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RÉFLEXION DE MONS, MICHAEL FITZGERALD 
SUR LA JOURNÉE DE PRIÈRE, DE JEÛNE ET D'AUMÔNE 
DU 14 DÉCEMBRE 2001

 

Au cours de l'Angelus du 18 novembre, le Saint-Père a demandé aux catholiques de prier et de jeûner pour la paix le vendredi 14 décembre. Il a aussi suggéré que cette prière et ce jeûne soient accompagnés de l'aumône comme signe de solidarité avec ceux qui souffrent du fait de la guerre.
Nous pourrions nous demander:  Quel est le but de la prière pour la paix, et pourquoi cette prière devrait-elle être accompagnée du jeûne et de l'aumône? Quelle est également la signification du jour particulier qui a été choisi?

La conviction que la prière est nécessaire pour réaliser la paix avait déjà conduit le Pape Jean-Paul II à inviter les chefs religieux à Assise en 1986 afin de prier pour la paix dans le monde. C'est cette même conviction qui l'a conduit à lancer un appel à une nouvelle journée de prière à Assise le 24 janvier, et à inviter les catholiques à prier et à jeûner à cette intention le 14 décembre. En de nombreuses occasions le Saint-Père a repris l'enseignement de l'Evangile selon lequel le monde ne peut pas donner la paix (cf. Jn 14, 27); elle est un don de Dieu, et par conséquent il faut présenter à Dieu des prières de supplication afin qu'il accorde ce don à l'humanité. Accueillant ceux qui avaient accepté l'invitation de se rendre à Assise, Jean-Paul II déclarait:  "La paix, là où elle existe, est toujours fragile. Elle est menacée de tant de manières et avec tant de conséquences imprévisibles que nous devons nous efforcer de lui donner des fondements solides. Sans nier en aucune façon la nécessité des nombreux moyens humains qui maintiennent et renforcent la paix, nous sommes ici parce que nous sommes certains que, au-dessus et au-delà de toutes les mesures de cet ordre, nous avons besoin de la prière - une prière intense, humble et confiante - pour que le monde puisse enfin devenir un lieu de paix véritable et permanente. (Allocution d'ouverture à la Basilique Sainte-Marie-des-Anges, Assise, 27 octobre 1986, cf. ORLF n. 44 du 4 novembre 1986).

Pourquoi cette prière doit-elle être accompagnée du jeûne? Se passer de nourriture aide à acquérir la liberté du coeur (cf. CEC 2043). Cela signifie que nous ne souhaitons pas être centrés sur nous-mêmes, sur nos désirs, sur nos besoins. Le jeûne nous aide donc à nous ouvrir à Dieu, et par conséquent nous assiste dans la prière lorsque nous élevons nos coeurs et nos esprits vers Dieu. Il nous aide aussi à être ouverts à nos frères et soeurs, spécialement ceux qui sont dans le besoin. En priant et en jeûnant pour la paix, nous gardons à l'esprit toutes les victimes de la guerre, le grand nombre de personnes qui souffrent de la faim ou sont sans-abri.

Ceci conduit naturellement au troisième élément traditionnel de la pénitence chrétienne, l'aumône. En nous souvenant de ceux qui souffrent, nous sommes incités à leur venir en aide dans toute la mesure de nos possibilités. Notre don sera un signe concret de notre désir de surmonter les effets de la guerre et d'apporter la réconciliation et la paix dans le respect et la justice. Nous pouvons parfois avoir le sentiment que notre contribution est minime, que notre aumône est insignifiante. Nous pouvons alors nous souvenir que le Seigneur Jésus a loué la veuve qui donnait de sa pauvreté (cf. Lc 21, 1-4).

Une autre question concerne le choix du jour retenu pour cet effort particulier en faveur de la paix. Pourquoi le vendredi 14 décembre? Le vendredi est traditionnellement un jour de pratiques pénitentielles dans l'Eglise catholique, en mémoire de la Passion et de la mort de Notre Seigneur Jésus-Christ le Vendredi Saint. En effet, le Droit canonique dit que tous les vendredis de l'année sont des jours de pénitence dans l'Eglise universelle (cf. CDC, can. 1250). Choisir le vendredi était donc naturel. Le vendredi retenu tombe au milieu de l'Avent, période de préparation à la fête de Noël. C'est un temps joyeux, plein de l'espérance de la venue du Sauveur, mais marqué cependant par un esprit d'ascétisme. Ce vendredi d'Avent est donc un moment bien adapté au jeûne et à la prière pour la paix, puisque celui qui est si ardemment attendu est le Prince de la Paix.

Une dernière raison au choix de ce jour est qu'il tombe presque à la fin du Ramadan, le mois de l'année où le jeûne est prescrit aux musulmans. Bien que le jeûne soit rigoureux, son but n'est pas la pénitence mais plutôt de manifester par un signe fort l'obéissance et la soumission à Dieu. Il est également compris par les musulmans comme une expression de gratitude envers Dieu; la nourriture et la boisson, et les biens de la terre en général, viennent en dernière analyse de Dieu lui-même, et donc s'en priver pour un temps aide à rester dans la reconnaissance pour ces dons. De plus, la difficulté qu'entraîne l'observance du jeûne peut stimuler la compassion envers les pauvres et ceux qui ont faim. Le Ramadan est aussi pour la communauté musulmane un temps particulier pour la prière en commun. Que les chrétiens se joignent aux musulmans le 14 décembre dans un esprit de prière et de jeûne apparaît donc particulièrement indiqué.

Le jeûne est une pratique commune à de nombreuses religions, au judaïsme, à l'hindouisme, au jaïnisme et au bouddhisme. On trouve aussi l'attention aux pauvres et à ceux qui ont faim, spécialement dans le sikhisme qui considère comme un devoir religieux de procurer nourriture et abri au vagabond ou à toute personne dans le besoin. Les membres de toutes les religions pourraient être invités à se joindre à cette journée spéciale de prière et de jeûne.

Car tout le monde aspire à la paix, et toutes les religions ont à apporter leur encouragement et leur contribution à la recherche d'une paix durable fondée sur la justice.

Les événements du 11 septembre et la guerre qui en a résulté en Afghanistan, une nation dont la population est entièrement musulmane, ont cependant concentré l'attention de manière particulière sur les relations islamo-chrétiennes. Cette journée spéciale de prière et de jeûne, un vendredi, pendant l'Avent, et à la fin du Ramadan, offre aux catholiques l'occasion de montrer leur solidarité envers les musulmans et, selon les termes du Pape Jean-Paul II, leur respect pour l'Islam "l'Islam authentique:  l'Islam qui prie, qui sait être solidaire de celui qui est dans le besoin" (Discours à Astanà (Kazakhstan), 24 septembre 2001, cf. ORLF n. 40 du 2 octobre 2001).


S.Exc. Mgr Michael Fitzgerald
Secrétaire du Conseil pontifical pour le Dialogue interreligieux

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