EXHORTATION APOSTOLIQUE
POST-SYNODALE
AFRICAE MUNUS
DU PAPE
BENOÎT XVI
À L’ÉPISCOPAT, AU CLERGÉ,
AUX PERSONNES CONSACRÉES
ET AUX FIDÈLES LAÏCS
SUR L'ÉGLISE EN AFRIQUE
AU SERVICE DE LA RÉCONCILIATION,
DE LA JUSTICE ET DE LA PAIX
« Vous êtes le sel de la terre...
Vous êtes la lumière du monde »
(Mt 5, 13.14)
TABLE DES MATIÈRES
PREMIÈRE PARTIE
«VOICI, JE FAIS L'UNIVERS NOUVEAU» (Ap 21, 5)
CHAPITRE I
AU SERVICE DE LA RÉCONCILIATION, DE LA JUSTICE ET DE LA PAIX
I. Authentiques serviteurs de la Parole de Dieu
II. Le Christ au cœur des réalités africaines: source de réconciliation, de justice et de paix
A. «Laissez-vous réconcilier avec Dieu» (2 Co 5, 20b)
B. Devenir justes et construire un ordre social juste1. Vivre de la justice du Christ
2. Créer un ordre juste dans la logique des BéatitudesC. L'amour dans la vérité: source de paix
1. Service fraternel concret
2. L'Église comme une sentinelle
CHAPITRE II
LES CHANTIERS POUR LA RÉCONCILIATION, LA JUSTICE ET LA PAIX
I. L’attention à la personne humaine
A. La metanoia: une authentique conversion
B. Vivre la vérité du Sacrement de la Pénitence et de la Réconciliation
C. Une spiritualité de communion
D. L'inculturation de l'Évangile et l'évangélisation de la culture
E. Le don du Christ: l'Eucharistie et la Parole de Dieu
A. La famille
B. Les personnes âgées
C. Les hommes
D. Les femmes
E. Les jeunes
F. Les enfants
III. La vision africaine de la vie
A. La protection de la vie
B. Le respect de la création et l'écosystème
C. La bonne gouvernance des États
D. Les migrants, déplacés et réfugiés
E. La mondialisation et l'aide internationale
IV. Le dialogue et la communion entre les croyants
A. Le dialogue œcuménique et le défi des nouveaux mouvements religieux
B. Le dialogue interreligieux
DEUXIÈME PARTIE
« À CHACUN LA MANIFESTATION DE L'ESPRIT EST DONNÉE EN VUE DU BIEN COMMUN » (1 Co 12, 7)
CHAPITRE I
LES MEMBRES DE L'ÉGLISE
CHAPITRE II
PRINCIPAUX CHAMPS D'APOSTOLAT
I. L'Église comme présence du Christ
IV. Le monde de l'information et de la communication
CHAPITRE III
« LÈVE-TOI, PRENDS TON GRABAT ET MARCHE ! » (Jn 5, 8)
I. L'enseignement de Jésus à la piscine de Bethesda
II. La parole de Dieu et les Sacrements
A. Les Saintes Écritures
B. L'Eucharistie
C. La Réconciliation
III. La Nouvelle Évangélisation
A. Porteurs du Christ «Lumière du monde»
B. Témoins du Christ Ressuscité
C. Missionnaires à la suite du Christ
CONCLUSION : « AIE CONFIANCE ! LÈVE-TOI,
IL T'APPELLE ! » (Mc10, 49)
1. L’engagement de l’Afrique pour le Seigneur Jésus-Christ est un trésor précieux que je confie, en ce début de troisième millénaire, aux Évêques, aux prêtres, aux diacres permanents, aux personnes consacrées, aux catéchistes et aux laïcs de ce cher continent et des îles voisines. Cette mission porte l’Afrique à approfondir la vocation chrétienne. Elle l’invite à vivre, au nom de Jésus, la réconciliation entre les personnes et les communautés, et à promouvoir pour tous la paix et la justice dans la vérité.
2. J’ai désiré que la deuxième Assemblée spéciale pour l’Afrique du Synode des Évêques qui s’est déroulée du 4 au 25 octobre 2009, se situe dans la continuité de l’Assemblée de 1994 qui s’est « voulue une manifestation d’espérance et de résurrection, au moment même où les événements semblaient pousser l’Afrique au découragement et au désespoir ».[1] L’Exhortation apostolique post-synodale Ecclesia in Africa de mon prédécesseur, le bienheureux Jean-Paul II, recueillait les orientations et les options pastorales des Pères synodaux pour une nouvelle évangélisation du continent africain. Il convenait, au terme de la première décennie de ce troisième millénaire, que se fassent vives notre foi et notre espérance pour contribuer à construire une Afrique réconciliée, par les voies de la vérité et de la justice, de l’amour et de la paix (cf. Ps 85, 11) !
Avec les Pères synodaux, je rappelle que « si le Seigneur ne bâtit la maison, en vain peinent les bâtisseurs » (Ps 127, 1).
3. Une vitalité ecclésiale exceptionnelle et le développement théologique de l’Église comme Famille de Dieu,[2] ont été les résultats les plus visibles du Synode de 1994. Pour donner à l’Église de Dieu se trouvant sur le continent africain et dans les îles adjacentes, une impulsion nouvelle chargée d’espérance et de charité évangéliques, il m’a semblé nécessaire de convoquer une seconde Assemblée synodale. Soutenues par l’invocation quotidienne de l’Esprit Saint et la prière d’innombrables fidèles, les sessions synodales ont produit des fruits que je souhaiterais transmettre par ce document à l’Église universelle, et particulièrement à l’Église en Afrique,[3] afin qu’elle soit véritablement « sel de la terre » et « lumière du monde » (cf. Mt 5, 13.14).[4] Animée par une « foi opérant par la charité » (cf. Ga 5, 6), l’Église désire apporter des fruits de charité : la réconciliation, la paix et la justice (cf. 1 Co 13, 4-7). C’est là sa mission spécifique.
4. La qualité des interventions des Pères synodaux et des autres personnes qui sont intervenues durant les assises, m’a impressionné. Le réalisme et la clairvoyance de leur contribution ont démontré la maturité chrétienne du continent. Ils n’ont pas eu peur d’affronter la vérité et ils ont cherché sincèrement à réfléchir à des solutions possibles aux problèmes qu’affrontent leurs Églises particulières, et même l’Église universelle. Ils ont constaté aussi que les bénédictions de Dieu, Père de tous, sont innombrables. Dieu n’abandonne jamais son peuple. Il ne me semble pas nécessaire de m’appesantir sur les différentes situations sociopolitiques, ethniques, économiques ou écologiques que vivent quotidiennement les Africains et qui ne peuvent être ignorées. Les Africains savent mieux que quiconque combien, trop souvent malheureusement, ces situations sont difficiles, troublées voire même tragiques. Je rends hommage aux Africains et à tous les chrétiens de ce continent qui les affrontent avec courage et dignité. Ils désirent, avec raison, que cette dignité soit reconnue et respectée. Je puis les assurer que l’Église respecte et aime l’Afrique.
5. Face aux nombreux défis que l’Afrique souhaite relever pour devenir toujours plus une terre de promesses, l’Église pourrait être tentée, comme Israël, par le découragement, mais nos ancêtres dans la foi nous ont montré la juste attitude à avoir. Ainsi Moïse, le serviteur du Seigneur, « par la foi … comme s’il voyait l’Invisible, tint ferme » (Hb 11, 27). L’auteur de la Lettre aux Hébreux nous le rappelle : « La foi est la garantie des biens que l’on espère, la preuve des réalités qu’on ne voit pas » (11, 1). J’exhorte donc l’Église entière à poser sur l’Afrique ce regard de foi et d’espérance. Jésus-Christ, qui nous a invités à être « le sel de la terre » et « la lumière du monde » (Mt 5, 13. 14), nous offre la puissance de l’Esprit pour réaliser toujours mieux cet idéal.
6. Dans ma pensée, la Parole du Christ : « Vous êtes le sel de la terre [… ] vous êtes la lumière du monde », devait être le fil conducteur du Synode et aussi celui de la période post-synodale. En m’adressant à Yaoundé à l’ensemble des fidèles africains, j’avais dit :« À travers Jésus, il y a deux mille ans déjà, Dieu a apporté lui-même le sel et la lumière à l’Afrique. Depuis lors, la semence de sa présence est enfouie dans les profondeurs des cœurs de ce cher continent et elle germe peu à peu au-delà et à travers les aléas de l’histoire humaine de votre continent ».[5]
7. L’Exhortation Ecclesia in Africa a fait sienne « l’idée-force de l’Église-Famille de Dieu », et les Pères synodaux « y ont vu une expression particulièrement appropriée de la nature de l’Église pour l’Afrique. L’image, en effet, met l’accent sur l’attention à l’autre, la solidarité, la chaleur des relations, l’accueil, le dialogue et la confiance ».[6] L’Exhortation invite les familles chrétiennes africaines à devenir des « églises domestiques »[7] pour aider leurs communautés respectives à reconnaître qu’elles appartiennent à un seul et même Corps. Cette image est importante non seulement pour l’Église en Afrique, mais aussi pour l’Église universelle, à l’heure où la famille est menacée par ceux qui veulent une vie sans Dieu. Priver de Dieu le continent africain, ce serait le faire mourir peu à peu en lui enlevant son âme.
8. Dans la tradition vivante de l’Église, en réponse à la sollicitation de l’Exhortation Ecclesia in Africa,[8] voir l’Église comme une famille et une fraternité, c’est restaurer un aspect de son patrimoine. Dans cette réalité où Jésus-Christ, « l’aîné d’une multitude de frères » (Rm 8, 29), a réconcilié tous les hommes avec le Dieu Père (cf. Ep 2, 14-18) et a donné le Saint-Esprit (cf. Jn 20, 22), l’Église devient à son tour porteuse de cette Bonne Nouvelle de la filiation divine de toute personne humaine. Elle est appelée à la transmettre à toute l’humanité, en proclamant le salut réalisé pour nous par le Christ, en célébrant la communion avec Dieu et en vivant la fraternité dans la solidarité.
9. La mémoire de l’Afrique garde le souvenir douloureux des cicatrices laissées par les luttes fratricides entre les ethnies, par l’esclavage et par la colonisation. Aujourd’hui encore, le continent est confronté à des rivalités, à des formes d’esclavage et de colonisation nouvelles. La première Assemblée Spéciale l’avait comparé à la victime des bandits, laissée moribonde au bord du chemin (cf. Lc 10, 25-37). C’est pourquoi on a pu parler de la « marginalisation » de l’Afrique. Une tradition née sur cette terre africaine identifie le bon Samaritain au Seigneur Jésus lui-même et invite à l’espérance. Clément d’Alexandrie écrivait en effet : « Qui, plus que lui, a eu pitié de nous, qui étions pour ainsi dire mis à mort par les puissances du monde des ténèbres, accablés d’une multitude de blessures, de craintes, de désirs, de colères, de chagrins, de mensonges et de plaisirs ? L’unique médecin de ces blessures, c’est Jésus ».[9] Il y a alors de nombreux motifs d’espérance et d’action de grâce. Ainsi par exemple, malgré les grandes pandémies – comme le paludisme, le sida, la tuberculose, etc.- qui déciment sa population et que la médecine cherche toujours plus efficacement à éradiquer, l’Afrique maintient sa joie de vivre, de célébrer la vie qui provient du Créateur dans l’accueil des naissances pour que s’agrandisse le cercle de la famille et de la communauté humaine. Je vois également un motif d’espérance dans le riche patrimoine intellectuel, culturel et religieux dont l’Afrique est dépositaire. Elle désire le préserver, l’explorer davantage et le faire connaître au monde. Il s’agit là d’un apport essentiel et positif.
10. La deuxième Assemblée synodale pour l’Afrique s’est penchée sur le thème de la réconciliation, de la justice et de la paix. La riche documentation qui m’a été remise après les Assises – les Lineamenta, l’Instrumentum laboris, les rapports rédigés avant et après les discussions, les interventions et les comptes rendus des groupes de travail –, invite à « transformer la théologie […] en pastorale, c’est-à-dire en un ministère pastoral très concret, dans lequel les grandes visions de l’Écriture Sainte et de la Tradition sont appliquées à l’œuvre des évêques et des prêtres à un moment et en un lieu déterminés ».[10]
11. C’est donc par souci paternel et pastoral que j’adresse ce document à l’Afrique d’aujourd’hui qui a connu les traumatismes et les conflits que nous savons. L’homme est pétri par son passé, mais il vit et chemine aujourd’hui. Il regarde l’avenir. Comme le reste du monde, l’Afrique vit un choc culturel qui porte atteinte aux fondements millénaires de la vie sociale et rend parfois difficile la rencontre avec la modernité. Dans cette crise anthropologique à laquelle le continent africain est confronté, il pourra trouver des chemins d’espérance en instaurant un dialogue entre les membres des composantes religieuses, sociales, politiques, économiques, culturelles et scientifiques. Il lui faudra alors retrouver et promouvoir une conception de la personne et de son rapport à la réalité fondée sur un renouveau spirituel profond.
12. Dans l’Exhortation Ecclesia in Africa, Jean-Paul II faisait remarquer qu’« en dépit de la civilisation contemporaine du “village global”, en Afrique comme ailleurs dans le monde, l’esprit de dialogue, de paix et de réconciliation est loin d’habiter le cœur de tous les hommes. Les guerres, les conflits, les attitudes racistes et xénophobes dominent encore trop le monde des relations humaines ».[11] L’espérance qui caractérise la vie authentiquement chrétienne, rappelle que l’Esprit Saint est à l’œuvre partout, sur le continent africain aussi, et que les forces de vie, qui naissent de l’amour, l’emportent toujours sur les forces de la mort (cf. Ct 8, 6-7). C’est pourquoi, les Pères synodaux ont vu que les difficultés rencontrées par les pays respectifs et les Églises particulières en Afrique, ne représentaient pas des obstacles empêchant d’avancer, mais défiaient plutôt ce qu’il y a de meilleur en nous : notre imagination, notre intelligence, notre vocation à suivre sans concession les pas de Jésus-Christ, à rechercher Dieu, « Amour éternel et Vérité absolue ».[12] Avec tous les acteurs de la société africaine, l’Église se sent donc appelée à relever ces défis. C’est, en quelque sorte, comme un impératif de l’Évangile.
13. Par ce document, je désire donner les fruits et les encouragements du Synode, et j’invite tous les hommes de bonne volonté à poser sur l’Afrique un regard de foi et de charité, pour l’aider à devenir par le Christ et par l’Esprit Saint, lumière du monde et sel de la terre (cf. Mt 5, 13. 14). Un précieux trésor est présent dans l’âme de l’Afrique où je perçois « le poumon spirituel pour une humanité qui semble en crise de foi et d’espérance »,[13] grâce aux richesses humaines et spirituelles inouïes de ses enfants, de ses cultures aux multiples couleurs, de son sol et de son sous-sol aux immenses ressources. Cependant, pour se tenir debout avec dignité, l’Afrique a besoin d’entendre la voix du Christ qui proclame aujourd’hui l’amour de l’autre, même de l’ennemi, jusqu’au don de sa propre vie, et qui prie aujourd’hui pour l’unité et la communion de tous les hommes en Dieu (cf.
Jn 17, 20-21).
« VOICI, JE FAIS L'UNIVERS NOUVEAU » (Ap 21, 5)
14. Le Synode a permis de discerner les axes majeurs de la mission pour une Afrique désireuse de réconciliation, de justice et de paix. Il revient aux Églises particulières de traduire ces axes en « fermes propos et en lignes d’action concrètes ».[14] En effet, c’est « dans les Églises locales que peuvent se fixer les éléments concrets d’un programme – objectifs et méthodes de travail, formation et valorisation du personnel, recherche des moyens nécessaires – qui permette à l’annonce du Christ d’atteindre les personnes, de vivifier les communautés, et d’agir en profondeur par le témoignage des valeurs évangéliques sur la société et sur la culture »[15] africaines.
AU SERVICE DE LA RÉCONCILIATION ET DE LA PAIX
I. AUTHENTIQUES SERVITEURS DE LA PAROLE DE DIEU
15. Une Afrique qui avance, joyeuse et vivante, manifeste la louange de Dieu. « La gloire de Dieu, c’est l’homme vivant » comme le faisait remarquer saint Irénée, mais il continue : « La vie de l’homme, c’est la vision de Dieu ».[16] C’est pourquoi, aujourd’hui encore, une des tâches essentielles de l’Église est de porter le message de l’Évangile au cœur des sociétés africaines, de conduire vers la vision de Dieu. Comme le sel donne goût aux aliments, ce message fait des personnes qui en vivent, d’authentiques témoins. Tous ceux qui grandissent de cette manière deviennent capables de se réconcilier en Jésus-Christ. Ils deviennent des lumières pour leurs frères. Ainsi, avec les Pères du Synode, j’invite « l’Église […] en Afrique à être témoin dans le service de la réconciliation, de la justice et de la paix, comme “sel de la terre” et “lumière du monde” »,[17] pour que sa vie réponde à cet appel : « Lève-toi, Église en Afrique, famille de Dieu, parce que le Père céleste t’appelle ! ».[18]
16. Il est heureux que Dieu ait permis que le deuxième Synode pour l’Afrique soit célébré juste après celui qui a été consacré à la Parole de Dieu dans la vie et la mission de l’Église. Ce Synode a rappelé l’impérieux devoir du disciple d’écouter le Christ qui appelle à travers sa Parole. Par elle, les fidèles apprennent à entendre le Christ et à se laisser orienter par l’Esprit Saint qui nous révèle le sens de toutes choses (cf. Jn 16, 13). En effet, la « lecture et la méditation de la Parole de Dieu nous enracinent plus profondément dans le Christ et orientent notre ministère de serviteurs de la réconciliation, de la justice et de la paix ».[19] Comme le rappelait ce Synode, « pour devenir ses frères et sœurs, il faut être de “ceux qui écoutent la Parole de Dieu et la mettent en pratique” (Lc 8, 21). Écouter authentiquement, c’est obéir et œuvrer ; faire naître dans la vie la justice et l’amour ; offrir dans l’existence et dans la société, un témoignage conforme à l’appel des prophètes – qui unissait sans cesse Parole de Dieu et vie, foi et rectitude, culte et engagement social ».[20] Écouter et méditer la Parole de Dieu, c’est désirer la laisser pénétrer et former notre vie pour nous réconcilier avec Dieu, pour permettre à Dieu de nous conduire à une réconciliation avec le prochain, chemin nécessaire pour la construction d’une communauté de personnes et de peuples. Sur nos visages et dans nos vies, que la Parole de Dieu prenne vraiment chair !
II. LE CHRIST AU CŒUR DES RÉALITÉS AFRICAINES :
SOURCE DE RÉCONCILIATION DE JUSTICE ET DE PAIX
17. Les trois concepts principaux du thème synodal, à savoir la réconciliation, la justice et la paix, ont mis le Synode face à sa « responsabilité théologique et sociale »,[21] et ont permis de s’interroger aussi sur le rôle public de l’Église et sa place dans l’espace africain d’aujourd’hui.[22] « On pourrait dire que réconciliation et justice sont les deux présupposés essentiels de la paix et qu’ils définissent également dans une certaine mesure sa nature ».[23] La tâche qu’il nous faut préciser, n’est pas aisée, car elle se situe entre l’engagement immédiat en politique – qui ne relève pas de la compétence directe de l’Église – et le repli ou l’évasion possible dans des théories théologiques et spirituelles ; celles-ci risquant de constituer une fuite face à une responsabilité concrète dans l’histoire humaine.
18. « Je vous laisse la paix, c’est ma paix que je vous donne », dit le Seigneur, qui ajoute « non pas comme le monde la donne » (Jn 14, 27). La paix des hommes qui s’obtient sans la justice est illusoire et éphémère. La justice des hommes qui ne prend pas sa source dans la réconciliation par la « vérité de l’amour » (Ep 4, 15) demeure inachevée ; elle n’est pas authentiquement justice. C’est l’amour de la vérité, – « la vérité tout entière » à laquelle l’Esprit seul peut nous conduire (cf. Jn 16, 13) –, qui trace le chemin que toute justice humaine doit emprunter pour aboutir à la restauration des liens de fraternité dans la « famille humaine, communauté de paix »,[24] réconciliée avec Dieu par le Christ. La justice n’est pas désincarnée. Elle s’ancre nécessairement dans la cohérence humaine. Une charité qui ne respecte pas la justice et le droit de tous, est erronée. J’encourage donc les chrétiens à devenir exemplaires en matière de justice et de charité (Mt 5, 19-20).
