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INTERVENTION DU SAINT-SIÈGE
À LA 50 SESSION DE LA COMMISSION SUR LA CONDITION DE LA FEMME

sur le point 3 de l’ordre du jour :
SUIVI DE LA QUATRIÈME CONFÉRENCE MONDIALE SUR LES FEMMES ET DE LA 23° SESSION EXTRAORDINAIRE DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE INTITULÉE « LES FEMMES EN L’AN 2000: ÉGALITÉ ENTRE LES SEXES, DÉVELOPPEMENT ET PAIX POUR LE XXIe SIÈCLE »

INTERVENTION DU SAINT-SIÈGE*

New York
Jeudi 2 mars 2006

Madame le Président,

A l'occasion de la 50 session de la Commission sur la condition de la femme, ma délégation prend la parole pour constater les progrès accomplis en faveur des femmes au cours de ces importants débats et délibérations, ainsi que les reculs enregistrés dans certains domaines.

En regardant un instant en arrière, la Commission peut être satisfaite de l'importance croissante que les questions sur les femmes ont acquise dans le débat politique mondial. Cela a été illustré de façon éloquente dans le Document final du Sommet mondial, dans lequel les responsables ont exprimé leur conviction selon laquelle "ce qui est un progrès pour la femme est un progrès pour tous". Le Sommet mondial a souligné à juste titre, entre autres, l'interdépendance du développement, de la paix et de la sécurité, et des droits de l'homme. De plus, il a souligné que pour que ceux-ci aient un impact positif sur les femmes les plus pauvres et les plus vulnérables en particulier, ils doivent encore être élaborés à travers une action politique clairvoyante, pour le bénéfice de tous les peuples du monde.

Nous ne devons pas perdre de vue l'objectif de cette Commission, qui est de préparer des recommandations et des comptes-rendus à l'ECOSOC sur la promotion des droits des femmes dans le domaine politique, économique, civil, social et éducatif, en vue d'atteindre une égalité des droits entre les hommes et les femmes et de meilleurs niveaux de vie dans une plus grande liberté. La Charte des Nations unies s'engage à juste titre à promouvoir le respect et l'application universels des droits de l'homme et des libertés fondamentales et d'assurer, à travers des mesures internationales, la promotion du progrès économique et social de tous les peuples.

C'est pourquoi les tentatives en vue d'éliminer les inégalités actuelles doivent être accomplies de façon appropriée et courageuse, et avec le plus grand soin. L'idéal serait de mettre en place des politiques qui restaurent l'équilibre et la justice dans les structures sociales et politiques, de façon à ce que leur succès même conduise tous les peuples à oeuvrer en vue du véritable progrès des femmes. Tous ceux qui veulent favoriser le progrès des femmes doivent poursuivre leur objectif en s'appuyant sur la force morale de leurs arguments. Ils n'y réussiront jamais si ils continuent de soumettre la liberté, la dignité et l'égalité des femmes à des politiques incertaines qui ont porté atteinte au véritable progrès des femmes au cours des dernières années.

En ce qui concerne les thèmes du développement et de la paix, qui font également l'objet de discussions ici, des défis évident demeurent à l'égard des femmes et des jeunes filles, en particulier dans les pays frappés par les conflits armés, la pauvreté ou les deux à la fois.

A cet égard, ma délégation constate que l'Année du Microcrédit, qui s'est récemment terminée, a attiré l'attention sur le succès important de la microfinance, un thème qui a eu un impact particulièrement positif, dans une large mesure grâce aux femmes entrepreneurs dans les pays en voie de développement. Il s'agit d'un phénomène qui reçoit le soutien des Eglises catholiques locales depuis de nombreuses années, à travers des programmes parallèles et des petits prêts aux formalités simplifiées pour les personnes pauvres dont les besoins n'étaient pas satisfaits par les institutions financières. Il est très encourageant de voir la patience, l'honnêteté et le dur travail des femmes pauvres récompensés de cette façon dans de nombreux endroits, et il faut encourager ces actions en portant une attention à la réforme des structures qui contribueront à leur tour à la diffusion et au succès constant de nouvelles initiatives dans ce domaine.

Il ne fait aucun doute que d'ici 2050, nous assisterons à un vieillissement de la population d'une façon jamais vue jusqu'à présent dans l'histoire de l'homme. Les femmes vivent généralement plus longtemps que les hommes, mais les femmes âgées sont parfois oubliées de façon honteuse par les décideurs politiques et les organismes créés en vue répondre aux préoccupations des femmes. Il serait donc opportun de revoir les politiques relatives aux femmes âgées, qui se sont souvent occupées des autres au cours de leur vie adulte, et qui devraient, selon toute justice, recevoir un soutien adéquat à leur tour.

En ce qui concerne les migrants en général, ceux-ci représentent 2,9% de la population mondiale, soit 185-192 millions de personnes, dont presque la moitié sont des femmes. Souvent, les femmes migrantes deviennent la principale source de revenu pour leur famille. Les opportunités d'emplois les plus fréquentes pour les femmes, outre le travail domestique, consiste à prendre soin des personnes âgées, à s'occuper des malades et à travailler dans le secteur hôtelier. Ce sont également des domaines où un traitement équitable doit être garanti aux femmes migrantes, par respect pour leur féminité et en reconnaissance de leurs droits égaux.

Dans un domaine semblable, le trafic d'êtres humains a des conséquences particulièrement négatives sur les femmes. Dans certains cas, les femmes et les jeunes filles sont exploitées presque comme des esclaves dans leur travail, et souvent dans l'industrie du sexe. La culture qui encourage l'exploitation systématique de la sexualité est à la fois envahissante et nocive pour la société et les belles paroles ne suffisent pas à la combattre.

Nous devrions sans doute ajouter ici que dans les conflits armés, les femmes et les jeunes filles sont également victimes de viols systématiques dans des buts politiques. Tous ceux qui permettent, encouragent et ordonnent de tels actes méritent une juste punition, de même que ceux qui perpétuent ces crimes en personne, tandis que la protection des femmes doit être respectée en accord avec l'article 27 de la IV Convention de Genève, ainsi que ses protocoles additionnels I et II.

Le Saint-Siège condamne à nouveau vigoureusement la violence sexuelle dont les femmes et les jeunes filles sont fréquemment l'objet, et encourage l'adoption de lois qui les protégeront de façon efficace contre ces violences. Nous ne pouvons pas non plus manquer de condamner, au nom du respect dû à la personne humaine, la vaste culture qui encourage l'exploitation systématique de la sexualité et corrompt jusqu'aux toutes jeunes filles en mettant leur corps à profit dans le cadre d'une industrie mondiale qui rapporte trois milliards de dollars.

Le mouvement de la femme a été décrit comme "le grand mouvement de libération de la femme". Ce parcours a été difficile et compliqué, et a parfois comporté sa part d'erreurs. Mais ce fut globalement un mouvement positif, même s'il n'est pas terminé, tant que les personnes de bonne volonté s'efforceront de faire reconnaître, respecter et apprécier les femmes dans leur dignité particulière.

Merci, Madame le Président.


*L'Osservatore Romano. Edition hebdomadaire en langue française n.11 p.9.

La Documentation catholique, n.2359 p.516-517.

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