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49e CONGRÈS EUCHARISTIQUE INTERNATIONAL DE QUÉBEC
 

I.
RÉFLEXION ET RECOMMANDATIONS

 

Selon la tradition du Congrès Eucharistique International, une commission a été désignée pour assurer un suivi à la réflexion et aux recommandations que ce Congrès aimerait laisser à l’Église.

Au terme du travail de compilation de la réflexion des ateliers, la Commission du Rapport a regroupé les points abordés par les Congressistes autour des catégories suivantes

1. Spiritualité eucharistique

La réflexion en ateliers a dégagé plusieurs traits d’une spiritualité eucharistique qu’on souhaite voir fleurir dans l’Église. Les mots clés pour exprimer une telle spiritualité pourraient être : amour, communion, présence, mystère pascal. Les ateliers ont parlé en ce sens, de relation personnelle au Christ, de reconnaissance de la présence du Christ dans l’Eucharistie, mais aussi dans le pauvre, dans le blessé de la vie. Ils ont souhaité que les croyants relient étroitement eucharistie et mystère pascal, mais cela toujours en ne séparant pas la croix du Christ de toute la souffrance du monde, la souffrance des personnes, la souffrance au coeur des institutions. Une spiritualité eucharistique ferait sienne la consigne d’Augustin, i.e. « nous recevons ce que nous sommes » : le Corps du Christ. Cette spiritualité insiste donc sur la dimension ecclésiale, sur la communion avec Dieu et avec les frères et soeurs. Elle privilégie les vertus d’union, de pardon, de miséricorde, de don de soi, de sacrifice, de cohérence entre la proclamation et l’agir. Elle est donc sous le signe de l’amour. Les fruits d’une telle spiritualité :

  • Elle conduit à l’engagement apostolique sous différentes formes.
  • Elle change le regard sur les autres.
  • Elle donne la force et le soutien en temps difficiles.
  • Elle transforme les personnes.
  • Elle stimule à la confession de foi, au témoignage.
  • Elle encourage à de nouvelles initiatives.

En résumé:

« Il faut favoriser le développement d’une spiritualité eucharistique chez tous les baptisés. Cette spiritualité relie l’action liturgique de la messe — prolongée dans le culte eucharistique hors de la messe — à l’engagement chrétien au coeur du monde coeur du monde. Elle est toute entière axée sur le mystère pascal accompli une fois pour toutes en Jésus et continuellement actualisée dans l’Église de tous les temps»

 

2. Action liturgique (la messe)

A ce chapitre, les ateliers ont fait plusieurs propositions assez concrètes.

  • On souhaite d’abord que les participants à l’assemblée liturgique comprennent qu’ils sont tous acteurs et non spectateurs de la célébration.
  • On suggère de soigner les divers moments de l’action liturgique de sorte qu’ils expriment toujours le lien intrinsèque avec l’engagement éthique au coeur du monde.
  • On invite à souligner les dimensions sociales et éthiques sur lesquelles les fêtes du sanctoral donnent occasion de réfléchir.
  • On encourage une plus grande utilisation des messes pour circonstances spéciales quand elles permettent un lien assez clair avec les situations sociales concrètes d’un milieu donné.
  • On trouve important de développer « l’art de célébrer ».
  • On insiste sur la valorisation des divers ministères liturgiques.
  • On croit qu’il faut conscientiser les fidèles à l’importance de se préparer à la célébration liturgique, o par la méditation, la formation continue, la réconciliation et par l’adoration en dehors de la messe.
  • On souhaite que soit bien articulé le rapport entre liturgie de la Parole et liturgie eucharistique proprement dite.
  • On rappelle que le rite pénitentiel, au début de chaque célébration, renvoie chaque personne à sa responsabilité de se laisser réconcilier en vérité pour s’approcher de la Table du Seigneur.
  • On exprime le souhait que les baptêmes soient célébrés à l’intérieur de l’Eucharistie.

En résumé :

« Une juste spiritualité eucharistique se vérifie lorsque la célébration de la messe engage la pleine participation de tous les baptisés —participation intérieure autant qu’extérieure— et lorsque le désir de rendre gloire à Dieu se conjugue à une vive conscience du monde qu’il nous invite à transformer»

 

3. Culte eucharistique en dehors de la messe

Du travail des ateliers, on peut dégager :