A. « LAISSEZ-VOUS RÉCONCILIER AVEC DIEU » (2 Co 5, 20b)
19. « La réconciliation est un concept et une réalité pré-politiques, qui précisément pour cette raison, est de la plus grande importance pour la tâche politique elle-même. Si l’on ne crée pas dans les cœurs la force de la réconciliation, le présupposé intérieur manque à l’engagement politique pour la paix. Les membres du Synode se sont engagés en vue de cette purification intérieure de l’homme qui constitue la condition préliminaire essentielle à l’édification de la justice et de la paix. Mais cette purification et cette maturation intérieure vers une véritable humanité ne peuvent exister sans Dieu ».[25]
20. En effet, c’est la grâce de Dieu qui nous donne un cœur nouveau et qui nous réconcilie avec lui et avec les autres.[26] C’est le Christ qui a rétabli l’humanité dans l’amour du Père. La réconciliation prend donc sa source dans cet amour ; elle naît de l’initiative du Père de renouer la relation avec l’humanité, relation rompue par le péché de l’homme. En Jésus-Christ, « dans sa vie et dans son ministère, mais, spécialement, dans sa mort et sa résurrection, l’Apôtre Paul avait vu Dieu réconcilier le monde (toutes les choses sous le ciel et sur la terre) avec lui-même, ne tenant plus compte des fautes des hommes (cf. 2 Co 5, 19 ; Rm 5, 10 ; Col 1, 21-22). L’Apôtre avait vu Dieu réconcilier les Juifs et les Gentils avec lui-même, créant un homme nouveau à la place des deux peuples
(cf. Ep 2, 15 ; 3, 6). Ainsi, l’expérience de la réconciliation établit la communion à deux niveaux : d’une part la communion entre Dieu et les hommes, et d’autre part, du fait que l’expérience de réconciliation nous fait aussi (nous, l’humanité réconciliée) “ambassadeurs de réconciliation”, elle rétablit également la communion entre les hommes ».[27] « Ainsi, la réconciliation ne se limite pas au dessein de Dieu de ramener à lui dans le Christ l’humanité séparée et souillée par le péché, à travers le pardon des fautes et par amour. C’est aussi la restauration des relations entre les hommes au moyen de la résolution des différends et la suppression des obstacles à leurs relations grâce à leur expérience de l’amour de Dieu ».[28] La parabole de l’enfant prodigue l’illustre quand l’Évangéliste nous présente dans le retour du fils cadet, c’est-à-dire dans sa conversion, le besoin de se réconcilier, d’un côté, avec son père et, de l’autre, avec son frère aîné par la médiation du père
(cf. Lc 15, 11-32). Des témoignages émouvants de fidèles d’Afrique, « des témoignages de souffrance et de réconciliation concrète dans les tragédies de l’histoire récente du continent »[29] ont montré la puissance de l’Esprit qui transforme les cœurs des victimes et de leurs bourreaux pour rétablir la fraternité.[30]
21. De fait, seule une authentique réconciliation engendre une paix durable dans la société. Ses protagonistes sont certes les autorités gouvernementales et les chefs traditionnels, mais également les simples citoyens. Après un conflit, la réconciliation souvent menée et accomplie dans le silence et la discrétion restaure l’union des cœurs et la coexistence sereine. Grâce à elle, après de longues périodes de guerre, des nations retrouvent la paix, des sociétés profondément blessées par la guerre civile ou le génocide reconstruisent leur unité. C’est en donnant et en accueillant le pardon[31] que les mémoires blessées des personnes ou des communautés ont pu guérir et que des familles jadis divisées ont retrouvé l’harmonie. « La réconciliation surmonte les crises, restaure la dignité des personnes et ouvre la voie au développement et à la paix durable entre les peuples à tous les niveaux »,[32] ont tenu à souligner les Pères du Synode.
Pour devenir effective, cette réconciliation devra être accompagnée par un acte courageux et honnête : la recherche des responsables de ces conflits, de ceux qui ont commandité les crimes et qui se livrent à toutes sortes de trafics, et la détermination de leur responsabilité. Les victimes ont droit à la vérité et à la justice. Il est important actuellement et pour l’avenir de purifier la mémoire afin de construire une société meilleure où de telles tragédies ne se répètent plus.
B. DEVENIR JUSTES ET CONSTRUIRE UN ORDRE SOCIAL JUSTE
22. Il ne fait pas de doute que la construction d’un ordre social juste relève de la compétence de la sphère politique.[33] Cependant, une des tâches de l’Église en Afrique consiste à former des consciences droites et réceptives aux exigences de la justice pour que grandissent des hommes et des femmes soucieux et capables de réaliser cet ordre social juste par leur conduite responsable. Le modèle par excellence à partir duquel l’Église pense et raisonne, et qu’elle propose à tous, c’est le Christ.[34] Selon sa doctrine sociale, « l’Église n’a pas de solutions techniques à offrir et ne prétend “aucunement s’immiscer dans la politique des États”. Elle a toutefois une mission de vérité à remplir […] une mission impérative. Sa doctrine sociale est un aspect particulier de cette annonce : c’est un service rendu à la vérité qui libère ».[35]
23. Grâce aux Commissions Justice et Paix, l’Église s’est engagée dans la formation civique des citoyens et dans l’accompagnement du processus électoral en différents pays. Elle contribue ainsi à l’éducation des populations et à l’éveil de leur conscience et de leur responsabilité civiques. Ce rôle éducatif particulier est apprécié par un grand nombre de pays qui reconnaissent l’Église comme un artisan de paix, un agent de réconciliation, et un héraut de la justice. Il est bon de répéter que, tout en distinguant le rôle des Pasteurs et celui des fidèles laïcs, la mission de l’Église n’est pas d’ordre politique.[36] Sa fonction est d’éduquer le monde au sens religieux en proclamant le Christ. L’Église désire être le signe et la sauvegarde de la transcendance de la personne humaine. Elle doit aussi éduquer les hommes à rechercher la vérité suprême face à ce qu’ils sont et à leurs interrogations pour trouver des solutions justes à leurs problèmes.[37]
1. VIVRE DE LA JUSTICE DU CHRIST
24. Sur le plan social, la conscience humaine est interpellée par de graves injustices existant dans notre monde, en général, et à l’intérieur de l’Afrique, en particulier. La confiscation des biens de la terre par une minorité au détriment de peuples entiers, est inacceptable parce qu’immorale. La justice oblige à « donner à chacun son bien propre » – ius suum unicuique tribuere.[38] Il s’agit donc de rendre justice aux peuples. L’Afrique est capable d’assurer à tous les individus et à toutes les nations du continent les conditions élémentaires qui permettent de participer au développement.[39] Les Africains pourront ainsi mettre les talents et les richesses que Dieu leur a donnés au service de leur terre et de leurs frères. La justice, vécue dans toutes les dimensions de la vie, privée et publique, économique et sociale, a besoin d’être soutenue par la subsidiarité et la solidarité, et encore plus d’être animée par la charité. « Selon le principe de subsidiarité, ni l’État ni aucune société plus vaste ne doivent se substituer à l’initiative et à la responsabilité des personnes et des corps intermédiaires ».[40] La solidarité est garante de la justice et de la paix, de l’unité donc, de sorte que « l’abondance des uns supplée au manque des autres ».[41] Et la charité qui assure le lien avec Dieu, va plus loin que la justice distributive. Car si « la justice est la vertu qui distribue à chacun son bien propre […] ce n’est pas la justice de l’homme celle qui soustrait l’homme au vrai Dieu ».[42]
25. Dieu lui-même nous montre la véritable justice quand, par exemple, nous voyons Jésus entrer dans la vie de Zachée et offrir ainsi au pécheur la grâce de sa présence (cf. Lc 19, 1-10). Quelle est donc cette justice du Christ ? Les témoins de cette rencontre avec Zachée observent Jésus
(cf. Lc 19, 7) ; leur murmure désapprobateur se veut une expression de l’amour de la justice. Ils ignorent cependant la justice de l’amour qui s’ouvre jusqu’à l’extrême, jusqu’à faire passer en soi la « malédiction » due aux humains, pour qu’ils reçoivent en échange la « bénédiction » qui est le don de Dieu (cf. Ga 3, 13-14). La justice divine offre à la justice humaine, toujours limitée et imparfaite, l’horizon vers lequel elle doit tendre pour s’accomplir. Elle nous fait prendre conscience en outre, de notre propre indigence, de l’exigence du pardon et de l’amitié de Dieu. C’est ce que nous vivons dans les sacrements de la Pénitence et de l’Eucharistie qui découlent de l’action du Christ. Cette action nous introduit dans une justice où nous recevons bien plus que nous n’étions en droit d’attendre car, dans le Christ, la charité est le résumé de la Loi (cf. Rm 13, 8-10).[43] Par le Christ, unique modèle, le juste est invité à entrer dans l’ordre de l’amour-agapê.
2. CRÉER UN ORDRE JUSTE DANS LA LOGIQUE DES BÉATITUDES
26. Le disciple du Christ, uni à son Maître, doit contribuer à former une société juste où tous pourront participer activement avec leurs propres talents à la vie sociale et économique. Ils pourront donc gagner ce qui leur est nécessaire pour vivre selon leur dignité humaine dans une société où la justice sera vivifiée par l’amour.[44] Le Christ ne propose pas une révolution de type social ou politique, mais celle de l’amour, réalisée dans le don total de sa personne par sa mort sur la Croix et sa Résurrection. Sur cette révolution de l’amour se fondent les Béatitudes (Mt 5, 3-12). Elles fournissent un nouvel horizon de justice inauguré dans le mystère pascal et grâce auquel nous pouvons devenir justes et construire un monde meilleur. La justice de Dieu, que nous révèlent les Béatitudes, élève les humbles et abaisse ceux qui s’élèvent. Elle se réalise en plénitude, il est vrai, dans le Royaume de Dieu qui se réalisera à la fin des temps. Mais la justice de Dieu se manifeste, d’ores et déjà, là où les pauvres sont consolés et admis au festin de la vie.
27. Selon la logique des Béatitudes, une attention préférentielle doit être portée au pauvre, à l’affamé, au malade – par exemple du sida, de la tuberculose ou du paludisme –, à l’étranger, à l’humilié, au prisonnier, au migrant méprisé, au réfugié ou au déplacé, etc. – (cf. Mt 25, 31-46). La réponse à leurs besoins dans la justice et la charité dépend de tous. L’Afrique attend cette attention de toute la famille humaine comme d’elle-même.[45] Elle devra cependant commencer par introduire en son propre sein, de manière résolue, la justice politique, sociale et administrative, éléments de la culture politique nécessaire au développement et à la paix. Pour sa part, l’Église apportera sa contribution spécifique s’appuyant sur l’enseignement des Béatitudes.
C. L’AMOUR DANS LA VÉRITÉ : SOURCE DE PAIX
28. La perspective sociale qu’illustre l’agir du Christ, fondé sur l’amour, transcende le minimum qu’exige la justice humaine : c’est-à-dire que l’on donne à l’autre ce qui lui revient. La logique interne de l’amour dépasse cette justice et va jusqu’à donner ce que l’on possède :[46] « N’aimons ni de mots ni de langue, mais en actes et en vérité » (1 Jn 3, 18). À l’image de son Maître, le disciple du Christ ira plus loin encore, jusqu’au don de lui-même pour ses frères (cf. 1 Jn 3, 16). C’est le prix de la paix authentique en Dieu (cf. Ep 2, 14).
29. Aucune société, même développée, ne peut se passer du service fraternel animé par l’amour. « Celui qui veut s’affranchir de l’amour se prépare à s’affranchir de l’homme en tant qu’homme. Il y aura toujours de la souffrance, qui réclame consolation et aide. Il y aura toujours de la solitude. De même, il y aura toujours des situations de nécessité matérielle, pour lesquelles une aide est indispensable, dans le sens d’un amour concret pour le prochain ».[47] C’est l’amour qui apaise les cœurs blessés, esseulés, abandonnés. C’est l’amour qui engendre la paix ou la rétablit dans le cœur humain et l’instaure entre les hommes.
2. L’ÉGLISE COMME UNE SENTINELLE
30. Dans la situation actuelle de l’Afrique, l’Église est appelée à faire entendre la voix du Christ. Elle désire suivre la recommandation de Jésus à Nicodème qui s’interrogeait sur la possibilité de renaître : « Il vous faut naître d’en-haut » (Jn 3, 7). Les missionnaires ont proposé aux Africains cette nouvelle naissance « d’eau et d’esprit » (Jn 3, 5), une Bonne Nouvelle que toute personne a le droit d’entendre afin de réaliser pleinement sa vocation.[48] L’Église en Afrique vit de cet héritage. À cause du Christ et par fidélité à sa leçon de vie, elle se sent poussée à être présente là où l’humanité connaît la souffrance et à se faire l’écho du cri silencieux des innocents persécutés, ou des peuples dont des gouvernants hypothèquent le présent et l’avenir au nom d’intérêts personnels.[49] Par sa capacité à reconnaître le visage du Christ dans celui de l’enfant, du malade, du souffrant ou du nécessiteux, l’Église contribue à forger lentement mais sûrement l’Afrique nouvelle. Dans son rôle prophétique, chaque fois que les peuples crient vers elle: « Veilleur, où en est la nuit ? » (Is 21, 11), l’Église désire être prête à rendre raison de l’espérance qu’elle porte en elle (cf. 1 P 3, 15) car une aube nouvelle pointe à l’horizon (cf. Ap 22, 5). Seul le refus de la déshumanisation de l’homme, et de la compromission – par crainte de l’épreuve ou du martyre – servira la cause de l’Évangile de vérité. « Dans le monde, dit le Christ, vous aurez à souffrir. Mais gardez courage ! J’ai vaincu le monde ! » (Jn 16, 33). La paix authentique vient du Christ (cf. Jn 14, 27). Elle n’est donc pas comparable à celle du monde. Elle n’est pas le fruit de négociations et d’accords diplomatiques fondés sur des intérêts. C’est la paix de l’humanité réconciliée avec elle-même en Dieu et dont l’Église est le sacrement.[50]
LES CHANTIERS POUR LA RÉCONCILIATION, LA JUSTICE ET LA PAIX
31. À ce point, je souhaite indiquer quelques chantiers que les Pères du Synode ont identifiés pour la mission actuelle de l’Église dans son souci d’aider l’Afrique à s’émanciper des forces qui la paralysent. Le Christ n’a-t-il pas dit tout d’abord au paralytique : « Tes péchés te sont remis » et puis « Lève toi ! » (Lc 5, 20. 24) ?
I. L’ATTENTION À LA PERSONNE HUMAINE
A. LA METANOIA : UNE AUTHENTIQUE CONVERSION
32. La préoccupation majeure des membres du Synode, face à la situation du continent, a été de chercher comment mettre dans le cœur des Africains disciples du Christ la volonté de s’engager effectivement à vivre l’Évangile dans leur vie et dans la société. Le Christ appelle constamment à la metanoia, à la conversion.[51] Les chrétiens sont marqués par l’esprit et les habitudes de leur époque et de leur milieu. Mais par la grâce de leur baptême, ils sont invités à renoncer aux tendances nocives dominantes et à aller à contre-courant. Un tel témoignage exige un engagement résolu dans « une conversion continue vers le Père, source de toute vraie vie, l’unique capable de nous délivrer du mal, de toute tentation et de nous maintenir dans son Esprit, au sein même du combat contre les forces du mal ».[52] Cette conversion n’est possible qu’en s’appuyant sur des convictions de foi consolidées par une catéchèse authentique. Il convient donc de « maintenir un lien vivant entre le catéchisme mémorisé et la catéchèse vécue, pour conduire à une conversion de vie profonde et permanente ».[53] La conversion se vit de manière particulière dans le Sacrement de la Réconciliation auquel une attention singulière sera accordée pour en faire une véritable « école du cœur ». À cette école, le disciple du Christ se forge, peu à peu, une vie chrétienne adulte, attentive aux dimensions théologales et morales de ses actes, et il devient ainsi capable de « faire face aux difficultés de la vie sociale, politique, économique et culturelle »[54] par une vie empreinte de l’esprit évangélique. La contribution des chrétiens en Afrique ne sera décisive que si l’intelligence de la foi aboutit à l’intelligence de la réalité.[55] Pour cela, l’éducation à la foi est indispensable, sinon le Christ ne sera qu’un nom supplémentaire accolé à nos théories. La parole et le témoignage de vie vont de pair.[56] Mais le témoignage seul ne suffit pas non plus, car « le plus beau témoignage se révélera à la longue impuissant s’il n’est pas éclairé, justifié – ce que Pierre appelait donner “les raisons de son espérance” (1 P 3, 15) –, explicité par une annonce claire, sans équivoque, du Seigneur Jésus ».[57]
B. VIVRE LA VÉRITÉ DU SACREMENT DE LA PÉNITENCE ET DE LA RÉCONCILIATION
33. Les membres du Synode ont, en outre, souligné qu’un grand nombre de chrétiens en Afrique adoptent une attitude ambiguë face à la célébration du Sacrement de la Réconciliation, alors que ces mêmes chrétiens sont souvent très scrupuleux dans l’application des rites traditionnels de réconciliation. Pour aider le fidèle catholique à vivre une authentique démarche de metanoia dans la célébration de ce Sacrement, où la mentalité tout entière se réoriente vers la rencontre avec le Christ,[58] il serait bon que les Évêques fassent étudier sérieusement les cérémonies traditionnelles africaines de réconciliation pour en évaluer les aspects positifs et les limites. Car ces médiations pédagogiques traditionnelles[59] ne peuvent, en aucun cas, remplacer le Sacrement. L’Exhortation apostolique post-synodale Reconciliatio et Paenitentia du Bienheureux Pape Jean-Paul II a clairement rappelé quels étaient le ministre et les formes du Sacrement de la Pénitence et de la Réconciliation.[60] Ces médiations pédagogiques traditionnelles peuvent uniquement contribuer à réduire la déchirure ressentie et vécue par certains fidèles en les aidant à s’ouvrir avec plus de profondeur et de vérité au Christ, l’Unique grand Médiateur, pour recevoir la grâce du Sacrement de Pénitence. Célébré dans la foi, ce Sacrement est suffisant pour nous réconcilier avec Dieu et avec le prochain.[61] C’est en définitive Dieu qui, en son Fils, nous réconcilie avec Lui et avec les autres.
C. UNE SPIRITUALITÉ DE COMMUNION
34. La réconciliation n’est pas un acte isolé mais un long processus grâce auquel chacun se voit rétabli dans l’amour, un amour qui guérit par l’action de la Parole de Dieu. Elle devient alors une manière de vivre, en même temps qu’une mission. Pour réussir une véritable réconciliation, et mettre en œuvre la spiritualité de communion par la réconciliation, l’Église a besoin de témoins qui soient profondément enracinés dans le Christ, et qui se nourrissent de sa Parole et des Sacrements. Ainsi, tendus vers la sainteté, ces témoins sont capables de s’investir dans l’œuvre de communion de la Famille de Dieu en communiquant au monde, au besoin jusqu’au martyre, l’esprit de réconciliation, de justice et de paix, à l’exemple du Christ.
35. Je voudrais rappeler ce que le Pape Jean-Paul II proposait à toute l’Église comme conditions d’une spiritualité de communion :être capable de percevoir la lumière du mystère de la Trinitésur le visage des frères qui sont à nos côtés ;[62] se montrer attentif, « dans l’unité profonde du Corps mystique, à son frère dans la foi, le considérant donc comme “l’un des nôtres”, pour partager ses joies et ses souffrances, pour deviner ses désirs et répondre à ses besoins, pour lui offrir une amitié vraie et profonde » ;[63]être capable en outre de reconnaître ce qu’il y a de positif dans l’autre pour l’accueillir et le valoriser comme un don que Dieu me fait à travers celui qui l’a reçu, bien au-delà de sa personne qui devient alors un intendant des grâces divines ; enfin « savoir “donner une place” à son frère, en portant “les fardeaux les uns des autres” (Ga 6, 2) et en repoussant les tentations égoïstes qui continuellement nous tendent des pièges et qui provoquent compétition, carriérisme, défiance, jalousies ».[64]
Ainsi mûrissent des hommes et des femmes de foi et de communion faisant preuve de courage dans la vérité et l’abnégation, et illuminés par la joie. Ils donnent alors un témoignage prophétique d’une vie cohérente avec leur foi. Marie, Mère de l’Église, qui a su accueillir la Parole de Dieu, est leur modèle : par son écoute de la Parole, elle a su entendre les besoins des hommes et intercéder pour eux dans sa compassion.[65]
D. L’INCULTURATION DE L'ÉVANGILE ET L'ÉVANGÉLISATION DE LA CULTURE
36. Pour réaliser cette communion, il serait bon de revenir sur une nécessité évoquée lors de la première Assemblée synodale pour l’Afrique : une étude approfondie des traditions et des cultures africaines. Les membres du Synode ont constaté l’existence d’une dichotomie entre certaines pratiques traditionnelles des cultures africaines et les exigences spécifiques du message du Christ. Le souci de la pertinence et de la crédibilité impose à l’Église un discernement approfondi pour identifier les aspects de la culture qui font obstacle à l’incarnation des valeurs de l’Évangile, tout comme ceux qui les promeuvent.[66]
37. Cependant, il ne faut pas oublier que l’Esprit Saint est l’authentique protagoniste de l’inculturation, « c’est lui qui préside de manière féconde au dialogue entre la Parole de Dieu, qui s’est révélée dans le Christ, et les requêtes les plus profondes qui jaillissent de la multiplicité des hommes et des cultures. Ainsi se poursuit dans l’histoire, dans l’unité d’une même et unique foi, l’événement de la Pentecôte, qui s’enrichit à travers la diversité des langages et des cultures ».[67] L’Esprit Saint fait que l’Évangile soit capable d’imprégner toutes les cultures, sans se laisser asservir par aucune.[68] Les Évêques auront à cœur de veiller à cette exigence d’inculturation dans le respect des normes fixées par l’Église. Discerner quels éléments culturels et quelles traditions sont contraires à l’Évangile permettra de pouvoir séparer le bon grain de l’ivraie (cf. Mt 13, 26). Tout en restant pleinement lui-même, dans l’absolue fidélité à l’annonce évangélique et à la tradition ecclésiale, le christianisme revêtira ainsi le visage des innombrables cultures et des peuples où il est accueilli et enraciné. L’Église deviendra alors une icône de l’avenir que l’Esprit de Dieu nous prépare,[69] icône à laquelle l’Afrique apportera sa contribution propre. Dans cette œuvre d’inculturation, il ne convient pas d’oublier la tâche, elle aussi essentielle, de l’évangélisation du monde de la culture contemporaine africaine.
