction et un métabolisme spécifique.

1. Transmission

La transmission d'une maladie infectieuse exige le passage d'un agent infectant d'une source d'infection à un ou plusieurs individus réceptifs, c'est-à-dire pouvant contracter une infection. Ce passage a lieu suivant des modalités qui peuvent varier selon le type de micro-organisme et sa diffusion dans l'environnement. On peut donc décrire ce que l'on appelle la chaîne de contamination:  La cause ou la source de l'infection, dans ce cas spécifique, représente l'origine de l'infection qui a permis la transmission du micro-organisme du réservoir d'infection à un sujet réceptif. Le réservoir d'infection est constitué par l'organisme, animal ou végétal, ou par l'environnement dans lequel le micro-organisme vit et se multiplie habituellement. La voie d'élimination représente la voie à travers laquelle un organisme infecté élimine les micro-organismes. Les micro-organismes sont habituellement éliminés à travers des sécrétions et excrétions. Elles peuvent être de plusieurs types:  intestinales:  maladies à transmission oro-fécale (germes transmis par voie digestive à travers l'eau ou la nourriture contaminées et éliminées par les selles); respiratoires:  maladies à transmission aérienne. La transmission a lieu à travers des gouttes microscopiques de salive qui sont émises par un porteur à travers la toux et les éternuements ou encore la parole. Génito-urinaires:  maladies à transmission sexuelle. Transcutanées:  maladies à transmission parentérale. Une peau intacte représente une excellente barrière contre les micro-organismes, mais des lésions, mêmes minimes, suffisent à laisser pénétrer les germes.

2. Voies de transmission

Les principales formes de propagation de ces maladies infectieuses et d'autres maladies ont lieu à travers cinq voies. La première est due à des infections d'origine alimentaire:  soulignons que l'industrialisation de la chaîne alimentaire fournit aux agents pathogènes de nouvelles occasions de rencontrer facilement un terrain humain. Cela est dû à diverses causes, parmi lesquelles nous pouvons identifier les suivantes:  l'élevage intensif de poissons (saumons),  de  poulets,  de lapins; le transport d'aliments à travers le monde avec les probables interruptions de la chaîne du froid et la possibilité de contamination (bactéries telles que Listeria, Yersinia...); la préparation industrielle d'aliments tels que la viande.

La deuxième voie concerne les infections respiratoires liées aux dispositifs de conditionnement de l'air ou de l'eau. C'est le cas de la légionelle pneumophile, causée par les bactéries qui se développent dans les circuits hydriques, les réfrigérateurs, les installations d'air conditionné...

La troisième concerne les infections liées aux voyages dans le monde:  maladies diarrhéiques et hémorragiques, malaria, fièvre jaune...

La quatrième concerne les infections liées aux modifications de l'environnement:  avec la déforestation, l'homme peut entrer en contact avec les germes pathogènes.

La cinquième concerne les infections liées aux nouvelles technologies médicales:  les infections nosocomiales. Certains instruments utilisés en médecine sont capables de transmettre des gènes pathogènes; cathéters, sondes urinaires... Dans le milieu hospitalier, il existe toujours des risques d'infection du VIH et de l'hépatite.

3. Situation actuelle et épidémiologie des maladies infectieuses

Les maladies infectieuses sont très nombreuses et touchent les organes et appareils les plus divers, donnant lieu aux manifestations cliniques les plus variées:  maladies respiratoires, exanthèmes, gastroentérites, neuropathies, et autres manifestations dans lesquelles celles-ci jouent le rôle de catalysateurs, pathologies de type auto-immunes et cancers. Dans ce contexte, certaines formes infectieuses peuvent sembler insignifiantes comparées au SIDA; toutefois, dans des contextes épidémiologiques déterminés, un grand nombre d'entre elles ont ou ont eu un poids très important; par exemple, les diarrhées infectieuses dans les pays en voie de développement, les hépatites virales, la malaria, la variole, la lèpre, la grippe, la tuberculose...

Pendant longtemps, les maladies infectieuses comme la peste noire, la syphillis, le choléra, la tuberculose, la variole, la diphtérie, la grippe espagnole, la scarlatine, la malaria, la fièvre jaune, le typhus, la rougeole, représentaient les premières causes de mortalité dans le monde. En 1798, Edward Jenner découvrit le vaccin contre la variole. En 1870, Louis Pasteur découvrit le premier microbe, responsable d'une maladie infectieuse, - la maladie des vers à soie - et mit ainsi fin à la théorie de la génération spontanée en publiant, en 1878, "La théorie des germes". En 1880, Louis Pasteur élabora le vaccin contre le choléra des poulets. En 1882, Robert Koch découvrit le bacille de la tuberculose. En 1885, Louis Pasteur mit au point le vaccin contre la rage. En 1923, Gaston Ramon découvrit l'anatoxine tétanique et dyphtérique. En 1921, Albert Calmette et Camille Guérin découvrirent le BCG (vaccin contre la tuberculose). En 1929, Alexander Fleming découvrit la pénicilline et ses propriétés bactéricides, ouvrant la voie à la thérapie des maladies infectieuses par les antibiotiques.

