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DISCOURS DU PAPE PIE XII
 AUX RELIGIEUSES DE LA CONGRÉGATION DE NOTRE-DAME*

Vendredi 21 juillet 1939

Vous êtes les bienvenues auprès de Nous, chères Filles de la Congrégation de Notre-Dame, à qui naguère encore Nous donnions si volontiers Notre Protectorat personnel. Cette responsabilité immédiate, Nous l'avons transmise à Notre Cher Fils le Cardinal Tedeschini, que ses qualités d'esprit et de cœur désignaient spécialement pour veiller sur une Congrégation enseignante, comme la vôtre. Mais Nous n'avons rien perdu, pour cela, de Notre paternelle affection à votre égard.

Aussi saluons-Nous avec joie, dans ce Chapitre général, les Religieuses venues de France, de Belgique, d'Angleterre et de Hollande, pour traiter les affaires de la Congrégation et élire, comme elles l'ont déjà fait heureusement, celle que toutes appelleront désormais leur Mère — mot rempli de douce tendresse —, en y ajoutant le titre de Générale, où résonnent l'union qui fait la force, et l'obéissance qui assure les victoires.

Depuis trois siècles et demi, votre Institut réalise le souhait de son Fondateur, celui que l'on appelait de son vivant « le bon Père de Mattaincourt », et que l'Église appelle maintenant saint Pierre Fourier. S'il vous a groupées en Congrégation religieuse, — commençant son œuvre avec cinq humbles filles, une nuit de Noël, à l'heure où Jésus-Christ commença l'œuvre rédemptrice, — ce fut, selon le mot d'un historien du temps, « pour former à tout savoir utile, à toute excellente besogne, et, d'abord à toutes vertus et bonne vie, les filles du monde, tant pauvres que riches ».

Cette consigne, vos devancières l'ont exécutée avec un rare courage et avec un succès auquel croyants et incroyants eux-mêmes ont rendu hommage. Les vicissitudes, par lesquelles votre famille religieuse passa, comme tant d'autres, durant la tourmente révolutionnaire et qui semblaient devoir en consommer la ruine, ont été suivies d'une vie nouvelle, plus active encore, dans laquelle il Nous plaît de discerner deux traits, en apparence contradictoires : l'un de continuité, l'autre d'innovation.

Vous restez et entendez bien rester fidèles à l'esprit de vos fondateurs : « Je veux, disait Notre Seigneur à sa servante Alix Le Clerc, je veux que les petites âmes, qui sont comme des enfants délaissés par leur mère, en aient une désormais en toi ». Or, combien de parents, aujourd'hui, s'ils pensent encore à la santé et à l'avenir temporel de leurs enfants, délaissent réellement leurs âmes ! Pour ces âmes, vous travaillez, - traitant, selon une autre parole que vous connaissez, « les filles pauvres comme vos sœurs, et vous appliquant à l'éducation des. riches pour les rendre modestes ». Ces derniers mots ne suffiraient-ils pas à montrer que votre mission est toujours actuelle : élever chrétiennement les jeunes filles pauvres, pour leur donner des âmes de sœurs, étrangères aux haines de classes et aux antagonismes nationalistes; élever chrétiennement les jeunes filles riches, pour leur donner la modestie des manières, des vêtements, des expressions et des sentiments eux-mêmes ?

Mais parce qu'une tradition trois fois séculaire risquerait d'être languissante ou déficiente dans ses applications, si un souffle de progrès et d'adaptation ne venait la vivifier, Nous sommes heureux de voir, avec la fidélité essentielle aux origines de l'Institut, un autre trait, nouveau celui-là, dans la Congrégation de Notre-Dame au XXe siècle. Vous avez compris, dans un monde avide d'instruction et devant une jeunesse féminine menacée en bien des pays par l'éclat d'un enseignement athée, vous avez compris l'utilité de l'union entre vos diverses maisons, pour coordonner et mieux répartir ensuite, à l'aide d'une Supérieure générale, les ressources intellectuelles dont dispose l'ensemble. Et cette union, pour la rendre plus universelle et plus indestructible, vous l'avez placée sous la dépendance immédiate du Saint-Siège.

Plus que jamais, donc, vous serez Filles de l'Église, puisque, jusque dans votre nom, vous vous déclarez Romaines. Et sans doute est-ce la Providence aussi, qui, par une délicate attention, vous a suggéré et permis de donner à votre maison de Rome ce surnom gracieux, illustré depuis bientôt cent cinquante ans par votre grand monastère de Paris : « la maison des Oiseaux! ». Votre saint et bon Père, dont le cœur séraphique saignait de voir capturer un oiselet, et qui, les jours de neige, faisait distribuer du grain aux moineaux transis du jardin, doit aimer ce nom des Oiseaux, avec tout le gracieux cortège de symboles qu'il éveille.

Nous souhaitons, très chères Filles, que votre Congrégation, comme ce nid qui figure dans vos armes, reste filialement blottie aux pieds de Notre-Dame et que, par cette Mère divine, descende sur vous la bénédiction promise au peuple de Dieu, selon le prophète Isaïe (XXXI, 5) : « Comme les oiseaux déployant leurs ailes sur leur couvée, Jahvé Sabaoth protègera Jérusalem ».

Comme gage de ces faveurs divines, Nous vous accordons, d'un cœur tout paternel, la Bénédiction apostolique.


* Discours et messages-radio de S.S. Pie XII - Vol. I,
Première année de Pontificat, 2 mars 1939 - 1er mars 1940, pp. 277-279
Typographie Polyglotte Vaticane.

 



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