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SYMPOSIA


 

Proclamer le Christ au cÂœur des cultures de lÂ’Asie

LÂ’Église et le film en dialogue

 


 

 

 

PROCLAMER LE CHRIST AU CÂŒUR DES CULTURES DE LÂ’ASIE

 

15-17 octobre 2002, Nagasaki, Japon

                                

Du 15 au 17 octobre 2002, le Conseil Pontifical de la Culture a organisé à Nagasaki, au Japon, une rencontre de ses membres et consulteurs originaires de lÂ’Asie, auxquels se sont joints les évêques présidents des Commissions épiscopales de la culture des pays suivants : Bangladesh, Inde, Indonésie, Japon, Corée, Malaysie-Singapour-Brunei, Taïwan, Thaïlande et Vietnam.

La rencontre avait été préparée par le regretté Mgr Francis Xavier Kaname Shimamoto, archevêque de Nagasaki et membre du Conseil Pontifical de la Culture, décédé quelques semaines avant la rencontre. Aussi, les participants ont-ils été les hôtes de lÂ’Administrateur diocésain, Mgr. Joseph Mitsuaki Takami, tandis que les réunions avaient lieu à lÂ’Université catholique du Sacré-CÂœur de Nagasaki, qui fut particulièrement touchée lors de lÂ’explosion de la bombe atomique qui tua 214 étudiantes et enseignants. AujourdÂ’hui, les Religieuses du Sacré-CÂœur de Nagasaki reçoivent plus de 3000 étudiantes et dirigent un hôpital – visité par Jean-Paul II, en 1981 – où les blessés de la bombe atomique passent lÂ’ultime partie de leur vie.

En ouvrant la rencontre, le Cardinal Poupard, Président du Conseil Pontifical de la Culture, soulignait la mission fondamentale de lÂ’Église : contempler le visage du Christ pour annoncer Celui qui est, à lui seul, Bonne Nouvelle. LÂ’Asie attend de lÂ’Église quÂ’elle lui donne dÂ’authentiques maîtres spirituels, capables dÂ’offrir le témoignage dÂ’une véritable compassion, premier pas vers une éthique de la solidarité. Les cultures empreintes dÂ’une pluralité de religions attestent lÂ’importance du spirituel comme noyau vivant des cultures. Les missionnaires lÂ’ont compris : ils ont utilisé la culture comme porte dÂ’entrée dans ces régions si éloignées de leur univers dÂ’origine. Maintenant, la mission requiert, pour une véritable inculturation de la foi, de pénétrer lÂ’âme des peuples. LÂ’Évangile crée un peuple dont lÂ’universalité sait accueillir toute culture, favorisant le progrès de ce qui, en chacune dÂ’elles, conduit implicitement vers la pleine explicitation dans la vérité. La pastorale de la culture en Asie comme sur les autres continents vise à lÂ’annonce de lÂ’Évangile et à son inculturation, de telle sorte que les cultures soient transformées, renouvelées par la nouveauté du Christ.

Le Cardinal Diaz le soulignait : à lÂ’aube du troisième millénaire, les chrétiens représentent moins de 3% de la population de lÂ’Asie, mais ils sont riches de vocations sacerdotales et religieuses. Fidèle à la mission dÂ’annoncer le Christ à tout homme, lÂ’Église se trouve confrontée, en Asie, à une mosaïque de cultures dont bien des valeurs sont des points de départ pour le dialogue et lÂ’annonce du Christ. Le défi consiste pour les chrétiens dÂ’Asie à assimiler leur foi au Christ, perçue plus clairement avec les yeux de leurs propres cultures. Le Cardinal Diaz précisait lÂ’exigence dÂ’une inculturation profonde, toujours distincte dÂ’une adaptation superficielle ou artificielle : « Ne pas confondre indianiser et inculturer ».

Monseigneur Takami, en soulignant la responsabilité propre des évêques, affirmait combien lÂ’inculturation de la foi doit être lÂ’affaire de toute lÂ’Église chargée de présenter le « visage asiatique » de Jésus, unique Sauveur. Une remarque doit être particulièrement soulignée : les non-chrétiens demandent aux baptisés non seulement de parler de Jésus, mais surtout de le montrer vivant en eux.