4. Les années d'illusion

De 1940 à 1970, nous nous trouvons face à ce que nous pouvons définir, dans le domaine des maladies infectieuses, les années d'illusion. La pénicilline a été utilisée pour la première fois pour guérir un patient atteint de septicémie par staphylocoque. Par la suite, d'autres familles de pénicilline ont été découvertes. Puis, au cours de cette période, dans les pays occidentaux, grâce à l'utilisation des antibiotiques, nous avons assisté à une réduction importante de la mortalité. Au cours de la même période ont été découverts les vaccins contre la coqueluche, la poliomyélite, la rougeole, les oreillons, la varicelle. En 1967, l'OMS a lancé la campagne internationale pour éradiquer la variole, qui frappait chaque année 15 millions de personnes et en tuait 2 millions. Au cours de cette période, il est indubitable que des progrès spectaculaires ont été réalisés dans les domaines de la microbiologie, de l'immunologie, de la biologie moléculaire, de l'ingénierie génétique, favorisant le diagnostic, l'étude et la recherche de nouveaux médicaments et vaccins contre ces agents pathogènes infectieux.

5. Les années de désillusion

Mais, de 1970 à aujourd'hui, nous pouvons dire que nous avons vécu des années de scepticisme et de désillusion. En effet, les microbes développent des résistances. A cause de l'utilisation non contrôlée d'antibiotiques et d'antiviraux, les bactéries et les virus pathogènes deviennent résistants, et même plurirésistants à travers le phénomène de sélection de mutations ou de transfert de gènes résistants. C'est ainsi qu'apparaissent ou que réapparaissent des maladies infectieuses. Parmi les maladies émergentes, figurent:  le virus Ebola, la légionellose, le VIH, le HCV, le HBV, le SRAS... (hépatite C, hépatite V). Quant aux maladies réémergentes, elles réapparaissent en grand nombre sous des formes plus virulentes avec des micro-organismes multirésistants aux médicaments. L'exemple typique est la tuberculose, qui avait été vaincue par le passé et qui frappe à nouveau, avec le SIDA, de nombreuses personnes atteintes de déficit immunitaire grave.

6. Maladies entraînant la mort

Les  maladies infectieuses sont responsables de 43% des décès dans les pays en voie de développement contre 1% dans les pays industrialisés. Il faut ajouter que 15% des tumeurs sont d'origine infectieuse. Par exemple, les tumeurs du foie peuvent être provoquées par le HBV ou le HCV; celle de la peau par le HHV-8 (virus de l'herpès), celle du col de l'utérus par le papillomavirus; celle du nasopharynx par le virus VEB (virus d'Eptstein-Barr); celle de l'estomac par la bactérie helicobacter pylori. Toutefois, 90% des décès causés par les maladies infectieuses dans le monde sont provoqués uniquement par six groupes d'agents infectieux.

On rapporte que les six principales maladies infectieuses qui frappent aujourd'hui le monde, avec le nombre de décès qu'elles provoquent par an, sont:  SIDA/VIH:  3,1 millions en 2004. Maladies respiratoires aiguës bactériennes:  3 millions par an. Maladies diarrhéiques (rotavirus, adénovirus, shigellose, Escherichia coli, choléra, fièvre typhoïde):  2, 5 millions par an. Tuberculose:  environ 2 millions par an. Malaria:  plus d'un million de morts par an. Rougeole:  750.000 morts par an. Total des décès par an:  12.350.000 morts par an.

Les problèmes les plus importants que rencontre actuellement le traitement des maladies infectieuses concernent l'efficacité des tests diagnostiques, la mutation et les résistances aux médicaments, le besoin de nouveaux médicaments et vaccins et la difficulté de trouver les fonds et le personnel pour le traitement.

II. Le Christ et le traitement des personnes atteintes de maladies infectieuses

Dans les considérations précédentes, nous avons indiqué certains aspects scientifiques concernant la réalité actuelle des maladies infectieuses. Mais notre objectif, compte tenu des considérations  scientifiques  et  de  la réalité elle-même, va au-delà de ce que nous avons décrit. Nous nous interrogerons en effet sur les aspects pastoraux dans le traitement de ces maladies.

