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CATÉCHÈSE PRONONCÉE 
PAR
S. EXC. MONSEIGNEUR SEPE


"Un enfant nous est né, un fils nous a été donné"
(Is 9, 5).

Cet enfant, annoncé par le prophète Isaïe, est véritablement né à Bethléem, il y a deux mille ans, par l'opération du Saint-Esprit.

Cette naissance nous est rapportée par le disciple de saint Paul, l'Evangéliste Luc, qui, à la manière des historiens grecs, montre sa préoccupation d'historien impartial en nous racontant tous les détails de cet événement unique. Nous les connaissons déjà tous:  l'Edit de l'Empereur César Auguste; le voyage de Joseph et Marie de Nazareth, en Galilée, à Bethléem, en Judée; la crèche; la visite des bergers, etc. Matthieu nous fournit lui aussi des détails, en élaborant la généalogie de Jésus-Christ, fils d'Abraham.

Après huit jours, au cours du rite de la circoncision, on donna à l'enfant le nom de Jésus, comme l'avait annoncé l'ange. Jésus signifie Sauveur, et indique la mission qu'il devait accomplir, c'est-à-dire le salut des hommes, comme le précise Matthieu:  "C'est lui qui sauvera son peuple de ses péchés". Tout cela a eu lieu afin que s'accomplisse ce qui fut annoncé par le Seigneur au moyen du prophète qui dit:  "Voici que la vierge concevra et enfantera un fis, et on l'appellera du nom d'Emmanuel, ce qui se traduit:  "Dieu avec nous"" (Mt 1, 22-23).

Mais qui est vraiment cet Enfant? Voilà la réponse de saint Jean:  "Et le Verbe s'est fait chair et il a habité parmi nous" (Jn 1, 14).

Donc, l'enfant né à Bethléem il y a deux mille ans est le Fils Unique que le Père a envoyé dans le monde et qui s'est fait homme pour devenir Dieu-avec-nous, sauver les hommes de leurs péchés et les reconduire à la maison du Père.

Cela eut lieu lorsque vint, comme le dit saint Paul, la "plénitude du temps". En effet, cet enfant a été précédé par un temps et par une histoire, que nous appelons "sacrés" parce qu'ils englobent les interventions de Dieu qui a fait des "merveilles" dans le peuple qu'il a choisi pour préparer la venue du Fils parmi nous.

La plénitude du temps signifie également que la naissance marque une nouveauté absolue en ce qui concerne le temps, qui débute et devient un temps "chrétien", en vertu duquel on commence à mesurer le nouveau temps "avant le Christ" et "après le Christ"; mais également en ce qui concerne l'histoire, car à travers la naissance de l'enfant, Dieu ne parle plus à un seul peuple, mais à toutes les nations, et, surtout, parce que Dieu ne parle et n'agit plus à travers des messages, mais directement et personnellement à travers la parole et les gestes de son fils même.

C'est pourquoi la naissance de Jésus constitue le grand Evénement, le Kairòs unique et définitif qui a créé une "cassure" entre l'Ancien et le Nouveau Testament, qui durera jusqu'à la fin des siècles.

Mais il existe un aspect très important, je dirais vital, qu'il faut souligner pour comprendre la signification de cette naissance. Ce qui a eu lieu il y a deux mille ans se produit encore aujourd'hui; l'événement continue aujourd'hui et continuera pour toujours, parce que le Christ né, mort et ressuscité continue à vivre:  il est vivant et il est le même qu'hier, qu'aujourd'hui et que demain.

Comment tout cela est-il possible? Comment la promesse que le Christ lui-même a faite se réalise-t-elle:  je serai avec vous jusqu'à la fin des temps? Jésus est-il aujourd'hui encore l'Emmanuel, le Dieu-avec-nous?

En réalité, le Christ ne nous a pas laissé en héritage uniquement un enseignement ou un testament fait de bonnes normes de vie, mais il s'est donné lui-même, sa parole vivante, son Corps, son Sang, sa divinité:  "Ceci est mon corps, ceci est mon sang". Ce mystère est grand et n'est compréhensible qu'à travers la foi et l'amour qui l'a déterminé.