38. Les initiatives de l’Église dans l’appréciation positive et la sauvegarde des cultures africaines sont connues. Il est très important de poursuivre cette tâche, à l’heure où le brassage des peuples, tout en constituant un enrichissement, fragilise souvent les cultures et les sociétés. L’identité des communautés africaines se joue dans ces rencontres interculturelles. Il faut donc s’engager à transmettre les valeurs que le Créateur a insufflées dans les cœurs des Africains depuis la nuit des temps. Elles ont servi de matrice pour façonner des sociétés vivant dans une certaine harmonie, car portant en leur sein des modes traditionnels de régulation pour une coexistence pacifique. Il s’agit donc de mettre en valeur ces éléments positifs, en les illuminant de l’intérieur (cf. Jn 8, 12) pour que le chrétien soit effectivement rejoint par le message du Christ, et pour qu’ainsi la lumière de Dieu puisse briller aux yeux des hommes. Alors, voyant les bonnes actions des chrétiens, les hommes et les femmes pourront glorifier « le Père qui est dans les cieux » (Mt 5, 16).
E. LE DON DU CHRIST : L’EUCHARISTIE ET LA PAROLE DE DIEU
39. Au-delà des différences d’origine ou de culture, le grand défi qui nous attend tous, est de discerner dans la personne humaine, aimée de Dieu, le fondement d’une communion qui respecte et intègre les contributions particulières des diverses cultures.[70] Nous « devons ouvrir réellement ces frontières entre tribus, ethnies, religions à l’universalité de l’amour de Dieu ».[71] Des hommes et des femmes différents par l’origine, la culture, la langue ou la religion, peuvent vivre ensemble harmonieusement.
40. En effet, le Fils de Dieu a dressé sa tente parmi nous ; il a versé son Sang pour nous. Conformément à sa promesse d’être avec nous jusqu’à la fin des temps (cf. Mt 28, 20), il se donne à nous chaque jour comme nourriture dans l’Eucharistie et dans les Écritures. J’ai écrit dans l’Exhortation apostolique post-synodale Verbum Domini, que « la Parole et l’Eucharistie sont corrélées intimement au point de ne pouvoir être comprises l’une sans l’autre: la Parole de Dieu se fait chair sacramentelle dans l’événement eucharistique. L’Eucharistie nous ouvre à l’intelligence de la Sainte Écriture, comme la Sainte Écriture illumine et explique à son tour le Mystère eucharistique ».[72]
41. L’Écriture Sainte atteste en effet que le Sang versé du Christ devient, par le baptême, le principe et le lien d’une nouvelle fraternité. Celle-ci est à l’opposé de la division, du tribalisme, du racisme, de l’ethnocentrisme, etc. (cf. Ga 3, 26-28). L’Eucharistie est la force qui rassemble les enfants de Dieu dispersés et les maintient dans la communion,[73] « puisque dans nos veines circule le même Sang du Christ, qui fait de nous les fils de Dieu, membres de la Famille de Dieu ».[74] Recevant Jésus dans l’Eucharistie et l’Écriture, nous sommes renvoyés au monde pour lui offrir le Christ en nous mettant au service des autres (cf. Jn 13, 15 ; 1 Jn 3, 16).[75]
42. La famille est le « sanctuaire de la vie » et une cellule vitale de la société et de l’Église. C’est en elle que « se modèle de manière primordiale le visage d’un peuple ; c’est là que ses membres reçoivent les acquis fondamentaux ; ils apprennent à aimer en étant aimés gratuitement ; ils apprennent le respect de toute autre personne en étant respectés ; ils apprennent à connaître le visage de Dieu en en recevant la première révélation d’un père et d’une mère pleins d’attentions. Chaque fois que ces expériences fondatrices font défaut, c’est l’ensemble de la société qui souffre violence et qui engendre à son tour de multiples violences ».[76]
43. La famille est bien le lieu propice pour l’apprentissage et la pratique de la culture du pardon, de la paix et de la réconciliation. « Dans une saine vie familiale, on fait l’expérience de certaines composantes fondamentales de la paix : la justice et l’amour entre frères et sœurs, la fonction d’autorité manifestée par les parents, le service affectueux envers les membres les plus faibles parce que petits, malades ou âgés, l’aide mutuelle devant les nécessités de la vie, la disponibilité à accueillir l’autre et, si nécessaire, à lui pardonner. C’est pourquoi, la famille est la première et irremplaçable éducatrice à la paix ».[77] En raison de son importance capitale et des menaces qui pèsent sur cette institution – la distorsion de la notion de mariage et de famille elle-même, la dévaluation de la maternité et la banalisation de l’avortement, la facilitation du divorce et le relativisme d’une « nouvelle éthique » – la famille a besoin d’être protégée et défendue,[78] pour qu’elle rende à la société le service qu’elle attend d’elle, c’est-à-dire lui donner des hommes et des femmes capables d’édifier un tissu social de paix et d’harmonie.
44. J’encourage donc vivement les familles à puiser inspiration et force dans le Sacrement de l’Eucharistie, afin de vivre la nouveauté radicale apportée par le Christ au cœur des conditions communes de l’existence, amenant chacun à être un témoin rayonnant dans son milieu de travail et dans la société tout entière. « L’amour entre l’homme et la femme, l’accueil de la vie, la tâche éducative, se révèlent être des lieux privilégiés où l’Eucharistie peut manifester sa capacité de transformer et de porter l’existence à sa plénitude de sens ».[79] Il apparaît clairement que participer à l’Eucharistie dominicale est requis par la conscience chrétienne et en même temps forme celle-ci.[80]
45. Par ailleurs, donner en famille toute sa place à la prière, personnelle et communautaire, signifie respecter un principe essentiel de la vision chrétienne de la vie : le primat de la grâce. La prière nous rappelle constamment le primat du Christ, et, en lien avec lui, le primat de la vie intérieure et de la sainteté. Le dialogue avec Dieu ouvre le cœur au flot de la grâce et permet à la Parole du Christ de passer à travers nous avec toute sa force ! Pour cela, l’écoute assidue et la lecture attentive de l’Écriture Sainte au sein des familles sont nécessaires.[81]
46. De plus « la mission éducative de la famille chrétienne [est] un vrai ministère, grâce auquel l’Évangile est transmis et diffusé, à tel point que la vie familiale dans son ensemble devient chemin de foi et en quelque sorte initiation chrétienne ou école de vie à la suite du Christ. Dans la famille, consciente d’un tel don, comme l’a écrit Paul VI, “tous les membres de la famille évangélisent et sont évangélisés”. En vertu de ce ministère d’éducation, les parents, à travers leur témoignage de vie, sont les premiers hérauts de l’Évangile auprès de leurs enfants. […]Ils deviennent pleinement parents en ce sens qu’ils engendrent non seulement à la vie selon la chair mais aussi à celle qui, à travers la renaissance dans l’Esprit, jaillit de la Croix et de la Résurrection du Christ ».[82]
47. En Afrique, les personnes âgées sont entourées d’une vénération particulière. Elles ne sont pas bannies des familles ou marginalisées comme dans d’autres cultures. Au contraire, elles sont estimées et parfaitement intégrées dans leur famille dont elles constituent le sommet. Cette belle réalité africaine devrait inspirer les sociétés occidentales afin qu’elles accueillent la vieillesse avec plus de dignité. La Sainte Écriture parle des personnes âgées avec fréquence. « La couronne des vieillards, c’est une riche expérience, leur fierté, c’est la crainte de Dieu » (Eccl. 25, 6). La vieillesse, malgré la fragilité qui semble la caractériser, est un don qu’il convient de vivre quotidiennement dans la disponibilité sereine envers Dieu et le prochain. C’est aussi le temps de la sagesse, car le temps vécu a appris la grandeur et la précarité de la vie. Et, en homme de foi, le vieillard Siméon proclame avec enthousiasme et sagesse non pas un adieu angoissé à la vie, mais une action de grâce au Sauveur du monde (cf. Lc 2, 25-32).
48. C’est à cause de cette sagesse, parfois chèrement acquise, que les personnes âgées peuvent agir sur la famille de diverses manières. Leur expérience les conduit naturellement non seulement à combler le fossé intergénérationnel, mais encore à affirmer la nécessité de l’interdépendance humaine.
Elles sont un trésor pour toutes les composantes de la famille, surtout pour les jeunes couples et les enfants qui trouvent chez elles compréhension et amour. N’ayant pas uniquement transmis la vie, elles contribuent par leur comportement à consolider leur famille (cf. Tt 2, 2-5) et, par leur prière et leur vie de foi, à enrichir spirituellement tous les membres de leur famille et la communauté.
49. Très souvent encore en Afrique, la stabilité et l’ordre social sont confiés à un conseil d’anciens ou à des Chefs traditionnels. Les personnes âgées peuvent contribuer par ce biais de manière efficace à l’édification d’une société plus juste qui va de l’avant, non pas grâce à des expériences, parfois hasardeuses, mais graduellement et avec un équilibre prudent. Les personnes âgées pourront ainsi participer à la réconciliation des personnes et des communautés par leur sagesse et leur expérience.
50. L’Église regarde les personnes âgées avec grande estime. Avec le bienheureux Jean-Paul II, je désire vous redire : « L’Église a besoin de vous, mais la société civile a besoin de vous, elle aussi ! […] Sachez employer généreusement le temps dont vous disposez et les talents que Dieu vous a accordés […] Contribuez à annoncer l’Évangile […] Consacrez du temps et de l’énergie à la
prière […] ».[83]
51. Dans la famille, les hommes ont une mission particulière à remplir. De par leur rôle d’époux et de père, ils exercent la noble responsabilité de donner à la société les valeurs dont elle a besoin à travers la relation conjugale et l’éducation des enfants.
52. Avec les Pères du Synode, j’encourage les hommes catholiques à contribuer vraiment dans leur famille à l’éducation humaine et chrétienne des enfants, à l’accueil et à la protection de la vie dès le moment de sa conception.[84] Je les invite à instaurer un style chrétien de vie, enraciné et fondé dans l’amour (cf. Ep 3, 17). Avec saint Paul, je leur redis : « Aimez vos femmes comme le Christ a aimé l’Église ; il s’est livré pour elle […] ; les maris doivent aimer leurs femmes comme leurs propres corps. Aimer sa femme, c’est s’aimer soi-même. Car nul n’a jamais haï sa propre chair […] on en prend soin. C’est justement ce que le Christ fait pour l’Église » (Ep 5, 25-29). N’ayez pas peur de rendre visible et tangible qu’il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime (cf. Jn 15, 13), c’est-à-dire en premier lieu sa femme et ses enfants. Cultivez une joie sereine dans votre foyer ! Le mariage est un « don du Seigneur », disait saint Fulgence de Ruspe.[85] Votre témoignage rendu à la dignité inviolable de chaque personne humaine sera un antidote efficace pour lutter contre des pratiques traditionnelles qui sont contraires à l’Évangile et qui oppriment particulièrement les femmes.
53. En manifestant et en vivant sur terre la paternité même de Dieu (cf. Ep 3, 15), vous êtes appelés à garantir le développement personnel de tous les membres de la famille, berceau et moyen le plus efficace pour humaniser la société, lieu de rencontre de plusieurs générations.[86] Par la dynamique créatrice de la Parole de Dieu même,[87] que grandisse votre sens des responsabilités, jusqu’à vous engager concrètement dans l’Église ! Celle-ci a besoin de témoins convaincus et efficaces de la foi qui promeuvent la réconciliation, la justice et la paix[88] et apportent leur contribution enthousiaste et courageuse à la transformation du milieu de vie et de la société dans son ensemble. Vous êtes ces témoins par votre travail qui permet d’assurer habituellement votre subsistance et celle de votre famille. Bien plus, par l’hommage de ce travail à Dieu, vous êtes associés à l’œuvre rédemptrice de Jésus-Christ qui a donné au travail une dignité éminente en œuvrant de ses propres mains à Nazareth.[89]
54. La qualité et le rayonnement de votre vie chrétienne dépendent d’une vie de prière profonde, nourrie de la Parole de Dieu et des Sacrements. Soyez donc vigilants à maintenir vivante cette dimension essentielle de votre engagement chrétien ; votre témoignage de foi dans les tâches quotidiennes, votre participation aux mouvements ecclésiaux y trouvent la source de leur dynamisme ! Ce faisant, vous devenez aussi des modèles que les jeunes gens voudront imiter, et vous pouvez ainsi les aider à entrer dans une vie adulte responsable. N’ayez pas peur de leur parler de Dieu et de les introduire, par votre exemple, à la vie de foi et à l’engagement dans les activités sociales ou caritatives, les amenant à découvrir en vérité qu’ils sont créés à l’image et à la ressemblance de Dieu : « Les signes de cette image divine en l’homme peuvent être reconnus, non dans la forme du corps qui se corrompt, mais dans la prudence de l’intelligence, dans la justice, la modération, le courage, la sagesse, l’instruction ».[90]
55. Les femmes en Afrique apportent une grande contribution à la famille, à la société et à l’Église avec leurs nombreux talents et leurs dons irremplaçables. Comme le disait Jean-Paul II : « La femme est celle en qui l’ordre de l’amour dans le monde créé des personnes trouve le lieu de son premier enracinement ».[91] L’Église et la société ont besoin que les femmes aient toute leur place dans le monde « afin que l’être humain puisse y vivre sans se déshumaniser complètement ».[92]
56. S’il est indéniable que des progrès ont été accomplis pour favoriser l’épanouissement et l’éducation de la femme dans certains pays africains, il reste cependant que, dans l’ensemble, sa dignité, ses droits ainsi que son apport essentiel à la famille et à la société ne sont pas pleinement reconnus ni appréciés. Ainsi la promotion des jeunes filles et des femmes est-elle souvent moins favorisée que celle des garçons et des hommes. Trop nombreuses sont encore les pratiques qui humilient les femmes, les avilissent au nom de la tradition ancestrale. Avec les Pères synodaux, j’invite instamment les disciples du Christ à combattre tous les actes de violence contre les femmes, à les dénoncer et à les condamner.[93] Dans ce contexte, il conviendrait que les comportements à l’intérieur même de l’Église soient un modèle pour l’ensemble de la société.
57. Lorsque je me suis rendu en terre africaine, j’ai rappelé fortement qu’il « faut reconnaître, affirmer et défendre l’égale dignité de l’homme et de la femme : tous les deux sont des personnes, à la différence de tout autre être vivant dans le monde autour d’eux ».[94] L’évolution des mentalités en ce domaine est hélas trop lente. L’Église se doit de contribuer à cette reconnaissance et à cette libération de la femme en suivant l’exemple donné par le Christ qui la valorisait (cf. Mt 15, 21-28 ; Lc 7, 36-50 ; 8, 1-3 ; 10, 38-42 ; Jn 4, 7-42). Créer pour elle un espace de prise de parole et d’expression de ses talents par des initiatives qui affermissent sa valeur, son estime de soi et sa spécificité, lui permettrait alors d’occuper dans la société une place égale à celle de l’homme – sans confusion ni nivellement de la spécificité de chacun –, car ils sont tous les deux « image » du Créateur (cf. Gn 1, 27). Puissent les Évêques encourager et promouvoir la formation des femmes pour qu’elles assument « leur propre part de responsabilité et de participation dans la vie communautaire de la société et […] de l’Église ».[95] Elles contribueront ainsi à l’humanisation de la société.
58. Vous, les femmes catholiques, vous vous inscrivez dans la tradition évangélique des femmes qui assistaient Jésus et les apôtres (cf. Lc 8, 3) ! Vous êtes pour les Églises locales comme leur « colonne vertébrale »,[96] car votre nombre, votre présence active et vos organisations sont d’un grand soutien pour l’apostolat de l’Église. Quand la paix est menacée et la justice bafouée, quand la pauvreté est grandissante, vous êtes debout pour défendre la dignité humaine, la famille et les valeurs de la religion. Puisse l’Esprit Saint susciter sans cesse dans l’Église des femmes saintes et courageuses qui apportent leur précieuse contribution spirituelle à la croissance de nos communautés !
59. Chères filles de l’Église, mettez-vous constamment à l’école du Christ comme Marie de Béthanie pour savoir reconnaître sa Parole (cf. Lc 10, 39). Formez-vous au catéchisme et à la Doctrine sociale de l’Église pour vous doter des principes qui vous aideront à agir en véritables disciples. Ainsi vous pourrez vous engager avec discernement dans les différents projets relatifs aux femmes. Continuez de défendre la vie car Dieu vous a constituées réceptacles de la vie. L’Église sera toujours votre soutien. Aidez par vos conseils et votre exemple les jeunes filles afin qu’elles abordent sereinement la vie adulte. Soutenez-vous mutuellement ! Vénérez les plus âgées d’entre vous. L’Église compte sur vous pour créer une « écologie humaine »[97] par l’amour et la tendresse, l’accueil et la délicatesse, et enfin la miséricorde, valeurs que vous savez inculquer aux enfants et dont le monde a tant besoin. Ainsi, par la richesse de vos dons proprement féminins,[98] vous favoriserez la réconciliation des hommes et des communautés.
60. Les jeunes constituent en Afrique la majorité de la population. Cette jeunesse est un don et un trésor de Dieu dont toute l’Église est reconnaissante au Maître de la vie.[99] Il faut aimer cette jeunesse, l’estimer et la respecter. Elle « aspire profondément, malgré de possibles ambiguïtés, aux valeurs authentiques qui ont dans le Christ leur plénitude. Le Christ n’est-il pas le secret de la vraie liberté et de la joie profonde du cœur ? Le Christ n’est-il pas l’ami suprême et en même temps l’éducateur de toute amitié authentique ? Si le Christ est présenté aux jeunes avec son vrai visage, ils le voient comme une réponse convaincante et ils sont capables de recevoir son message, même s’il est exigeant et marqué par la Croix ».[100]
61. En pensant aux jeunes, j’avais écrit dans l’Exhortation apostolique post-synodale Verbum Domini : « C’est durant la période de la jeunesse qu’émergent de façon irrépressible et sincère les questions sur le sens de la vie personnelle et sur l’orientation à donner à sa propre existence. Seul Dieu sait apporter une véritable réponse à ces questions. Cette attention au monde des jeunes implique le courage d’une annonce claire ; nous devons aider les jeunes à acquérir l’intimité et la familiarité avec les Saintes Écritures, pour qu’elle soit comme une boussole qui leur indique la route à suivre. C’est pourquoi ils ont besoin de témoins et de maîtres, qui marchent avec eux et qui les forment à aimer et à communiquer à leur tour l’Évangile surtout aux jeunes de leur âge, devenant ainsi eux-mêmes des annonciateurs authentiques et crédibles ».[101]
62. Dans sa Règle, saint Benoît demande à l’abbé du monastère, d’écouter les plus jeunes, en disant : « Souvent le Seigneur inspire à un plus jeune un avis meilleur ».[102] N’omettons donc pas d’impliquer directement la jeunesse dans la vie de la société et de l’Église, afin qu’elle ne s’abandonne pas à des sentiments de frustration et de rejet devant l’impossibilité de prendre en mains son avenir, particulièrement dans les situations où la jeunesse est rendue vulnérable par le manque de formation, le chômage, l’exploitation politique et toutes sortes d’addictions … .[103]
63. Chers jeunes, des sollicitations de toutes sortes : idéologies, sectes, argent, drogue, sexe facile, violences…, peuvent vous tenter. Soyez vigilants : ceux qui vous font ces propositions veulent détruire votre futur ! En dépit des difficultés, ne vous laissez pas décourager et ne renoncez pas à vos idéaux, à votre application et à votre assiduité dans la formation humaine, intellectuelle et spirituelle ! Pour acquérir le discernement, la force nécessaire et la liberté de résister à ces pressions, je vous encourage à mettre Jésus-Christ au centre de toute votre vie par la prière, mais aussi par l’étude des Saintes Écritures, la pratique des Sacrements, la formation à la Doctrine sociale de l’Église, ainsi que par votre participation active et enthousiaste aux rassemblements et aux mouvements ecclésiaux. Cultivez en vous l’aspiration vers la fraternité, la justice et la paix. L’avenir est entre les mains de ceux qui savent trouver de fortes raisons de vivre et d’espérer. Si vous le voulez, l’avenir est entre vos mains, car les dons que le Seigneur a déposés en chacun de vous, façonnés par la rencontre avec le Christ, peuvent apporter une espérance authentique au monde ![104]
64. Quand il s’agit de vous orienter dans votre choix de vie, quand la question d’une consécration totale se pose à vous – par le sacerdoce ministériel ou la vie consacrée –, appuyez-vous sur le Christ, prenez-le pour modèle, écoutez sa Parole en la méditant régulièrement. Durant l’homélie de la messe inaugurale de mon pontificat, je vous ai exhortés par ces paroles qu’il me semble bon de vous redire car elles sont toujours actuelles : « Celui qui fait entrer le Christ dans sa vie, ne perd rien, rien – absolument rien de ce qui rend la vie libre, belle et grande. Non ! Dans cette amitié seulement s’ouvrent largement les portes de la vie. Dans cette amitié seulement, se libèrent réellement les grandes potentialités de la condition humaine. […] Chers jeunes : n’ayez pas peur du Christ ! Il n’enlève rien, et il donne tout. Celui qui se donne à lui, reçoit le centuple. Oui, ouvrez, ouvrez tout grand les portes au Christ – et vous trouverez la vraie vie ».[105]
65. Tout comme la jeunesse, les enfants sont un don de Dieu à l’humanité, ils doivent donc être l’objet d’un soin particulier de la part de leurs familles, de l’Église, de la société et des gouvernements car ils sont une source d’espérance et de renouvellement dans la vie. Dieu leur est particulièrement proche, et leur vie est précieuse à ses yeux, même lorsque les circonstances semblent contraires ou impossibles (cf. Gn 17, 17-18 ; 18, 12 ; Mt 18, 10).