  • l’importance qu’il y aurait à ce que soit bien connu et appliqué le rituel du culte eucharistique en dehors de la messe et de façon particulière, le lien entre messe et exposition du Très Saint Sacrement;
  • le souhait que l’on fasse la promotion de l’adoration hors de la messe dans les écoles catholiques;
  • le désir que soit respectée la diversité des chemins vers Dieu, la diversité d’expression de la dévotion au Très Saint Sacrement;
  • la suggestion de rappeler aux croyants que, pour les personnes qui ne peuvent communier, reste ouverte la voie de la communion spirituelle;
  • l’effort à faire dans les communautés chrétiennes pour que l’adoration en dehors de la messe soit vécue comme prolongement ou comme anticipation de la célébration eucharistique;
  • le souhait que les pratiques d’adoration en dehors de la messe s’inspirent des principes liturgiques : qu’on apprenne à souligner la dimension communautaire de ces temps d’adoration et qu’on y fasse place à la proclamation et à la méditation de la Parole de Dieu;
  • l’importance de nommer un certain nombre de critères de discernement d’une adoration hors de la messe, fidèle au mystère eucharistique:

- À la kénose du Christ inhérente à la croix et à l’eucharistie devrait faire écho la kénose des adorateurs.
- L’adoration fidèle à Celui qui est adoré suppose des adorateurs pour qui la présence, l’authenticité, la recherche d’unité, la joie, l’abandon, le don de soi, sont des dimensions importantes.
- L’adoration véritable comprend qu’amour du Christ et amour de l’Église sont inséparables.
- L’adoration en dehors de la messe doit être porteuse du même dynamisme missionnaire que la messe.

En résumé:

« La qualité de contemplation, d’adoration et d’attention à la présence du Christ, qui caractérise la dévotion eucharistique hors de la messe, doit se retrouver dans la célébration même de la messe. De la même manière, les multiples dimensions de la célébration liturgique doivent informer les pratiques du culte eucharistique hors de la messe : participation communautaire, écoute de la Parole de Dieu, intercession, offrande, sacrifice, action de grâce, engagement pour la mission de l’Église au coeur du monde ». 

 

4. L’Église, Corps du Christ : le tissu communautaire

Toujours en nous rappelant, à l’école d’Augustin, que nous recevons ce que nous sommes, le Corps du Christ, nous nous réjouissons de ce que les ateliers d’approfondissement aient multiplié les suggestions pour dynamiser le tissu communautaire des rassemblements eucharistiques.

• Les ateliers ont dit l’importance pour la qualité de vie eucharistique dans un milieu donné :

- d’encourager la qualité de la vie familiale;
- d’encourager les mouvements, source de vitalité pour les paroisses et non force concurrente;
- de prendre soin des pasteurs, de les interpeller
- d’aider le discernement vocationnel de jeunes qui pourraient se sentir appelés au ministère presbytéral;
- de faire place aux jeunes dans la vie paroissiale, dans la liturgie;
- de soigner les rapports intergénérationnels;
- de susciter des occasions de nouer des liens hors de la célébration;
o d’encourager la formation de petits groupes de partage de foi…

  • Dans les ateliers, on a demandé qu’on assure des lieux de prière variés.
  • Dans les ateliers, il a aussi été suggéré de favoriser la création de réseaux de prière : o groupes consacrés à la prière pour les autres et groupes priant dans les lieux publics.

En résumé :

« Pour que nos célébrations et notre prière soient vraies, elles doivent jaillir d’une vraie communauté et en favoriser le déploiement. »

 

5. L’Église engagée dans la mission du Christ : transformer par la solidarité

Dans les ateliers, s’est beaucoup exprimée la conviction que la vérité de l’Eucharistie exigeait qu’une communauté chrétienne, loin de se refermer sur elle-même, devait être ouverte et accueillante aux autres. Tout l’enseignement du Congrès renvoyait au binôme :

  • Eucharistie — lavement des pieds;
  • Eucharistie — engagement envers les frères et soeurs;
  • Eucharistie — pastorale sociale.

Les ateliers, en ce sens, ont souligné comment l’Eucharistie appelait à dénoncer les idoles de notre temps, à s’engager dans des pratiques qui donnent vie.

  • Ces idoles, on les a nommées : surconsommation, sexe, argent, drogue, recherche excessive de l’épanouissement de soi, divertissement, pouvoir, absorption dans le « paraître ».
  • Parmi les pratiques qui donnent vie, on a mentionné : la participation à des réseaux internet pour faire pression; les mouvements pro-vie; les formes de solidarité avec le Tiers-monde; les initiatives en faveur de la justice sociale; les formes de participation à la vie publique / politique…
    Pour toutes ces formes de participation, on a précisé le besoin d’une formation adéquate et l’importance de bien analyser le contexte social de nos milieux. Plusieurs autres points ont été soulignés qui touchent à ce lien Eucharistie — mission de l’Église. On souhaite :
  • que les liturgies prennent en compte les situations concrètes;
  • que dans les lettres pastorales et les homélies traitant des questions sociales, on fasse le lien avec l’Eucharistie;
  • qu’on valorise, dans les rassemblements de la communauté les actions missionnaires des membres.

