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Journée Mondiale de la Jeunesse: De Toronto à Cologne

Rome 10 -13 avril 2003

P. Giorgio Pontiggia
Recteur de l'Institut 'Sacro Cuore' (Milan, Italie)

 

Les jeunes face au Christ et à l'Eglise

Je n'ai pas trouvé de description plus synthétique et imaginative de la situation des jeunes d'aujourd'hui que celle qui a surgi au cours d'un dialogue de don Giussani avec un groupe d'universitaires: "C'est comme si tous les jeunes d'aujourd'hui avaient été touchés par une sorte de Tchernobyl, par une énorme explosion nucléaire: structurellement leur organisme est comme avant, mais dynamiquement il ne l'est plus. Il y a eu comme un assujettissement physiologique, réalisé par la mentalité dominante. C'est comme si il n'y avait plus aujourd'hui aucune évidence réelle, sinon la mode - qui est un concept et un instrument du pouvoir. Jamais autant qu'aujourd'hui le milieu environnant, considéré comme climat mental et mode de vie, n'a eu à sa disposition des instruments d'invasion des consciences aussi despotique. Plus que jamais aujourd'hui l'éducateur, ou le déséducateur souverain, est l'environnement avec toutes ses formes d'oppression. De même l'annonce chrétienne a toujours plus de mal à devenir une vie convaincue, à devenir vie et conviction. Ce que l'on écoute et ce que l'on voit n'est pas vraiment assimilé: ce qui nous entoure, la mentalité dominante, la culture envahissante, le pouvoir, nous rend en quelque sorte étrangers à nous-mêmes. Ainsi, d'une part nous demeurons abstraits dans le rapport avec nous-mêmes et, sur le plan affectif, à plat (comme une pile qui au lieu de durer des heures ne dure que quelques minutes); et, de l'autre, par contraste, nous nous réfugions dans la communauté comme protection".

-  être étrangers à nous-mêmes. Ainsi, d'une part nous demeurons abstraits dans le rapport avec nous-mêmes

Parce que la raison, comme exigence de connaissance de la réalité, c'est-à-dire de l'expérience, selon tous les facteurs, a été remplacée par le sentiment ; la personne n'est plus ce qu'elle est, mais elle est ce qu'elle sent et la raison devient une capacité de justification de cette réaction: "Va où te mène le sentiment": ainsi l'opinion prévaut sur le jugement.
 

L'évidence d'une faiblesse originelle dans laquelle vit la personne a disparu. L'affirmation de Rousseau "Fais ce que tu veux car par nature l'homme est poussé à accomplir des actes vertueux" a été choisie pour dogme et s'est répandue à travers les moyens de communication sociale. La peine et le sacrifice sont devenus une objection et non plus la condition de la vie.

- et, sur le plan affectif, à plat (comme une pile qui au lieu de durer des heures ne dure que quelques minutes) ;

L'affection devient la satisfaction d'un plaisir et non plus l'attrait du vrai; ainsi tout est changeant, incertain, et les piles déchargées font en sorte que la vie n'est plus un chemin vers quelque chose, mais un vagabondage, une intermittence au lieu d'être une aurore.

La religiosité des jeunes est souvent aussi la fluctuation du sentiment de Dieu plus que sa reconnaissance; par conséquent toutes les religions sont égales car elles correspondent à une spontanéité propre et non pas parce qu'elles réalisent davantage sa nature spécifique.

- et, de l'autre, par contraste, nous nous réfugions dans la communauté comme protection".

Ainsi les associations de jeunes naissent en raison d'une proximité de sensations et de modes plus que pour une aide à la croissance de la personne, devenant ainsi la nouvelle forme de l'idéologie, la courroie de transmission de la mode et de la mentalité dominante.

Don Giussani écrivait encore dans 'Porta la speranza' (Porte l'espérance), dont je vous joins un chapitre: "Mais pour le lieu qu'elle occupe dans la chronologie de toute vie, à toutes les époques, la jeunesse aura présenté un spectacle de crise. Par conséquent, si l'on parle maintenant d'une crise des jeunes, particulière et exceptionnelle, celle-ci, en dernière analyse, doit être recherchée dans une crise de l'éducation, des facteurs éducatifs. La crise des éducateurs apparaît:

- en premier lieu comme une inconscience qui fait des éducateurs eux-mêmes les collaborateurs, sans doute inconscients, des déficiences de l'environnement.