66. En effet, « en ce qui concerne le droit à la vie, tout être humain innocent est absolument égal à tous les autres. Cette égalité est la base de tous les rapports sociaux authentiques qui, pour être vraiment tels, ne peuvent qu’être fondés sur la vérité et sur la justice, reconnaissant et défendant chaque enfant, chaque homme et chaque femme, comme une personne et non comme une chose dont on peut disposer ».[106]
67. Comment alors ne pas déplorer et dénoncer avec force les traitements intolérables infligés en Afrique à tant d’enfants ?[107] L’Église est Mère et ne saurait les abandonner, quels qu’ils soient. Il nous revient de projeter sur eux la lumière du Christ en leur offrant son amour afin qu’ils s’entendent dire : « Tu comptes beaucoup à mes yeux, tu as du prix et je t’aime » (Is 43, 4). Dieu veut le bonheur et le sourire de tout enfant et sa faveur est avec lui « car c’est à leurs pareils qu’appartient le Royaume de Dieu » (Mc 10, 14).
68. Le Christ Jésus a toujours manifesté sa préférence envers les plus petits (cf. Mc 10, 13-16). L’Évangile lui-même est traversé en profondeur par la vérité sur l’enfant. Que veut dire en effet : « Si vous ne changez pas pour devenir comme les petits enfants, vous n’entrerez point dans le Royaume des cieux » (Mt 18, 3) ? Jésus ne fait-il pas de l’enfant un modèle, même pour les adultes ? Chez l’enfant, il y a quelque chose qui ne doit jamais faire défaut à celui qui veut entrer dans le Royaume des cieux. Le ciel est promis à tous ceux qui sont simples comme les enfants, à tous ceux qui, comme eux, sont remplis d’un esprit d’abandon dans la confiance, purs et riches de bonté. Eux seuls peuvent trouver en Dieu un Père et devenir, grâce à Jésus, des fils de Dieu. Fils et filles de nos parents, Dieu veut que nous soyons tous ses fils adoptifs par grâce ![108]
III. LA VISION AFRICAINE DE LA VIE
69. Dans la vision africaine du monde, la vie est perçue comme une réalité qui englobe et inclut les ancêtres, les vivants et les enfants à naître, toute la création et tous les êtres : ceux qui parlent et ceux qui sont muets, ceux qui pensent et ceux qui n’ont point de pensée. L’univers visible et invisible y est considéré comme un espace de vie des hommes, mais aussi comme un espace de communion où des générations passées côtoient invisiblement les générations présentes, elles-mêmes mères des générations à venir. Cette ample ouverture du cœur et de l’esprit de la tradition africaine vous prédispose, chers frères et sœurs, à entendre et à recevoir le message du Christ et comprendre le mystère de l’Église pour donner toute sa valeur à la vie humaine et aux conditions de son épanouissement.
70. Au nombre des dispositions visant à protéger la vie humaine sur le continent africain, les membres du Synode ont pris en considération les efforts déployés par les institutions internationales
en faveur de certains aspects du développement.[109] Ils ont noté toutefois avec préoccupation l’existence d’un manque de clarté éthique lors des rencontres internationales, voire d’un langage confus véhiculant des valeurs contraires à la morale catholique. L’Église cultive le souci constant du développement intégral de « tout homme et de tout l’homme », comme disait le Pape Paul VI.[110] C’est pourquoi, les Pères synodaux ont tenu à souligner les aspects discutables de certains documents émanant d’organismes internationaux: en particulier ceux concernant la santé reproductive des femmes. La position de l’Église ne souffre aucune ambiguïté quant à l’avortement. L’enfant dans le sein maternel est une vie humaine à protéger. L’avortement, qui consiste à supprimer un innocent non-né, est contraire à la volonté de Dieu, car la valeur et la dignité de la vie humaine doivent être protégées depuis la conception jusqu’à la mort naturelle. L’Église en Afrique et dans les îles voisines doit s’engager à aider et à accompagner les femmes et les couples tentés par l’avortement, et à être proche de ceux qui en ont fait la triste expérience afin de les éduquer au respect de la vie. Elle salue le courage des gouvernements qui ont légiféré contre la culture de mort, dont l’avortement est une expression dramatique, au bénéfice de la culture de la vie.[111]
71. L’Église sait que nombreux sont ceux – individus, associations, bureaux spécialisés ou États –
qui rejettent une doctrine saine à ce sujet. « Nous ne devons pas craindre l’hostilité ou l’impopularité mais refuser tout compromis et toute ambiguïté qui nous conformeraient à la mentalité de ce monde (cf. Rm 12, 2). Nous devons être dans le monde mais non du monde (cf. Jn 15, 19 ; 17, 16), avec la force qui nous vient du Christ, vainqueur du monde par sa mort et sa résurrection (cf. Jn 16, 33) ».[112]
72. Sur la vie humaine en Afrique pèsent de lourdes menaces. Il faut déplorer, comme ailleurs, les ravages de la drogue et les abus de l’alcool qui détruisent le potentiel humain du continent et affligent surtout les jeunes.[113] Le paludisme,[114] ainsi que la tuberculose et le sida, déciment les populations africaines et compromettent gravement leur vie socio-économique. Le problème du sida, en particulier, exige certes une réponse médicale et pharmaceutique. Celle-ci est cependant insuffisante car le problème est plus profond. Il est avant tout éthique. Le changement de comportement qu’il requiert – par exemple : l’abstinence sexuelle, le refus de la promiscuité sexuelle, la fidélité dans le mariage –, pose en dernière analyse la question du développement intégral qui demande une approche et une réponse globales de l’Église. Car pour être effective, la prévention du sida doit s’appuyer sur une éducation sexuelle elle-même fondée sur une anthropologie ancrée dans le droit naturel, et illuminée par la Parole de Dieu et l’enseignement de l’Église.
73. Au nom de la vie – qu’il est du devoir de l’Église de défendre et de protéger – et en union avec les Pères synodaux, je renouvelle mon soutien et je m’adresse à toutes les institutions et à tous les mouvements d’Église qui travaillent dans le domaine de la santé et spécialement du sida. Vous réalisez un travail merveilleux et important. Je demande aux agences internationales de vous reconnaître et de vous aider dans le respect de votre spécificité et dans un esprit de collaboration. J’encourage vivement de nouveau les instituts et les programmes de recherches thérapeutiques et pharmaceutiques en cours pour éradiquer les pandémies. N’épargnez pas vos fatigues pour aboutir au plus vite à des résultats, par amour pour le don précieux de la vie.[115] Puissiez-vous trouver des solutions et rendre accessibles à tous les traitements et les médicaments tenant compte des situations de précarité ! L’Église plaide depuis longtemps pour un traitement médical de haute qualité et au moindre coût pour toutes les personnes concernées.[116]
74. La défense de la vie comporte également l’éradication de l’ignorance par l’alphabétisation des populations et par une éducation qualifiée qui englobe toute la personne. Au long de son histoire, l’Église catholique a prêté une attention particulière à l’éducation. Elle a toujours sensibilisé, encouragé et aidé les parents à vivre leur responsabilité de premiers éducateurs de vie et de foi de leurs enfants. En Afrique, ses établissements – comme les écoles, les collèges, les lycées, les écoles professionnelles, les universités – mettent à la disposition de la population des outils pour accéder au savoir, sans discrimination d’origine, de fortune ou de religion. L’Église apporte sa contribution pour permettre de valoriser et faire fructifier les talents que Dieu a mis dans le cœur de tout homme. De nombreuses Congrégations religieuses sont nées dans ce but. D’innombrables saints et saintes ont compris que sanctifier l’homme signifiait avant tout promouvoir sa dignité par l’éducation.
75. Les membres du Synode ont constaté que l’Afrique connaît, tout comme le reste du monde d’ailleurs, une crise de l’éducation.[117] Ils ont souligné la nécessité d’un programme éducatif qui allie la foi et la raison pour préparer les enfants et les jeunes à la vie adulte. Des bases et de sains jalons ainsi posés leur permettraient d’affronter les choix quotidiens caractérisant toute vie adulte sur le plan affectif, social, professionnel et politique.
76. L’analphabétisme représente l’un des freins majeurs au développement. C’est un fléau égal à celui des pandémies. Certes, il ne tue pas directement, mais il contribue activement à la marginalisation de la personne – qui est une forme de mort sociale –, et lui rend impossible d’accéder à la connaissance. Alphabétiser l’individu, c’est en faire un membre à part entière de la res publica, à la construction de laquelle il pourra contribuer,[118] et c’est permettre au chrétien d’accéder au trésor inestimable des Saintes Écritures qui alimentent sa vie de foi.
77. J’invite les communautés et les institutions catholiques à répondre généreusement à ce grand défi, qui est un réel laboratoire d’humanisation, et à intensifier leurs efforts, selon leurs moyens, pour développer, seules ou en collaboration avec d’autres organisations, des programmes efficaces et adaptés aux populations. Les communautés et les institutions catholiques ne relèveront ce défi qu’en maintenant leur identité ecclésiale et en demeurant jalousement fidèles au message évangélique et au charisme de leur fondateur. L’identité chrétienne est un bien précieux qu’il faut savoir préserver et entretenir de crainte que le sel ne s’affadisse et ne finisse par être foulé aux pieds
(cf. Mt 5, 13).
78. Il convient, certainement, de sensibiliser les gouvernements afin qu’ils accroissent leur aide en faveur de la scolarisation. L’Église reconnaît et respecte le rôle de l’État dans le domaine éducatif. Elle affirme cependant son droit légitime à y participer en y apportant sa contribution particulière. Et il peut être bon de rappeler à l’État que l’Église a le droit d’éduquer selon ses règles propres et dans ses édifices. Il s’agit là d’un droit qui se situe dans la liberté d’action « dont elle a besoin pour veiller au salut des hommes ».[119] De nombreux États africains reconnaissent le rôle éminent et désintéressé que joue l’Église, à travers ses structures éducatives, dans l’édification de leur nation. J’encourage donc vivement les gouvernants dans leurs efforts pour appuyer cette œuvre éducative.
B. LE RESPECT DE LA CRÉATION ET DE L'ÉCOSYSTÈME
79. Avec les Pères du Synode, j’invite tous les membres de l’Église à œuvrer et à plaider en faveur d’une économie soucieuse des pauvres et résolument opposée à un ordre injuste qui, sous prétexte de réduire la pauvreté, a souvent contribué à l’aggraver.[120] Dieu a donné à l’Afrique d’importantes ressources naturelles. Face à la pauvreté chronique de ses populations, victimes d’exploitation et de malversations locales et étrangères, l’opulence de certains groupes choque la conscience humaine. Edifiés pour la création de richesses dans leurs propres nations et souvent avec la complicité de ceux qui exercent le pouvoir en Afrique, ces groupes assurent trop souvent leur propre fonctionnement au détriment du bien-être des populations locales.[121] Agissant en collaboration avec toutes les autres composantes de la société civile, l’Église doit dénoncer l’ordre injuste qui empêche les peuples africains de consolider leurs économies[122] et « de se développer selon leurs caractéristiques culturelles ».[123] Il est, en outre, du devoir de l’Église de lutter pour « que chaque peuple puisse être lui-même le principal artisan de son progrès économique et social[…] et puisse prendre part à la réalisation du bien commun universel comme membre actif et responsable de la société humaine, sur un plan d’égalité avec les autres peuples ».[124]
80. Des hommes et des femmes d’affaires, des gouvernements, des groupes économiques s’engagent dans des programmes d’exploitation, qui polluent l’environnement et causent une désertification sans précédent. De graves atteintes sont portées à la nature et aux forêts, à la flore et à la faune, et d’innombrables espèces risquent de disparaître à tout jamais. Tout cela menace l’écosystème tout entier et, par conséquence la survie de l’humanité.[125] J’exhorte l’Église en Afrique à encourager les gouvernants à protéger les biens fondamentaux que sont la terre et l’eau, pour la vie humaine des générations présentes et futures[126] et pour la paix entre les populations.
C. LA BONNE GOUVERNANCE DES ÉTATS
81. Un instrument majeur au service de la réconciliation, de la justice et de la paix, peut être l’institution politique dont le devoir essentiel est la mise en place et la gestion de l’ordre juste.[127] Cet ordre est à son tour au service de la « vocation à la communion des personnes ».[128] Pour concrétiser un tel idéal, l’Église en Afrique doit contribuer à édifier la société en collaboration avec les autorités gouvernementales et les institutions publiques et privées engagées dans l’édification du bien commun.[129] Les chefs traditionnels peuvent contribuer de manière très positive à la bonne gouvernance. L’Église, pour sa part, s’engage à promouvoir en son sein et dans la société une culture soucieuse de la primauté du droit.[130] À titre d’exemple, les élections constituent un lieu d’expression du choix politique d’un peuple et sont un signe de la légitimité pour l’exercice du pouvoir. Elles sont le moment privilégié pour un débat politique public sain et serein, caractérisé par le respect des différentes opinions et des différents groupes politiques. Favoriser un bon déroulement des élections, suscitera et encouragera une participation réelle et active des citoyens à la vie politique et sociale. Le non respect de la Constitution nationale, de la loi ou du verdict des urnes, là où les élections ont été libres, équitables et transparentes, manifesterait une défaillance grave dans la gouvernance et signifierait un manque de compétence dans la gestion de la chose publique.[131]
82. Aujourd’hui de nombreux décideurs, tant politiques qu’économiques, prétendent ne rien devoir à personne, si ce n’est à eux-mêmes. « Ils estiment n’être détenteurs que de droits et ils éprouvent souvent de grandes difficultés à grandir dans la responsabilité à l’égard de leur développement personnel intégral et de celui des autres. C’est pourquoi il est important de susciter une réflexion sur le fait que les droits supposent des devoirs sans lesquels ils deviennent arbitraires ».[132]
83. La croissance du taux de la criminalité dans les sociétés de plus en plus urbaines est un grand sujet de préoccupation pour tous les responsables et pour les gouvernants. Il est urgent que soient donc mis en place des systèmes judiciaires et carcéraux indépendants, pour rétablir la justice et pour rééduquer les coupables. Il faut aussi bannir les cas d’erreurs de justice et les mauvais traitements des prisonniers, les nombreuses occasions de non application de la loi qui correspondent à une violation des droits humains[133] et les incarcérations qui n’aboutissent que tardivement ou jamais à un procès. « L’Église en Afrique […] reconnaît sa mission prophétique vis-à-vis de tous ceux et celles qui sont touchés par la criminalité et leur besoin de réconciliation, de justice et de paix ».[134] Les prisonniers sont des personnes humaines qui méritent, malgré leur crime, d’être traitées avec respect et dignité. Ils ont besoin de notre sollicitude. Pour cela, l’Église doit organiser la pastorale du monde carcéral pour le bien matériel et spirituel des prisonniers. Cette activité pastorale est un service réel que l’Église offre à la société et que l’État doit favoriser pour le bien commun. Avec les membres du Synode, j’attire l’attention des responsables de la société sur la nécessité de faire tout ce qui est possible pour arriver à l’élimination de la peine capitale,[135] ainsi que sur la réforme du système pénal pour que la dignité humaine du prisonnier soit respectée. Aux agents pastoraux revient la tâche d’étudier et de proposer la justice restaurative comme un moyen et un processus pour favoriser la réconciliation, la justice et la paix, et la réinsertion dans les communautés des victimes et des offenseurs.[136]
D. LES MIGRANTS, DÉPLACÉS ET RÉFUGIÉS
84. Des millions de migrants, déplacés ou réfugiés, cherchent une patrie et une terre de paix en Afrique ou sur d’autres continents. Les dimensions de cet exode, qui touche tous les pays, révèlent l’ampleur cachée des diverses pauvretés souvent engendrées par des défaillances dans la gestion publique. Des milliers de personnes ont essayé et essayent encore de traverser les déserts et les mers à la recherche d’oasis de paix et de prospérité, d’une meilleure formation et d’une plus grande liberté. Malheureusement, de nombreux réfugiés ou déplacés rencontrent toutes sortes de violence et d’exploitation, voire la prison ou trop souvent la mort. Certains États ont répondu à ce drame par une législation répressive.[137] La situation de précarité de ces pauvres devrait susciter la compassion et la solidarité généreuse de tous; au contraire, elle fait naître souvent la peur et l’anxiété. Car beaucoup considèrent les migrants comme un fardeau, les regardent avec suspicion ne voyant en eux que danger, insécurité et menace. Cette perception provoque des réactions d’intolérance, de xénophobie et de racisme. Tandis que ces migrants eux-mêmes sont contraints, à cause de la précarité de leur situation, à effectuer des travaux mal rémunérés souvent illégaux, humiliants ou dégradants. La conscience humaine ne peut que s’indigner de ces situations. La migration à l’intérieur et à l’extérieur du continent devient ainsi un drame multidimensionnel, qui affecte sérieusement le capital humain de l’Afrique, provoquant la déstabilisation ou la destruction des familles.
85. L’Église se souvient que l’Afrique fut une terre de refuge pour la Sainte Famille qui fuyait le pouvoir politique sanguinaire d’Hérode[138] en quête d’une terre qui leur promettait la sécurité et la paix. L’Église continuera de faire entendre sa voix et de s’investir pour défendre toutes les personnes.[139]
E. LA MONDIALISATION ET L'AIDE INTERNATIONALE
86. Les Pères du Synode ont exprimé leur perplexité et leur préoccupation face à la mondialisation. J’ai déjà attiré l’attention sur cette réalité, comme un défi à relever. « La vérité de la mondialisation comme processus et sa nature éthique fondamentale dérivent de l’unité de la famille humaine et de son développement dans le bien. Il faut donc travailler sans cesse afin de favoriser une orientation culturelle personnaliste et communautaire, ouverte à la transcendance, du processus d’intégration planétaire ».[140] L’Église souhaite que la mondialisation de la solidarité aille jusqu’à inscrire « dans les relations marchandes le principe de gratuité et la logique du don, comme expression de la fraternité »,[141] évitant la tentation de la pensée unique sur la vie, la culture, la politique, l’économie, au profit du respect éthique et constant des diverses réalités humaines pour une solidarité effective.
87. Cette mondialisation de la solidarité se manifeste déjà dans une certaine mesure par l’aide internationale. Aujourd’hui la nouvelle d’une catastrophe fait rapidement le tour de la planète et elle suscite bien souvent un mouvement de compassion et des actes concrets de générosité. L’Église rend un service de grande charité en défendant les besoins réels du destinataire. Au nom du droit des nécessiteux et des sans-voix, et au nom du respect et de la solidarité qu’il faut leur apporter, elle demande que « les organismes internationaux et les Organisations non gouvernementales s’engagent à œuvrer dans la pleine transparence ».[142]
IV. LE DIALOGUE ET LA COMMUNION ENTRE LES CROYANTS
88. Comme nous le révèlent de nombreux mouvements sociaux, les relations interreligieuses conditionnent la paix en Afrique comme ailleurs. Dès lors, il importe que l’Église promeuve le dialogue comme attitude spirituelle afin que les croyants apprennent à travailler ensemble, par exemple dans des associations orientées vers la paix et la justice, dans un esprit de confiance et d’entraide. Les familles doivent être éduquées à l’écoute, à la fraternité et au respect sans crainte de l’autre.[143] Une seule chose est nécessaire (cf. Lc 10, 42) et capable d’assouvir la soif d’éternité de tout être humain et le désir d’unité de toute l’humanité : l’amour et la contemplation de Celui devant qui saint Augustin s’est écrié : « O éternelle vérité, vraie charité, chère éternité ! ».[144]
A. LE DIALOGUE ŒCUMÉNIQUE ET LE DÉFI DES NOUVEAUX MOUVEMENTS RELIGIEUX
89. En invitant à participer à l’Assemblée synodale nos frères chrétiens orthodoxes, coptes orthodoxes, luthériens, anglicans et méthodistes – et en particulier Sa Sainteté Abuna Paulos, Patriarche de l’Église orthodoxe Tewahedo d’Éthiopie, une des plus anciennes communautés chrétiennes du continent africain – j’ai voulu signifier que le chemin vers la réconciliation passe d’abord par la communion des disciples du Christ. Un christianisme divisé demeure un scandale puisqu’il contredit de facto la volonté du Divin Maître (cf. Jn 17, 21). Le dialogue œcuménique vise donc à orienter notre marche commune vers l’unité des chrétiens, en étant assidus à l’écoute de la Parole de Dieu, fidèles à la communion fraternelle, à la fraction du pain et aux prières (cf. Ac 2,42). J’exhorte toute la famille ecclésiale – les Églises locales, les Instituts de vie consacrée et les associations et mouvements de laïcs – à poursuivre ce chemin de façon plus résolue, dans l’esprit et sur la base des indications du Directoire œcuménique, et à travers les diverses associations œcuméniques existantes. J’invite par ailleurs à en former de nouvelles là où cela peut représenter une aide pour la mission. Puissions-nous entreprendre ensemble des œuvres de charité et protéger les patrimoines religieux grâce auxquels les disciples du Christ trouvent les forces spirituelles dont ils ont besoin pour l’édification de la famille humaine ![145]
90. Au long de ces dernières décennies, l’Église en Afrique s’est interrogée avec insistance sur la naissance et l’expansion de communautés non-catholiques appelées parfois aussi autochtones africaines (African Independent Churches). Souvent, elles dérivent d’Églises et de communautés ecclésiales chrétiennes traditionnelles et elles adoptent des aspects des cultures traditionnelles africaines. Ces groupes ont récemment fait leur apparition dans le panorama œcuménique. Les pasteurs de l’Église catholique devront tenir compte de cette nouvelle réalité pour la promotion de l’unité des chrétiens en Afrique et ils devront, par conséquent, trouver une réponse adaptée au contexte en vue d’une évangélisation plus profonde pour faire parvenir de manière efficace la Vérité du Christ aux Africains.