En résumé :

« Pour que nos célébrations et notre prière soient vraies, elles doivent nous envoyer en mission vers le monde en inspirant, nourrissant et soutenant notre engagement chrétien au coeur du monde. »

 

6. Catéchèse de la liturgie, vers la liturgie, par la liturgie

Tout au long des quatre séances des ateliers d’approfondissement, ce sont multipliés les constats d’un profond besoin d’intensifier l’éducation dans la foi de tous les croyants. Le Congrès lui-même a été une si merveilleuse école de la foi. Ce que les ateliers ont appelé de tous leurs voeux, c’est

  • un enseignement sur le lien étroit o entre mystère pascal et Eucharistie et
  • une éducation o au sens et à la valeur des symboles qui composent l’action liturgique et
  • un approfondissement du sens des textes de la liturgie de la Parole en petits groupes;
  • un développement de la pastorale biblique;
  • une découverte ou redécouverte de Vatican II et spécialement de la Constitution sur la liturgie;
  • une proposition d’homélies mystagogiques sur le sens de l’Eucharistie, sur l’adoration;
  • une présentation articulée o du rapport entre Table de la Parole et Table eucharistique
  • une éducation qui promeut la connaissance et la compréhension des divers rites dans l’Église;
  • une initiation à la prière contemplative pour des groupes spécifiques, v.g. o les jeunes, les parents en initiation sacramentelle,

Cette initiation pourrait se faire, dit-on, avant ou après la messe sur semaine. On souhaite qu’il se trouve des prêtres, des ministres, des enseignants, pour guider cette prière contemplative et y conduire par le témoignage de leur vie même.

Au service de cette catéchèse multiforme, on a suggéré : la tenue de Congrès locaux, le développement de catéchismes « liturgiques » nationaux, un plus grand déploiement de la formation liturgique des séminaristes, des prêtres, des agent(e)s de pastorale.

En résumé : « Il faut développer des processus, des outils et des lieux catéchétiques, qui favorisent une meilleure connaissance de l’Eucharistie et une meilleure capacité d’y participer pleinement —à la liturgie comme au culte eucharistique hors de la messe— surtout en initiant à la prière contemplative. »

 

II
RÉFLEXION ET SOUHAITS

La table était royalement garnie, surabondante : le Congrès nous a offert un enseignement extrêmement riche, varié, fidèle au plus profond du mystère. Déjà, le thème général reflétait cette volonté ferme d’honorer l’initiative divine et la fécondité pour l’humanité du mystère que nous consacrerions la semaine à célébrer. Don de Dieu pour la vie du monde. Tous les exposés du Congrès ont parlé de ce que l’Eucharistie représente pour la vie du monde.

Comme Commission du Rapport, nous croyons utile d’ajouter certaines réflexions que nous avons partagées en accueillant le travail des ateliers. Déjà, nous étions en mesure de constater qu’un nombre de points appelaient une plus grande considération dans l’Église d’ici et peut-être dans d’autres milieux.

 

1. Eucharistie - Engagement social

On doit s’émerveiller de ce que, dans ce Congrès, la presque totalité des interventions (catéchèses, témoignages, homélies) ont signalé les implications sociales de la participation eucharistique, et particulièrement, l’importance, pour l’authenticité de la célébration eucharistique, de vivre suivant le modèle que Jésus nous donne : une vie livrée pour nous, par amour. En ce sens, la Commission en est venue à souhaiter que tous les mouvements d’action sociale catholique réexaminent la place de l’Eucharistie dans leur agir et que toutes les chapelles d’adoration, les mouvements eucharistiques et autres, s’interrogent sur leur sensibilité sociale.

 

2. Rapport : Eucharistie - Mystère pascal

Parmi les plus beaux cadeaux que Vatican II a laissés à l’Église touchant l’Eucharistie, on ne peut donner trop d’attention au fait que le Concile ait souligné le lien étroit entre l’Eucharistie et le Page mystère pascal. La Commission croit qu’une attention accrue doit être donnée dans tous les lieux où s’offre une formation catéchétique, pastorale, théologique, à enraciner dans le coeur des Chrétiens et des Chrétiennes, cette perspective fondamentale de l’Eucharistie comme mémorial de la mort et de la résurrection du Seigneur.

 

3. Eucharistie - don trinitaire

Le document de base du Congrès invitait, dès les premières pages, à considérer l’Eucharistie comme don trinitaire. Les catéchèses du Congrès n’ont pas ignoré cette dimension fondamentale. Pourtant, on sent qu’il faudra dans les communautés chrétiennes, revenir souvent sur cette profondeur du mystère. La Commission ne peut que souhaiter que se poursuive cette éducation du peuple de Dieu à reconnaître l’Eucharistie comme don trinitaire de l’amour des trois qui sont un. Les Chrétiens sont-ils suffisamment attentifs au fait que l’Eucharistie, mémorial du mystère pascal, est acte d’adoration suprême du Christ au Père, adoration à laquelle nous sommes invités à communier? Les Chrétiens sont-ils suffisamment attentifs au rôle de l’Esprit dans l’Eucharistie? Une attention spéciale est-elle donnée aux épiclèses? Quelle attention est donnée à la grande doxologie trinitaire qui conclut la prière eucharistique? Se peut-il que nos frères et soeurs de rite oriental aient quelque chose d’important à nous partager à ce niveau?

