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INTERVENTION DU SAINT-SIÈGE
LORS DE LA XXII SESSION DE LA CONFÉRENCE PERMANENTE
DES MINISTRES EUROPÉENS DE L'ÉDUCATION

INTERVENTION DE MGR J. MICHAEL MILLER*

Istanbul, Turquie
4-5 mai 2007

 

Monsieur le Président,

Je voudrais commencer par exprimer la sincère et profonde gratitude de la Délégation du Saint-Siège, ainsi que la mienne, aux Autorités turques qui accueillent cette Conférence des Ministres:  pour leur compétences en matière d'organisation et pour la cordialité avec laquelle ils nous ont reçus dans cette ville d'Istanbul, lieu riche d'histoire et carrefour de diverses cultures.

1. Le Saint-Siège a suivi avec intérêt la préparation de cette 22 session de la Conférence permanente des Ministres européens de l'Education. De plus, il a pris note en particulier des projets promus par les Comités directeurs de l'Education, et de l'Enseignement supérieur et de la Recherche du Conseil de l'Europe. Ces Comités témoignent de notre effort commun visant à garantir que l'éducation apporte une contribution significative à l'édification d'une Europe plus démocratique, qui incarne la solidarité et qui respecte la diversité du continent et la conscience de son identité spécifique.

2. Le thème de la session actuelle de la Conférence des Ministres de l'Education, "Construire une Europe plus humaine et inclusive; contribution des politiques éducatives" est véritablement opportun. En effet, ce thème affronte les objectifs stratégiques définis lors du III sommet des Chefs d'Etat et de gouvernement du Conseil de l'Europe, qui s'est tenu à Varsovie les 16 et 17 mai 2005. La réalisation de cet objectif implique nécessairement que la société respecte la dignité de chaque personne humaine, une société dans laquelle fournir une éducation de qualité pour tous est un but indispensable.

3. Le terme de "qualité" de l'éducation nous rappelle le besoin de développer des procédures et des instruments adaptés à l'objectif d'une éducation authentique des jeunes. Parmi ces objectifs éducatifs fondamentaux figurent le développement cognitif, moral et spirituel des étudiants; la transmission des valeurs et de la culture; la promotion d'une cohésion sociale; et la maturation de la personnalité de l'étudiant dans toutes ses dimensions. De plus, une éducation intégrale devrait contribuer à former la nouvelle génération à la participation sociale, à la solidarité et au sens critique de la réalité.

4. Comme nous le savons, l'éducation est l'œuvre de nombreuses personnes accomplie dans divers secteurs éducatifs. Parmi ceux-ci, l'école et l'université jouent un rôle central, car elles offrent une vaste gamme d'expériences éducatives que l'on trouve difficilement ailleurs. Ces différentes expériences - régies par le principe de la subsidiarité - sont le résultat d'une synergie entre les familles, les enseignants, les professeurs, les étudiants, les Organisations non-gouvernementales, les Eglises et communautés religieuses, ainsi que les personnes qui contribuent à ce processus de formation de diverses façons. Le Saint-Siège se réjouit de constater que le projet préparé se réfère de façon explicite à la participation active de la société civile dans la formulation des programmes et des politiques éducatives qui concerne ses membres.

5. Une société qui veut être plus humaine et plus inclusive doit prendre soin de ses membres les plus faibles; L'attention portée par les politiques éducatives aux droits de l'enfant représente un aspect significatif de cette protection.  L'éducation  devrait  être un moyen d'aider l'enfant à satisfaire ses besoins affectifs et cognitifs. Cela exige une réponse unifiée, c'est-à-dire un système d'interventions coordonnées au sein du projet éducatif. Les enfants ont besoin d'être aimés et d'aimer, de jouer, d'utiliser leur imagination, d'exercer librement leur choix d'une façon adaptée à leur âge, et d'obtenir des réponses satisfaisantes à leurs questions sur la signification et à leur développement spirituel. L'école devrait offrir un environnement qui permet tout cela. Elle doit être une communauté d'éducation caractérisée par le respect, l'amour et l'attention réciproque. De plus, les écoles ont besoin d'enseignants correctement formés qui servent de modèles à leurs étudiants. Les éducateurs transmettent non seulement des idées, mais ils accompagnent également de près les jeunes dans cette étape importante de leur vie, en collaborant avec les parents qui ont le droit et le devoir primordiaux de pourvoir à l'éducation de leurs enfants.

6. De plus, l'éducation a la responsabilité de transmettre la connaissance des racines culturelles d'une personne et de fournir des points de référence stables, qui permettent aux étudiants de trouver leur place de façon sereine dans le monde en général. Dans le même temps, une éducation authentique devrait enseigner aux générations futures le respect pour les autres cultures et promouvoir la reconnaissance de la richesse de leur histoire et de leurs valeurs. L'éducation est donc appelée à fournir des éléments indispensables pour développer une vision interculturelle parmi les jeunes. Une telle vision est encouragée lorsqu'est entrepris un chemin de formation et d'éducation adapté. Cela va au-delà de la simple tolérance pour arriver à l'accueil de la réalité multiculturelle de l'Europe - un chemin qui demande une compréhension mutuelle. Au niveau pédagogique, cette perspective interculturelle implique véritablement un changement de modèles. Les modèles passés d'intégration et de respect pour la diversité ont eu plus ou moins de succès, mais le moment est venu d'adopter un nouveau modèle de coexistence, ensemble, avec nos différences. Ce nouveau modèle implique davantage qu'une coexistence. Il signifie avant tout édifier un destin commun, rechercher la coopération et la fraternité, unir nos forces sur le chemin de l'édification de notre civilisation. Un tel modèle n'est pas facile à réaliser. D'une part, il impose la nécessité d'analyser les fondements éthiques de toutes les expériences culturelles; de l'autre, il exige de préserver sa propre identité et doit éviter de proposer des modèles génériques qui pourraient facilement conduire à la fragmentation culturelle et à l'instabilité politique.

7. Pour ces raisons, l'Europe a besoin de politiques éducatives courageuses et respectueuses, qui encourageront un climat de dialogue et de sérénité et qui permettront aux écoles et aux Universités de former des environnements vivifiants, où les étudiants peuvent établir et développer des relations positives. Il est donc nécessaire que nous établissions des objectifs pédagogiques clairs, qui encouragent le dépassement de l'individualisme radical. Nous pouvons y parvenir en formant les jeunes aux valeurs de la solidarité plutôt que de la concurrence, de la participation et de l'accueil des autres plutôt que l'isolement et l'indifférence. Enfin, ces politiques ne devraient jamais oublier que le but premier de l'éducation est le développement intégral de la personnalité dans toutes ses dimensions, y compris religieuse, tant dans le domaine du savoir que des valeurs. De cette façon, l'éducation sera véritablement en mesure d'apporter sa contribution à une Europe de demain qui soit plus humaine et plus inclusive.

Merci.


*L'Osservatore Romano. Edition hebdomadaire en langue française n.22 p.9, 10.




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