91. De nombreux mouvements syncrétistes et des sectes ont aussi vu le jour en Afrique au cours de ces dernières décennies. Il est parfois difficile de discerner s’ils sont d’inspiration authentiquement chrétienne ou s’ils sont simplement le fruit d’un engouement pour un leader prétendant avoir des dons exceptionnels. Leur dénomination et leur vocabulaire prêtent facilement à confusion, ils peuvent égarer des fidèles de bonne foi. Profitant de structures étatiques en élaboration, de l’effritement des solidarités familiales traditionnelles et d’une catéchèse insuffisante, ces nombreuses sectes exploitent la crédulité et offrent une caution religieuse à des croyances multiformes et hétérodoxes non-chrétiennes. Elles détruisent la paix des couples et des familles à cause de fausses prophéties ou visions. Elles séduisent même des responsables politiques. La théologie et la pastorale de l’Église doivent déterminer les origines de ce phénomène non seulement pour endiguer « l’hémorragie » des fidèles des paroisses vers celles-ci, mais aussi pour constituer les bases d’une réponse pastorale appropriée face à l’attraction que ces mouvements et ces sectes exercent sur eux. Ce qui signifie encore une fois : évangéliser en profondeur l’âme africaine.
1. LES RELIGIONS TRADITIONNELLES AFRICAINES
92.L’Église vit chaque jour avec les adeptes des religions traditionnelles africaines. Ces religions qui se réfèrent aux ancêtres et à une forme de médiation entre l’homme et l’Immanence, sont le terreau culturel et spirituel d’où viennent la plupart des chrétiens convertis, et avec lequel ils gardent un contact quotidien. Parmi les convertis, il convient de discerner des personnes biens informées pour qu’elles deviennent pour l’Église des guides dans la connaissance toujours plus profonde et précise des traditions, de la culture et des religions traditionnelles. Le repérage des véritables points de rupture en deviendra plus aisé. On parviendra aussi à la distinction nécessaire entre le culturel et le cultuel et l’on écartera les éléments magiques, causes d’éclatement et de ruine pour les familles et les sociétés. Le Concile Vatican II a précisé, dans ce sens, que l’Église « exhorte ses fils, pour qu’à travers le dialogue et la collaboration avec les adeptes des autres religions, menés avec prudence et amour et, en témoins de la foi et de la vie chrétiennes, ils reconnaissent, préservent et promeuvent les choses bonnes, spirituelles et morales, ainsi que les valeurs socioculturelles découvertes chez ces personnes ».[146] Afin que les trésors de la vie sacramentelle et de la spiritualité de l’Église puissent être découverts dans toute leur profondeur et mieux transmis dans la catéchèse, l’Église pourrait examiner, dans une étude théologique, certains éléments des cultures traditionnelles africaines qui sont conformes à l’enseignement du Christ.
93. S’appuyant sur les religions traditionnelles, la sorcellerie connaît actuellement une certaine recrudescence. Des peurs renaissent et créent des liens de sujétion paralysants. Les préoccupations concernant la santé, le bien-être, les enfants, le climat, la protection contre les esprits mauvais, conduisent de temps à autre à recourir à des pratiques des religions traditionnelles africaines qui sont en désaccord avec l’enseignement chrétien. Le problème de la « double appartenance », au christianisme et aux religions traditionnelles africaines demeure un défi. Pour l’Église qui est en Afrique, il est nécessaire, à travers une catéchèse et une inculturation profonde, de guider les personnes vers la découverte de la plénitude des valeurs de l’Évangile. Il convient de déterminer la signification profonde de ces pratiques de sorcellerie en identifiant les enjeux théologiques, sociaux et pastoraux qui sont véhiculés par ce fléau.
94. Les Pères du Synode ont mis en évidence la complexité de la réalité musulmane sur le continent africain. Dans certains pays, une bonne entente règne entre chrétiens et musulmans ; en d’autres, les chrétiens locaux n’ont qu’une citoyenneté de second rang et des catholiques étrangers, religieux
ou laïcs, ont du mal à obtenir visas et permis de séjour ; en d’autres, les éléments religieux et politiques ne sont pas suffisamment distingués, en d’autres enfin l’agressivité existe. J’exhorte l’Église,
dans toute situation, à persévérer dans l’estime des « musulmans, qui adorent le Dieu Un, vivant et subsistant, miséricordieux et tout-puissant, créateur du ciel et de la terre, qui a parlé aux hommes ».[147] Si nous tous, croyants en Dieu, désirons servir la réconciliation, la justice et la paix, nous devons œuvrer ensemble pour bannir toutes les formes de discrimination, d’intolérance et de fondamentalisme confessionnel. Dans son œuvre sociale, l’Église ne fait pas de distinction religieuse. Elle aide qui est dans le besoin, qu’il soit chrétien, musulman ou animiste. Elle témoigne ainsi de l’amour de Dieu, créateur de tous et encourage les adeptes d’autres religions à une attitude respectueuse et à une réciprocité dans l’estime. J’invite toute l’Église à chercher, par un patient dialogue avec les musulmans, la reconnaissance juridique et pratique de la liberté religieuse, de telle sorte qu’en Afrique chaque citoyen jouisse, non seulement du droit au choix libre de sa religion[148] et à l’exercice du culte, mais aussi du droit à la liberté de conscience.[149] La liberté religieuse est la voie de la paix.[150]
C. DEVENIR « SEL DE LA TERRE » ET « LUMIÈRE DU MONDE »
95. La mission d’évangélisation de l’Église en Afrique puise à plusieurs sources : les Saintes Écritures, la Tradition et la vie sacramentelle. Comme un grand nombre de Pères synodaux l’ont fait remarquer, le ministère de l’Église s’appuie efficacement sur le Catéchisme de l’Église catholique. Par ailleurs, le Compendium de la Doctrine sociale de l’Église, est un guide pour la mission de l’Église comme « Mère et Éducatrice » dans le monde et la société, et par là-même un outil pastoral de premier ordre.[151] Un chrétien qui s’alimente à la source authentique, le Christ, est transformé par Lui en « lumière du monde » (Mt 5, 14), et il transmet Celui qui est « la lumière du monde » (Jn 8, 12). Sa connaissance doit être animée par la charité. En effet, le savoir, « s’il veut être une sagesse capable de guider l’homme à la lumière des principes premiers et de ses fins dernières, doit être “relevé” avec le ‘sel’ de la charité ».[152]
96. Pour réaliser la tâche que nous sommes appelés à accomplir, faisons nôtre l’exhortation même de saint Paul : « Tenez-vous donc debout, avec la vérité pour ceinture, la justice pour cuirasse, et pour chaussures le zèle à propager l’évangile de la paix ; ayez toujours en main le bouclier de la foi, grâce auquel vous pourrez éteindre tous les traits enflammés du Mauvais ; enfin recevez le casque du Salut et le glaive de l’Esprit, c’est-à-dire la Parole de Dieu. Vivez dans la prière et les supplications ; priez en tout temps, dans l’Esprit » (Ep 6,14-18).
« À CHACUN LA MANIFESTATION DE L'ESPRIT
EST DONNÉE EN VUE DU BIEN COMMUN » (1 Co 12, 7)
97. Les orientations de la mission que je viens d’indiquer ne deviendront réalité que si l’Église agit, d’une part, sous la conduite de l’Esprit Saint, et, d’autre part, comme un seul corps, pour reprendre l’image de saint Paul qui présente ces deux conditions de manière articulée. En effet, dans une Afrique marquée par des contrastes, l’Église doit indiquer clairement le chemin vers le Christ. Elle doit montrer comment se vit, dans la fidélité au Christ Jésus, l’unité dans la diversité enseignée par l’Apôtre : « Il y a, certes, diversité de dons spirituels, mais c’est le même Esprit ; diversité de ministères, mais c’est le même Seigneur ; diversité d’opérations, mais c’est le même Dieu qui opère tout en tous. À chacun la manifestation de l’Esprit est donnée en vue du bien commun » (1 Co 12, 4-7). En exhortant chaque membre de la famille ecclésiale à être « le sel de la terre » et « la lumière du monde » (Mt 5, 13.14), j’entends insister sur cet “être” qui, par l’Esprit, devrait agir en vue du bien commun. On n’est jamais chrétien tout seul. Les dons faits par le Seigneur à chacun– évêques, prêtres, diacres, religieux et religieuses, catéchistes, laïcs – doivent contribuer à l’harmonie, à la communion et à la paix dans l’Église elle-même et dans la société.
98. Nous connaissons bien l’épisode de l’homme paralysé que l’on porte à Jésus pour qu’il le guérisse (cf. Mc 2, 1-12). Pour nous aujourd’hui, cet homme symbolise tous nos frères et sœurs d’Afrique et d’ailleurs, paralysés de diverses manières, et hélas, souvent dans une profonde détresse. Face aux défis que j’ai esquissés fort brièvement à la suite des communications des Pères synodaux, méditons sur l’attitude des porteurs du paralysé. Ce dernier n’a pu accéder à Jésus qu’avec l’aide de ces quatre personnes de foi, qui ont bravé l’obstacle physique de la foule en faisant preuve de solidarité et de confiance absolue en Jésus. Le Christ « voit leur foi ». Il ôte alors l’obstacle spirituel en disant au paralysé : « Tes péchés te sont pardonnés ». Il ôte ce qui empêche l’homme de se relever. Cet exemple nous enjoint de grandir dans la foi et de faire preuve, nous aussi, de solidarité et de créativité pour soulager ceux qui portent de lourds fardeaux, en les ouvrant ainsi à la plénitude de la vie dans le Christ (cf. Mt 11, 28). Face aux obstacles tant physiques que spirituels qui se dressent devant nous, mobilisons les énergies spirituelles et les ressources matérielles du corps entier qui est l’Église, sûrs que le Christ agira par l’Esprit Saint en chacun de ses membres.
99. Chers fils et filles de l’Église, et vous en particulier chers fidèles d’Afrique, l’amour de Dieu vous a comblés de toutes sortes de bénédictions et il vous a rendus capables d’agir comme le sel de la terre. Vous tous, comme membres de l’Église, vous devez être conscients que la paix et la justice naissent d’abord de la réconciliation de l’être humain avec lui-même et avec Dieu. C’est le Christ seul qui est le vrai et l’unique « Prince de la paix ». Sa naissance est le gage de la paix messianique telle qu’elle a été annoncée par les prophètes (cf. Is 9, 5-6 ; 57, 19 ; Mi 5, 4 ; Ep 2, 14-17). Cette paix ne vient pas des hommes, mais de Dieu. Elle est le don messianique par excellence. Cette paix conduit à la justice du Royaume qu’il convient de chercher à temps et à contretemps dans tout ce qui se fait (cf. Mt 6, 33), afin qu’en toute circonstance la gloire soit rendue à Dieu (cf. Mt 5, 16). Or nous savons que le juste est fidèle à la loi de Dieu car il s’est converti (cf. Lc 15, 7 ; 18, 14). Cette fidélité nouvelle est apportée par le Christ pour nous rendre « irréprochables et purs » (cf. Ph 2, 15).
100. Chers frères dans l’épiscopat, la sainteté à laquelle l’Évêque est appelé exige l’exercice des vertus – en premier lieu des vertus théologales – et celui des conseils évangéliques.[153] Votre sainteté personnelle doit rejaillir au bénéfice de ceux qui ont été confiés à votre sollicitude pastorale, et que vous devez servir. Votre vie de prière irriguera de l’intérieur votre apostolat. Un Évêque doit être un amoureux du Christ. Votre autorité morale et votre prestance qui soutiennent l’exercice de votre pouvoir juridique, ne proviendront que de la sainteté de votre vie.
101. Comme le disait saint Cyprien au milieu du IIIe siècle à Carthage : « L’Église repose sur les Évêques, et toute sa conduite obéit à la direction de ces mêmes chefs ».[154] C’est la communion, l’unité et la collaboration avec le presbyterium, qui serviront d’antidote aux germes de divisions et qui vous aideront à vous mettre tous ensemble à l’écoute de l’Esprit Saint. Il vous conduira par le juste chemin (cf. Ps 23, 3). Aimez et respectez vos prêtres ! Ils sont les précieux collaborateurs de votre ministère épiscopal. Imitez le Christ ! Il a créé autour de lui un climat d’amitié, d’affection fraternelle et de communion qu’il a puisé dans les profondeurs du mystère trinitaire. « Je vous invite à rester soucieux d’aider vos prêtres à vivre dans une union intime avec le Christ. Leur vie spirituelle est le fondement de leur vie apostolique. Vous les exhorterez avec douceur à la prière quotidienne et à la célébration digne des Sacrements, surtout de l’Eucharistie et de la Réconciliation, comme le faisait saint François de Sales pour ses prêtres. […]Les prêtres ont besoin de votre affection, de votre encouragement et de votre sollicitude ».[155]
102. Soyez unis au Successeur de Pierre avec vos prêtres et l’ensemble de vos fidèles. Ne gaspillez pas vos énergies humaines et pastorales dans la recherche vaine de réponses à des questions qui ne sont pas de votre compétence directe, ou dans les méandres d’un nationalisme qui peut aveugler. Suivre cette idole, tout comme celle de l’absolutisation de la culture africaine, est plus facile que de suivre les exigences du Christ. Ces idoles sont des leurres. Bien plus elles sont une tentation, celle de croire que, par les seules forces humaines, on peut faire advenir le Royaume du bonheur éternel sur la terre !
103. Votre premier devoir est de porter à tous la Bonne Nouvelle du Salut, et de donner aux fidèles une catéchèse qui contribue à une connaissance plus approfondie de Jésus-Christ. Veillez à donner aux laïcs une vraie conscience de leur mission ecclésiale, et incitez-les à la réaliser avec le sens des responsabilités, envisageant toujours le bien commun. Les programmes de formation permanente des laïcs, en particulier pour les leaders politiques et économiques, devront insister sur la conversion comme condition nécessaire pour transformer le monde. Il est bon de toujours commencer par la prière, puis de poursuivre par la catéchèse qui conduira à agir concrètement. La création de structures viendra après si c’est vraiment nécessaire, car elles ne remplaceront jamais la puissance de la prière.
104. Chers frères dans l’Épiscopat, soyez, à la suite du Christ-bon Pasteur, de bons bergers et des serviteurs du troupeau qui vous est confié, exemplaires par votre vie et votre comportement. La bonne administration de vos diocèses requiert votre présence. Pour que votre message soit crédible, faites que vos diocèses deviennent des modèles quant au comportement des personnes, à la transparence et la bonne gestion financière. Ne craignez pas d’avoir recours à l’expertise des audits comptables pour donner l’exemple aussi bien aux fidèles qu’à la société tout entière. Favorisez le bon fonctionnement des organismes ecclésiaux diocésains et paroissiaux tels qu’ils sont prévus par le droit de l’Église. La recherche de l’unité, de la justice et de la paix vous incombe en tout premier lieu, parce que vous avez la responsabilité des Églises locales.
105. Le Synode a rappelé que « l’Église est une communion qui engendre une solidarité pastorale organique. Les Évêques, en communion avec l’Évêque de Rome, sont les premiers promoteurs de la communion et de la collaboration dans l’apostolat de l’Église ».[156] Les Conférences épiscopales nationales et régionales ont la mission de consolider cette communion ecclésiale et de promouvoir cette solidarité pastorale.
106. Pour une plus grande visibilité, cohérence et efficacité dans la pastorale sociale de l’Église, le Synode a ressenti le besoin d’une action plus solidaire à tous les niveaux. Il serait bon que les Conférences épiscopales régionales et nationales ainsi que l’Assemblée de la Hiérarchie Catholique d’Égypte (A.H.C.E.) renouvellent leur engagement de solidarité collégiale.[157] Cela implique concrètement une participation tangible aux activités de ces structures, aussi bien en ce qui concerne le personnel que les moyens financiers. L’Église témoignera ainsi de l’unité pour laquelle le Christ a prié (cf. Jn 17, 20-21).
107. Il m’apparaît également souhaitable que les Évêques s’engagent davantage à promouvoir à soutenir effectivement et affectivement le Symposium des Conférences Épiscopales d’Afrique et de Madagascar (S.C.E.A.M.) comme structure continentale de solidarité et de communion ecclésiale.[158] Il est bon aussi de cultiver de bonnes relations avec la Confédération des Conférences des Supérieurs Majeurs d’Afrique et de Madagascar (CO.S.M.A.M.), les Associations des Universités catholiques et d’autres structures ecclésiales continentales.
108. Collaborateurs proches et indispensables de l’Évêque, les prêtres[159] ont la charge de poursuivre l’œuvre d’évangélisation. La deuxième Assemblée du Synode pour l’Afrique a été célébrée au cours de l’année que j’avais consacrée au sacerdoce, lançant un appel particulier à la sainteté. Chers prêtres, souvenez-vous que votre témoignage de vie pacifique, par-delà les frontières tribales et raciales, peut toucher les cœurs.[160]L’appel à la sainteté nous invite à devenir des pasteurs selon le cœur de Dieu,[161] qui font paître le troupeau avec justice (cf. Ez 34, 16). Céder à la tentation de vous transformer en guides politiques[162] ou en agents sociaux, serait trahir votre mission sacerdotale et desservir la société qui attend de vous des paroles et des gestes prophétiques. Saint Cyprien le disait déjà : « Ceux qui ont l’honneur du divin sacerdoce […] ne doivent prêter leur ministère qu’au sacrifice et à l’autel, et ne vaquer qu’à la prière ».[163]
109. En vous consacrant surtout à ceux que le Seigneur vous confie pour les former aux vertus chrétiennes, et les conduire à la sainteté, non seulement vous les gagnerez à la cause du Christ, mais vous en ferez aussi les protagonistes d’une société africaine renouvelée. Face à la complexité des situations auxquelles vous êtes confrontés, je vous invite à approfondir votre vie de prière et votre formation continue ; que celle-ci soit à la fois spirituelle et intellectuelle. Devenez des familiers des Saintes Écritures, de la Parole de Dieu que vous méditez chaque jour et que vous expliquez aux fidèles. Développez aussi votre connaissance du Catéchisme, des documents du Magistère ainsi que de la Doctrine sociale de l’Église. Vous serez ainsi capables, à votre tour, de former les membres de la communauté chrétienne dont vous êtes les responsables immédiats pour qu’ils deviennent d’authentiques disciples et témoins du Christ.
110. Vivez avec simplicité, humilité et amour filial, votre obéissance à l’Évêque de votre diocèse. « Par respect pour celui qui nous a aimés, il convient d’obéir sans aucune hypocrisie ; car ce n’est pas cet Évêque visible que l’on abuse, mais c’est l’Évêque invisible que l’on cherche à tromper. Car, dans ce cas, ce n’est pas de chair dont il s’agit, mais de Dieu qui connaît les choses cachées ».[164] Dans le cadre de la formation permanente des prêtres, il me semble opportun que soient relus et médités certains documents, comme le Décret conciliaire sur le ministère et la vie des prêtres : Presbyterorum ordinis, ou l’Exhortation apostolique post-synodale Pastores dabo vobis de 1992, ou le Directoire pour le Ministère et la Vie des prêtres de 1994, ou encore l’Instruction Le prêtre, pasteur et guide de la Communauté paroissiale, de 2002.
111. Édifiez vos communautés chrétiennes par votre exemple en vivant dans la vérité et la joie vos engagements sacerdotaux : le célibat dans la chasteté et le détachement des biens matériels. Vécus avec maturité et sérénité, ces signes qui sont particulièrement conformes au style de vie de Jésus, expriment « le don total et exclusif au Christ, à l’Église et au Règne de Dieu ».[165] Investissez-vous intensément dans la mise en œuvre de la pastorale diocésaine pour la réconciliation, la justice et la paix, notamment par la célébration des sacrements de la Pénitence et de l’Eucharistie, la catéchèse, la formation des laïcs et l’accompagnement des responsables de la société. Tout prêtre doit pouvoir se sentir heureux de servir l’Église.
112. Suivre le Christ sur le chemin du sacerdoce demande à faire des choix. Ils ne sont pas toujours faciles à vivre. Les exigences évangéliques, codifiées au cours des siècles par l’enseignement du Magistère, paraissent radicales aux yeux du monde. Il est difficile parfois de les suivre, mais cela n’est pas impossible. Le Christ nous apprend qu’il n’est pas possible de servir à la fois deux maîtres (cf. Mt 6, 24). Il fait certes référence à l’argent, ce trésor temporel qui peut occuper notre cœur (cf. Lc 12, 34), mais il fait également référence aux innombrables autres biens que nous possédons : notre vie, notre famille, notre éducation, nos relations personnelles par exemple. Il s’agit là de biens précieux et admirables qui sont constitutifs de nos personnes. Mais, le Christ demande à celui qu’il appelle, de s’abandonner totalement à la Providence. Il demande un choix absolu(cf. Mt 7, 13-14) qu’il nous est parfois difficile de comprendre et vivre. Mais, si Dieu est notre trésor véritable – cette perle rare qu’il faut acquérir à tout prix même en effectuant de grands sacrifices (cf. Mt 13, 45-46) – alors nous désirerons que notre cœur et notre corps, que notre esprit et notre intelligence soient pour lui seul. Cet acte de foi nous permettra de voir ce qui nous semble important sous un autre regard, et de vivre notre relation à notre corps et nos relations humaines familiales ou amicales, à la lumière de l’appel de Dieu et de son exigence au service de l’Église. Il convient de réfléchir à cela profondément. Cette réflexion commencera dès le séminaire pour être continuée durant toute la vie sacerdotale. Le Christ, connaissant les forces et les faiblesses de notre cœur, comme pour nous encourager, nous dit : « Cherchez d’abord le Royaume et sa justice, et tout vous sera donné par surcroît » (Mt 6, 33).