En réalité, au cours de ces deux mille ans, les hommes ne l'ont pas toujours compris et accepté. Depuis le début, cette nouveauté apportée par le Christ fut ridiculisée par les païens, comme le philosophe Celse, qui comparait les chrétiens à des grenouilles qui croassent, en assurant que leur Dieu s'est fait homme. Mais aujourd'hui aussi, il existe de nombreux Celse, qui à travers des arguments rationalistes ou à caractère immanentiste et naturaliste, qualifiés de scientisme, prétendent ne pouvoir accepter qu'un Dieu, même s'il existe, puisse se faire homme.

Mais ici entre en compte le problème de la foi qui trouve une explication "raisonnable" dans la vérité de l'Amour.

Notre Dieu n'est pas un Dieu fermé dans sa transcendance, éloigné, inabordable, vindicatif, mais c'est un Dieu-Amour, qui nous a créés par Amour, nous a rachetés en envoyant son Fils unique qui, par amour, a donné sa vie pour nous. C'est le Dieu-avec-nous, venu habiter parmi les hommes afin que nous soyons avec-Dieu. Telle est la réalité de notre vie, telle est la vocation à laquelle nous sommes tous appelés, comme l'explique clairement saint Augustin:  "Dieu s'est fait homme afin que l'homme devienne Dieu".

Dans cette auto-manifestation de Dieu, nous découvrons le sens et la valeur de notre vie. En réalité, notre existence n'est pas un fait dû au hasard ou à une nécessité biologique. Notre vie aujourd'hui trouve son origine dans l'amour éternel de Dieu qui, depuis toujours, nous a pensés, aimés et voulus. Certes, nous savons que nous avons commencé à exister un jour, une année précis, dans une famille, un pays et une culture déterminés. Mais notre être a toujours été en Dieu, qui, par pur amour, nous a donné l'existence en un temps et un lieu particuliers.

Mais l'amour de Dieu ne s'est pas arrêté à notre seule création. Il a également voulu que dans notre vie dans le monde, nous ne soyons pas seuls, mais il a placés à nos côtés son Fils, afin qu'il nous accompagne dans tous nos pas. Tel est l'Emmanuel, le Dieu-avec-nous, l'ami, le frère qui nous a conquis non pas à travers des paroles vaines ou des promesses inutiles, mais à travers son propre sang, en donnant sa vie pour nous.

Chers jeunes, avec Jésus-Christ, nous ne sommes pas seuls car, ayant reçu le Baptême, nous sommes unis à lui de façon totale et définitive. Dans notre âme coule le même sang, la même vie du Christ:  en lui, nous sommes devenus fils du même Père, co-héritiers de son Royaume, c'est pourquoi nous pouvons crier:  Abba, Père, notre Père qui es dans les cieux...

Le Saint-Père écrit dans la Lettre qui vous est adressée à l'occasion de ce Jubilé:  "Ce qui distingue la foi chrétienne de toutes les autres religions, c'est la certitude que l'homme Jésus de Nazareth est le Fils de Dieu, le Verbe fait chair, la seconde personne de la Trinité venue  dans  le  monde.  Telle  est  la "joyeuse conviction de l'Eglise dès son commencement, lorsqu'elle chante "le grand mystère de la piété':  Il a été manifesté dans la chair" (Catéchisme de l'Eglise catholique, n. 463). Dieu, l'invisible, est vivant et présent dans Jésus, le fils de Marie, la Theotokos, la Mère de Dieu. Jésus de Nazareth est Dieu-avec-nous, l'Emmanuel:  qui Le connaît connaît Dieu, qui le voit voit Dieu, qui Le suit suit Dieu, qui s'unit à Lui est uni à Dieu (cf. Jn 12, 44-50). En Jésus né à Bethléem, Dieu épouse la condition  humaine  et  se  rend  accessible en faisant alliance avec l'homme" (n. 2).