Les représentants des différents pays ont souligné non seulement lÂ’extraordinaire diversité des cultures, des situations dans lesquelles vit lÂ’Église, mais aussi des formes de dialogue entretenues avec lÂ’immense majorité de non-chrétiens, soit à travers les services sociaux, les arts, la philosophie et la spiritualité, soit à lÂ’occasion des très nombreux mariages entre catholiques et non-chrétiens.

Le culte des ancêtres, vécu sous des formes et avec des intensités diverses selon les pays, est lÂ’un des axes fondamentaux des cultures asiatiques comme des cultures africaines. Toutefois, il semble, dans certains pays, exercer une pression suffisamment forte pour entraver les conversions au catholicisme considérées comme des infidélités ou des trahisons de la propre famille. Il semble bien, dans ce contexte, quÂ’il faille consacrer beaucoup de soins aux expériences fondamentales de la souffrance et de la mort, pour témoigner de lÂ’espérance, de la miséricorde, de la compassion chrétiennes. En ce sens, la communauté croyante est appelée à jouer un rôle essentiel, car il nÂ’est pas rare le danger de présenter un Jésus très humain, en oubliant quÂ’il est Dieu.

Le Père Gabriel Ly, de Taïwan, membre de lÂ’Académie Pontificale de Saint Thomas dÂ’Aquin, a mis en évidence un certain nombre de données essentielles à toute pastorale de la culture. LÂ’évangélisation inculturée ne produit pas une adaptation extérieure de la foi aux cultures, mais transforme les valeurs des cultures renouvelées de lÂ’intérieur par lÂ’Évangile. Il y a, de fait, une relation intrinsèque entre lÂ’Évangile et les cultures. Par ses Âœuvres sociales, notamment dans les pays de mission, lÂ’Église sÂ’insère au cÂœur des cultures et offre un témoignage vivant du Christ. LÂ’Esprit Saint est lÂ’agent principal de lÂ’évangélisation et il actualise lÂ’incarnation du Christ et de son Évangile dans les cultures locales de lÂ’Extrême-Orient.

Dans certaines cultures asiatiques, le concept de personne humaine est sinon étranger, du moins relativement flou, ce qui entraîne une déficience logique du concept de Dieu. LÂ’être humain est vu en relation avec la nature, mais pas avec un Dieu personnel qui parle à lÂ’homme. Aussi la culture japonaise, par exemple, sÂ’arrête-t-elle devant le dieu silencieux. Si lÂ’Occident chrétien sÂ’est souvent arrêté à la conception proposée par Boèce de la personne comme sujet conscient et responsable de ses actes, il faudrait sans doute redécouvrir la belle notion de la personne que saint Thomas dÂ’Aquin propose dans son traité de la Trinité, la définissant, en Dieu, comme une relation subsistante. Alors serait-il peut-être plus aisé de montrer comment lÂ’homme est « imago Dei » et, par conséquent, « capax Dei ».

Ces champs dÂ’action pastorale et les enjeux en cause font apparaître dans toute son importance la question de la formation des catholiques en général et des prêtres en particulier. Par leur influence culturelle, les établissements catholiques dÂ’enseignement, de lÂ’école primaire à lÂ’université, sont appelés à jouer un rôle croissant, notamment dans le renouvellement des cultures par la foi au Christ et par la découverte de la dimension religieuse de lÂ’éthique. En effet, nombreux sont les domaines de la foi et des mÂœurs qui demeurent encore inaccessibles aux cultures dÂ’Extrême-Orient.