1. La Parole de Dieu

La lumière apportée par la Parole de Dieu sur les maladies infectieuses est très semblable à celle apportée sur tout autre maladie. Il s'agit de la réflexion souvent offerte sur la souffrance et la douleur. Mais, dans ce cas, pour être plus précis, il convient d'examiner la façon dont le Christ s'est comporté face à ces maladies infectieuses lorsqu'il les a soignées.

On pense en particulier, dans ce domaine, à la guérison des lépreux.

Pour comprendre la façon dont agit le Christ lorsqu'il guérit les lépreux, il faut étudier brièvement la conception culturelle qui entourait cette maladie à son époque et qui découle de la législation de Moïse dans l'Ancien Testament.

Permettez-moi de citer un passage du Lévitique, au chapitre 13: 

"Lorsqu'apparaîtra sur un homme un mal du genre lèpre, on le conduira au prêtre.  Le  prêtre  l'examinera, et s'il constate sur la peau une tumeur blanchâtre avec blanchissement du poil et production d'un ulcère, c'est une lèpre invétérée sur la peau. Le prêtre le déclarera impur [...] Le lépreux atteint de ce mal portera ses vêtements déchirés et ses cheveux dénoués; il se couvrira la moustache et il criera:  "Impur! Impur!" Tant que durera son mal, il sera impur et, étant impur, il demeurera à part:  sa demeure sera hors du camp" (13, 9-11; 43-44).

Nous devons souligner ici deux éléments:  impureté et marginalisation. En raison de l'impureté, il était interdit de toucher le lépreux, et en raison de la marginalisation, il lui était interdit d'habiter avec le peuple.

Passons à présent aux Evangiles et voyons la façon dont le Christ guérit ces malades. Nous disposons de récits dans les trois Evangiles synoptiques de Matthieu, Marc et Luc: 

Matthieu

"Quand il fut descendu de la montagne, des foules nombreuses se mirent à le suivre. Or, voici qu'un lépreux s'approcha et se prosterna devant lui en disant:  "Seigneur, si tu le veux, tu peux me purifier". Il étendit la main et le toucha, en lui disant:  "Je le veux, sois purifié". Et aussitôt, sa lèpre fut purifiée. Et Jésus lui dit:  "Garde-toi d'en parler à personne, mais va te montrer au prêtre et offre le don qu'a prescrit Moïse:  ce leur sera une attestation"" (Mt 8, 1-4).

Marc

"Un lépreux vient à lui, le supplie et, s'agenouillant, lui dit:  "Si tu le veux, tu peux me purifier". Emu de compassion, il étendit la main, le toucha et lui dit:  "Je le veux, sois purifié". Et aussitôt, la lèpre le quitta et il fut purifié. Et, le rudoyant, il le chassa aussitôt, et lui dit:  "Garde-toi de rien dire à personne; mais va te montrer au prêtre et offre pour  ta  purification  ce qu'a prescrit Moïse:  ce leur sera une attestation"" (Mc 1, 40-44).

Luc

"Et il advint, comme il était dans une ville, qu'il y avait un homme plein de lèpre. A la vue de Jésus, il tomba sur la face et le pria en disant:  "Seigneur, si tu le veux, tu peux me purifier". Il étendit la main et le toucha, en disant:  "Je le veux, sois purifié". Et aussitôt, la lèpre le quitta. Et il lui enjoignit de n'en parler à personne:  "Mais va-t'en te montrer au prêtre, et offre pour ta purification ce qu'a prescrit Moïse:  ce leur sera une attestation" [...] Et il advint, comme il faisait route vers Jérusalem, qu'il passa aux confins de la Samarie et de la Galilée. A son entrée dans un village, dix lépreux vinrent à sa rencontre et s'arrêtèrent à distance. Ils élevèrent la voix et dirent:  "Jésus, Maître, aie pitié de nous". A cette vue, il leur dit:  "Allez vous montrer aux prêtres". Et il advint, comme ils y allaient, qu'ils furent purifiés. L'un d'entre eux, voyant qu'il avait été purifié, revint sur ses pas en glorifiant Dieu à haute voix et tomba sur la face aux pieds de Jésus en le remerciant. Et c'était un Samaritain. Prenant la parole, Jésus dit:  "Est-ce que les dix n'ont pas été purifiés? Les neuf autres, où sont-ils? Il ne s'est trouvé, pour revenir rendre gloire à Dieu, que cet étranger!". Et il lui dit:  "Relève toi, va, ta foi t'a sauvé"" (Lc 5, 12-14; 17, 11-19).