Votre condition de jeunes vous unit au Christ. Mais, je vous le demande, connaissez-vous le Christ dans votre existence, le voyez-vous, le suivez-vous concrètement dans toutes les situations qui font partie de votre vie de jeunes, dans vos joies et vos douleurs, dans vos efforts et dans vos espérances, dans vos illusions et vos déceptions, dans le travail et dans l'étude, dans les découragements et les incompréhensions, dans les succès et dans les échecs, dans l'effort d'un changement personnel et social continu, dans les peurs et dans les obstacles que la société dans laquelle nous vivons vous présentent chaque jour? En un mot:  quel est le moyen pour être jeunes et jeunes chrétiens aujourd'hui? La réponse est que pour être de jeunes chrétiens, nous devons avoir le regard toujours fixé sur le Christ crucifié et ressuscité. "Il y a quinze ans, écrit le Pape dans la Lettre mentionnée, au terme de l'Année Sainte de la Rédemption, je vous confiai une grande Croix de bois, en vous invitant à la porter dans le monde comme signe de l'amour du Seigneur Jésus pour l'humanité et comme annonce que ce n'est que dans le Christ mort et ressuscité qu'existent le salut et la rédemption. Depuis, soutenue par des bras et des coeurs généreux, elle a parcouru un long pèlerinage ininterrompu à travers les continents, montrant que la Croix marche avec les jeunes et que les jeunes marchent avec la croix" (n. 1).

C'est dans la croix du Christ et dans sa résurrection que nous trouvons la clé pour affronter et surmonter nos problèmes existentiels, pour comprendre le sens de la vie, pour avoir la force de voler haut, sans nous laisser prendre au piège par le marécage du matérialisme qui nous brise les ailes.

"A tous ceux qui l'ont accueilli, il a donné pouvoir de devenir enfants de Dieu" (Jn 1, 12). Accueillir le fils signifie lui accorder une place, non pas marginale ni éphémère, dans notre vie; cela signifie vivre cette vie avec le même amour avec lequel il nous a aimés et continuera à nous aimer, cela signifie nous placer dans une attitude d'adoration et de contemplation face au nouveau-né que la Vierge Marie a mis au monde, cela signifie ressentir sa présence en nous comme forte et motivante. Le Christ est Présence, accueillie par certains et repoussée par d'autres, aimée par certains et méprisée et refusée par d'autres.

A nous qui l'avons accueillie, cette présence suscite merveille, joie, enthousiasme, espérance, volonté de vivre et de le témoigner comme Vie et source de Vie; elle suscite la volonté de sainteté et de changement dans le monde et en soi:  soyez saints, comme Dieu est saint, comme Jésus-Christ est saint. Il s'agit d'un appel qui est humainement au-delà de nos faibles forces humaines, mais qui est réalisable également pour nous aujourd'hui, comme cela a été possible pour tant de jeunes au cours de ces deux mille ans; il est possible si nous conservons le regard fixé sur le Christ, si nous devenons plus forts grâce à cette espérance que lui seul peut nous donner:  "il n'y a de salut en personne d'autre" (Mt 4, 12).

Dans le Christ, tout est réalisable, tout peut se conquérir, même les sommets les plus élevés et inaccessibles. Aucun obstacle ni fardeau ne pourra nous arrêter:  il est le guide expert, prêt à nous porter sur ses épaules si nous nous fatiguons, toujours prêt à nous chercher si nous nous perdons sur le chemin de la vie.

Chers jeunes, je vous pose une autre question:  pourquoi êtes-vous venus ici, à Rome, à l'occasion du Jubilé des jeunes, qui coïncide avec la XVème Journée mondiale de la Jeunesse? Pour vous aider à répondre, je voudrais vous raconter une sorte de parabole que j'ai lue quelque part ces jours-ci.

En Provence, parmi les nombreux santons qui constituent la crèche, il y en a un qui représente un homme avec un visage magnifique, empreint de merveille, mais les mains vides. Ils lui ont donné le surnom de "le ravi". Un jour, les autres santons se sont mis en colère et lui ont reproché âprement d'être le seul à n'apporter aucun cadeau à l'Enfant Jésus:  "N'as-tu pas honte de venir les mains vides voir Jésus, sans même apporter un petit don?". "le ravi" ne semblait faire aucun cas des reproches et continuait à regarder Jésus.