 

4. Table de la Parole - Table du Pain de Vie

Déjà au Symposium qui a précédé le Congrès, le Cardinal W. Kasper avait indiqué qu’il intuitionnait que le synode romain sur la Parole de Dieu ferait ressurgir cette question du lien étroit entre les deux tables : Table de la Parole et Table du Pain de Vie. Les ateliers d’approfondissement ont évoqué l’importance de méditer les textes bibliques proposés dans la première partie de la célébration eucharistique, mais Vatican II ne nous invite-t-il pas à « toujours témoigner du respect de l’Église à l’égard des Écritures tout comme à l’égard du Corps du Seigneur lui-même, puisque, surtout dans la Sainte Liturgie, elle ne cesse, de la Table de la Parole de Dieu, comme de celle du Corps du Christ, de prendre le Pain de Vie et de le présenter aux fidèles » (DV, 21)

 

5. Eucharistie - Dies Domini

Dans la première catéchèse du Congrès, Mgr D. W. Wuerl, archevêque de Washington, soulignait l’importance du rassemblement eucharistique, le jour du Seigneur, non seulement pour proposer la foi mais aussi pour renouveler la vie du Christ en nous. « Nous ne nous réunissons pas comme des individus isolés les uns des autres et uniquement reliés au Christ, mais précisément comme famille de Dieu, reliés les uns aux autres à travers l’Église. L’Eucharistie nous fait un. » À la fin du Congrès, le Cardinal F. Arinze évoquait ces martyrs d’Abitène, en Afrique proconsulaire, qui donnèrent leur vie plutôt que de renoncer à la messe du Dimanche. Page 12 sur 13

La Commission a regretté que les ateliers d’approfondissement ne s’arrêtent davantage au rassemblement eucharistique du jour du Seigneur, étant donné la désaffection de bon nombre de Chrétiens pour cet engagement et l’urgence d’une action pastorale concertée pour sa remise en valeur.

 

6. Eucharistie - action de grâce

Les membres de la Commission notent que la dimension action de grâce de l’Eucharistie ne semble pas avoir été soulignée. Pourtant, le terme même d’Eucharistie et la facture de la prière eucharistique encadrée par l’appel du président de la célébration à rendre grâce au Seigneur notre Dieu et le répons de l’assemblée « nous rendons grâce à Dieu », sans oublier la formule d’Institution comprenant la phrase « il rendit grâce », invitent à nous y arrêter. Est-ce que l’action de grâce, le développement d’une culture de l’action de grâce ne servirait pas la mise en relief de l’Eucharistie comme don de Dieu?

 

7. Eucharistie - Marie

Le document de base du Congrès mais aussi la catéchèse du Cardinal Bergoglio ont remarquablement mis en relief le rapport Marie - Eucharistie. S’inspirant du chapitre 6 que Jean-Paul II dans Ecclesia de Eucharistia consacre à Marie, le Cardinal Bergoglio présente 3 images illustrant en quoi Marie, femme eucharistique, est modèle de l’Alliance entre le Christ et l’Église, son épouse. Encore sur ce point, il nous semble que l’Église doit assurer un suivi du Congrès.

 

8. Eucharistie - adoration hors de la messe

Deux des questions proposées aux Congressistes pour leur approfondissement, lors de la seconde séance d’ateliers et l’ensemble des questions de la troisième séance, invitaient à clarifier le rapport messe - adoration en dehors de la messe. Comme Commission, nous sentons qu’un travail pastoral s’impose pour que le peuple chrétien saisisse davantage que, pour citer Mgr Tagle, « le sacrifice ou culte spirituel de Jésus sur la croix est son acte d’adoration suprême » et « dans l’Eucharistie, nous nous joignons à l’adoration de Jésus adorant le Dieu de la vie ». L’adoration en dehors de la messe serait mal comprise si elle n’était vécue comme prolongement de cette adoration suprême.

 

9. Eucharistie - sacrement du sacrifice du Christ

Nous notons, enfin, que les ateliers d’approfondissement ne semblent pas avoir considéré l’Eucharistie comme sacrement du sacrifice du Christ. La réflexion de Mgr Tagle sur le sacrifice du Christ nous semble une merveilleuse porte d’entrée dans cette dimension du mystère.

 

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