Il y a une perte de la signification personnelle du fait chrétien qui est la constitution d'un sujet nouveau dans l'histoire et non un fait comme les autres, avec quelques engagements en plus, comme l'a dit le cardinal Ratzinger au Meeting de Rimini en 1990: "L'idée qu'une personne est d'autant plus chrétienne qu'elle est davantage engagée dans des activités ecclésiales est répandue ici et là, même dans des milieux ecclésiastiques élevés. On pousse à une sorte de thérapie ecclésiastique de l'activité, à se donner du travail à faire; on cherche à assigner à chacun un comité ou, en tout cas, au moins quelque engagement au sein de l'Eglise. (...) Il peut arriver que quelqu'un exerce sans interruption des activités d'associations ecclésiales, sans toutefois n'être en rien chrétien. (...) L'Eglise n'existe pas dans le but de nous occuper comme une quelconque association intra-mondaine et de défendre son existence même, mais elle existe, au contraire, pour devenir en nous tous un accès à la vie éternelle".

A l'intérieur de la société contemporaine, le christianisme est souvent lié à des structures. Ces structures n'étant pas toujours vivifiées par un témoignage personnel, le refus ou l'indifférence à l'égard de ces structures coïncident avec le refus ou l'indifférence à l'égard du fait chrétien, comme si la participation à celles-ci suffisait à justifier son propre être de chrétien. Il manque chez beaucoup de chrétiens le témoignage de la subjectivité nouvelle qu'est le christianisme afin de faire de ces structures une occasion de vie : on a perdu la conscience de la signification personnelle de l'appel chrétien, correspondant à l'humain.

Ainsi le fait chrétien demeure abstrait, étranger à la vie, au monde normal.

- et, en second lieu, comme vitalité manquée dans l'attitude éducative qui ne leur fait pas combattre avec une énergie suffisante la négativité de l'environnement, dans la mesure où elle les situe sur des positions schématiquement traditionnelles, formalistes, au lieu de les conduire à rénover le Verbe rédempteur éternel dans l'esprit de la nouvelle lutte ".

On favorise la fracture entre christianisme et vie.

La société tend à refuser ou à reléguer le christianisme dans le cadre d'une dimension privée : à savoir un détachement par rapport à Dieu comme origine et sens de la vie, donc de l'expérience.

Comme si Dieu répondait à la 'religiosité' et non aux exigences de la vie. Ainsi, inconsciemment, on accepte le rôle que la société voudrait réserver aux chrétiens, qui serait d'être le supplément religieux, l'âme pour la réalisation de son projet, au lieu d'être jugement et donc des collaborateurs originaux de l'aspiration commune des hommes à leur bonheur.

Les difficultés des fils sont une interrogation dramatique pour les pères; voilà pourquoi nous devons nous demander avec T. S. Eliot: "Est-ce l'humanité qui a abandonné l'Eglise?" ou "Est-ce l'Eglise qui a abandonné l'humanité?" (T. S. Eliot B I cori de la Rocca).

 

Le Christ et l'Église

Le christianisme est un fait, un événement

Le christianisme est un événement; une personne est entrée dans l'histoire: Jésus-Christ, que certains ont rencontré et accepté.

Et l'Eglise est la possibilité de répéter aujourd'hui cette rencontre, la possibilité qu'elle se répète pour tous, comme l'a dit le Saint-Père pour  la XVIIIème Journée Mondiale de la Jeunesse: "Chers jeunes, vous le savez: le christianisme n'est pas une opinion et ne consiste pas en paroles vaines. Le christianisme, c'est le Christ ! C'est une Personne, c'est le Vivant".

Ce n'est donc pas une théorie, mais un fait qui nous concerne, un fait dont la portée est donnée par une Présence personnelle, la Présence du Christ : de l'Emmanuel, 'Dieu-avec-nous', de Dieu qui s'est fait Compagnon, ami de l'homme.

Comme l'écrivait Fédor Dostoïevski dans 'Les Démons': "Beaucoup croient qu'il est suffisant de croire en la morale du Christ pour être chrétiens; ce n'est ni la morale du Christ, ni l'enseignement du Christ qui sauveront le monde, mais précisément ceci: que le Verbe s'est fait chair".

L'événement, c'est la méthode

L'"Evénement"' n'est pas seulement le moment où ce fait s'est situé, mais indique une méthode, la méthode choisie et utilisée par Dieu pour sauver l'homme: l'Incarnation, Dieu sauve l'homme à travers l'humain.