Nul ne saurait sÂ’accommoder du succès mitigé, et en tout cas insuffisant, de lÂ’évangélisation en Asie. Sans doute les Centres Culturels Catholiques représentent une chance pour lÂ’avenir de lÂ’évangélisation et de lÂ’inculturation. LÂ’ensemble des participants souhaite une revitalisation des centres existants, un lien plus étroit avec le diocèse, des directives concrètes, un recueil dÂ’information sur leurs diverses activités, voire des réunions régionales régulières, pour créer des liens entre les différents centres souvent isolés. Le rôle des laïcs engagés dans ces structures culturelles et pastorales est très important, notamment pour la conservation et lÂ’approfondissement de la foi dans les familles. Aussi ne faut-il pas que ces centres perdent leur dimension chrétienne. La pastorale de la culture se doit dÂ’accorder la plus grande attention à la situation des personnes qui se convertissent au christianisme et, de ce fait, perdent leurs relations sociales, voire familiales. Ceci est un appel aux communautés chrétiennes à vivre concrètement la communion fraternelle avec les néophytes.

Cette rencontre consacrée à la proclamation du Christ, accomplissement des cultures de lÂ’Asie, a renouvelé lÂ’élan missionnaire des participants, dans le respect de ces cultures multi-religieuses. Une fois purifiées de ce qui est incompatible avec la dignité de lÂ’homme et sa vocation surnaturelle, ces cultures permettront à lÂ’Évangile du Christ du porter beaucoup de fruits. LÂ’Asie, avec son extraordinaire patrimoine culturel, matériel et immatériel, offre un contexte favorable à la synthèse entre foi et culture. LÂ’Église renouvelle en profondeur son élan missionnaire pour animer et purifier les légitimes aspirations des peuples indigènes de lÂ’Asie, dans lÂ’affirmation de leur dignité et de leur identité, de façon à les rendre aptes à sÂ’engager eux-mêmes à purifier et promouvoir leurs propres cultures et à devenir pour leurs frères et sÂœurs les artisans actifs de leur évangélisation. Les institutions éducatives de lÂ’Église ont besoin de sÂ’engager toujours davantage dans la transmission dÂ’un enseignement et dÂ’une éducation qui fassent droit à la personne humaine dans son intégralité. La pastorale de la culture, dans son acception la plus large, a besoin dÂ’un fondement théologique pour manifester le visage asiatique du Christ, comme pour garantir la transmission fidèle de la foi chrétienne au cÂœur des cultures, dans un contexte multi-religieux. La priorité pastorale accordée aux populations indigènes devrait devenir une priorité pour lÂ’ensemble des Conférences Épiscopales de lÂ’Extrême-Orient, afin dÂ’enraciner plus profondément lÂ’Évangile du Christ. AujourdÂ’hui, les nouvelles techniques dÂ’information et de communication ont tendance à se généraliser : il convient de les utiliser dans la pastorale de la culture.

Pour répondre à une demande générale, les diverses interventions de cette rencontre seront publiées dans quelques moins par les soins du Conseil Pontifical de la Culture et, en collaboration avec les membres et consulteurs de lÂ’Asie, le Conseil envisagera les modalités dÂ’une réunion régionale des responsables de Centres Culturels Catholiques dÂ’Extrême-Orient.

En concluant la rencontre, le Cardinal Poupard devait notamment déclarer : « En ce vaste continent, berceau des plus grandes religions, qui abrite la majorité de la population mondiale, lÂ’Église apparaît comme un petit reste. Au lieu de rester dispersées et découragées, isolées les unes des autres, les Églises locales ont besoin de sÂ’aider et de se soutenir mutuellement dans leur commune mission dÂ’évangéliser les cultures et dÂ’inculturer lÂ’Évangile ». Pour sa part, le Conseil Pontifical de la Culture mettra tout en Âœuvre afin de les soutenir dans cette mission exaltante, mais combien ardue.

 

                                                                       P. Bernard Ardura O.Praem.

                                                                 Secrétaire du Conseil Pontifical de la Culture

 

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The continental gathering of Asian Members and Consultors of the Pontifical Council for Culture and Bishops in charge of the Asian BishopsÂ’ ConferencesÂ’ various Culture Committees took place in Nagasaki (Japan) from 15th to 17th October 2002, on the theme Proclaiming Christ to Asian Cultures: Promise and Fulfilment. Those taking part stressed not only the extraordinary cultural diversity of Asia, and the situations in which the Church lives and works, but also the forms of dialogue that there are with the non-Christian majority.

