Je salue le cardinal Tagle et vous tous, et je vous remercie pour le service que vous offrez ces jours-ci. Vous êtes venus à Rome de tous les continents pour réfléchir à l'identité, à la mission, aux attentes et à l'avenir de l'université pontificale urbanienne. Il existe le projet de la «fusionner» avec les autres universités: non, ce n'est pas possible. Je vous félicite également pour la modalité synodale que vous avez adoptée, en recueillant d'abord les contributions des Conférences épiscopales des pays relevant de la juridiction du dicastère.

Je voudrais moi aussi offrir quelques considérations à ce sujet, en partant de la perspective dans laquelle l'Université urbanienne répond à l'autorité et à l'activité du dicastère pour l'évangélisation, dans la configuration établie par la constitution apostolique Praedicate evangelium. L'Urbanienne a sa propre identité.

Je m'attarderai d'abord sur le binôme identité-mission. La vocation de cette institution académique fait que son identité a toujours coïncidé avec sa mission. La formation, l'enseignement, la recherche et la vitalité de l'université font partie du mandat que nous avons reçu d'annoncer la Bonne Nouvelle à tous les peuples (cf. Mc 16, 15) et leur mise en œuvre ne peut jamais être considérée comme définitive — toujours en mouvement! —. Ce sont des dimensions ouvertes, qui doivent constamment se laisser guider par le souffle de l'Esprit Saint qui guide l'histoire et nous appelle à interpréter les temps que nous vivons. Et à le faire avec nos propres critères

L'intuition et les valeurs fondatrices de l'institution sont toujours d'actualité, tout comme le chemin parcouru depuis quatre cents ans, de l'ancien collège urbain à l'université urbanienne. Il est toutefois nécessaire que cet héritage se traduise par des réponses adéquates aux questions que la réalité d'aujourd'hui pose à l'Eglise et au monde: «Les études ecclésiastiques ne peuvent pas se limiter à transmettre des connaissances, des compétences, des expériences, aux hommes et aux femmes de notre temps, […] mais elles doivent développer la tâche urgente d’élaborer des instruments intellectuels capables d’être proposés comme paradigmes d’action et de pensée, utiles à l’annonce dans un monde marqué par le pluralisme éthique et religieux» (Const. apost. Veritatis gaudium, 5). Nous ne vivons pas dans une société chrétienne, mais nous sommes appelés à vivre en tant que chrétiens dans la société plurielle actuelle. En tant que chrétiens et ouverts.

En ce qui concerne l'autre binôme attentes-avenir, la réflexion s'inscrit dans le cadre du discernement demandé aux institutions universitaires de Rome qui dépendent spécialement du Siège apostolique.

C'est là que doivent converger la nécessité d'améliorer la qualité de l'offre de formation et de recherche, et la nécessaire rationalisation des ressources humaines et économiques. Cela requiert une vision capable de regarder vers l'avenir, capable de considérer la situation ecclésiale et sociale, la vitalité des structures ecclésiastiques et leur durabilité, les besoins des Eglises locales, les vocations au sacerdoce et à la vie consacrée, et les indices démographiques des différentes régions. Nous savons bien qu'une «identification des fins sans une adéquate recherche communautaire des moyens pour les atteindre est condamnée à se traduire en pure imagination» (Exhort. apost. Evangelii gaudium, 33). Il faut une saine créativité pour trouver les chemins appropriés. N'ayez pas peur de la créativité: elle est nécessaire, cette saine créativité. L'indication de «faire chorus», donnée lors de la rencontre avec toutes les universités et institutions académiques pontificales de Rome en février 2023, ne se limite pas à une solution technique; elle exprime la préoccupation qu'un modèle renouvelé de l'Université, en tant que communauté de connaissance et d'apprentissage, évite le risque que les études soient réduites au simple accomplissement de cours, de crédits et d'examens.

Rendre une institution universitaire attrayante et compétitive requiert des enseignants dévoués, une recherche scientifique et la capacité d'apporter une contribution significative à la doctrine. Faire bon usage des ressources signifie unifier les parcours identiques, partager le corps professoral des six institutions, éliminer le gaspillage, planifier les activités avec sagesse et abandonner les procédures et les projets désormais caducs. Et pour cela, je veux remercier mm. le cardinal et le secrétaire, qui font un vrai travail pour éviter ces choses laides et sales dont je viens de parler. Merci pour ce que vous faites.

Dans le cas particulier de l'Urbanienne, il est important que sa spécificité missionnaire et interculturelle émerge encore plus dans la qualité de la formation offerte, afin que les personnes formées soient en mesure de médiatiser le message chrétien avec originalité dans le rapport avec les autres cultures et religions. Combien avons-nous besoin de pasteurs, de personnes consacrées et de laïcs qui sachent incarner un élan missionnaire pour évangéliser les cultures et inculturer ainsi l'Evangile! Ces deux choses vont toujours ensemble: l'évangélisation de la culture et l'inculturation de l'Evangile.

J'espère que, comme cela s'est déjà produit pour la région asiatique et chinoise, d'autres centres de recherche pourront être créés pour les différentes zones géographiques et culturelles et renforcer ceux qui existent déjà. En outre, l'affiliation des séminaires et des instituts de théologie présents dans les circonscriptions ecclésiastiques missionnaires devrait être encouragée; lorsque cela n'est pas possible, un accompagnement différent mais constant devrait être garanti.

Chers frères et sœurs, merci beaucoup pour le travail que vous accomplissez ces jours-ci. Et merci pour votre engagement dans les différents contextes ecclésiaux dans lesquels vous exercez votre ministère. Que l'Esprit Saint, avec le don de la sagesse, inspire vos réflexions. Que la Vierge Marie, Reine de la Mission, vous accompagne de son intercession maternelle. Je prie pour vous, mais s'il vous plaît, faites-le pour moi, car ce travail est agréable mais pas facile!

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L'Osservatore Romano, Edition hebdomadaire en langue française, LXXVe année, numéro 36, jeudi 5 septembre 2024, p. 2.