The Holy See
back up
Search
riga

INTERVENTION DU SAINT-SIÈGE
À LA IV SESSION ORDINAIRE DU
CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME

INTERVENTION DE S.E. MGR SILVANO M. TOMASI*

Genève 23 mars 2007

Point 2 de l’ordre du jour : APPLICATION DE LA RÉSOLUTION 60/251 DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE DU 15 MARS 2006 INTITULÉE «CONSEIL DES DROITS DE L’HOMME»

 

Monsieur le Président,

1. La Délégation du Saint-Siège apprécie beaucoup l'attention accordée à la protection de l'enfant et aux droits des enfants au cours des récents examens et débats. En réalité, l'enfant ne devrait pas être placé uniquement parmi les priorités du débat politique, mais bien au centre des préoccupations:  l'avenir de la société dépend des enfants et de la façon dont ils y sont préparés, et leur vulnérabilité exige une protection particulière. Un enfant n'est ni un instrument, ni un objet. La Convention des Nations unies sur les Droits de l'Enfant attribue à l'enfant les droits fondamentaux d'une personne; elle reconnaît à l'enfant la même égalité et dignité qu'une personne adulte. Dans son préambule, elle affirme qu'en raison de son manque de maturité, l'enfant "a besoin d'une protection spéciale et de soins spéciaux, notamment d'une protection juridique appropriée, avant, comme  après  la  naissance". Le respect  des  enfants  est  le respect de l'humanité.

2. Dans de nombreux cas, en raison du manque de volonté et de ressources, aucune disposition juridique appropriée ni politique publique ne sont mises en place, ce qui comporte de graves conséquences pour les enfants. Ils deviennent souvent les premières victimes des famines et des guerres. Ils sont mutilés par des munitions non explosées, ne sont pas scolarisés, manquent de nourriture suffisante, sont obligés de dormir et de survivre sur les trottoirs des centres urbains, sont atteints du SIDA, de la malaria, et de la tuberculose, sans pouvoir avoir accès aux médicaments, sont vendus aux trafiquants, recrutés au sein d'armées clandestines, déracinés par les déplacements forcés, contraints à de longues heures de travail éreintant. Ces millions de jeunes victimes sont le symbole vivant des inégalités existantes et des mauvais systèmes. Malheureusement, ce ne sont pas les seules contradictions qui frappent les enfants dans notre univers mondialisé. Le droit à la vie est nié à de nombreux enfants; la sélection prénatale élimine les enfants soupçonnés d'être porteurs de handicap, de même que les petites filles simplement à cause de leur sexe, niant ainsi la valeur égale et intrinsèque des personnes handicapées et des petites filles dans la famille et la société. La violence contre les enfants se poursuit de diverses façons, ainsi que la violation humiliante de leurs droits en tant qu'êtres humains.

3. Si le respect des droits humains des enfants est la mesure de la santé d'une société, alors, la reconnaissance juridique de ces droits est urgente. Le premier droit des enfants est celui de naître et d'être élevé dans un environnement familial accueillant et sûr, où leur croissance physique, psychologique et spirituelle est garantie et leur potentiel développé, et dans lequel la reconnaissance de la dignité de la personne devient la base du comportement à l'égard des autres et de l'avenir. L'objectif d'éliminer la violence contre les enfants et de garantir un cadre constructif et sain pour leur développement exige que l'Etat et la société soutiennent et permettent de façon concrète à la famille d'accomplir son devoir. Une façon vitale, en effet, de lutter contre la vulnérabilité des enfants est de renforcer les familles dans lesquelles ils devraient grandir, s'épanouir, et être formés en tant que citoyens responsables et productifs dans leurs communautés locales et dans la société en général. Les gouvernements doivent assumer leur rôle légitime de protéger et de promouvoir la vie de famille, car la famille possède un lien vital et organique évident avec la société. La création de conditions conduisant à la paix et au développement économique, la responsabilité constante des communautés nationales et de la Communauté internationale, permettra de réduire et, en fin de compte, d'éliminer les situations qui frappent les enfants de façon disproportionnée. Ma délégation reconnaît certainement que toutes les formes de violence contre les enfants sont injustifiables, qu'on peut les éviter et qu'on doit y mettre un terme.

4. Un effort cohérent en vue d'éliminer la violence contre les enfants devra donc rejeter l'exaltation de la violence dans la culture publique de la société. L'éducation peut devenir un instrument important non seulement pour insuffler la notion de tolérance dans la coexistence au sein des sociétés actuelles, qui connaissent partout un pluralisme accru, mais également la reconnaissance et le respect des autres, l'ouverture au dialogue dans une recherche concertée en vue du bien commun, et même à l'amour, en tant que lien le plus constructif pour le bon fonctionnement de la société. Ce serait une nouvelle forme de violence contre les enfants si l'Etat devait imposer un modèle spécifique de conscience morale sur les enfants, sans prendre en considération les convictions morales et religieuses des parents. La société civile peut jouer un rôle important dans le soutien de la famille et la lutte contre toute forme de violence contre les enfants. Pour sa part, les plus de 300.000 institutions sociales, humanitaires et éducatives de l'Eglise catholique œuvrent chaque jour à la fois afin d'assurer l'éducation des enfants dans un cadre pacifique et créatif, et le développement de leurs talents, et de garantir la réinsertion des enfants victimes d'abus et d'abandon dans leurs familles, si possible, et dans la société.

Monsieur le Président,

5. Les enfants sont à la fois faiblesse et espérance. Poursuivre la défense de leurs droits et l'élimination de toute forme de violence contre eux demeure un défi institutionnel pour la Communauté internationale. Nous n'y parviendrons que si l'on donne la priorité au rôle naturel de la famille et à la culture publique qui reconnaît que les enfants aussi sont des personnes humaines à part entière.

Merci, Monsieur le Président.



*
L'Osservatore Romano. Edition hebdomadaire en langue française n.17 p.10.

top