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 Pontifical Council for the Pastoral Care of Migrants and Itinerant People

People on the Move

N° 99, December 2005

 

 

Rencontre RÉgionale de

l’ApoSTOLAT DE LA MER de l’Océan Indien*

 

 

 

Card. Stephen Fumio HAMAO

Président du Conseil Pontifical 

pour la Pastorale des Migrants 

et des Personnes en déplacement

 

Discours d’ouverture

Mesdames et Messieurs

Chers Frères et Sœurs,

Je voudrais dire un mot spécial de félicitations et d'encouragement à M. Jean Vacher pour son dévouement et son engagement au service de la communauté maritime et qui aujourd’hui voit un vieux rêve se réaliser. Il a été dans l’Océan Indien, et même au-delà, un pionnier et une source d’inspiration pour la pastorale maritime. Il a encouragé la coopération œcuménique, et pendant toutes ces années il a été une référence pour tous, et la coordination de l'Apostolat maritime dans cette région du monde a largement reposé sur lui.

A la fin de l’année dernière certains pays de votre région ont été durement éprouvés par le Tsunami et je pense spécialement aux Maldives, aux Seychelles et à certains pays riverains de l’Afrique de l’Est. Je voudrais redonner à tous l’assurance de notre solidarité et de notre sympathie.

C'est aussi l’occasion pour moi de rappeler à votre région que vous n'êtes pas seuls dans cet apostolat, vous êtes membre d'un réseau international de plus de 110 centres et aumôneries de l'Apostolat de la Mer à travers le monde. Ce travail est coordonné par le Conseil Pontifical pour la Pastorale des Migrants et des Personnes en déplacement, dont je suis le Président, dont Msgr A. Marchetto (que vous connaissez) est le Secrétaire et dont Msgr Jacques Harel et Mme Farina, sont les Officiels. Nous avons également une grande tradition oecuménique qui est encouragé et favorisé par l’ICMA dont nous sommes un membre fondateur et actif, je me réjouis des bonnes relations œcuméniques qui existent aussi dans les pays de votre région.

Le Saint-Père Benoît XVI porte un grand intérêt à notre travail et à la situation des personnes en déplacement, donc des marins, des pêcheurs et de leurs familles. Récemment, le 5 juin à l’Angélus le nouveau pape disait ceci:

«Je pense à tous ceux qui se trouvent loin de leur patrie et souvent aussi de leur famille et je leur souhaite de toujours trouver sur leur chemin des visages amis et des cœurs accueillants, capables de les soutenir dans les difficultés de chaque jour.»

Les marins et les pêcheurs, nous le savons, sont des personnes qui accomplissent un travail essentiel, difficile et souvent pas reconnu, loin de la famille et de leur pays et ce pendant de longues périodes. Être reçu par une communauté fraternelle est une des meilleures manières de les soutenir, les encourager et les remercier de ce travail qu'ils font et qui est tellement nécessaire à la prospérité de nos Pays et au bien-être de nos populations.

Quand un marin ou un pêcheur arrive au Centre fatigué d’un long voyage, sachez l’accueillir comme St-Benoit recommandait à ses moines de le faire pour l’étranger: 

«Accueillez l’étranger comme le Christ lui-même»

L’accueil et l’hospitalité sont parmi les formes les plus parfaites de la charité, nous disait le Pape Jean-Paul II quelques mois avant sa mort.

C’est pourquoi il est important de garder son enthousiasme et son dynamisme dans l’engagement pastoral. Ce nouveau centre, comme tous les autres centres, se développera et conservera sa raison d’être dans la mesure où vous saurez garder votre dynamisme, votre capacité de mobilisation et de compassion. Un aumônier, un agent pastoral de l’Apostolat de la Mer n’est pas un fonctionnaire, qui se doit de rester neutre et détaché, mais au contraire il se doit de « fonctionner dans l’amour et la compassion ». C’est ce qui nous permettra de faire une lecture chrétienne des « signes des temps » et de répondre dans la charité aux appels de nos frères et sœurs et de ne jamais les abandonner.

Pour qu’un centre de marins puisse se développer et répondre aux besoins réels et accomplir ainsi efficacement son travail il faut qu’il soit bien intégré dans le contexte local. Concrètement, cela veut dire entretenir des relations fraternelles et apostoliques avec vos Diocèses, les paroisses proches du Port et du bord de mer et s’intégrer dans la pastorale d’ensemble, entretenir des rapports œcuméniques avec les autres églises et communautés ecclésiales. Vous devez également entretenir de bons rapports avec les autorités portuaires, syndicales et gouvernementales et avec la population environnante. 

Je suis au courant que ce centre de Roches-Bois, a vu le jour grâce à une synergie exemplaire entre l’Eglise, la Municipalité, le Gouvernement et les syndicats, à travers le ITF-Seafarers Trust, et j’en suis heureux.

Cela suppose naturellement une capacité d’écoute mutuelle, de dialogue et d’adaptabilité afin de pouvoir répondre aux besoins, vrais ou ressentis, de la communauté maritime et de leurs familles. Cela suppose également des fréquentes remises en question et la capacité de remettre ses plans personnels et ses projets en chantier.

