The Holy See
back up
Search
riga

INTERVENTION DE S.E. MGR LEO BOCCARDI,
LORS DE LA 48ème SESSION DE LA CONFÉRENCE GÉNÉRALE
DE L'AGENCE INTERNATIONALE
POUR L'ÉNERGIE ATOMIQUE (AIEA)*

Vienne (Autriche)
Mercredi 22 septembre 2004

 

Monsieur le Président,

Au nom de la délégation du Saint-Siège, je voudrais vous féliciter pour votre élection en tant que Président de la 48 Conférence générale et je vous assure du soutien total de ma délégation pour le succès de cette Conférence.

Un tour d'horizon des nombreuses activités accomplies en 2003 fait apparaître clairement que le domaine de compétence du travail de l'Agence a continué de s'étendre. Grâce, en particulier, à l'action du Directeur général, M. ElBaradei et au dévouement du Secrétariat tout entier, l'AIEA a pu répondre de façon efficace aux nombreux défis dans tous les domaines de son travail - prévenir la prolifération des armes nucléaires, améliorer et renforcer la sécurité nucléaire, contribuer à développer les utilisations pacifiques de la technologie nucléaire au service du développement durable - et apporter ainsi une contribution unique aux objectifs de paix et de prospérité dans le monde.

Monsieur le Président,

Les actes de violence perpétrés récemment en Russie et dans d'autres parties du monde offensent gravement l'humanité tout entière. Les violations constantes de la dignité humaine et les victimes innocentes du terrorisme attirent l'attention de tous sur la nécessité d'affronter les causes qui sous-tendent les formes modernes de barbarie et de les affronter de façon efficace. Nous devons également continuer de croire dans le dialogue comme instrument essentiel pour établir la paix et la sécurité.

Les menaces constantes à la paix et à la stabilité, dues à la prolifération des armes de destruction de masse, ainsi que les situations d'urgences humanitaires et écologiques, exigent des réponses fermes et à long terme. Le Directeur général, M. ElBaradei, a déclaré récemment:  "Nous devons également commencer à considérer les causes profondes de l'insécurité. Dans les régions de conflits qui durent depuis longtemps, comme le Moyen-Orient, l'Asie du sud et la péninsule coréenne, la recherche d'armes de destruction de masse - même si leur présence n'est jamais justifiée - se poursuivra vraisemblablement tant que que nous ne trouverons pas d'alternatives pour pallier le manque de sécurité". La réponse de la Communauté internationale doit être complète, et conjuguer sécurité, solidarité, et défense de la vie humaine.

Différentes sources nous avertissent que la prolifération nucléaire s'étend et que certains pays sont intéressés par l'acquisition illégale d'armes de destruction de masse. Il existe également le risque que les terroristes aient accès à ce type de matériel et de technologie. Dans ce contexte, nous devons nous accorder sur certaines mesures visant à assurer que la "vente normale" dans le domaine nucléaire ne puisse pas continuer. Le Traité de Non-Prolifération a contribué à la paix et la sécurité internationales, mais il reste encore beaucoup à faire, et la Communauté internationale doit accroître ses efforts en vue de diminuer les risques de prolifération nucléaire et développer un cadre mieux adapté aux réalités du XXI siècle. Un meilleur contrôle des exportations de matériaux nucléaires et la mondialisation du système de contrôle des exportations sont nécessaires. Par conséquent, il est nécessaire d'accorder plus d'autorité aux inspecteurs, comme le fait clairement apparaître la récente découverte d'un marché illicite de matériaux radioactifs et d'équipements nucléaires.

En ce qui concerne le Moyen-Orient, ma délégation partage la préoccupation générale à l'égard des signes croissants de la poussée de l'insécurité, due à la poursuite de guerre en Irak et à ses implications pour la sécurité dans la région et au conflit en suspens en Terre Sainte. Le respect des aspirations légitimes des deux parties, le retour à la table des négociations et l'engagement concret de la Communauté internationale peuvent conduire à une solution acceptable pour tous. Dans ce but, il serait souhaitable que tous les pays de la région, ainsi que la Communauté internationale, instaurent un dialogue sérieux pour créer un Moyen-Orient libre de toute arme de destruction de masse. Cela, associé aux limitations sur les armes conventionnelles et à des mesures de sécurité et de confiance adaptées, peut contribuer à établir la paix dans la région.

Le Programme de Coopération technique de l'Agence représente l'un des instruments principaux pour le transfert de la science et de la technologie nucléaires aux Etats-membres, afin de promouvoir le développement social et économique. Ses initiatives, lorsqu'elles sont adaptées aux besoins des Etats bénéficiaires et à leurs partenaires dans le cadre des priorités nationales, aident à  combattre  la  pauvreté  et peuvent ainsi contribuer à une solution plus pacifique des graves problèmes auxquels l'humanité doit faire face.

Ma délégation note avec satisfaction les efforts qui ont été accomplis pour améliorer le programme et le soutien des Etats-membres, comme en témoignent les ressources mises à disposition pour l'amélioration des conditions socio-économiques, à travers l'utilisation de la technologie nucléaire à des fins pacifiques, dont 110 pays issus de tous les continents ont bénéficié. Pour garantir le succès, tous les Etats-membres doivent contribuer à l'effort collectif, montrant de cette façon leur engagement en vue de surmonter les incertitudes chroniques qui touchent le Fonds de coopération technique.

