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LETTRE DU CARDINAL-SECRÉTAIRE D'ETAT ANGELO SODANO
À L'OCCASION DE LA 34ème ASSEMBLÉE GÉNÉRALE
DE L'ORGANISATION DES ETATS AM
ÉRICAIN*

 

 

A l'occasion de la 34 Assemblée générale de l'OEA, Sa Sainteté le Pape Jean-Paul II m'a chargé de faire parvenir une salutation cordiale à Votre Excellence, à LL.EE. MM. les Ministres des Affaires étrangères des Etats américains et des Caraïbes, à S.E. le Secrétaire général de l'Organisation des Etats américains, M. César Gaviria, ainsi qu'aux représentants des pays observateurs.

Vingt-cinq ans se sont écoulés depuis que le 6 octobre 1979, le Saint-Père a rendu visite au siège de l'OEA à Washington, qui allait devenir ainsi la première des nombreuses Organisations et Institutions internationales auxquelles le Souverain Pontife aurait par la suite l'occasion d'adresser un message de paix et d'amitié.

A cette occasion, le Pape avait soumis, "dans un respect absolu" et "un esprit de service", certaines réflexions, en commençant par une observation qui n'a rien perdu de son actualité:  "La paix est un don précieux que vous vous efforcez de préserver pour vos peuples. Vous êtes d'accord avec moi sur le fait que ce n'est pas par l'accumulation des armes que l'on arrive à assurer cette paix d'une façon stable. Mis à part le fait que cette accumulation augmente, dans la pratique, le risque de recourir aux armes pour résoudre les conflits qui  peuvent  surgir,  elle soustrait de considérables ressources matérielles et humaines aux grandes missions pacifiques et si urgentes du développement" (Discours à l'OEA, n. 2; 6 octobre 1979).

Au cours de ces dernières années, l'attention mondiale s'est consacrée, pour des raisons aussi tristes qu'évidentes, à la question de la sécurité.

L'OEA également, le 28 octobre dernier, au terme de la Conférence spéciale  sur  la  Sécurité,  qui s'est tenue à Mexico, a approuvé une déclaration à cet égard. On y affirme, entre autres, que la paix est une valeur en soi et qu'elle est fondée sur la démocratie, sur la justice, sur le respect des droits de l'homme, sur la solidarité, sur la sécurité et sur le respect du droit international (cf. Déclaration sur la Sécurité dans les Amériques, art. 3).

Ces "piliers de la paix" reposent sur un fondement commun:  le droit à la vie. Un droit qui ne peut être pleinement exercé si les conditions de vie ne sont pas dignes:  si la nourriture, le logement, l'éducation, l'assistance médicale, le travail, la liberté, etc... font défaut. Pour garantir ces conditions, d'immenses ressources économiques sont également nécessaires, qui, malheureusement, manquent souvent.

Pourtant, combien de richesses, aujourd'hui encore, continue-t-on de gâcher en fournissant des instruments de guerre toujours plus sophistiqués lorsque manquent ceux nécessaires au développement intégral de l'homme!

Trop d'armes circulent encore dans tant de pays du monde, tandis que l'on aurait davantage besoin de maisons, d'écoles, de routes, de lumière, d'eau potable et de médicaments!

Il faut reconnaître que l'OEA a été un pionnier dans ce domaine également. En effet, ce fut la première Institution régionale à avoir adopté une "Convención interamericana contra la Fabricación y el Tráfico Ilícitos de Armas de Fuego, Municiones, Explosivos y Otros Materiales Relacionados" (10 juin 1998), qui a récemment célébré sa première Conférence de révision (Bogotà, 8-9 mars 2004).

Le phénomène du trafic d'armes, souvent lié à d'autres formes illicites de commerce, représente un grave problème pour le développement intégral du monde.

Bien qu'il s'agisse d'un premier pas important, il ne suffit pourtant pas de se doter d'instruments techniques et juridiques adaptés si l'on insiste pas sur une vision éthique de la dignité humaine. Cette vision doit s'enraciner dans un processus d'édification de la paix qui aille à la racine du fléau de la violence, qui est au coeur de l'homme.

"Quand on parle de droit à la vie, à l'intégrité physique et morale, à la nourriture, au logement, à l'éducation, à la santé, au travail, à la participation responsable à la vie de la nation, on parle de la personne humaine [...] Tout ce que vous ferez pour la personne humaine engendrera un arrêt de la violence et des menaces de subversion et de déséquilibre", disait encore le Saint-Père dans le discours cité plus haut au Siège de l'OEA (nn. 5 et 6, 6 octobre 1979).

C'est pourquoi seule la conscience du caractère sacré de la vie et son plein respect, à chaque étape de son évolution, de sa conception à sa mort naturelle,  peut jeter  les bases de la construction d'une authentique "cité de la paix".

Le droit à la vie, ainsi que son plein respect, comporte toutefois la tâche immense et indispensable de déraciner tout ce qui l'empêche d'être vécue de façon digne:  la pauvreté, avec ses multiples causes et ses nombreuses victimes.

Certains pays ont un besoin urgent de l'aide internationale, afin de surmonter les moments difficiles et de financer des projets de développement.

Le Saint-Siège est souvent sollicité pour recommander ou soutenir des projets d'investissement ou de développement. Je profite de cette occasion pour inviter les pays donateurs et les Institutions financières à accomplir un effort généreux dans ce sens, conscients qu'un don aujourd'hui peut constituer une économie importante pour demain et contribuer à l'édification de la paix et de la sécurité.

Il ne me reste à présent qu'à exprimer à tous les participants à cette Assemblée générale mes meilleurs voeux pour un travail fructueux et serein, tandis que je suis heureux de vous renouveler, Monsieur le Ministre des Affaires étrangères, les sentiments de ma très haute considération.

Du Vatican, le 6 juin 2004.

ANGELO CARD. SODANO
SECRÉTAIRE D'ETAT


*L'Osservatore Romano. Edition hebdomadaire en langue française n.28 p.6.

 

 

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