2. Etendre et toucher

Dans l'accomplissement des lois et des prescriptions de Moïse, les lépreux qui rencontrent le Christ se tiennent "à distance", ils se sentent impurs, exclus de la coexistence humaine; ceux qui les touchent deviendront eux aussi impurs. Le Seigneur les guérit et manifeste sa volonté salutaire à travers les paroles et à travers deux signes très significatifs:  il étend les mains et les touche. Le Christ non seulement accepte de s'approcher des lépreux, mais il étend sa main, les reçoit et les touche. Le Christ s'identifie aux lépreux, devient pleinement solidaire d'eux. Il détruit leur impureté et leur marginalisation, manifeste sa pleine solidarité avec eux.

3. La solidarité

Il me semble que nous pouvons trouver ici une clé particulière d'interprétation pour étudier le soin pastoral des malades contaminés. Ce soin doit être entièrement empreint de solidarité.

Aujourd'hui, on parle souvent de solidarité, au point d'arriver à faire croire qu'il s'agit d'un concept laïc ou, tout au plus, d'une vertu dont le Christ nous a donné l'exemple. Mais, si nous regardons de plus près cette solidarité qui s'exprime dans les guérisons susmentionnées, nous trouvons quelque chose de différent. C'est-à-dire:  cette manière d'agir que le Seigneur possède à l'égard des malades contaminés n'est pas fortuite, mais découle de la vie divine elle-même qu'il est venu nous donner; elle réside dans le cœur de la Rédemption. La solidarité véritable et profonde est la participation de la vie divine que le Christ nous donne au moyen de la Rédemption.

Dans la guérison des lépreux, le Christ fait ressortir cette solidarité comme source de vie:  vie divine, dont il participe déjà dans la guérison physique des malades.

4. Solidarité et vie divine

En entrant dans l'intimité de cette solidarité, nous entrons dans l'intimité de la vie divine et nous constatons qu'il s'agit d'une solidarité personnelle, c'est-à-dire qu'il s'agit de la troisième personne de la Très Sainte Trinité:  l'Esprit Saint.

Ainsi, la solidarité coïncide avec l'authentique spiritualité, c'est-à-dire:  l'action de l'Esprit Saint, l'amour. L'Esprit Saint est l'amour de Dieu qui devient histoire dans la miséricorde solidaire du Père éternel, qui nous envoie son Fils rédempteur à travers son incarnation pascale.

L'Esprit Saint est l'intercommunication trinitaire infinie dans l'amour. La troisième Personne de la Très Sainte Trinité nous montre la nature divine de Dieu comme Amour; un amour qui est le don total du Père à son Fils et du Fils à son  Père  qui,  dans  son dévouement total, font procéder d'Eux la personne Amour, la personne Don, qu'est l'Esprit Saint. L'Esprit Saint signifie donc l'infinie possession personnelle individuelle tant du Père que du Fils en eux-mêmes, possession qui le rend en mesure de se donner de façon absolue. C'est ici que se trouve l'essence de la solidarité. Lorsque nous parlons de la solidarité humaine, celle-ci n'est authentique que lorsqu'elle se fait à l'image de Dieu. L'homme devient fils de Dieu uniquement à travers la solidarité, qui signifie recevoir dans un don gratuit et entier tout ce qu'il est, et le donner également sans mesure à Dieu et aux autres.

III. Quelques lignes d'action pastorale dans la lutte contre les maladies infectieuses et le traitement des personnes atteintes de maladies infectieuses

Si, en partant de cette solidarité, nous voulons alors réfléchir sur les maladies infectieuses en général, nous arrivons à la dimension pastorale des maladies infectieuses, de la même façon que le Christ s'est fait pasteur de ces maladies.

Nous devons partir de ces éléments spirituels et pastoraux pour savoir ce que signifie, à notre époque, ce qu'a fait le Christ:  tendre les mains et toucher les malades atteints de maladies infectieuses. Bien sûr, cela ne signifiera pas renoncer de façon absurde aux règles élémentaires d'hygiène, bien au contraire. C'est précisément en plaçant l'hygiène au premier plan que l'on parvient à la solidarité à l'égard de ces malades.

Nous indiquons certaines suggestions, en partant de la solidarité chrétienne, qui s'expliqueront sans doute mieux dans la troisième partie de notre étude.