113. Les missionnaires non africains, répondant généreusement à l’appel du Seigneur avec un zèle apostolique ardent, sont venus partager le bonheur de la Révélation. À leur suite, des Africains sont aujourd’hui missionnaires sur d’autres continents. Comment, à ce point, ne pas leur rendre un hommage particulier ? Les missionnaires venus en Afrique – prêtres, religieux, religieuses et laïcs – ont construit des églises, des écoles et des dispensaires, et contribué fortement à la visibilité actuelle des cultures africaines, mais ils ont surtout édifié le Corps du Christ et enrichi la demeure de Dieu. Ils ont su partager la saveur du sel de la Parole et faire resplendir la lumière des Sacrements. Et par-dessus tout, ils ont donné à l’Afrique ce qu’ils possédaient de plus précieux : le Christ. Grâce à eux de nombreuses cultures traditionnelles ont été libérées de peurs ancestrales et d’esprits immondes (cf. Mt 10, 1). Du bon grain qu’ils ont semé (cf. Mt 13, 24), ont surgi de nombreux saints africains qui sont autant de modèles dont il faut s’inspirer davantage. Il serait souhaitable que leur culte soit ravivé et promu. Leur engagement pour la cause de l’Évangile s’est parfois réalisé avec héroïsme, au prix même de leur vie. Une fois encore s’est vérifiée l’affirmation de Tertullien : « Le sang des martyrs est semence de chrétiens».[166] Je rends grâce au Seigneur pour ces saints et saintes, signes de la vitalité de l’Église en Afrique.
114. J’encourage les Pasteurs des Églises locales à reconnaître parmi les serviteurs africains de l’Évangile, ceux qui pourraient être canonisés, selon les normes de l’Église, non seulement pour augmenter le nombre des saints africains, mais aussi pour obtenir de nouveaux intercesseurs au ciel afin qu’ils accompagnent l’Église dans son pèlerinage terrestre et intercèdent auprès de Dieu pour le continent africain. Je confie à Notre-Dame d’Afrique et aux saints de ce cher continent, l’Église qui s’y trouve.
115. La grandeur de l’appel reçu par les diacres permanents mérite d’être soulignée. Dans la fidélité à la mission reçue il y a des siècles, je les invite à œuvrer avec humilité en étroite collaboration avec les évêques.[167] Avec affection je leur demande de continuer de proposer à la jeunesse ce que nous enseigne le Christ dans l’Évangile : la rigueur dans le travail bien fait,[168] la force morale dans le respect des valeurs, l’honnêteté, le respect de la parole donnée, la joie d’apporter sa pierre à l’édification de la société et de l’Église, la protection de la nature, le sens du bien commun. Chers diacres, aidez la société africaine dans toutes ses composantes à valoriser la responsabilité des hommes en tant qu’époux et pères, à respecter la femme qui est égale à l’homme en dignité, à avoir le souci des enfants livrés à eux-mêmes et sans éducation.
116. Ne manquez pas de prêter une attention particulière aux personnes infirmes mentales ou physiques,[169] à celles qui sont les plus faibles, et aux plus pauvres de vos communautés. Puisse votre charité se faire inventive ! Dans la pastorale paroissiale, souvenez-vous qu’une saine spiritualité permet à l’Esprit du Christ de libérer l’être humain pour qu’il agisse efficacement dans la société. Les Évêques veilleront à parfaire votre formation afin qu’elle contribue à l’exercice de votre charisme.[170] Comme saint Étienne, saint Laurent et saint Vincent, diacres et martyrs, efforcez-vous de reconnaître et de rencontrer le Christ dans l’Eucharistie et dans les pauvres. Ce service de l’autel et de la charité vous fera aimer la rencontre du Seigneur présent sur l’autel et dans le pauvre. Vous serez alors disposés à donner votre vie pour Lui jusqu’à la mort.
117. Par les vœux de chasteté, de pauvreté et d’obéissance, la vie des personnes consacrées est devenue un témoignage prophétique. Elles peuvent être ainsi des modèles en matière de réconciliation, de justice et de paix, même dans des circonstances de fortes tensions.[171] La vie communautaire montre qu’il est possible de vivre fraternellement et d’être unis, même là où les origines ethniques ou raciales sont différentes (cf. Ps 133,1). Elle peut et doit donner à voir et à croire qu’aujourd’hui en Afrique, ceux et celles qui suivent le Christ Jésus trouvent en Lui le secret de la joie du vivre ensemble : l’amour mutuel et la communion fraternelle, quotidiennement consolidés par l’Eucharistie et la Liturgie des Heures.
118. Puissiez-vous, chères personnes consacrées, continuer à vivre votre charisme avec un zèle vraiment apostolique dans les différents domaines indiqués par vos fondateurs ! Vous mettrez ainsi plus de soin à garder votre lampe allumée ! Vos fondateurs ont voulu suivre le Christ en vérité en répondant à son appel. Diverses œuvres qui en sont les fruits, sont des joyaux qui ornent l’Église.[172] Il convient donc de les développer en suivant le plus fidèlement possible le charisme de vos fondateurs, leurs pensées et leurs projets. Je voudrais ici souligner la part importante des personnes consacrées dans la vie ecclésiale et missionnaire. Elles sont une aide nécessaire et précieuse à l’activité pastorale mais aussi une manifestation de la nature intime de la vocation chrétienne.[173] C’est pourquoi je vous invite, chères personnes consacrées, à rester en communion étroite avec l’Église locale et son premier responsable, l’Évêque. Je vous invite également à fortifier votre communion avec l’Évêque de Rome.
119. L’Afrique est le berceau de la vie contemplative chrétienne. Toujours présente en Afrique du Nord et particulièrement en Égypte et en Éthiopie, elle a pris racine en Afrique subsaharienne au siècle dernier. Puisse le Seigneur bénir les hommes et les femmes qui ont décidé de Le suivre de manière inconditionnelle ! Leur vie cachée est comme le levain dans la pâte. Leur prière continuelle soutiendra l’effort apostolique des Évêques, des prêtres, des autres personnes consacrées, des catéchistes et de toute l’Église.
120. Les rencontres des différentes Conférences nationales des Supérieurs Majeurs et celles de la CO.S.M.A.M. permettent d’unir les réflexions et les forces non seulement pour assurer les finalités de chacun des Instituts, en préservant toujours leur autonomie, leur caractère et leur esprit propre, mais aussi pour traiter des affaires communes dans un souci de fraternité et de solidarité. Il est bon de cultiver un esprit ecclésial en assurant une saine coordination et une juste coopération avec les Conférences des Évêques.
121. Les Pères synodaux ont accordé une attention particulière aux séminaristes. Sans négliger la formation théologique et spirituelle, évidemment prioritaire, ils ont souligné l’importance de la croissance psychologique et humaine de chaque candidat. Les futurs prêtres doivent développer en eux une juste compréhension de leurs cultures sans s’enfermer dans leurs limites ethniques et culturelles.[174] Ils devront également s’enraciner dans les valeurs évangéliques pour fortifier leur engagement, dans la fidélité et la loyauté envers le Christ. La fécondité de leur future mission dépendra beaucoup de leur profonde union au Christ, de la qualité de leur vie de prière et de leur vie intérieure, des valeurs humaines, spirituelles et morales qu’ils auront assimilées durant leur formation. Puisse chaque séminariste devenir un homme de Dieu en recherchant et en vivant « la justice, la piété, la foi, la charité, la constance, la douceur »(1Tm 6, 11) !
122. « Les séminaristes doivent apprendre la vie communautaire de telle manière que la vie fraternelle entre eux, par la suite, devienne la source d’une authentique expérience du sacerdoce comme intime fraternité sacerdotale ».[175] Les directeurs et les formateurs du séminaire travailleront ensemble, en suivant les indications des Évêques, afin de garantir une formation intégrale aux séminaristes qui leur sont confiés. Dans la sélection des candidats, il faudra procéder à un discernement soigneux et à un accompagnement de qualité afin que ceux qui seront admis au sacerdoce soient de vrais disciples du Christ et d’authentiques serviteurs de l’Église. On aura à cœur de les initier aux innombrables richesses du patrimoine biblique, théologique, spirituel, liturgique, moral et juridique de l’Église.
123. Je me suis adressé aux séminaristes en leur écrivant une Lettre à la suite de l’Année sacerdotale qui s’est achevée en juin 2010.[176] J’y ai insisté sur l’identité, la spiritualité et l’apostolat du prêtre. Je recommande vivement à chaque séminariste de lire et de méditer ce bref document qui lui est destiné personnellement et que les formateurs mettront à sa disposition. Le séminaire est un temps de préparation au sacerdoce, un temps d’étude. C’est un temps de discernement, de formation et de maturation humaine et spirituelle. Puissent les séminaristes utiliser judicieusement ce temps qui leur est offert pour accumuler des réserves spirituelles et humaines dans lesquelles ils pourront puiser durant leur vie sacerdotale.
124. Chers séminaristes, soyez des apôtres auprès des jeunes de votre génération en les invitant à se mettre à la suite du Christ dans la vie sacerdotale. N’ayez pas peur ! La prière de nombreuses personnes vous accompagne et vous soutient (cf. Mt 9, 37-38).
125. Les catéchistes sont de précieux agents pastoraux dans la mission d’évangélisation. Leur rôle a été très important dans la première évangélisation, l’accompagnement catéchuménal, l’animation et le soutien des communautés. « Avec naturel, ils ont opéré une inculturation réussie qui a porté de merveilleux fruits (cf. Mc 4, 20). Ce sont les catéchistes qui ont permis que la ‘lumière brille devant les hommes’ (Mt 5, 16), car en voyant le bien qu’ils font, des populations entières ont pu rendre gloire à Notre Père qui est aux cieux. Ce sont des Africains qui ont évangélisé des Africains ».[177] Ce rôle important dans le passé, reste essentiel pour le présent et le futur de l’Église. Je les remercie pour leur amour de l’Église.
126. J’invite les Évêques et les prêtres à prendre soin de la formation humaine, intellectuelle, doctrinale, morale, spirituelle et pastorale des catéchistes, en prêtant grande attention à leurs conditions de vie pour sauvegarder leur dignité. Qu’ils n’oublient pas leurs légitimes besoins matériels,[178] car l’ouvrier fidèle de la vigne du Seigneur a droit à une juste rétribution (cf. Mt 20, 1-16) en attendant celle que donnera le Seigneur de manière équitable, car c’est lui seul qui est juste et qui connaît les cœurs.
127. Chers catéchistes, souvenez-vous que, pour un grand nombre de communautés, vous êtes le visage concret et immédiat du disciple zélé et le modèle de la vie chrétienne. Je vous encourage à proclamer, par l’exemple, que la vie familiale mérite une très grande considération, que l’éducation chrétienne prépare les enfants à être, dans la société, honnêtes et fiables dans leurs rapports avec autrui. Accueillez quiconque sans discrimination : pauvres et riches, autochtones et étrangers, catholiques et non catholiques (cf. Jc 2, 1). Ne faites acception de personne (cf. Ac 10, 34 ; Rm 2, 11 ; Ga 2, 6 ; Ep 6, 9). En assimilant vous-mêmes les Saintes Écritures et les enseignements du Magistère, vous parviendrez à offrir une catéchèse solide, à animer des groupes de prière et à proposer la lectio divina aux communautés dont vous avez le soin. Votre action deviendra alors cohérente, persévérante et source d’inspiration. En évoquant avec reconnaissance le souvenir glorieux de vos devanciers, je vous salue et je vous encourage à œuvrer aujourd’hui avec la même abnégation, le même courage apostolique et la même foi. En cherchant à être fidèles à votre mission, vous contribuerez aussi non seulement à votre sainteté personnelle, mais aussi efficacement à la construction du Corps Mystique du Christ, l’Église.
128. Par ses membres laïcs, l’Église se rend présente et active dans la vie du monde. Les laïcs ont un grand rôle à jouer dans l’Église et dans la société. Pour qu’ils puissent bien assumer ce rôle, il convient que des écoles ou des centres de formation biblique, spirituelle, liturgique et pastorale soient organisés dans les diocèses. Je souhaite de tout cœur que les laïcs qui ont des responsabilités d’ordre politique, économique et social, s’arment d’une solide connaissance de la Doctrine sociale de l’Église qui fournit des principes d’action conformes à l’Évangile. En effet, ils sont des « ambassadeurs du Christ » (2 Co 5, 20) dans l’espace public, au cœur du monde.[179] Leur témoignage chrétien ne sera crédible que s’ils sont des professionnels compétents et honnêtes.
129. Les laïcs, hommes et femmes, sont appelés avant tout à la sainteté et à vivre cette sainteté dans le monde. Chers fidèles, cultivez avec soin votre vie intérieure et votre relation à Dieu afin que l’Esprit Saint vous éclaire en toute circonstance. Pour que la personne humaine et le bien commun demeurent effectivement au centre de l’action humaine, politique, économique ou sociale, attachez-vous profondément au Christ pour le connaître et l’aimer, consacrant du temps à Dieu en priant et en recevant les Sacrements. Laissez-vous éclairer et instruire par Dieu et par sa Parole.
130. Je voudrais revenir sur la particularité de la vie professionnelle du chrétien. Brièvement, il s’agit de témoigner du Christ dans le monde en montrant, par l’exemple, que le travail peut être un lieu de réalisation personnelle très positif, et qu’il n’est pas d’abord un moyen de profits. Le travail vous permet de participer à l’œuvre de la création et d’être au service de vos frères et sœurs. En agissant ainsi, vous serez « le sel de la terre » et « la lumière du monde » comme nous le demande le Seigneur. Dans votre vie quotidienne, pratiquez l’option préférentielle pour les pauvres, quelle que soit votre position dans la société, selon l’esprit des Béatitudes (cf. Mt 5, 3-12), pour voir en eux le visage concret de Jésus qui vous appelle à le servir (cf. Mt 25, 31-46).
131. Il peut être utile de vous organiser en associations pour continuer à former votre conscience chrétienne et vous soutenir mutuellement dans la lutte pour la justice et la paix. Les Communautés Ecclésiales Vivantes (CEV) ou les Small Christian Communities (SCC), et les « Communautés nouvelles »[180] sont des cadres porteurs pour entretenir la flamme vivante de votre Baptême. Apportez également vos compétences à l’animation des Universités catholiques qui ne cessent de se développer depuis les recommandations de l’Exhortation apostolique post-synodale Ecclesia in Africa.[181] Je voudrais également vous encourager à avoir une présence active et courageuse dans le monde de la politique, de la culture, des arts, des médias et des diverses associations. Que cette présence soit sans complexe ni honte, fière et consciente de la précieuse contribution qu’elle peut apporter au bien commun !
132. Le Seigneur nous a confié une mission particulière et il ne nous a pas laissés dépourvus de moyens pour l’accomplir. Non seulement il a revêtu chacun de dons personnels pour l’édification de son Corps qu’est l’Église, mais il a confié aussi à toute la communauté ecclésiale des dons particuliers pour lui permettre de continuer sa mission. Le don par excellence, c’est l’Esprit Saint. C’est par lui que nous formons un seul corps et « c’est seulement dans la force de l’Esprit Saint que nous pouvons trouver ce qui est droit et le mettre ensuite en pratique ».[182] Des moyens sont nécessaires pour nous permettre d’agir, mais ils demeurent insuffisants si, à travers « nos capacités de penser, de parler, de sentir, d’agir »,[183] ce n’est pas Dieu lui-même qui nous dispose à collaborer à son œuvre de réconciliation. C’est grâce à l’Esprit Saint que nous devenons vraiment « le sel de la terre » et « la lumière du monde » (Mt 5, 13. 14).
I. L’ÉGLISE COMME PRÉSENCE DU CHRIST
133. L’Église est « dans le Christ, en quelque sorte le sacrement, c’est-à-dire à la fois le signe et le moyen de l’union intime avec Dieu et de l’unité de tout le genre humain ».[184] En tant que communauté de disciples du Christ, nous pouvons laisser voir et communiquer l’amour de Dieu. L’amour « est la lumière – en réalité l’unique – qui illumine sans cesse à nouveau un monde dans l’obscurité et qui nous donne le courage de vivre et d’agir ».[185] Cette réalité devient manifeste dans l’Église universelle, diocésaine, paroissiale, dans les CEV (SCC),[186] dans les mouvements et les associations, jusque dans la famille chrétienne, « appelée à être ‘une Église domestique’, un lieu de foi, de prière et de souci affectueux pour le bien véritable et durable de chacun de ses membres »,[187] une communauté où se vit le geste de paix.[188] Les CEV (SCC), les mouvements et les associations peuvent être des lieux propices, au sein des paroisses, pour accueillir et vivre le don de la réconciliation offert par le Christ, notre paix. Chaque membre de la communauté doit devenir le gardien de l’autre : c’est une des significations du geste de la paix dans la célébration de l’Eucharistie.[189]
134. Les écoles catholiques sont de précieux instruments pour apprendre à tisser dans la société, dès l’enfance, des liens de paix et d’harmonie par l’éducation aux valeurs africaines assumées par celles de l’Évangile. J’encourage les Évêques et les Instituts de personnes consacrées à œuvrer pour que les enfants en âge de scolarisation puissent fréquenter une école : c’est une question de justice pour tout enfant et, bien plus, l’avenir de l’Afrique en dépend. Que les chrétiens, les jeunes en particulier, se dédient aux sciences de l’éducation en vue de transmettre un savoir épris de vérité, un savoir-faire et un savoir-être animés par une conscience chrétienne formée à la lumière de l’enseignement social de l’Église. Il conviendra de veiller également à assurer une rémunération juste au personnel des institutions éducatives de l’Église et à l’ensemble du personnel des structures d’Église pour renforcer la crédibilité de l’Église.
135. Dans le contexte actuel du grand brassage des populations, des cultures et des religions, le rôle des universités et institutions académiques catholiques est essentiel à la recherche patiente, rigoureuse et humble de la lumière qui vient de la Vérité. Seule une vérité qui transcende la mesure humaine, conditionnée par des limites, pacifie les personnes et réconcilie les sociétés entre elles. À cet effet, il convient de créer des universités catholiques nouvelles là où elles n’existent pas encore. Chers frères et sœurs engagés dans les universités et les institutions académiques catholiques, c’est à vous qu’il revient, d’une part, d’éduquer l’intelligence et l’esprit des jeunes générations à la lumière de l’Évangile, et, d’autre part, d’aider les sociétés africaines à mieux comprendre les défis auxquels l’Afrique est confrontée aujourd’hui, en fournissant la lumière nécessaire par vos recherches et vos analyses.
136. La mission confiée par l’Exhortation apostolique Ecclesia in Africa aux institutions universitaires catholiques conserve toute sa pertinence. Mon bienheureux prédécesseur y a écrit : « Les Universités et les Instituts supérieurs catholiques en Afrique ont un rôle important à jouer dans la proclamation de la Parole salvifique de Dieu. Ils sont un signe de la croissance de l’Église dans la mesure où ils intègrent dans leurs recherches les vérités et les expériences de la foi, et aident à les intérioriser. Ils se mettent ainsi au service de l’Église en lui fournissant du personnel bien préparé; en étudiant des questions théologiques et sociales d’importance; en développant la théologie africaine; en promouvant la tâche de l’inculturation […] en publiant des livres et en diffusant la pensée catholique; en entreprenant toutes les recherches que leur confient les Évêques et en contribuant à une étude scientifique des cultures […]. Les centres culturels catholiques offrent à l’Église des possibilités de présence et d’action dans le domaine des mutations culturelles. Ils constituent, en effet, des forums publics qui permettent de faire connaître très largement, dans un dialogue créatif, les convictions chrétiennes sur l’homme, la femme, la famille, le travail, l’économie, la société, la politique, la vie internationale, l’environnement. Ils sont ainsi des lieux d’écoute, de respect et de tolérance ».[190] Les Évêques veilleront à ce que ces institutions universitaires conservent leur nature catholique, en prenant toujours des orientations fidèles à l’enseignement du Magistère de l’Église.
137. Pour apporter une contribution forte et qualifiée à la société africaine, il est indispensable de proposer aux étudiants une formation à la Doctrine sociale de l’Église. Cela aidera ainsi l’Église en Afrique à préparer, avec sérénité, une pastorale qui rejoint l’être de l’Africain et le réconcilie avec lui-même dans l’adhésion au Christ. Il incombe aux Évêques, encore une fois, de soutenir une pastorale de l’intelligence et de la raison qui crée une habitude de dialogue rationnel et d’analyse critique dans la société et dans l’Église. J’avais dit à Yaoundé : « Ce siècle permettra peut-être, avec la grâce de Dieu, la renaissance, sur votre continent, mais certainement sous une forme différente et nouvelle, de la prestigieuse École d’Alexandrie. Pourquoi ne pas espérer qu’elle puisse fournir aux Africains d’aujourd’hui et à l’Église universelle de grands théologiens et des maîtres spirituels qui contribueraient à la sanctification des habitants de ce continent et de l’Église entière ? ».[191]
138. Il est bon que les Évêques encouragent les aumôneries à l’intérieur des universités et des institutions éducatives de l’Église, et en créent dans les établissements publics. La chapelle de l’aumônerie en sera comme le cœur. Elle permettra à l’étudiant de rencontrer Dieu et de se placer sous son regard. Elle permettra également à l’aumônier qui sera choisi avec soin pour ses vertus sacerdotales, d’exercer son ministère pastoral d’enseignement et de sanctification.
