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INTERVENTION DU SAINT-SIÈGE
LORS DE LA 59 SESSION DE DE L'ASSEMBLÉE GÉNÉRALE
DES NATIONS UNIES RELATIVE AU RENFORCEMENT DE L'ONU
(POINTS N. 52 ET N. 54)

INTERVENTION DE S.E. MGR CELESTINO MIGLIORE

Mardi 5 octobre 2004

 

Monsieur le Président,

Le Saint-Siège nourrit à l'égard du processus de renforcement des Nations unies de grands espoirs, un profond intérêt, ainsi que la volonté d'apporter sa contribution.  Il  s'agit d'un effort complexe, mais extrêmement nécessaire, qui comporte trois aspects différents:  les structures, les moyens et les objectifs.

Au cours de ces derniers mois, tant l'opinion publique que les Etats-membres se sont concentrés à juste titre sur la structure des organes des Nations unies. Un tel débat comportait toujours la question implicite de savoir si la structure et le fonctionnement de l'Organisation étaient adaptés aux objectifs de la Charte et sur quels moyens il était possible de compter pour les mettre en pratique. C'est précisément cette signification que nous voulons conférer au débat en cours sur "le multilatéralisme efficace":  la capacité à remplir les objectifs établis dans la Charte, dont certains ont été soulignés dans les Objectifs de Développement pour le Millénaire.

Etant caractérisée par l'universalité de ses membres, cette Organisation doit être adaptée à des objectifs tout aussi universels. Nous savons par expérience que l'organisation de la vie politique et l'influence exercée par l'autorité publique ne répondent pas toujours à leur devoir de promouvoir le bien commun. Aujourd'hui, la recherche du bien commun universel doit faire face à des problèmes d'envergure mondiale; des problèmes, par conséquent, qui ne peuvent être résolus que par une Autorité possédant le pouvoir, l'organisation et les instruments ayant la même ampleur que ces problèmes, et dont le domaine d'activité s'étend à l'échelle mondiale. C'est pourquoi les organes de la Communauté internationale devraient être conçus afin d'être en mesure de réaliser le bien commun à travers des voies et des instruments adaptés aux conditions historiques changeantes.

Jusqu'à présent, le débat a concentré son attention sur une multitude de raisons, de motivations et de réflexions utiles sur le fonctionnement institutionnel des Nations unies. A cet égard, le principal aspect que nous jugeons sans doute utile de réaffirmer est que les structures doivent refléter les fonctions. En ce qui concerne la réforme des organes, ma délégation voudrait proposer quelques considérations touchant aux principes fondamentaux.

Tout d'abord, nous devrions toujours avoir à l'esprit que les Nations unies sont une communauté d'Etats qui partagent des valeurs fondamentales, bien définies dans la Déclaration du Millénaire:  liberté, égalité, solidarité, tolérance, respect pour la nature et responsabilité partagée.

Le renforcement du système des Nations unies implique de reconnaître qu'il s'agit d'un système fondé sur la coopération, plutôt que la concurrence, entre les Etats, activement alimentée par la volonté constructive, la confiance, le respect des engagements et la collaboration entre des partenaires égaux et mutuellement responsables. Rendre ces principes fondateurs irréversibles constitue une tâche prioritaire.

Dans le processus de réforme et d'adaptation de cette institution, il est important d'identifier les principes directeurs, ainsi que les critères objectifs, justes et équitables, qui puissent être acceptables pour tous les Etats-membres, et qui ouvriront la voie à une réflexion constructive en ce qui concerne la composition des différents organes.

Le point essentiel est la reconnaissance du principe selon lequel tous les Etats ont, par nature, une dignité égale. Au sein de cette institution, nous savons bien que même si les nations diffèrent largement entre elles en ce qui concerne le progrès  matériel et la force militaire, elles sont toutes conscientes de leur égalité juridique. Il est toutefois vrai que les nations qui ont atteint un degré supérieur de développement scientifique, culturel et économique, ont la responsabilité d'apporter une plus grande contribution à la cause commune.

Sur un plan plus pratique, les critères essentiels qui devraient être pris en compte pour réorganiser les structures et réviser les procédés de cette Organisation sont les suivants:  en ce qui concerne les structures:  représentation et inclusion; en ce qui concerne les procédés:  impartialité, efficacité et compétence; en ce qui concerne les résultats:  responsabilité et capacité de réaction.

La légitimité des décisions prises par les Nations unies, y compris le Conseil de Sécurité, repose en ultime analyse, comme pour tout organisme politique, sur deux piliers:  le degré et l'étendue de la représentativité, et les processus de prise de décision. La prise de décision visera donc, en général, au plus large consensus d'opinions dans les débats.

Il est évident que, pour des raisons pratiques, tous les organes des Nations unies ne peuvent pas être établis sur le modèle de l'Assemblée générale. Toutefois, cela ne signifie pas que l'ensemble des principes et des critères qui viennent d'être mentionnés ne sont pas applicables au Conseil de Sécurité, bien au contraire. Dans la restructuration de cet organe, on pourrait considérer que sa composition devrait refléter, autant que possible, la répartition de la population mondiale, des régions géopolitiques, des divers niveaux de développement économique et des différentes civilisations. Cette liste n'est pas exhaustive, mais elle inclut les critères essentiels afin d'améliorer la crédibilité et l'efficacité d'une réforme du Conseil de Sécurité. Enfin, il est important de tenir compte de la capacité réelle et de la volonté politique de contribuer de façon significative  à  atteindre les buts qui constituent une priorité pour une très large majorité des Etats-membres.

Dans le même temps, comme la Commission d'enquête sur les Nations unies - Relations avec la société civile, l'a recommandé dans son compte-rendu au Secrétaire général, les Nations unies doivent devenir une Organisation davantage tournée vers l'extérieur, capable d'écouter plus attentivement les besoins et les exigences de la communauté mondiale.

A cet égard, cette même Commission nous rappelle le besoin d'"allier le mondial au local". Ce critère peut être interprété comme une version moderne de la notion bien connue de subsidiarité, qui représente une autre caractéristique du processus de réforme. En effet, la plupart des problèmes du monde actuel, en raison de leur gravité, de leur ampleur et de leur urgence, sont tout simplement trop difficiles à résoudre de façon positive pour les dirigeants des Etats individuels. Dans le même temps, nous devons faire apparaître clairement que l'objectif essentiel des Nations unies est de créer des conditions mondiales dans lesquelles les Autorités publiques de chaque nation, ses citoyens et ses groupes intermédiaires, puissent accomplir leurs tâches, remplir leurs devoirs et revendiquer leurs droits dans une plus grande sécurité.

Nous formons le voeu que certaines de ces idées pourront contribuer à garantir que la réforme de cette institution ne servira pas seulement à atteindre nos objectifs communs, mais qu'elle donnera aux Nations unies l'autorité nécessaire, en termes de crédibilité et de légitimité morale, pour agir en vue du bien de la communauté mondiale. Il s'agit là certainement de la première raison d'être des Nations unies.

Merci, Monsieur le Président.

    

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