1. Recherches

Dans le domaine de la médecine elle-même, cela signifie changer les motivations selon lesquelles s'accomplissent les recherches. D'ordinaire, celles-ci se font selon les lois du marché. Ainsi, on détermine ce qu'il faut produire et pour qui le produire. En ultime analyse, le moteur de tout est le profit. Dans ce domaine, nous nous heurtons aux médicaments "orphelins", c'est-à-dire à ceux qui ne se produisent plus pour combattre ces maladies, non pas parce qu'ils ne sont plus nécessaires, mais parce qu'ils servent à des gens pauvres du Tiers-Monde, qui ne peuvent pas payer une somme assez élevée pour permettre une marge de profit acceptable. D'autre part, il ne faut pas négliger le fait que, avec la mondialisation, les maladies infectieuses qui étaient considérées auparavant comme l'exclusivité du Tiers-Monde, peuvent aujourd'hui se trouver partout, car les microbes et les virus ne connaissent pas de frontières.

2. Ecologie

Cette solidarité devra également nous conduire à vaincre l'égoïsme dans l'exploitation de l'environnement; la pollution atmosphérique, en particulier celle de l'eau, favorise clairement la propagation des maladies infectieuses. Il faut arriver à porter une attention particulière aux déchets qui, s'ils ne sont pas correctement détruits ou recyclés, contaminent le sol et l'eau. Nous devons essayer d'éviter les types d'agriculture et d'élevage d'animaux qui, utilisant ces eaux ou ce sol, propagent les maladies infectieuses.

Il a été démontré que la déforestation est un autre facteur qui exerce une influence sur la diffusion des maladies infectieuses. Une ligne d'action possible serait donc une action visant à préserver l'environnement, fortement influencé par la présence de forêts. La déforestation, tant de fois effectuée uniquement pour le profit économique de quelques-uns, s'oppose clairement à la solidarité, notamment dans la perspective de la lutte contre les maladies infectieuses.

3. Industrialisation

La révision de l'industrialisation de la chaîne alimentaire, de l'élevage intensif, des aliments transgéniques, de la rupture de la chaîne du froid dans le transport des aliments s'impose également. Il ne s'agit pas ici de supprimer ces techniques, qui sont davantage capables aujourd'hui que par le passé de nourrir un grand nombre de personnes, mais d'examiner ses procédures et, contrairement à la pensée tant de fois prédominante, assurer que le but principal de la production ne soit pas seulement le profit, mais surtout la santé et la satisfaction des besoins de la population.

4. Hygiène

La solidarité exige également d'observer avec une profonde attention toutes les règles d'hygiène et de propreté adaptées dans les milieux domestiques, publics et sur les lieux de travail.

Ainsi s'impose le devoir d'une procédure sanitaire adéquate de la part des malades atteints de maladies infectieuses, afin d'éviter de propager l'infection. Le contrôle sanitaire international doit être correctement appliqué, tant en ce qui concerne les personnes qui voyagent que de la part des autorités responsables des migrations.

Il est vrai que les professionnels de la santé et tous ceux qui soignent les patients atteints de maladies infectieuses doivent prendre les précautions adéquates, mais d'autre part, ces précautions ne doivent pas en arriver à nier l'aide qui leur est due, ou à refuser de leur prêter le secours nécessaire en manifestant une répugnance ou une peur qui, au lieu d'aider le malade, aggrave encore plus son état. Dans ce domaine, la solidarité elle-même impose un contrôle rigide du milieu hospitalier, tant en ce qui concerne le nettoyage des lieux d'hospitalisation que les instruments chirurgicaux et non chirurgicaux qui sont utilisés.

5. Formation

Dans cette perspective, il convient de programmer des cours de relations et d'aide pour les volontaires et les agents de la pastorale qui travaillent dans les hôpitaux et les maisons de soins, ainsi que des rencontres de formation de pastorale de la santé et d'éthique pour aumôniers, médecins, infirmiers des hôpitaux et des cliniques.

6. Assistance

Dans la pratique, il faut promouvoir l'assistance à ce type de malades et à leurs familles. Dans le domaine de la pastorale de la santé, cette assistance signifie en premier lieu leur fournir les Sacrements, en particulier le Sacrement de la Réconciliation, l'Eucharistie et le Sacrement de l'Onction des Malades. De ces Sacrements découlera, tant pour les malades que pour tous ceux qui prennent soin d'eux, la force solidaire pour les soigner de la meilleure façon possible.

Conclusions

Telle est la source de tant d'autres actions pastorales qui peuvent venir à l'esprit, avec une imagination créative pour aider davantage ces malades.

Accueillir les malades, s'identifier à eux, seront les deux piliers pour la guérison des patients atteints de maladies infectieuses et pour la lutte contre les maladies infectieuses. Ainsi, la solidarité chrétienne constituera l'âme des professionnels de la santé et de tous ceux qui s'engagent à accomplir le commandement évangélique:  "Curate Infirmos". .

 

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