Le christianisme n'est pas la révélation de l'existence de Dieu mais la stupeur que Dieu est un Homme, la stupeur de Kafka: "Celui que nous n'avons jamais vu, que nous attendons pourtant avec une réelle ardeur, qui toutefois a raisonnablement été considéré comme inaccessible pour toujours, le voilà qui est assis ici" (F. Kafka - Le château). 

Le salut ne sera pas: il est, la valeur du présent

- Si Dieu est avec nous, le salut existe; non seulement il existe, mais il est au milieu de nous; par conséquent, on peut l'utiliser, l'expérimenter dès à présent, car Dieu qui est salut, se compromet avec l'homme, avec toute sa vie et avec l'histoire. Le salut est une compagnie: la compagnie de Dieu avec l'homme, dans laquelle l'homme trouve la possibilité de sa réalisation, la consistance de sa vie et de soi-même, sa véritable physionomie, l'unité de sa personne.

Notre réalisation, rédemption, n'est pas le résultat de notre effort de cohérence humaine, mais est la conséquence de l'acceptation de cette compagnie.

'Sauver' veut dire que l'homme comprenne qui il est, comprenne son destin, sache comment conduire ses pas vers son destin et y puisse cheminer.

C'est en rencontrant cette Présence que la personne commence à se comprendre, à comprendre quel est son destin, à comprendre comment aller vers son destin et avec quelle énergie marcher.

- Adhérer au fait chrétien, procéder en lui comporte une modalité de conversion. Se convertir, ce n'est pas analyser l'annonce, mais se compromettre avec elle, c'est-à-dire avec un Fait, un événement.

La consistance de l'annonce réside entièrement dans le fait qu'elle pénètre dans l'existence et la change. L'expérience d'un renouveau de la vie, d'une physionomie personnelle imprévue, est la preuve existentielle que l'œuvre du salut est en train de s'accomplir, elle est le centuple ici-bas.

Comme le rappelait encore le Saint-Père aux jeunes pour la prochaine journée mondiale de la jeunesse: "Chers jeunes, Jésus seul connaît votre cœur, vos désirs les plus profonds. Lui seul, qui vous a aimés jusqu'à la mort (cf. Jn 13, 1), est capable de combler vos aspirations. Ses paroles sont des paroles de vie, des paroles qui donnent le sens de la vie. Personne d'autre que lui pourra vous donner le vrai bonheur".

Ou, comme le disait le cardinal Giacomo Biffi à un congrès de théologiens à Bologne: "Nous ne sommes pas le 'peuple du livre', à la rigueur nous ne sommes même pas le 'peuple de la parole': nous sommes le 'peuple de l'Evénement' (...) "Malheureux le théologien, l'exégète, le lecteur de la sainte Ecriture pour qui Jésus est d'abord un personnage littéraire, parlant donc du Christ des synoptiques, du Christ paulinien, du Christ de Jean, et non de son Sauveur".

Il est impossible de comprendre le christianisme si l'on ne comprend pas que le christianisme naît entièrement comme passion pour l'homme, pour l'individu, mieux encore de la passion pour le destin de chaque homme.  

- Si Dieu s'est fait homme, est entré dans l'histoire, la méthode pour le connaître ne peut plus être celle d'avant sa venue, celle de toutes les autres religions fondées sur la recherche, sur la tentative de l'homme.

Avant tout reposait sur l'effort, l'étude, le génie, le sentiment religieux; maintenant il s'agit de Quelqu'un à rencontrer, cela n'exige pas de capacités particulières, mais la simplicité d'une rencontre.

Comme l'a écrit le Saint-Père à don Giussani pour les vingt ans de la Fraternité de Communion et Libération: "Le christianisme, avant d'être un ensemble de doctrines ou une règle pour le salut, est l'"événement" d'une rencontre. Telle est l'intuition et l'expérience que vous avez transmises durant ces dernières années à tant de personnes qui ont adhéré au mouvement de Communion et Libération, plus qu'à offrir des choses nouvelles, vous tendez à faire redécouvrir la Tradition et l'histoire de l'Eglise, pour la ré-exprimer par des modalités capables de parler aux et d'interpeller les hommes de notre temps".

- Le moi se retrouve dans la rencontre avec une présence qui porte en soi cette affirmation: "Ce dont est fait ton cœur existe! Regarde, en moi, par exemple, cela existe".

La rencontre avec une présence ne constitue pas ontologiquement la personne dans sa subjectivité : la rencontre réveille quelque chose qui était obscur, quelque chose qui était impensé et impensable sur le plan existentiel.