Une autre priorité surtout quand on se retrouve à l’aube d’un nouveau et grand voyage c’est de «s’assurer de son équipage». En d’autres termes de n’épargner aucune peine ou sacrifices pour constituer une équipe soudée, loyale et efficace. «Un royaume divisé ne peut pas tenir». Sans équipe un Centre ne fonctionnera pas ou sera un lieu de rivalités, de divisions et de «palabres» de toutes sortes. 

C’est pourquoi les responsables devront savoir:

  • faire confiance aux employés et aux volontaires en leur déléguant des responsabilités tout en les accompagnant et les encourageant.
  • Donner du temps à la formation.
  • Ne jamais favoriser l’exclusion mais toujours la communication et l’unité.

Chacun en retour devra:

  • Donner du temps à Dieu et avoir une vie spirituelle, personnelle et vraie.
  • Accepter de servir avant d’être servi ou de se servir.
  • Pratiquer la bienveillance, faire confiance avant de suspecter et condamner.
  • Voir dans chacun non pas un ennemi mais un frère. 
  • Et, surtout, entretenir une capacité de se pardonner mutuellement et de se réconcilier.

Traditionnellement les Centres de marins à travers le monde sont aussi des lieux où sont défendus les droits des marins, des pêcheurs et de leurs familles. Du reste à travers le monde, plus précisément à New York, à Londres et à Barcelone il y a trois centres, patronnés par les Eglises, qui sont spécialisés dans la défense des droits des marins. Le 16 juin dernier le pape Benoît XVI recevant sept ambassadeurs leur déclarait: 

«Notre cœur ne peut être en paix tant que nous voyons des frères souffrir, par manque de nourriture, de travail, de toit ou d’autres biens fondamentaux»

Nous le savons hélas que les marins et les pêcheurs sont en butte à toutes sortes de difficultés, de dangers et qu’ils sont les premiers à subir les effets négatifs de la mondialisation: ils font couramment face au manque de sécurité, à l’exploitation et aux abandons sauvages, ils sont souvent marginalisés et soumis à des harassements administratifs, de plus nous avons été récemment témoins d’une « criminalisation croissante » de cette belle profession. 

C’est pourquoi il est de notre devoir d’élever nos voix et d’être la voix des sans-voix, de tous ceux qui ne savent où se tourner pour avoir un recours. Il est de notre devoir de le faire en interpellant les partenaires du monde maritime et même des autorités publiques lorsque la dignité de la personne humaine et ses droits ne sont pas respectés. En le faisant nous contribuons au développement de ce secteur et même à sa prospérité à long terme, car la justice et le dialogue sont la base et la garantie d’une cohésion sociale qui permettront le progrès vrai et durable. 

Cette mission prophétique du chrétien, aussi appelé devoir d’advocacy, est clairement exprimé par Jean-Paul II dans sa lettre aux Évêques français du 11 février 2005:

«Les Chrétiens en raison de leur mission sont appelés à intervenir régulièrement dans le débat public sur les grandes questions de société. De même, au nom de leur foi, les chrétiens, personnellement ou en associations, doivent pouvoir prendre la parole publiquement pour exprimer leurs opinions et pour manifester leurs convictions, apportant de ce fait leurs contributions aux débats démocratiques, interpellant l’Etat et leurs concitoyens sur leurs responsabilités d’hommes et de femmes, notamment dans le domaine des droits fondamentaux de la personne humaine et du respect de sa dignité, du progrès de l’humanité qui ne peut pas être à n’importe quel prix, de la justice et de l’équité, ainsi que de la protection de la planète, autant de domaines qui engagent l’avenir de l’homme et de l’humanité, et la responsabilité de chaque génération.»

Cette activité pastorale essentielle, fait partie de la mission prophétique de l’Église. Mais l’«advocacy» de l’Apostolat de la Mer ne sera crédible que s’il est fondé sur un engagement à la base même, pour s’assurer que nous sommes à l’écoute et au courant des vrais problèmes et que notre action aide à conscientiser les personnes concernées et les aide à prendre eux-mêmes leurs responsabilités. 

Je voudrais conclure en félicitant et en remerciant, au nom de tous les marins et pêcheurs étrangers ou locaux qui fréquenteront ce magnifique centre, tous ceux qui ont œuvré à cette belle réalisation. Vous êtes un pays, et une Région, à vocation maritime et votre Zone Economique Exclusive est une des plus vastes au monde, j’espère que ce Centre vous aidera à rester tournés vers la mer et à vous rappeler que c’est là que se trouve votre avenir. 

En déclarant cette Conférence ouverte, j’invoque, par l’intermédiaire de Marie, la «Stella Maris», la bénédiction de Dieu sur vous tous, sur ce Centre et son personnel, sur votre région, votre engagement apostolique et professionnel et sur toutes vos familles.

 
*Port-Louis, Mauritius, 5-7 July 2005

 

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