 

Si è tenuto, a Nagasaki, dal 15 al 17 ottobre 2002, , LÂ’incontro continentale dei Membri e Consultori asiatici del Pontificio Consiglio della Cultura e dei Vescovi presidenti delle Commissioni di Cultura delle Conferenze Episcopali dÂ’Asia, sul tema: Proclamare Cristo alle culture asiatiche: promessa e realizzazione. I partecipanti hanno sottolineato non soltanto la straordinaria diversità culturale dellÂ’Asia, e le situazioni nella quale la Chiesa vive e agisce, ma anche le forme di dialogo esistente con la maggioranza dei non cristiani.

 

Los participantes en el Encuentro de Nagasaki, Proclamar a Cristo a las Culturas Asiáticas: promesa y realización, celebrado del 15 al 17 de octubre de 2002, han subrayado la extraordinaria diversidad cultural de Asia y las situaciones en las que la Iglesia vive y actúa, así como también las formas de diálogo existentes con una mayoría que no es cristiana.

 

 

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LÂ’ÉGLISE ET LE FILM EN DIALOGUE

 

7-10 novembre 2002, Oslo, Norvège

 

 

Le Conseil Pontifical de la Culture a organisé une importante Rencontre internationale à Oslo, en Norvège, sur LÂ’Église et le Film en dialogue, du 7 au 10 novembre 2002. Sous la présidence du Cardinal Poupard et avec lÂ’aide du Chanoine Karl Gervin, de la Cathédrale Luthérienne dÂ’Oslo, grâce à lÂ’appui de la Filmens Hus de la capitale norvégienne, des hommes et des femmes dÂ’Église, évêques – catholiques et luthériens –, prêtres et pasteurs, religieuses dominicaines et théologiens, se sont rencontrés avec des hommes et des femmes du monde du cinéma nordique, producteurs et acteurs, cinéastes, critiques de cinéma et journalistes, pendant trois jours de dialogue intense, dans un esprit dÂ’authentique amitié et de respect réciproque.

Les grands thèmes qui ont articulé les journées de travail, ont touché à des questions existentielles diverses : le cinéma et la Bible ; le miracle et lÂ’irruption du surnaturel dans la vie des hommes ; la solitude et la tentation du suicide ; lÂ’anorexie et lÂ’épreuve de lÂ’enfant qui se sent délaissé ; la réconciliation, la rémission et la grâce ; la société et ses conséquences sur le couple et la famille ; la violence comme élément narratif et la violence commercialisée ; lÂ’enfant comme médiateur de sagesse ; lÂ’exploitation des jeunes filles de lÂ’est pour la prostitution. Chaque séance sÂ’articulait sur ces thèmes, avec la projection de films ou dÂ’extraits de films accompagnée de brèves interventions de trois personnalités : un producteur ; un théologien ou un pasteur ; un enseignant ou un critique de cinéma. De là se sont développés de riches débats qui ont montré combien le cinéma est un excellent médium et offre une plate-forme de réflexion dÂ’une grande richesse pour un dialogue fécond.

Dans son discours dÂ’introduction au Colloque, le Cardinal Poupard a souligné lÂ’intérêt du Conseil Pontifical de la Culture pour le cinéma, et lÂ’heureuse collaboration qui sÂ’est établie avec quelques organismes importants qui Âœuvrent dans la production, la distribution et lÂ’étude du cinéma. Le « septième art » entretient des liens étroits avec la dimension religieuse de lÂ’homme. Se référant à Lettre aux artistes du Pape Jean-Paul II, du 4 avril 1999, le Cardinal sÂ’est interrogé sur les liens réciproques des artistes et de lÂ’Église, et la source dÂ’inspiration, que les grands Maîtres des arts, ont su trouver dans lÂ’Évangile des Béatitudes et de la Passion du Christ.

