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DISCOURS DU PAPE JEAN XXIII
POUR LE IIe CONGRÈS MONDIAL DES ÉCRIVAINS ET ARTISTES NOIRS

Mercredi 1er avril 1959

 

Messieurs !

En organisant à Rome le deuxième Congrès des Écrivains et Artistes Noirs, la Société Africaine de Culture a voulu prendre pour siège de ses assises internationales un haut-lieu de la culture humaine et chrétienne, que plus de deux millénaires de civilisation ont marqué d'une empreinte indélébile.

Déjà, lors de votre première assemblée à Paris, il y a trois ans, vous aviez choisi une cité, particulièrement chère à Notre mémoire, dont le patrimoine littéraire et artistique attire les élites intellectuelles de partout, et notamment d'Afrique, comme Nous l'avons Nous-mêmes souvent observé.

Ainsi, par deux fois, avez-vous tenu à affirmer votre estime pour ces grandes valeurs de l'esprit, qui, pendant des siècles, ont trouvé en Europe une terre d'élection et dont vous avez vous-mêmes reçu les inestimables bienfaits.

Nous sommes heureux de vous en féliciter, et Nous vous souhaitons de grand cœur la bienvenue dans Notre ville de Rome. C'est dans son cadre prestigieux que vous vous appliquez à étudier l'unité et les responsabilités d'une culture négro- africaine. Appartenant vous-mêmes à diverses nations de l'ancien et du nouveau monde, différents par la langue et par le style de vos œuvres, vous vous affirmez liés par une unité, qui est celle de votre race d'origine, et par de communes responsabilités envers votre patrimoine ancestral.

L'Église apprécie, respecte et encourage un semblable travail d'investigation et de réflexion, qui a pour objet de dégager les richesses originales d'une culture propre, d'en retrouver les points d'appui dans l'histoire, d'en manifester les harmonies profondes à travers des expressions variées, d'en faire bénéficier enfin, par des œuvres nouvelles, les pays respectif auxquels vous appartenez.

Partout en effet où d'authentiques valeurs de l'art et de la pensée sont susceptibles d'enrichir la famille humaine, l'Église est prête à favoriser ce travail de l'esprit. Elle-même, vous le savez, ne s'identifie à aucune culture, pas même à la culture occidentale à laquelle pourtant son histoire est étroitement mêlée. Car sa mission propre est d'un autre ordre : celui du salut religieux de l'homme. Mais l'Église, pleine d'une jeunesse sans cesse renouvelée au souffle de l'Esprit, demeure disposée à reconnaître, à accueillir, et même à animer tout ce qui est l'honneur de l'intelligence et du cœur humain sur d'autres plages du monde que ce bassin méditerranéen qui fut le berceau providentiel du christianisme.

On ne peut donc que suivre avec intérêt, Messieurs, vos efforts pour rechercher les bases d'une communauté culturelle d'inspiration africaine, en formant le vœu qu'elle repose sur de justes critères de vérité et d'action !

Croyez-en, sur ce point, la sagesse séculaire de 1'Église. Son regard éclairé sait déceler dans les formes, anciennes ou nouvelles, de l'expression artistique ou littéraire ce qui doit être purifié pour être conciliable avec la dignité de l'homme, avec ses droits et devoirs naturels. L'universalité de son regard, attentif aux ressources humaines de tous les peuples, la met au service d'une vraie paix dans le monde. En aidant les élites qui se tournent vers elle à développer les possibilités culturelles de leur patrie ou de leur race, l'Église les invite à le faire dans un esprit d'harmonieuse collaboration et de sympathie profonde avec les autres courants issus d'authentiques civilisations. N'est ce pas à ce prix seulement que s'accroissent les conquêtes de l'esprit et que se nouent les liens spirituels d'une communauté humaine fraternelle ?

Nous invoquons donc de grand cœur les bénédictions divines d'abord sur toutes et chacune de vos personnes, sur vos proches, sur tous ceux qui vous sont chers, et Nous formons le souhait que ces bénédictions descendent aussi sur vos travaux, afin qu'ils ne cessent de s'inspirer, à Rome et ailleurs, de cet amour de la vérité et de la paix, qui est la marque de tous les vrais serviteurs de la culture et qui anime, Nous en avons la conviction, l'action de Nos fils qui aiment l'Afrique et ses plus nobles traditions.



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