139. L’Église, de tout temps, s’est préoccupée de la santé. L’exemple vient du Christ lui-même qui, après avoir proclamé la Parole et guéri les malades, a confié à ses disciples la même autorité afin « qu’ils guérissent toute maladie et toute infirmité » (Mt 10, 1 ; cf. 14, 35 ; Mc 1, 32 et 34 ; 6, 13 et 55). C’est ce même souci des malades que l’Église, à travers ses institutions de santé, continue de manifester aux souffrants. Comme l’ont souligné les Pères synodaux, l’Église est résolument engagée dans la lutte contre les infirmités, les maladies et les grandes pandémies.[192]
140. Que les institutions de santé de l’Église et toutes les personnes qui y travaillent à divers titres, s’efforcent de voir en chaque malade un membre souffrant du Corps du Christ. Des difficultés de toute sorte se dressent sur votre chemin : le nombre croissant des malades, l’insuffisance des moyens matériels et financiers, la défection des organismes qui vous ont longtemps soutenus et vous abandonnent, tout cela vous donne parfois l’impression d’un travail sans résultats tangibles. Chers personnels de la santé, soyez les porteurs de l’amour compatissant de Jésus aux personnes qui souffrent ! Soyez patients, soyez forts et gardez courage ! Pour ce qui concerne les pandémies, les moyens financiers et matériels sont indispensables mais attachez-vous aussi sans relâche à informer et à former la population et surtout les jeunes.[193]
141. Il convient que les institutions de santé soient gérées selon les règles éthiques de l’Église, y assurant les services en conformité avec son enseignement et exclusivement en faveur de la vie. Qu’elles ne deviennent pas une source d’enrichissement pour les particuliers. La gestion des fonds octroyés doit viser à la transparence et servir surtout le bien du malade. Enfin, chaque institution de santé devrait avoir une chapelle. Sa présence rappellera au personnel (direction, gestionnaires, médecins et infirmiers ...) et au malade que Dieu seul est le Maître de la vie et de la mort. Il convient également de multiplier, dans la mesure du possible, les petits dispensaires qui assurent des soins de proximité et de premiers secours.
IV. LE MONDE DE L'INFORMATION ET DE LA COMMUNICATION
142. L’Exhortation apostolique Ecclesia in Africa considérait que les médias modernes ne sont pas seulement des instruments de communication, mais aussi un monde à évangéliser.[194] Ils doivent servir une communication authentique qui est une priorité en Afrique, car ils sont un levier important pour le développement du continent[195] et pour l’évangélisation. Les « médias peuvent constituer une aide puissante pour faire grandir la communion de la famille humaine et l’ethos des sociétés, quand ils deviennent des instruments de promotion de la participation de tous à la recherche commune de ce qui est juste ».[196]
143. Nous savons tous que les nouvelles technologies de l’information peuvent devenir de puissants instruments de cohésion et de paix ou bien des promoteurs efficaces de destruction et de division. Ils peuvent servir ou desservir sur le plan moral, propager le vrai comme le faux, proposer le laid comme le beau. La masse de nouvelles ou de contre-nouvelles, ainsi que celle d’images, peut être intéressante tout comme elle peut conduire à une forte manipulation. L’information peut très facilement devenir de la désinformation, et la formation de la déformation. Les médias peuvent promouvoir une humanisation authentique, mais ils peuvent tout autant entraîner une déshumanisation.
144. Les médias éviteront cet écueil s’ils « sont structurés et orientés à la lumière d’une image de la personne et du bien commun qui en respecte les valeurs universelles. Les moyens de communication sociale ne favorisent pas la liberté de tous et n’universalisent pas le développement et la démocratie pour tous simplement parce qu’ils multiplient les possibilités d’interconnexion et de circulation des idées. Pour atteindre de tels objectifs, il faut qu’ils aient pour visée principale la promotion de la dignité des personnes et des peuples, qu’ils soient expressément animés par la charité et mis au service de la vérité, du bien et d’une fraternité naturelle et surnaturelle ».[197]
145. L’Église doit être davantage présente dans les médias afin d’en faire non seulement un instrument de diffusion de l’Évangile mais aussi un outil pour la formation des peuples africains à la réconciliation dans la vérité, à la promotion de la justice et à la paix. Pour cela, une solide formation des journalistes à l’éthique et au respect de la vérité, les aidera à éviter l’attrait du sensationnel, ainsi que la tentation de la manipulation de l’information et de l’argent vite gagné. Que les journalistes chrétiens n’aient pas peur de manifester leur foi ! Qu’ils en soient fiers ! Il est bon également d’encourager la présence et l’activité de fidèles laïcs compétents dans le monde des communications publiques et privées. Tel le levain dans la pâte, ils continueront à témoigner de l’apport positif et constructif que l’enseignement du Christ et de son Église apporte au monde.
146. Aussi, l’option prise par la première Assemblée Spéciale pour l’Afrique de considérer la communication comme un axe majeur de l’évangélisation s’est-elle avérée fructueuse pour le développement des médias catholiques. Il conviendrait, peut-être aussi, de coordonner les structures existantes comme cela se fait déjà dans certains endroits. Améliorer de cette façon l’utilisation des médias contribuera à une plus grande promotion des valeurs défendues par le Synode : la paix, la justice et la réconciliation en Afrique,[198] et permettra à ce continent de participer au développement actuel du monde.
« LÈVE-TOI, PRENDS TON GRABAT ET MARCHE ! » (Jn 5, 8)
I. L’ENSEIGNEMENT DE JÉSUS À LA PISCINE DE BETHESDA
147. Chers frères dans l’épiscopat, chers fils et filles d’Afrique, après avoir fait le tour des principales actions et des quelques moyens proposés par l’Assemblée spéciale pour l’Afrique du Synode des Évêques pour l’accomplissement de la mission de l’Église, je souhaiterais revenir sur certains points qui ont déjà été abordés auparavant de manière diffuse.
148. L’évangile de saint Jean nous présente au chapitre 5 une scène saisissante, près de la piscine
de Bethesda. « Sous ces portiques gisaient une multitude d’infirmes, aveugles, boiteux, impotents, qui attendaient le bouillonnement de l’eau » (v. 3), c’est-à-dire l’occasion de la guérison. Il se trouvait parmi eux « un homme qui était infirme depuis trente-huit ans » (v. 5), mais qui n’avait personne pour l’aider à se plonger dans la piscine. Et voici que Jésus entre dans sa vie. Tout change lorsque Jésus lui dit : « Lève-toi, prends ton grabat et marche ! » (v. 8). « Et aussitôt, dit l’évangéliste, l’homme fut guéri » (v. 9). Il n’avait plus besoin de l’eau de la piscine.
149. L’accueil de Jésus offre à l’Afrique une guérison plus efficace et plus profonde que toute autre. Comme l’apôtre Pierre l’a déclaré dans les Actes des Apôtres (3, 6), je redis que ce n’est ni d’or, ni d’argent que l’Afrique a d’abord besoin ; elle désire se mettre debout comme l’homme de la piscine de Bethesda ; elle désire avoir confiance en elle-même, en sa dignité de peuple aimé par son Dieu. C’est donc cette rencontre avec Jésus que l’Église doit offrir aux cœurs meurtris et blessés, en mal de réconciliation et de paix, assoiffés de justice. Nous devons offrir et annoncer la Parole du Christ qui guérit, libère et réconcilie.
II. LA PAROLE DE DIEU ET LES SACREMENTS
150. Selon saint Jérôme, « ignorer les Écritures, c’est ignorer le Christ ».[199] La lecture et la méditation de la Parole de Dieu nous donnent non seulement « la science éminente de Jésus-Christ » (Ph 3, 8), mais encore, elles nous enracinent plus profondément dans le Christ et orientent notre service de la réconciliation, de la justice et de la paix. La célébration de l’Eucharistie dont la première partie est la liturgie de la Parole, en constitue la source et le sommet. Je recommande donc que l’apostolat biblique soit promu dans chaque communauté chrétienne, dans la famille et dans les mouvements ecclésiaux.
151. Que chaque fidèle du Christ prenne l’habitude de la lecture quotidienne de la Bible ! Une lecture attentive de ma récente Exhortation apostolique Verbum Domini, fournira des indications pastorales utiles. On veillera donc à initier les fidèles à la vénérable et fructueuse tradition de la lectio divina. C’est la Parole de Dieu qui peut aider à la connaissance de Jésus Christ et opérer les conversions qui aboutissent à la réconciliation, puisqu’elle passe au crible « les sentiments et les pensées du cœur » (Hb 4, 12). Les Pères du Synode encouragent les communautés chrétiennes paroissiales, les CEV (CCS), les familles et les associations et les mouvements ecclésiaux à des moments de partage de la Parole de Dieu.[200] Ils deviendront ainsi davantage des lieux où la Parole de Dieu qui édifie la communauté des disciples du Christ, est lue ensemble, méditée et célébrée. Cette Parole régénère sans cesse la communion fraternelle (cf. 1 P 1, 22-25).
152. Pour bâtir une société réconciliée, juste et pacifique, le moyen le plus efficace est une vie d’intime communion avec Dieu et avec les autres. En effet, autour de la table du Seigneur sont réunis des hommes et des femmes d’origines, de cultures, de races, de langues, et d’ethnies différentes. Ils forment une seule et même unité grâce au Corps et au Sang du Christ. À travers le Christ-Eucharistie, ils deviennent consanguins, et donc authentiquement frères et sœurs, grâce à la Parole, au Corps et au Sang de Jésus-Christ lui-même. Ce lien de fraternité est plus fort que celui de nos familles humaines, celui de nos tribus. « Car ceux que d’avance il a discernés, il les a aussi prédestinés à reproduire l’image de son Fils, afin qu’il soit l’Aîné d’une multitude de frères » (Rm 8, 29). L’exemple de Jésus les rend capables de s’aimer, de donner leur vie les uns pour les autres, car l’amour dont chacun est aimé doit se communiquer en acte et en vérité.[201] Il est donc indispensable de célébrer en communauté le dimanche, Jour du Seigneur, comme aussi les fêtes de précepte.
153. Je ne désire pas faire ici un exposé théologique sur l’Eucharistie. Dans l’Exhortation apostolique post-synodale Sacramentum caritatis, j’en ai esquissé les grands traits. J’exhorte, ici, toute l’Église en Afrique à soigner tout particulièrement la célébration de l’Eucharistie, mémorial du Sacrifice du Christ Jésus, signe d’unité et lien de charité, banquet pascal et gage de la vie éternelle. L’Eucharistie doit être célébrée avec dignité et beauté en suivant les normes établies. L’Adoration eucharistique, personnelle et communautaire, permettra d’approfondir ce grand mystère. Dans cette ligne, un Congrès eucharistique continental pourrait être célébré. Il soutiendrait l’effort des chrétiens dans leur souci de témoigner des valeurs fondamentales de communion dans toutes les sociétés africaines.[202]
154. Pour que le mystère eucharistique soit respecté, les Pères synodaux rappellent que les églises et les chapelles sont des lieux sacrés à réserver uniquement aux célébrations liturgiques en évitant, autant que possible, qu’elles deviennent de simples espaces de socialisation ou des espaces culturels. Il convient de promouvoir leur fonction première qui est celle d’être un lieu privilégié de rencontre entre Dieu et son peuple, entre Dieu et sa créature fidèle. Il convient en outre de veiller à ce que l’architecture de ces édifices cultuels soit digne du mystère célébré et conforme à la législation ecclésiastique et au style local. Ces constructions doivent être faites sous la responsabilité des Évêques, après avoir entendu l’avis de personnes compétentes en liturgie et en architecture. Que l’on puisse dire en en franchissant le seuil : « En vérité, le Seigneur Dieu est en ce lieu […] Ce n’est rien de moins qu’une Maison de Dieu et la porte du ciel » (Gn 28, 16-17) ! Ces lieux atteindront également leur finalité s’ils sont une aide à la communauté, régénérée dans l’Eucharistie et les autres Sacrements, pour prolonger leur action dans la vie sociale en perpétuant l’exemple même du Christ (cf. Jn 13, 15).[203] Cette « cohérence eucharistique »[204] interpelle toute conscience chrétienne
(cf. 1 Co 11, 17-34).
155. Pour aider les sociétés africaines à guérir des blessures de la division et de la haine, les Pères du Synode invitent l’Église à se souvenir qu’elle porte en son sein les mêmes blessures et amertumes. Dès lors, elle a besoin que le Seigneur l’en guérisse pour qu’elle atteste, de manière crédible, que le Sacrement de la Réconciliation panse et guérit les cœurs meurtris. Ce Sacrement renoue les liens rompus entre la personne humaine et Dieu et restaure les liens dans la société. Il éduque aussi nos cœurs et nos esprits pour que nous apprenions à vivre « en esprit d’union, dans la compassion, l’amour fraternel, la miséricorde, l’esprit d’humilité » (1 P 3, 8).
156. Je rappelle l’importance de la confession individuelle qu’aucun autre acte de réconciliation ou aucune autre paraliturgie ne peut remplacer. J’encourage, donc, tous les fidèles de l’Église, clergé, personnes consacrées et laïcs, à redonner sa place véritable au Sacrement de la Réconciliation dans sa double dimension personnelle et communautaire.[205] Les communautés qui n’ont pas de prêtres, à cause des distances ou pour d’autres raisons, peuvent vivre le caractère ecclésial de la pénitence et de la réconciliation à travers des formes non sacramentelles. Les chrétiens en situation d’irrégularité peuvent se joindre ainsi à la démarche pénitentielle de l’Église. Comme l’ont indiqué les Pères synodaux, la forme non sacramentelle peut être considérée comme un moyen de préparation des fidèles à une réception fructueuse du Sacrement,[206]mais elle ne pourra pas devenir une norme habituelle, et encore moins remplacer le Sacrement lui-même. J’exhorte de tout cœur les prêtres à vivre ce Sacrement personnellement, et à se rendre vraiment disponibles pour sa célébration.
157. Pour encourager la réconciliation, à titre collectif, je recommande vivement, comme l’ont souhaité les Pères synodaux, de célébrer tous les ans dans chaque pays africain « un jour ou une semaine de réconciliation, particulièrement pendant l’Avent ou le Carême ».[207] Le S.C.E.A.M. pourra contribuer à sa réalisation et, en accord avec le Saint-Siège, promouvoir une Année de la réconciliation au niveau continental pour demander à Dieu un pardon spécial pour tous les maux et blessures que les êtres humains se sont infligés les uns aux autres en Afrique, et pour que se réconcilient les personnes et les groupes qui ont été blessés dans l’Église et dans l’ensemble de la société.[208] Il s’agirait d’une Année jubilaire extraordinaire « pendant laquelle l’Église en Afrique et dans les îles adjacentes rend grâce avec l’Église universelle et prie pour recevoir les dons de l’Esprit Saint »,[209] spécialement le don de la réconciliation, de la justice et de la paix.
158. Pour de telles célébrations, il sera utile de suivre le conseil des Pères synodaux : « Que la mémoire des grands témoins qui ont donné leur vie au service de l’Évangile et du bien commun ou pour la défense de la vérité et des droits humains soit gardée et fidèlement rappelée ».[210] À cet égard, les saints sont les véritables étoiles de notre vie, eux « qui ont su vivre dans la droiture. Ils sont des lumières d’espérance. Certes, Jésus Christ est la lumière par antonomase, le soleil qui se lève sur toutes les ténèbres de l’histoire. Mais pour arriver jusqu’à Lui nous avons besoin aussi de lumières proches – de personnes qui donnent une lumière en la tirant de sa lumière et qui offrent ainsi une orientation pour notre traversée ».[211]
III. LA NOUVELLE ÉVANGÉLISATION
159. Avant de conclure ce document, je désire revenir à nouveau sur la tâche de l’Église en Afrique qui est celle de s’engager dans l’évangélisation, dans la missio ad gentes, ainsi que dans la nouvelle évangélisation, afin que la physionomie du continent africain se modèle toujours plus sur l’enseignement toujours actuel du Christ, vraie « lumière du monde » et authentique « sel de la terre ».
A. PORTEURS DU CHRIST « LUMIÈRE DU MONDE »
160. L’œuvre urgente de l’évangélisation se réalise de manière différente, selon la diversité des situations de chaque pays. « Au sens propre, il y a la mission ad gentes pour ceux qui ne connaissent pas le Christ. Au sens large, on parle d’ “évangélisation” pour ce qui concerne l’aspect ordinaire de la pastorale, et de la “nouvelle évangélisation” pour ceux qui ne suivent plus une conduite chrétienne ».[212] Seule l’évangélisation qui est animée par la force de l’Esprit-Saint, devient la « loi nouvelle de l’Évangile » et porte des fruits spirituels.[213] Le cœur de toute activité évangélisatrice est l’annonce de la personne de Jésus, le Verbe de Dieu incarné (cf. Jn 1, 14), mort et ressuscité, pour toujours présent dans la communauté des fidèles, dans son Église (cf. Mt 28, 20). Il s’agit d’une tâche urgente non seulement pour l’Afrique, mais pour le monde entier, car la mission que le Christ rédempteur a confiée à son Église n’a pas encore atteint sa pleine réalisation.
161. L’« Évangile de Jésus Christ, Fils de Dieu » (Mc 1, 1) est le chemin sûr pour rencontrer la Personne du Seigneur Jésus. Scruter les Écritures nous permet de découvrir toujours plus le véritable visage de Jésus, révélation de Dieu le Père (cf. Jn 12, 45), et son œuvre de salut. « Redécouvrir la centralité de la Parole divine dans la vie chrétienne nous fait retrouver la signification la plus profonde de ce que le Pape Jean-Paul II a rappelé avec force : poursuivre la missio ad gentes et entreprendre de toutes nos forces la nouvelle évangélisation ».[214]
162. Conduite par l’Esprit-Saint, l’Église en Afrique doit annoncer – en le vivant – le mystère
du salut à ceux qui ne le connaissent pas encore. L’Esprit Saint que les chrétiens ont reçu au
Baptême est le feu d’amour qui pousse à l’action évangélisatrice. Après la Pentecôte, les disciples « remplis de l’Esprit Saint » (Ac 2, 4) sont sortis du Cénacle, où, par peur, ils s’étaient enfermés, pour proclamer la Bonne Nouvelle de Jésus Christ. L’évènement de la Pentecôte, nous permet de mieux comprendre la mission des chrétiens, « lumière du monde » et « sel de la terre » sur le continent africain. Le propre de la lumière est de se diffuser et d’éclairer de nombreux frères et sœurs qui sont encore dans les ténèbres. La missio ad gentes engage tous les chrétiens d’Afrique. Animés par l’Esprit, ils doivent être porteurs de Jésus-Christ, « lumière du monde », partout sur le continent, dans tous les domaines de la vie personnelle, familiale et sociale. Les Pères synodaux ont souligné « l’urgence et la nécessité de l’évangélisation qui est la mission et la véritable identité de l’Église ».[215]
B. TÉMOINS DU CHRIST RESSUSCITÉ
163. Le Seigneur Jésus exhorte encore aujourd’hui les chrétiens d’Afrique à prêcher en son nom « à tous les peuples, la conversion et le pardon des péchés » (Lc 24, 47). Pour cela, ils sont appelés à être témoins du Seigneur ressuscité (cf. Lc 24, 48). Les Pères synodaux ont souligné que l’évangélisation « consiste essentiellement à rendre témoignage au Christ dans la puissance de l’Esprit par la vie, puis par la parole, dans un esprit d’ouverture aux autres, de respect et de dialogue avec eux, en s’en tenant aux valeurs de l’Évangile ».[216] Pour ce qui est de l’Église en Afrique, ce témoignage doit être au service de la réconciliation, de la justice et de la paix.
164. L’annonce de l’Évangile doit retrouver l’ardeur des débuts de l’évangélisation du continent africain, attribuée à l’évangéliste Marc, suivi par une « foule innombrable de saints, de martyrs, de confesseurs et de vierges ».[217] Avec gratitude, il faut se mettre à l’école de l’enthousiasme de nombreux missionnaires qui, pendant plusieurs siècles, ont sacrifié leur vie pour apporter la Bonne Nouvelle à leurs frères et sœurs africains. Au cours de ces dernières années, l’Église a commémoré en différents pays le centenaire de l’évangélisation. Elle s’est justement engagée à diffuser l’Évangile à ceux qui ne connaissent pas encore le nom de Jésus-Christ.
165. Afin que cet effort devienne toujours plus efficace, la missio ad gentes doit aller de pair avec la nouvelle évangélisation. En Afrique aussi, les situations qui requièrent une nouvelle présentation de l’Évangile, « nouvelle dans son ardeur, dans ses méthodes et dans ses expressions »,[218] ne sont pas rares. En particulier, la nouvelle évangélisation doit intégrer la dimension intellectuelle de la foi dans l’expérience vive de la rencontre avec Jésus-Christ présent et agissant dans la communauté ecclésiale. Car à l’origine du fait d’être chrétien, il n’y a pas une décision éthique ou une grande idée, mais la rencontre avec un événement, avec une Personne, qui donne à la vie un nouvel horizon et par là son orientation décisive. La catéchèse doit donc intégrer la partie théorique, constituée de notions apprises par cœur, à celle pratique, vécue au niveau liturgique, spirituel, ecclésial, culturel et caritatif, afin que la semence de la Parole de Dieu, tombée sur une terre fertile, laisse de profondes racines et puisse grandir et parvenir à maturité.
