Pontifical Council for the Pastoral Care of Migrants and Itinerant People People on the Move N° 101, August 2006 Conférence de la Diaspora Mauricienne (17-22 Juillet 2006) Du 17 au 22 juillet 2006 sÂÂest tenue à lÂÂUniversité de Maurice, la Conférence Internationale sur la Diaspora Mauricienne, dont le thème était « Afin de ne pas oublier nos racines ». La conférence a été ouverte par le Vice-président de la République, en présence du Vice-premier ministre M Xavier Luc Duval, du Cardinal Margéot, de LL EE Mgr M Piat et de Mgr G Aubry. Plus de 100 mauriciens dÂÂailleurs et une centaine de Maurice et de Rodrigue ( ainsi quÂÂun certain nombre dÂÂétudiants de lÂÂUniversité) ont participé régulièrement aux travaux. JÂÂy représentais le Conseil Pontifical pour la Pastorale es Migrants et Personnes en Déplacement. Cette Conférence est la première consacrée aux causes et aux conséquences de lÂÂémigration mauricienne et sur ses perspectives dÂÂavenir. Malgré les années et le recul du temps, cette rencontre sÂÂest déroulée dans un contexte délicat qui nÂÂa pas oublié que les émigrés post-indépendance appartenaient surtout à lÂÂethnie créole, quÂÂils étaient des chrétiens, dont la majorité avait milité contre lÂÂindépendance du pays. Certains avaient émigré par peur dÂÂune hégémonie hindoue et asiatique et dÂÂune attitude revancharde de leurs adversaires politiques. A lÂÂépoque, et même récemment, dÂÂaucuns nÂÂavaient pas hésité à les traiter de traîtres lors des campagnes électorales et des débats publics. Les thèmes de la conférence étaient pertinents, intéressants et variés. Les sujets ont été traités par des spécialistes et aussi grâce aux interventions venant du public. Beaucoup dÂÂintervenants ont souligné que Maurice est un petit pays sans grandes ressources naturelles, qui a besoin de toutes ses compétences pour construire son avenir et quÂÂil était temps dÂÂadopter une vision nouvelle si on voulait avancer. Pendant le premier jour on a traité de lÂÂorigine des Mauriciens : « Tous issus de lÂÂimmigration », car Maurice est un pays de peuplement et tous les Mauriciens sont descendants dÂÂimmigrés. Ensuite la « saga des départs » des années 60-70 a été retracée à travers un exposé très documenté . « Rêver de lÂÂavenir de notre pays » était le deuxième sujet et a invité les participants à se pencher sur les perspectives économiques et à rêver dÂÂune Ile Maurice nouvelle, construite par tous ses fils et ses filles réconciliés. Le dernier jour, la conférence a traité de la situation des migrants confrontés à des loyautés multiples, dont le déchirement du migrant appelé à se déraciner de son pays dÂÂorigine et à sÂÂenraciner dans son pays dÂÂaccueil. Des résolutions pratiques ont été prises, parmi les plus importantes: - La création dÂÂun Secrétariat permanent de la diaspora pour établir le suivi du symposium ; - La mise sur pied avec lÂÂaide de lÂÂUniversité de Maurice dÂÂun site Internet ; - Une plus grande diffusion de la législation en vigueur concernant la citoyenneté et les droits des émigrés ; - Les diverses associations caritatives et humanitaires, déjà actives sur le terrain, ont été encouragées à intensifier leurs activités dans le domaine de la santé et de lÂÂéducation ; - Il a aussi été demandé que les émigrés aient le droit de vote (cette résolution a peu de chances dÂÂêtre acceptée car elle risquerait de mettre en péril la délicate question dÂÂéquilibre ethnique dans le pays), mais au niveau des recommandations finales il a été accepté "dÂÂétudier les implications légales, politiques et sociales en vue de la mise en place effective du droit de vote pour les expatriés d'origine mauricienne" ; - Un cadre dÂÂaccueil pour les étudiants mauriciens se rendant à l'étranger pour des études tertiaires ; - LÂÂaide pour le financement des projets locauxÂÂ
- Il a également été décidé de créer un observatoire de l'Océan Indien afin de sauvegarder les vestiges du passé ; - De meilleurs contacts entre la République de Maurice et les pays dÂÂaccueil ( cf. visa, double nationalité etc.) ; - LÂÂinformatique est appelée à jouer un grand rôle dans tout futur développement et lÂÂIle Maurice qui manque de compétence dans ce domaine devrait faire appel aux mauriciens de la diaspora et une meilleure synergie au niveau du transfert des technologies devrait être adoptée ; - Au fil des jours, les organisateurs ont bien précisé quÂÂils ne sont pas " nécessairement à la recherche de ressources financières, mais plutôt de la collaboration de spécialistes avec lesquels les professionnels mauriciens pourraient travailler en réseau ». Cette conférence a eu le grand mérite de traiter avec sérénité dÂÂun sujet jusquÂÂici « tabou », car il y a toujours le risque quÂÂil soulève des vieilles passions et réveille des vieux démons. La conférence, très bien organisée, sÂÂest déroulée dans lÂÂordre et dans un esprit dÂÂécoute mutuelle, bien que certains sujets tels le peuplement initial de lÂÂIle, les raisons de la grande émigration des années 60 et la demande du droit de vote ont donné lieu à des débats et à des divergences de point de vue. LÂÂengagement de lÂÂUniversité de Maurice et la présence des journalistes et dÂÂautres représentants de forces vives dans cette recherche a aussi été positive et a enrichi les débats. Le partenariat avec lÂÂUnivesité de Maurice qui était une première au niveau de lÂÂEglise à Maurice a été très fructueux. En effet, fort du succès remporté par le symposium,le Chancelier de l'Université a déjà donné son aval pour plusieurs projets. Ainsi, un département d'enseignement au sein de la faculté des sciences sociales sera créé, pour étudier le phénomène d'émigration, l'identité et la responsabilité collective. L' Université compte aussi mettre sur pied un Mauritian Diaspora Unit, pour effectuer des recherches autour de différents thèmes ciblés. Ce travail sera effectué en synergie avec les partenaires de la diaspora mauricienne, et l'Eglise, les centres culturelsÂÂ
ainsi que le Mauritius Research Council (MRC). En conclusion je voudrais rendre hommage à la vision des deux prêtres catholiques, les Pères Philippe Goupille et Jocelyn Grégoire C.S.Sp, qui ont eu lÂÂinitiative de ce grand projet et qui grâce à leur vision et à leur persévérance ont su le mener à bien en lÂÂinsérant dans une vision nationale. La conférence a eu une grande couverture médiatique et a suscité un très grand intérêt dans le pays. Les Pères Goupille et Grégoire ont réussi le tour de force de réunir sur une même plate-forme tant de personnalités de sensibilités différentes, qui ont accepté subséquemment de sÂÂengager pour effectuer le suivi, donnant ainsi une crédibilité accrue aux conclusions et recommandations. Cette conférence constitue, donc, une étape importante dans le processus de « nation building » dont lÂÂIle Maurice, jeune nation encore plutôt fragile, a tant besoin. Rev. Mgr Jacques HAREL |