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 Pontifical Council for the Pastoral Care of Migrants and Itinerant People

People on the Move

N° 99, December 2005

 

 

COMMERCES, BUREAUX, PARKING Â…

LA NOUVELLE ECONOMIE DES AEROPORTS*

Á l'image du modèle britannique, les grandes plates-formes aériennes européennes se transforment pour accroître leur part dÂ’activité commerciale. Une manière de tirer profit du nombre croissant de passagers qui passent de plus en plus de temps dans leurs murs

 

François Bostnavaron 

avec Dominique Buffler

 

«DITES-MOI où sont leś boutiques, on verra après où on fait embarquer les passagers». Cette affirmation ne serait pas surprenante si son auteur nÂ’était pas un spécialiste de la gestion aéroportuaire, en lÂ’occurrence Pierre Graff, président dÂ’une entreprise en pleine mutation: Aéroports de Paris (ADP). Lundi 6 juin, la société qui gère notamment lés deux plus grands aéroports de France, Roissy-Charles-de-Gaulle et Orly,amorce une mutation culturelle: nouveau logo, changement de décoration, nouvel accompagnement sonore des voyageurs...ADP separe dÂ’atours avant sa privatisation annoncée. Une démarche marketing dépoussiérée pour se présenter comme une entreprise à part entière.

Car aujourdÂ’hui les métiers des aéroports sont en pleine transformation. Les grandes plates-formes aériennes cherchent à gagner leur vie en trouvant de nouvelles sources de revenus, bien loin de leur activité historique: la perception de la redevance aéroportuaire payée par les compagnies aériennes et de la taxe dÂ’aéroport qui incombe aux passagers. Les aéroports accueillent des centres commerciaux, gèrent des parcs immobiliers et des parkings...

Cette mutation, abordée au cours dés années 1980, a déjà transformé lés équilibres de leurs comptes annuels. En 2004, ADP a ainsi réalisé 53,1% de son chiffre dÂ’affaires (1,82 milliard dÂ’euros) grâce à la gestion de ses activités commerciales (concession des boutiques, royalties sur les activités hôtelières..). La tendance est identique à lÂ’aéroport de Schiphol, dans la banlieue dÂ’Amsterdam, où les activités commerciales représentent  43% du chiffre dÂ’affaires (888 millions dÂ’euros).

Seul lÂ’aéroport allemand de Francfort semble en retard dans le développement de cette stratégie: les revenus tirés du commerce et de lÂ’immobilier (373,9 millions dÂ’euros) ne représentent que 20% de son chiffre dÂ’affaires. Tous ont en ligne de mire lÂ’exemple britannique: British Airport Authority (BAA). Cette société totalement privée, qui gère notamment les aéroports londoniens dÂ’Heathrow et de Gatwick, réalise près de 60% de son chiffre dÂ’affaires dans les activités non aériennes. 

Essor de lÂ’Asie

Ce changement de cap des grands aéroports européens sÂ’explique en premier-lieu par leur volonté de mieux optimiser leur domaine foncier - ADP possède quelque 6.500 hectares. Mais surtout cette évolution accompagne la hausse continue du trafic de passagers qui transitent dans les aéroports mondiaux. Plus de 1,8 milliard de voyageurs ont pris lÂ’avion en 2004. Et lÂ’Association internationale du transport aérien (IATA) table sur une croissance de ce chiffre de 6% par an entre 2004 et 2008, liée pour partie à lÂ’essor du continent asiatique. Autant de consommateurs potentiels que les aéroports entendent occuper pendant leur attente. DÂ’autant plus que celle-ci sÂ’est allongée: depuis le 11 septembre 2001, les mesures de sécurité adoptées par les compagnies aériennes, notamment nord-américaines, obligent les passagers à venir parfois plusieurs heures avant le départ de lÂ’avion. Pour profiter au mieux de cette manne commerciale, lÂ’aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle, qui compte déjà plus de 40.000 metres carres de boutiques hors taxes, veut augmenter ces surfaces dÂ’au moins un quart dÂ’ici à 2008.

Une manière de se rapprocher du modèle britannique.« De ce côté de la Manche, on a privilégié le geste architectural tandis quÂ’à Heathrow on construisait un gigantesque centre commercial avec des portes dÂ’embarquement », ironise un professionnel.

Au fil des ans, les aéroports européens ont également appris à optimiser une autre ressource gourmande en superficie: leurs parkings. Là aussi, le Royaume-Uni est en pointe. Pour BAA, le chiffre dÂ’affaires généré par le stationnement a rapporté sur lÂ’exercice 2004-2005, 155 millions de livres (229,6 millions dÂ’euros), soit plus dÂ’argent que les ventes réalisées dans les boutiques hors taxes (148 millions de livres).

Pour doper cette activité, les gestionnaires britanniques nÂ’hésitent pas à appliquer les techniques dÂ’optimisation du yield management, couramment pratiqué dans les avions: plus on réserve tôt moins la place est chère. Résultat: dans les aéroports anglais gérés par BAA, cette activité est en hausse de 10% sur un an. Sans pour lÂ’instant adopter totalement cette approche, Aéroports de Paris a déjà mis en place des formules week-end à 35 euros et de parking longue durée pour encourager les voyageurs à venir avec leur propre voiture plutôt que dÂ’emprunter les transports en commun.

Dernière source dÂ’optimisation potentielle: lÂ’utilisation commerciale des terrains détenus par les aéroports.Partout en Europe, ils perçoivent déjà des royalties de nombreuses chaînes hôtelières ou dÂ’entreprises qui ont installé des bureaux à proximité des terminaux. Pour aller plus loin, les aéroports nÂ’hésitent plus à imaginer la création de véritables centres, commerciaux géants. Ainsi, à Roissy, le promoteur immobilier Unibail projette, de construire une space de 50.000 mètres carrés, soit la surface de 4 à 5 hypermarchés. Un investissement de 200 millions dÂ’euros pour lequel est prévue la création de 2.000 à 3.000 emplois. LÂ’ouverture devrait coïncider avec lÂ’éventuelle tenue des Jeux olympiques à Paris en 2012.

 
*Extrait de Le Monde, Vendredi 3 Juin 2005

 

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