Le cinéma est un moyen de communication puissant, capable dÂ’influencer toute une société, dans les pays nordiques comme dans lÂ’ensemble du monde. Certains cinéastes considèrent que beaucoup vont chercher au cinéma ce quÂ’ils trouvaient autrefois dans les Églises. Ils constatent que leur message a souvent plus dÂ’impact – du moins en apparence – que celui des hommes politiques et, même, que la prédication des pasteurs dans les Offices religieux. Les images sont plus universelles que les mots, ont une force suggestive que renforce la bande sonore, et sÂ’adressent autant à lÂ’esprit quÂ’aux sentiments. Du reste, certains effets spéciaux posent la question de la manipulation des spectateurs.

Une question importante : discerner des critères pour affirmer quÂ’une Âœuvre est religieuse ou ne lÂ’est pas. LÂ’exemple du Seigneur des Anneaux, film qui se déroule en un univers totalement païen sans jamais faire référence au nom de Dieu, montre quÂ’un film peut donner lieu à une interprétation profondément religieuse, surtout lorsque le sens ultime dÂ’une Âœuvre est la recherche dÂ’un bien qui apparaît clairement distinct du mal. Anne Hoff, critique de cinéma et présentatrice dÂ’une émission de télévision sur le septième art, considère que lÂ’enseignement de lÂ’insoutenable film de Lars von Thrier, Breaking the waves, est que nous sommes tous religieux. Ce film de 1996, dit-elle, constitue un véritable tournant dans le cinéma nordique, et met fin à une longue période « de distance ironique » entre les cinéastes et lÂ’Église. Depuis, de plus en plus de films touchent aux thèmes spirituels. Elle confesse toutefois que ce qui manque le plus aux hommes et aux femmes du monde du cinéma, cÂ’est cette langue qui permet de parler du film comme dÂ’un acte de foi. Dans une société qui a perdu ses symboles, la tentation du cinéaste est de se croire capable de recréer ces symboles, et sa liberté insensée de croire en une créativité absolue. La question a été posée : le religieux nÂ’est-il pas dans le non-dit, dans le non-montré ?

Une fille de pasteur, Kari, a demandé à un cinéaste, Sigve Endresen, de faire un film à partir de son histoire. Kari a sombré dans lÂ’anorexie avant de suivre un chemin de guérison. Sa maladie, expression dÂ’un profond désespoir, est la conséquence dÂ’une terrible souffrance intérieure, celle dÂ’un enfant qui ne se sent pas assez aimé par ses parents. Ceux-ci, au nom de leur foi, ont cru devoir consacrer tout leur temps « aux autres », cÂ’est-à-dire à des enfants pauvres et démunis de Mauritanie, en délaissant leur fille sans en mesurer les conséquences. Sur son chemin de guérison, certes, la médecine lÂ’a aidée. Mais elle confesse : « JÂ’ai commencé à guérir lorsque jÂ’ai accepté ma nature humaine. » Avec le cinéaste, il sÂ’agissait pour elle de dire, par le cinéma, ce que lÂ’Âœil ordinaire ne voit pas. Son drame religieux renvoie à celui dÂ’Isaac : le prix de la vocation est-il lÂ’obligation du sacrifice dÂ’Abraham ?

Le plus grand des cinéastes des pays nordiques est sans nul doute Ingmar Bergman. Fils dÂ’un pasteur luthérien, Bergman a développé toute une Âœuvre cinématographique dont lÂ’aspect théologique est central. Kierkegaard du cinéma, il sÂ’est opposé à une certaine vision de Dieu reçue dans son enfance, « vieille image dÂ’un Dieu dogmatique et spéculatif », pour faire apparaître celle dÂ’un Dieu qui le laisse maître de sa propre existence. Il reproche à la religion quÂ’il appelle dogmatique, dÂ’avoir fait abstraction de la dimension subjective de lÂ’existence, qui, elle, échappe à lÂ’emprise de la Vérité objective. Le besoin impérieux dÂ’« assumer sa propre existence » suscite lÂ’angoisse de ses personnages, et la mort « se répand » dans ses films – aujourdÂ’hui, 80% des films nordiques parlent de la mort – : la frontière entre la vie et la mort apparaît dès lors ambiguë. Bergman finit par rejeter définitivement lÂ’idée du « Dieu dogmatique » pour laisser place « au mystère et à lÂ’amour indicible » qui agissent à lÂ’intérieur de lÂ’homme.