L'homme redécouvre son identité originelle en rencontrant à une présence qui suscite un attrait et provoque un réveil des exigences constitutives de sa nature, une agitation motivée par la raison, dans la mesure où il réalise que cela correspond aux exigences de la vie selon la totalité de ses dimensions, de la naissance à la mort.

Paradoxalement, l'originalité du moi émerge quand nous nous apercevons que nous avons en nous quelque chose qui est en tous les hommes.

- Il s'agit donc d'une expérience à faire. Le grand bibliste Ignace de la Potterie a dit: "La foi chrétienne est un cheminement du regard".

Sans l'engagement expérientiel, on ne peut pas comprendre ce qu'est le cheminement du regard. La chose la plus difficile à accepter, c'est que ce qui nous réveille à nous-mêmes, ce qui nous réveille à la vérité de notre vie, de notre destin, à l'espérance, à la moralité est un événement.

Car le mot événement, dont la rencontre est la forme, indique une 'coïncidence' entre le réel expérimentable et le surnaturel.

Le plus grand fait n'est pas celui d'exister, mais la rencontre: cette circonstance unique dont toute une histoire dépend, un moment dans le temps, où un être dit "Je suis Toi qui me fais".

- Notre responsabilité est de rendre possible la rencontre avec le Christ présent dans notre témoignage.

Il faut donc bien s'identifier à la valeur de l'affirmation que le christianisme 'est' un événement, non pas qu'il 'fut' un événement ; il n'a 'pas été' un événement mais il l''est'; maintenant.

C'est une présence paternelle qui engendre une Rencontre, c'est-à-dire l'impact avec un Evénement qui te communique une vie, parce que la vraie paternité c'est quand se communique une proposition pour la vie. C'est une paternité et par conséquent une rencontre si elle est proposition d'une réponse à ce qu'est l'autre.

- La rencontre se dilate en une compagnie : la rencontre génère une compagnie comme certitude affective, une famille, un lieu où il existe une espérance pour la vie. Cette certitude affective pour les jeunes réside chez les adultes.

Comme l'a affirmé le Pape il y a deux ans : " La rencontre avec certaines personnes engendre une affinité et cette affinité engendre une compagnie, une communion, un mouvement. Vivre cette communion, c'est participer au Mystère de l'Esprit ".

Grâce à la rencontre avec ces personnes, nous nous sentons sollicités et attirés, nous sommes poussés à nous unir à elles.

La rencontre demeure donc comme compagnie. Elle est le lieu de l'humain, elle est le lieu géographique et social où nous sommes rappelés à Ce à quoi la rencontre nous a ravivés: le Christ, le destin fait homme.

La compagnie est le lieu d'une amitié qui naît du pressentiment du destin et soutient au long du chemin du destin qu'est le Christ. Cette amitié est une aide au long de l'itinéraire qui conduit à la réalisation de soi et non à l'aliénation de soi.

Voilà ce que nous devons provoquer, autrement c'est inutile : nous faisons seulement des réunions. C'est l'expérience d'un Quelque chose que nous portons au-dedans de nous, auquel nous appartenons si profondément que cela touche la vie par des propositions, qui sont paroles, organisation du temps, initiatives qui se prennent et surtout rapports qui s'établissent, de sorte que l'autre puisse s'apercevoir qu'il n'a jamais trouvé de choses où l'humanité est plus humaine.

C'est à peu près ce qui se passait avec Jésus, quand il accomplissait des miracles. Il n'est pas venu pour faire des miracles, mais il a fait des miracles pour faire comprendre ce pour quoi il était venu et qui il était. Ainsi notre but est de vivre cette présence pour devenir la présence qui prenne tous les hommes.

La méthode est une rencontre existentielle, comme l'a dit Jean-Paul Ier: "Le vrai drame de l'Eglise qui aime se qualifier de moderne, c'est la tentative de corriger la stupeur de l'événement du Christ avec des règles". 

Une présence ne peut être que dans l'environnement.

C'est ainsi que le décrivait don Giussani dès les débuts de Communion et Libération dans " Il cammino al vero è un'esperienza " et SEI : " Notre appel ne peut pas aller directement à la conscience : pour parvenir au moi authentique il doit perforer une mentalité qui en est comme l'enveloppe. Cette superstructure est construite en grande partie par l'exaspération de l'influence environnementale actuelle à travers les moyens très modernes d'invasion de la personne : publicité, école, télévision, etc... Prétendre résister ou neutraliser cette influence est vain si l'on ne parvient pas à atteindre la personne précisément là où elle est la plus influencée, c'est-à-dire dans son environnement. Cet 'environnement' ne coïncide évidemment pas avec un 'lieu' au sens matériel du terme : beaucoup plus qu'un lieu, c'est un milieu environnant, c'est-à-dire tout un mode de vie, la trame de conditions d'existence. Dans la société actuelle, ce milieu de vie possède lui aussi une clef de voûte dans un lieu matériel physique, qui devient comme le point de référence ou le carrefour obligé de tout un enchevêtrement de rapports et de l'irruption d'idées et de sentiments qui s'ensuit. Les lieux de référence sont l'école et, à différents degrés, le travail.

