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refroidit, devient impersonnelle et opprime la vie
concrète de la personne. La vérité que nous cher-
chons, celle qui donne sens à nos pas, nous illu-
mine quand nous sommes touchés par lâÂÂamour.
Celui qui aime comprend que lâÂÂamour est une ex-
périence de vérité, quâÂÂil ouvre lui-même nos yeux
pour voir toute la réalité de manière nouvelle, en
union avec la personne aimée. En ce sens, saint
Grégoire le Grand a écrit que «Â
amor ipse noti-
tia est
 », lâÂÂamour même est une connaissance, il
porte en soi une logique nouvelle.
20
Il sâÂÂagit dâÂÂune
manière relationnelle de regarder le monde, qui
devient connaissance partagée, vision dans la vi-
sion de lâÂÂautre et vision commune sur toutes les
choses. Guillaume de Saint Thierry, au Moyen-
âge, suit cette tradition quand il commente un
verset du Cantique des Cantiques où le bien-aimé
dit à la bien-aimée : Tes yeux sont des yeux de co-
lombes (cf.
Ct
1, 15).
21
Ces yeux de la bien-aimée,
explique Guillaume, sont la raison croyante et
lâÂÂamour, qui deviennent un seul ÅÂil pour parve-
nir à la contemplation de Dieu, quand lâÂÂintellect
se fait « intellect dâÂÂun amour illuminé ».
22
28.âÂÂCette découverte de lâÂÂamour comme source
de connaissance, qui appartient à lâÂÂexpérience
originelle de tout homme, trouve une
expression
importante dans la conception biblique de la foi.
20
Homiliae in Evangelia
, II, 27, 4Â :
PL
76, 1207.
21
âÂÂCf.
Expositio super Cantica Canticorum
, XVIII, 88Â :
CCL
,
Continuatio Medieavalis
87, 67.
22
Ibid
., XIX, 90Â :
CCL
,
Continuatio Mediaevalis
87, 69.