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INTERVENTION DU SAINT-SIÈGE
À LA RÉUNION DE L'OSCE/ODIHR
SUR LE THÈME:
"LUTTE CONTRE LE RACISME, LA XÉNOPHOBIE
ET LA DISCRIMINATION, AXÉE ÉGALEMENT SUR L'INTOLÉRANCE
ET LA DISCRIMINATION À L'EGARD DES CHRÉTIENS ET DES MEMBRES
D'AUTRES RELIGIONS.
"
(VARSOVIE, 28 SEPTEMBRE - 9 OCTOBRE 2009)

INTERVENTION DEMGR ANTHONY FRONTIERO,
MEMBRE DU CONSEIL PONTIFICAL "JUSTICE ET PAIX"*

Varsovie
Lundi 5 octobre 2009

 

 

Monsieur le modérateur,

La délégation du Saint-Siège se félicite de la possibilité de participer à cet important débat. Les incidents de haine, de discrimination, de violence et d'intolérance contre les chrétiens et les membres d'autres religions continuent à se manifester trop souvent dans la région de l'osce, et sont symptomatiques d'un manque de paix dans le monde. Le Pape Benoît XVI a déploré cette situation, en déclarant: "En parlant particulièrement des chrétiens, je dois relever avec souffrance que parfois, ils ne sont pas seulement empêchés; dans certains Etats, ils sont même persécutés, et récemment encore, on a pu enregistrer de tragiques épisodes de violence abominable. Il y a des régimes qui imposent à tous une religion unique, tandis que des régimes indifférents nourrissent non pas une persécution violente, mais une dérision culturelle systématique des croyances religieuses. Dans tous les cas, un droit humain fondamental n'est pas respecté, avec des répercussions graves sur la convivialité pacifique. Cela ne peut que promouvoir une mentalité et une culture négatives pour la paix" (Benoît xvi, Message pour la Journée mondiale de la Paix 2007, n. 5).

La tolérance et le respect authentique représentent une discipline civique, et pas seulement une attitude personnelle. L'objectif de l'engagement de l'osce en vue de combattre l'intolérance et la discrimination contre les chrétiens et les membres d'autres religions n'est pas en quelque sorte d'"aplanir le terrain de jeu" ou de faire preuve d'indifférence envers les opinions présentes dans le monde, mais de respecter de façon authentique les différences qui existent entre nous. En effet, la neutralité à l'égard des opinions dans le monde ne peut être véritablement tolérante et respectueuse. De même, l'absence de convictions n'est pas synonyme de tolérance; et en l'absence d'une notion véritablement convaincante de la vérité qui exige de nous d'être tolérants envers ceux qui ont une conception différente de la vérité des choses, seuls demeurent le scepticisme et le relativisme (cf. George Weigel, The Cube and the Cathedral, 2005, p. 110). Une notion authentique de tolérance dans les sociétés pluralistes exige que, dans les relations avec les non croyants et les personnes d'autres religions, les croyants comprennent qu'ils doivent raisonnablement s'attendre à ce que les désaccords qu'ils rencontrent continueront d'exister. Dans le même temps, toutefois, les cultures politiques laïques doivent encourager les non-croyants à faire de même dans leurs relations avec les croyants. Lorsque les citoyens laïcs agissent dans leur rôle de citoyens, ils ne doivent pas nier par principe que les modèles religieux du monde ont le pouvoir d'exprimer la vérité. Ils ne doivent pas non plus nier à leurs concitoyens croyants le droit d'apporter leur contribution aux débats publics à travers un langage religieux (cf. Jürgen Habermas, The Dialectics of Secularization, 2005, pp. 50-51).

La table ronde sur le thème Intolérance et discrimination contre les chrétiens, qui s'est tenue à Vienne en mars 2009, a été un événement marqué par le succès et l'espérance, et a révélé la possibilité d'un dialogue constructif vers la compréhension et le respect mutuel entre les chrétiens, les membres d'autres religions et les non-croyants. Nous espérons que cette table ronde connaîtra un développement. A la suite des incidents répétés d'intolérance, de discrimination et de violence contre les chrétiens et les membres d'autres religions, la délégation du Saint-Siège propose que cet éminent organisme conçoive une nouvelle forme de tolérance, non pas la tolérance indifférente qui dit: "Nous devrions être tolérants car cela fonctionne mieux", mais la véritable tolérance des différences appliquée sur le plan civil. En conclusion, je soutiens l'idée développée par le Pape Benoît xvi, lorsqu'il dit: "Le dialogue fécond entre la foi et raison ne peut que rendre plus efficace l'œuvre de la charité dans le champ social et constitue le cadre le plus approprié pour encourager la collaboration fraternelle entre croyants et non croyants dans leur commune intention de travailler pour la justice et pour la paix de l'humanité" (Caritas in veritate, n. 57). Respecter l'autre comme un Autre qui recherche également la vérité et le bien, permet au croyant et à l'autre d'engager une conversation, un dialogue qui conduit à l'enrichissement réciproque plutôt qu'à un scepticisme plus profond sur la possibilité même de comprendre la vérité des choses. Une liste de recommandations concrètes sur ce thème sera fournie au Secrétariat avec le texte de mes observations.


*L'Osservatore Romano. Edition hebdomadaire en langue française n°45 p.11.

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