La capacité éducative est en crise, quand elle ne crée pas un environnement et ne passe pas par une confrontation avec l'environnement. Faire des discours et organiser ne constitue pas une capacité éducative ; mais c'est la confrontation avec le milieu environnant, c'est-à-dire avec la trame des problèmes humains que pose la vie en commun, comme reflet de la société.

- l'engagement avec le milieu environnant, c'est-à-dire la rencontre, est générateur de culture : il permet de juger la réalité à la lumière de la foi, d'un horizon total qui met en valeur le détail et rend manifeste le mensonge de la prétention totalisante de l'idéologie.

Comme disait le Pape au congrès du MEIC en 1982: "Une foi qui ne devient pas culture est une foi non pleinement accueillie, non entièrement pensée, non fidèlement vécue".

- et faire grandir la conviction grâce à la vérification, c'est-à-dire s'apercevoir que la proposition du Christ correspond aux exigences de la personne.

Parce que le fait que Dieu est Dieu se manifeste comme capacité de répondre à l'homme plus que comme explication de la doctrine.

C'est le centuple ici-bas, qui n'est pas ce qu'invente l'homme, mais la vie vécue avec la conscience de la grande Présence comme ce fut le cas pour Pierre: "Seigneur, à qui irions-nous, toi seul as les paroles qui expliquent la vie".

D'où partir

- Un chrétien, un homme qui vit les problèmes de tous, qui souffre de l'injustice de tous, qui est impliqué dans les contradictions de toute la société et qui sent dans cette expérience que cela correspond à son humanité, doit se demander ce qu'il peut faire pour le monde ?

Le christianisme authentique est l'annonce de l'Incarnation : le mystère et l'infini se rencontrent en une réalité spatio-temporelle précise : la personne.

D'autres éléments ne sont pas nécessaires pour pouvoir commencer: une analyse déjà accomplie ne sert pas. Il ne sert à rien d'atteindre une force et une capacité déterminées, il ne sert à rien d'être sûr que l'on sera écouté et que l'entreprise ira à bonne fin.

La première condition est alors que cette conscience de l'événement doit produire un changement en nous: nos camarades d'école, les gens que nous rencontrons, nos amis et nos collègues, doivent s'en apercevoir, s'apercevoir que nous sommes personnellement impliqués dans ce chemin de réalisation de soi: éduque qui se laisse éduquer.

Si l'on ne part pas de là, le reste se disperse dans le néant: il peut y avoir quelques moments d'efficacité en présence d'une personnalité humainement fascinante et activement constructive, mais une fois cette personne passée, la tromperie prend fin.

- Les jeunes ont besoin d'hommes qui aient la stature de leurs exigences humaines en sachant donner raison de la foi qui est en eux

Il existe deux symptômes qui nous signalent si nous sommes avec eux dans cette position:

- que les jeunes eux-mêmes deviennent participants à cette expérience, c'est-à-dire deviennent missionnaires

Une fois que l'on découvre pour soi combien l'intensité de la vie chrétienne coïncide avec l'intensité de la passion pour soi, en tant qu'être qui chemine vers son propre destin, une fois découvert cela pour soi-même, on s'aperçoit que cette coïncidence vaut pour toute personne que l'on rencontre, même pour son pire ennemi, et il n'est pas possible de ne pas le communiquer.

- que nous apprenions d'eux

Parce que le rapport éducatif est une réciprocité: ne pas faire pour, mais faire avec, de sorte que l'adulte soit appelé à vérifier lui-même ce que propose l'autre.

La plus grande découverte que j'ai faite et que je fais tous les jours est qu'en enseignant on grandit; on s'aperçoit que l'on apprend avant tout nous-mêmes et l'on voudrait que ce que l'on apprend devienne transparent et persuasif aussi pour ceux qui sont avec nous.

Comme le disait Pier Paolo Pasolini: " Si quelqu'un t'avait éduqué, il ne pourrait l'avoir fait qu'avec son être, non pas par sa parole " (extrait de 'Gennariello' in 'Lettere Luterane').

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