Tout est-il montrable ? Le triste spectacle des « émissions à lÂ’américaine » qui remplacent le confessionnal et dont le succès populaire pousse à lÂ’adaptation en de nombreux pays, est symptomatique de la société. Sous prétexte de divertissement, on tombe dans le voyeurisme et lÂ’exhibitionnisme. La tyrannie de la visibilité, diamétralement opposée au message chrétien, ne laisse plus dÂ’espace à la pensée ni au spirituel. La dernière génération de films qui offrent le spectacle dÂ’une débauche dÂ’effets spéciaux, laisse peu de chance à la réflexion et à la mystique religieuse. Le cinéma, alors, manque totalement de substance. Le problème de la violence touche à un grand débat de société. Comme telle, la violence est inhérente à la nature humaine, et le Christ lui-même en a été la victime en sa terrible Passion. Un cinéaste a dit : « Nous sommes les descendants de Caïn, et non dÂ’Abel ». La violence est un donné naturel, mais le cinéma montre deux types de violence : la violence légitime, et la violence illégitime. La première provoque le rejet de la violence, et laisse le spectateur libre de prendre du recul par rapport à elle. Elle est éthique. Tandis que lÂ’autre est inesthétique, immorale, et elle rend aveugle. La question est de savoir quand la violence est nécessaire, ou quand elle est inutile et gratuite. Cette question, la directrice des salles de cinéma dÂ’Oslo se la pose à chaque film, tiraillée par des choix difficiles parce que consciente du pouvoir énorme du cinéma, notamment sur les jeunes esprits trop enclins à « consommer » ces films, purs produits de la mondialisation, qui sont complètement a-culturés et, donc, rarement enrichissants.

 

                                                                                  P. Jean-Marie Laurent Mazas

                                                                                                                Conseil Pontifical de la Culture

 

 

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The Pontifical Council for Culture, in conjunction with Canon Karl Gervin of the Lutheran Cathedral in Oslo (Norway), and with support from the cityÂ’s Filmens Hus, organised an international meeting there from 7th to 10th November 2002 on The Church and film in dialogue. Catholic and Lutheran bishops, priests, pastors, religious and theologians met personalities from the Nordic film world, including producers, actors, directors, film critics and journalists, in a spirit of real friendship and mutual respect. The themes they discussed included: films and the Bible, loneliness and the temptation to commit suicide, reconciliation, societyÂ’s impact on marriage and the family, violence as a narrative device and commercial violence.

 

Il Pontificio Consiglio della Cultura, con la collaborazione del canonico luterano Karl Gervin di Oslo e con lÂ’appoggio del Filmens Hus dÂ’Oslo, ha organizzato un Incontro internazionale nella capitale norvegese, dal 7 al 10 novembre 2002, su La Chiesa e il film in dialogo. Vescovi cattolici e luterani, sacerdoti e pastori, religiose e teologi si sono incontrati con personalità del cinema nordico, produttori ed attori, cineasti, critici cinematografici e giornalisti, in un autentico spirito di amicizia e stima reciproca. Tra i temi affrontati: cinema e Bibbia, la solitudine e la tentazione al suicidio, la riconciliazione, la società e il suo impatto sulla coppia e sulla famiglia, la violenza come elemento narrativo e la violenza commerciale.

 

El Consejo Pontificio de la Cultura, con la colaboración del canónigo luterano Karl Gervin, de Oslo, y con el apoyo del Filmens Hus de esa ciudad, ha organizado un encuentro internacional en la capital noruega, del 7 al 10 de noviembre de 2002, sobre La Iglesia y el cine en diálogo. Obispos católicos y luteranos, sacerdotes y pastores, religiosas y teólogos se han encontrado con personalidades del cine nórdico: productores y actores, cineastas, críticos de cine y periodistas, en auténtico espíritu de amistad y recíproca estima. Entre los temas abordados: el cine y la Biblia, la soledad y la tentación del suicidio, la reconciliación, la sociedad y su impacto sobre la pareja y la familia, la violencia como elemento narrativo y la violencia comercial.

 

 


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