La Mère de l'Enfant, voyant que les autres santons continuaient de faire des reproches au ravi prit sa défense et dit:  "Ce n'est pas vrai qu'il n'apporte aucun cadeau à Jésus; il a apporté le don le plus beau:  son émerveillement! Cela signifie qu'il a été attiré par l'immense amour de Dieu qui l'a enchanté!".

La réponse à la question, pourrait alors être:  nous sommes venus à Rome non pas par curiosité, ou pour faire du tourisme, ou pour passer le temps, mais pour vivre profondément et spirituellement le grand Jubilé, c'est-à-dire pour rencontrer le Christ, pour nous éloigner de tout ce qui ne nous permet pas de l'approcher et ressentir sa présence en nous, pour proclamer face au monde, comme Pierre, il y a deux mille ans:  "Seigneur, à qui irons-nous? Tu as les paroles de vie éternelle" (Jn 6, 68), pour réaffirmer notre foi:  "Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant!" (Mt 16, 18). Chers jeunes, "Telle est notre foi. Telle est la foi de l'Eglise. Et nous, nous nous glorifions de la professer, en Jésus-Christ notre Seigneur" (Rite pontifical romain de la confirmation).

Notre vie et celle du monde changeront et cela sera magnifique s'il y a des jeunes qui, comme "le ravi", seront capables de s'émerveiller.

Le Christ est le "livre de la vie", que vous devez lire et mettre en pratique. Il vous a été confié un devoir extraordinaire:  projeter le Christ dans le temps nouveau et dans l'histoire qui s'ouvre avec ce troisième millénaire de l'ère chrétienne. Vous êtes les bâtisseurs, les artisans de la nouvelle société et de l'Eglise qui, fondée par le Christ, avec des pas de jeunes, est entrée dans cette nouvelle époque.

Une Eglise à l'esprit toujours jeune, comme celle qui célèbre, à travers le grand Jubilé de l'An 2000, le bimillénaire de l'Incarnation de son Seigneur et Sauveur, et accueille dans l'optimisme le début de son troisième millénaire d'histoire, ne peut manquer d'être une Eglise de jeunes dans laquelle les jeunes garçons et filles du monde entier se sentent chez eux. A une Eglise de jeunes, faite de jeunes, correspond un Jubilé tout aussi jeune et fait de jeunes.

C'est à vous, qui vivez ce Jubilé des jeunes, que s'adresse l'invitation à vous sentir encouragés à apporter au monde l'annonce que Jésus-Christ est l'Emmanuel, le Dieu avec nous. C'est à vous que s'adresse le devoir de lui donner la réponse de votre engagement chrétien et de témoigner des conséquences qui découlent pour votre vie de la forte expérience spirituelle que vous vivez ces jours-ci.

Une fois de plus, je vous répète l'invitation du Pape:  N'ayez peur de rien ni de personne, ouvrez grandes les portes de votre coeur, de votre esprit et de votre volonté au Christ qui marche avec vous, vous renouvelle et vous renforce à  travers la force de son Esprit. Le souhait du Saint-Père est que le Jubilé représente pour vous l'occasion propice pour un nouvel élan spirituel courageux et pour une célébration extraordinaire de l'amour de Dieu pour l'humanité.

Agenouillés face à l'Enfant déposé dans la  crèche,  conservons  le  regard fixé également sur la Vierge, Mère de Dieu. Chers jeunes, que la Très Sainte Vierge Marie vous enseigne à discerner la volonté du Père céleste sur votre existence; qu'elle diffuse en vous la force et la sagesse de pouvoir parler à Dieu et parler de Dieu. Que son exemple et son intercession maternelle vous poussent à être dans le nouveau millénaire des annonciateurs d'espérance, d'amour et de paix.

Amen!

 

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