Les techniques nucléaires et isotopiques se sont avérées de plus en plus utiles pour répondre aux besoins humains fondamentaux et affronter les grands défis, en particulier dans les régions du monde en voie de développement. Les activités de recherche et les projets de coopération technique menés ces dernières années, ou encore en cours, continuent de produire des résultats encourageants et indiquent des façons innovatrices de traiter de problèmes qui touchent un grand nombre de personnes dans leur vie quotidienne. Les efforts de l'AIEA dans ce domaine sont très appréciés et devraient se poursuivre à travers une coopération et un partenariat fructueux avec les pays bénéficiaires.

Ces applications pacifiques des techniques nucléaires peuvent apporter une contribution significative en vue de répondre aux préoccupations les plus urgentes de nombreuses façons, par exemple, la gestion des réserves d'eau potable, la production de récoltes qui donnent un meilleur rendement, ou ont une plus grande tolérance au sel dans les climats arides, l'élimination des parasites porteurs de maladies ou des insectes nuisibles d'une façon qui respecte l'environnement. Elles peuvent être utilisées, entre autres, dans l'étude de la malnutrition infantile ainsi que dans le diagnostic et le traitement de maladies. Dans ce contexte, je désire mentionner le rôle particulier des radionucléides utilisés dans le diagnostic et le traitement de maladies malignes. Ma délégation désire exprimer sa gratitude pour ce qui a été réalisé dans le domaine de la médecine nucléaire avec l'aide de l'AIEA. Mais il reste encore beaucoup à faire, et l'Agence devrait continuer à poursuivre ses efforts importants dans ce domaine.

Récemment, l'Agence et l'OMS ont attiré l'attention sur une autre crise imminente qui frappe des millions de personnes, en particulier dans les pays en voie de développement. Le nombre des patients atteints de cancer s'accroît de façon dramatique, tandis que les ressources et les équipements en vue de diagnostiquer et de traiter la maladie sont très limités, voire inexistants dans de nombreux pays. Presque 13% du nombre total de décès dans le monde sont provoqués par le cancer (plus que par la tuberculose, la malaria et le sida réunis). Aujourd'hui, le nombre de nouveaux cas de cancer apparaissant chaque année dans les pays en voie de développement est déjà supérieur à celui des pays industrialisés, et on prévoit une augmentation considérable des cas de cancer dans ces pays au cours des dix prochaines années.

La radiothérapie constitue l'un des traitements de base du cancer, et plus de 50% des patients sur lesquels un cancer a été diagnostiqué tireraient profit de ce type de thérapie, seule ou associée à la chirurgie et à la chimiothérapie. Toutefois, dans les pays en voie de développement, près de la moitié du nombre des patients souffrant de cancer n'auront pas accès à la radiothérapie à cause du manque d'équipements appropriés et de personnel suffisamment formé ayant une expérience dans le domaine de la physique clinique et médicale.

Le Saint-Siège apprécie tout le travail et les efforts de l'AIEA et de ses partenaires dans l'élaboration et le développement des programmes de dépistage du cancer, qui incluent la fourniture et la modernisation des équipements essentiels, ainsi que la formation adéquate de médecins, de physiciens et de techniciens, et l'échange d'informations à l'échelle mondiale. L'une des tâches principales de l'AIEA a été de développer et de mettre au point des normes et des Protocoles dans la dosimétrie des installations d'irradiation médicale. Le réseau mondial de laboratoires de dosimétrie, soutenu depuis plusieurs années par l'AIEA et l'OMS, fournit des services de calibrage pour les hôpitaux, en particulier dans les pays en voie de développement, en vue d'aider leurs programmes de contrôle de qualité.

Nous souhaitons que l'Agence continue d'accomplir et d'approfondir ces précieuses activités. Le Programme d'Action pour la Thérapie contre le Cancer (PATC), qu'elle vient de lancer, qui vise à accroître sa capacité à aider les Etats-membres dans la gigantesque tâche de lutter contre le cancer et de créer des centre régionaux d'expertise pour la radiothérapie, pourra être bénéfique si les pays donateurs et les Organisations soutiennent généreusement cette initiative.

Monsieur le Président,

Les efforts considérables de l'AIEA en vue de renforcer la sécurité radiologique et nucléaire, d'attirer l'attention sur les méthodes d'utilisation sans risque de sources radioactives, et d'aider à retrouver les sources abandonnées, apportent une contribution importante en vue de minimiser les dangers et d'empêcher tout dommage au public et aux personnes. L'Agence est activement engagée dans la promotion d'une culture de la sécurité en ce qui concerne l'application des techniques nucléaires et l'irradiation ionisante, et doit poursuivre ses efforts dans ce domaine. Le progrès accompli dans l'amélioration des équipements de protection contre les radiations dans de nombreuses régions contribue à accroître la sécurité et s'avère extrêmement utile, mais l'objectif n'a pas encore été atteint et devrait être constamment recherché. Dans le même temps, une autre tâche importante consiste à accroître la sécurité des matériaux et des infrastructures nucléaires, qui constituent encore une source de préoccupation et exigent une coopération efficace et approfondie entre les Organisations internationales et les Etats pris individuellement.

Les activités de l'Agence s'étendent à de nombreux domaines. Mais son succès ne doit toutefois pas nous conduire à nous reposer sur nos lauriers. Nous ne pouvons pas penser que notre travail  est  terminé,  mais  nous devons constamment nous efforcer d'atteindre notre objectif.

Merci, Monsieur le Président.


*L'Osservatore Romano. Edition hebdomadaire en langue française n.42 pp.8, 10.

top