166. Pour que cela advienne, il est indispensable d’employer de nouvelles méthodes qui sont à notre disposition aujourd’hui. Quand il s’agit des moyens de communication sociale dont j’ai déjà parlé, il ne faut pas oublier ce que j’ai noté récemment dans l’Exhortation apostolique post-synodale Verbum Domini : « Saint Thomas d’Aquin, en mentionnant saint Augustin, insiste avec force : “Même la lettre de l’Évangile tue s’il manque, à l’intérieur de l’homme, la grâce de la foi qui guérit” ».[219] Conscients de cette exigence, il faut aussi toujours se rappeler qu’aucun moyen ne peut ni ne doit se substituer au contact personnel, à l’annonce verbale, ainsi qu’au témoignage d’une vie chrétienne authentique. Ce contact personnel et cette annonce verbale doivent exprimer la foi vive qui engage et transforme l’existence, et l’amour de Dieu qui touche et rejoint chacun tel qu’il est.
C. MISSIONNAIRES À LA SUITE DU CHRIST
167. L’Église qui chemine en Afrique est appelée à contribuer à la nouvelle évangélisation également dans les pays sécularisés, d’où provenaient auparavant de nombreux missionnaires et qui aujourd’hui manquent malheureusement de vocations sacerdotales et à la vie consacrée. Entre-temps, un grand nombre d’Africains et d’Africaines ont accueilli l’invitation du Maître de la moisson (cf. Mt 9, 37-38) à travailler à sa vigne (cf. Mt 20, 1-16). Sans diminuer l’élan missionnaire ad gentes dans les différents pays, et même sur le continent tout entier, les Évêques d’Afrique doivent accueillir avec générosité l’invitation de leurs confrères des pays qui manquent de vocations, et venir en aide aux fidèles privés de prêtres. Cette collaboration, qui doit être réglementée par des accords entre l’Église qui envoie et celle qui reçoit, devient un signe concret de fécondité de la mission ad gentes. Bénie par le Seigneur, Bon Pasteur (cf. Jn 10, 11-18), elle soutient ainsi de façon précieuse la nouvelle évangélisation dans les pays d’ancienne tradition chrétienne.
168. L’annonce de la Bonne Nouvelle fait naître dans l’Église de nouvelles expressions, appropriées aux nécessités du temps, des cultures, et aux attentes des hommes. L’Esprit Saint ne manque pas de susciter aussi en Afrique des hommes et des femmes qui, rassemblés en différentes associations, mouvements, et communautés, consacrent leur vie à la diffusion de l’Évangile de Jésus-Christ. Selon l’exhortation de l’Apôtre des nations – « n’éteignez pas l’Esprit, ne dépréciez pas les dons de prophéties ; mais vérifiez tout : ce qui est bon, retenez-le ; gardez-vous de toute espèce de mal » (1 Th 5, 19-22) – les Pasteurs ont le devoir de veiller afin que ces nouvelles expressions de la fécondité pérenne de l’Évangile s’insèrent dans l’action pastorale des paroisses et des diocèses.
169. Chers frères et sœurs, à la lumière du thème de la deuxième Assemblée spéciale pour l’Afri-
que, la nouvelle évangélisation concerne, en particulier, le service de l’Église en vue de la réconciliation, de la justice et de la paix. Par conséquent, il est nécessaire d’accueillir la grâce de l’Esprit Saint qui nous invite : « Laissez-vous réconcilier avec Dieu » (2 Co 5, 20). Les chrétiens sont donc tous invités à se réconcilier avec Dieu. Alors, vous serez en mesure de devenir des artisans de la réconciliation au sein des communautés ecclésiales et sociales dans lesquelles vous vivez et œuvrez. La nouvelle évangélisation suppose la réconciliation des chrétiens avec Dieu et avec eux-mêmes. Elle exige la réconciliation avec le prochain, le dépassement des barrières de toutes sortes comme celles provenant de la langue, de la culture et de la race. Nous sommes tous fils d’un seul Dieu et Père « qui fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et tomber la pluie sur les justes et sur les injustes » (Mt 5, 45).
170. Dieu bénira un cœur réconcilié, en lui accordant sa paix. Le chrétien deviendra ainsi un artisan de paix (cf. Mt 5, 9) dans la mesure où, enraciné dans la grâce divine, il collabore avec son Créateur à la construction et à la promotion du don de la paix. Le fidèle réconcilié deviendra aussi promoteur de la justice en tout lieu, surtout dans les sociétés africaines divisées, en proie à la violence et à la guerre, qui ont faim et soif de la vraie justice. Le Seigneur nous invite : « Cherchez d’abord le Royaume et sa justice, et tout cela vous sera donné par surcroît » (Mt 6, 33).
171. La nouvelle évangélisation est une tâche urgente pour les chrétiens en Afrique, car eux aussi doivent ranimer leur enthousiasme d’appartenir à l’Église. Sous l’inspiration de l’Esprit du Seigneur ressuscité, ils sont appelés à vivre, au niveau personnel, familial et social, la Bonne Nouvelle et à l’annoncer avec un zèle renouvelé aux personnes proches et lointaines, en employant pour sa diffusion les nouvelles méthodes que la Providence divine met à notre disposition. En louant Dieu le Père pour les merveilles qu’il continue d’accomplir dans son Église en chacun de ses membres, les fidèles sont invités à vivifier leur vocation chrétienne dans la fidélité à la Tradition ecclésiale vivante. Ouverts à l’inspiration de l’Esprit Saint, qui continue de susciter différents charismes dans l’Église, les chrétiens doivent poursuivre ou entreprendre avec détermination le chemin de la sainteté pour devenir toujours plus apôtres de la réconciliation, de la justice et de la paix.
CONCLUSION :
« AIE CONFIANCE ! LÈVE-TOI, IL T'APPELLE ! » (Mc 10, 49)
172. Chers frères et sœurs, le dernier mot du Synode a été un appel à l’espérance, lancé à l’Afrique. Un tel appel sera vain s’il ne s’enracine pas dans l’amour trinitaire. De Dieu, Père de tous, nous recevons la mission de transmettre à l’Afrique l’amour dont nous a aimés le Christ, le Fils aîné, afin que notre action, animée par son Esprit Saint, soit portée par l’espérance et devienne, en même temps, source d’espérance. Tout en désirant faciliter la mise en pratique des orientations du Synode sur des sujets aussi brûlants que sont la réconciliation, la justice et la paix, je souhaite que les
« théologiens continuent d’explorer la profondeur du mystère trinitaire et sa signification pour le quotidien africain ».[220] Puisque la vocation de tout homme est unique, ne laissons pas s’essouffler en nous l’élan vital de la réconciliation de l’humanité avec Dieu par le mystère de notre salut dans le Christ. La rédemption est la raison de la fiabilité et de la fermeté de notre espérance « en vertu de laquelle nous pouvons affronter notre présent : le présent, même un présent pénible, peut être vécu et accepté s’il conduit vers un terme et si nous pouvons être sûrs de ce terme, si ce terme est si grand qu’il peut justifier les efforts du chemin ».[221]
173. Je le redis à nouveau : « Lève-toi, Église en Afrique […] parce que le Père céleste t’appelle, Lui que tes ancêtres invoquaient comme Créateur, avant d’en connaître la proximité miséricordieuse, révélée dans son Fils unique, Jésus-Christ. Entreprends le chemin d’une nouvelle évangélisation avec le courage qui te vient de l’Esprit Saint ».[222]
174. Le visage de l’évangélisation prend aujourd’hui le nom de réconciliation, « condition indispensable pour instaurer en Afrique des rapports de justice entre les hommes et pour construire une paix équitable et durable dans le respect de chaque individu et de tous les peuples ; une paix qui […] s’ouvre à l’apport de toutes les personnes de bonne volonté au-delà des appartenances religieuses, ethniques, linguistiques, culturelles et sociales respectives ».[223] Que l’Église catholique tout entière accompagne de son affection les frères et sœurs du continent africain ! Que les saints de l’Afrique les soutiennent par leur prière d’intercession ![224]
175. Que « le bon maître de maison, saint Joseph, qui sait bien personnellement ce que signifie réfléchir, dans une attitude de sollicitude et d’espérance, sur les chemins futurs de la famille, [et qui] nous a écoutés avec amour et nous a accompagnés jusqu’au Synode »,[225] protège et accompagne l’Église dans sa mission au service de l’Afrique, terre où il trouva, pour la Sainte Famille, refuge et protection (cf. Mt 2, 13-15) ! Que la Bienheureuse Vierge Marie, Mère du Verbe de Dieu et Notre-Dame d’Afrique, continue d’accompagner toute l’Église par son intercession et ses invitations à faire tout ce que nous dira son Fils (cf. Jn 2, 5) ! Que la prière de Marie, Reine de la Paix, dont le cœur est toujours orienté vers la volonté de Dieu, soutienne tout effort de conversion, qu’elle consolide toute initiative de réconciliation, et affermisse tout effort en faveur de la paix dans un monde qui a faim et soif de justice (cf. Mt 5, 6) ![226]
176. Chers frères et sœurs, par la deuxième Assemblée spéciale pour l’Afrique du Synode des Évêques, le Seigneur, bon et miséricordieux, vous rappelle de façon pressante que « vous êtes le sel de la terre… la lumière du monde » (Mt 5, 13-14). Que ces paroles vous redisent la dignité de votre vocation d’enfants de Dieu, membres de l’Église une, sainte, catholique et apostolique ! Cette vocation consiste à répandre dans un monde souvent enténébré la clarté de l’Évangile, la splendeur de Jésus-Christ, vraie lumière qui « éclaire tout homme » (Jn 1, 9). En outre, les chrétiens doivent offrir aux hommes le goût de Dieu le Père, la joie de sa présence créatrice dans le monde. Ils sont aussi appelés à collaborer avec la grâce de l’Esprit Saint, afin que le miracle de la Pentecôte se poursuive sur le continent africain, et que chacun devienne toujours plus un apôtre de la réconciliation, de la justice et de la paix.
177. Puisse l’Église catholique en Afrique être toujours un des poumons spirituels de l’humanité, et devenir chaque jour davantage une bénédiction pour le noble continent africain et pour le monde entier !
Donné à Ouidah, au Bénin, le 19 novembre 2011, en la septième année de mon pontificat.
BENEDICTUS PP. XVI
[1] Jean-Paul II, Exhort. apost. post-synodale Ecclesia in Africa (14 septembre 1995), n. 1 : AAS 88 (1996), p. 5 ; La Documentation catholique (par la suite DC) 2123 (1995), p. 817.
[2] Cf. Première Assemblée spéciale du Synode des Évêques pour l’Afrique, Message final (6 mai 1994), nn. 24-25, L’Osservatore Romano français (par la suite ORF) 2316 (1994), p. 93 ; DC 2095 (1994), pp. 528-529 ; Jean-Paul II, Exhort. apost. post-synodale Ecclesia in Africa (14 septembre 1995), n. 63 : AAS 88 (1996), pp. 39-40 ; DC 2123 (1995), pp. 832-833.
[3] Cf. Deuxième Assemblée spéciale du Synode des Évêques pour l’Afrique, Proposition (par la suite Prop.), n. 1: DC 2434 (2009), p. 1035.
[4] Cf. Prop. n. 2 : DC 2434 (2009), p. 1035.
[5] Benoît XVI, Discours aux membres du Conseil spécial pour l’Afrique du Synode des Évêques, (Yaoundé, 19 mars 2009), AAS 101 (2009), p. 310 ; DC 2422 (2009), p. 386.
[6] Jean-Paul II, Exhort. apost. post-synodale Ecclesia in Africa (14 septembre 1995), n. 63 : AAS 88 (1996), pp. 39-40 ; DC 2123 (1995), p. 832.
[7] Cf. n. 92 : AAS 88 (1996), pp. 57-58 ; DC 2123 (1995), pp. 840-841 ; Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n. 11 ; Conc. œcum. Vat. II, Décret Apostolicam actuositatem, n. 11 ; Jean-Paul II, Exhort. apost. Familiaris consortio (22 novembre 1981), n. 21 : AAS 74 (1982), pp. 104-106 ; DC 1821 (1982), p. 8.
[8] N. 63 : AAS 88 (1996), pp. 39-40 ; DC 2123 (1995), p. 832.
[9] Quis dives salvetur 29, 2-3 : PG 9, 633 ; Sources chrétiennes (par la suite SC) 537, pp. 176-177.
[10] Benoît XVI, Discours à la Curie romaine à l’occasion de l’échange des vœux (21 décembre 2009) : AAS 102 (2010), p. 35 ; DC 2439 (2010), p. 109.
[11] N. 79 : AAS 88 (1996), p. 51; DC 2123 (1995), p. 838.
[12] Benoît XVI, Lett. enc. Caritas in veritate (29 juin 2009), n. 1 : AAS 101 (2009), p. 641 ; DC 2429 (2009), p. 753.
[13] Benoît XVI, Homélie de la Messe d’ouverture de la deuxième Assemblée spéciale pour l’Afrique du Synode des Évêques (4 octobre 2009) : AAS 101 (2009), p. 907 ; DC2433 (2009), p. 951.
[14] Jean-Paul II, Lett. apost. Novo millennio ineunte (6 janvier 2001), n. 3 : AAS 93 (2001), p. 267 ; DC 2240 (2001), p. 69.
[15] Ibidem, n. 29: AAS 93 (2001), p. 286 ; DC 2240 (2001), p. 78.
[16] Adversus haereses, IV, 20, 7 : PG 7, 1037 ; SC100/II, pp. 648-649.
[17] Prop. n. 34 ; DC 2434 (2009), p. 1047.
[18] Benoît XVI, Homélie de clôture de la deuxième Assemblée spéciale pour l’Afrique du Synode des Évêques (25 octobre 2009) : ASS 101 (2009), p. 918 ; DC 2434 (2009), p. 1024.
[19] Prop. n. 46 : DC 2434 (2009), p. 1051.
[20] XIIe Assemblée générale ordinaire du Synode des Évêques, Message final (24 octobre 2008), n. 10 ; ORF 3055 (2008), p. 28 ; DC 2412 (2008), p. 1010.
[21] Benoît XVI, Discours à la Curie romaine à l’occasion de l’échange des vœux (21 décembre 2009) : AAS 102 (2010), p. 35 ; DC 2439 (2010), p. 109.
[22] Cf. Benoît XVI, Lett. enc. Caritas in veritate (29 juin 2009), nn. 5-9 : AAS 101 (2009), pp. 643-647 ; DC 2429 (2009), pp. 754-756.
[23] Benoît XVI, Discours à la Curie romaine à l’occasion de l’échange des vœux (21 décembre 2009) : AAS 102 (2010), p. 35 ; DC 2439 (2010), p. 109.
[24] Benoît XVI, Message pour la Journée mondiale de la Paix 2008 : AAS 100 (2008), pp. 38-45 ; DC 2393 (2008), pp. 2-6.
[25] Benoît XVI, Discours à la Curie romaine à l’occasion de l’échange des vœux (21 décembre 2009) : AAS 102 (2010), p. 37 ; DC 2439 (2010), p. 109.
[26] Cf. Prop. n. 5 : DC 2434 (2009), p. 1036.
[27] Rapport avant le débat, II, a : ORF 3104 (2009), p. 13 ; DC 2433 (2009), p. 992.
[28] Idem.
[29] Benoît XVI, Discours à la Curie romaine à l’occasion de l’échange des vœux (21 décembre 2009) : AAS 102 (2010), p. 35 ; DC 2439 (2010), p. 109.
[30] Cf. Benoît XVI, Homélie à la messe de conclusion de la deuxième Assemblée spéciale pour l’Afrique du Synode des Évêques (25 octobre 2009) : AAS 101 (2009), p. 916 ;DC2434 (2009), pp. 1022-1024.
[31] Cf. Jean-Paul II, Message pour la célébration de la Journée mondiale de la paix 1997, n. 1 : AAS 89 (1997), p. 1 ; DC 2152 (1997), p. 51.
[32] Prop. n. 5 : DC 2434 (2009), p. 1036.
[33] Cf. Benoît XVI, Lett. enc. Deus caritas est (25 décembre 2005), n. 28 : AAS 98 (2006), pp. 238-240 ; DC 2352 (2006), pp. 178-180.
[34] Cf. Prop. n. 14 : DC 2434 (2009), pp. 1039-1040.
[35] Cf. Benoît XVI, Lett. enc. Caritas in veritate (29 juin 2009), n. 9 : AAS 101 (2009) pp. 646-647 ; DC 2429 (2009), p. 756.
[36] Cf. Benoît XVI, Lett. enc. Deus caritas est (25 décembre 2005), nn. 28-29 : AAS 98 (2006), pp. 238-240 ; Commission théologique internationale, Quelques questions sur la Théologie de la Rédemption (29 novembre 1994), nn. 14-20.
[37] Cf. Conc. œcum. Vat. II, Const. past. Gaudium et spes, n. 40 ; Conseil pontifical Justice et Paix, Compendium de la Doctrine sociale de l’Église, nn. 49-51.
[38] Cf. S. Thomas d’Aquin, S. Th.IIa-IIae, q. 58, a. 1.
[39] Cf. Jean-Paul II, Lett. enc. Centesimus annus (1er mai 1991), n. 35 : AAS 83 (1991), p. 837 ; DC 2029 (1991), p. 535.
[40] Catéchisme de l’Église catholique, n. 1894.
[41] Deuxième Assemblée spéciale pour l’Afrique du Synode des Évêques, Lineamenta (3 décembre 2007), n. 44 : ORF 2940 (2006), p. VI dans le supplément ; DC 2365 (2006), p. 845.
[42] S. Augustin, De civitate Dei, XIX, 21, 1 : Patrologia Latina, cursus completus, éd. J.-P. Migne (par la suite PL), 41, 649.
[43] Cf. Benoît XVI, Message de Carême 2010 : Insegnamenti, V/2(2009), p. 454 ; DC 2440 (2010), pp. 152-153.
[44] Cf. idem.
[45] Cf. Prop. n. 17 : DC 2434 (2009), pp. 140-141.
[46] Cf. Benoît XVI, Lett. enc. Caritas in veritate (29 juin 2009), n. 6 : AAS 101 (2009) p. 644 ; DC 2429 (2009), pp. 754-755.
[47] Benoît XVI, Lett. enc. Deus caritas est (25 décembre 2005), n. 28 : AAS 98 (2006), p. 240 ; DC 2352 (2006), pp. 179-180.
[48] Cf. Paul VI, Exhort. apost. Evangelii nuntiandi(8 décembre 1975), nn. 53.80 : AAS 68 (1976), pp. 41-42 et 73-74; DC 73 (1976), pp. 11 et 20 ; Jean-Paul II, Lett. enc. Redemptoris missio
(7 décembre 1990), n. 46 : AAS 83 (1991), p. 293; DC 88 (1991), p. 170.
[49] Cf. Deuxième Assemblée spéciale du Synode des Évêques pour l’Afrique, Message final (23 octobre 2009), n. 36 : ORF 3107 (2009), p. 26 ; DC 2434 (2009), p. 1033.
[50] Cf. Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n. 1.
[51] Cf. Congrégation pour la Doctrine de la Foi, Note doctrinale sur certains aspects de l’Évangélisation (3 décembre 2007), n. 9 : AAS 100 (2008), pp. 497-498 ; DC 2394 (2008), p. 63.
[52] Deuxième Assemblée spéciale pour l’Afrique du Synode des Évêques, Lineamenta, (3 décembre 2007), n. 48 : ORF 2940 (2006), p. VII dans le supplément ; DC 2365 (2006), p. 846.
[53] Prop. n. 43 : DC 2434 (2009), p.1051.
[54] Idem.
[55] Cf. Benoît XVI, Discours au Conseil pontifical pour les Laïcs (21 mai 2010) : Insegnamenti, VI/1 (2010), p. 758 ; DC 2452 (2010), p. 753.
[57] Paul VI, Exhort. apost. Evangelii nuntiandi (8 décembre 1975), n. 22 : AAS 68 (1976), p. 20 ; DC 73 (1976), p. 5.
[58] Cf. Prop. n. 9 : DC 2434 (2009), pp. 1037-1038.
[59] Cf. Prop. n. 8 : DC 2434 (2009), p. 1037.
[60] Cf. nn. 28-34 : AAS 77 (1985), pp. 250-273 ; DC 1887 (1985), pp. 16-27. Cet enseignement a été confirmé par la Lettre apostolique sous forme de Motu proprio Misericordia Dei (2 mai 2002) : AAS 94 (2002), pp. 452-459 ; DC 2270 (2002), pp. 451-455.
[61] Cf. Prop. n. 7 : DC 2434 (2009), p. 1037.
[62] Cf. Jean-Paul II, Lett. apost. Novo millennio ineunte (6 janvier 2001), n. 43 : AAS 93 (2001), pp. 296-299; DC 2240 (2001), pp. 83-84.
[63] Idem.
[64] Idem.
[65] Cf. Prop. n. 9 : DC 2434 (2009), pp. 1037-1038.
[66] Cf. Prop. n. 33 : DC 2434 (2009), pp. 1046-1047.
[67] Congrégation pour la Doctrine de la Foi, Note doctrinale sur certains aspects de l’Évangélisation (3 décembre 2007), n. 6 : AAS 100 (2008), p. 494 ; DC 2394 (2008), p. 62.
[68] Cf. Paul VI, Exhort. apost. Evangelii nuntiandi (8 décembre 1975), nn. 19-20 : AAS 68 (1976), pp. 18-19; DC 73 (1976), pp. 4-5.
[69] Jean-Paul II, Lett. apost. Novo millennio ineunte (6 janvier 2001), n. 40 : AAS 93 (2001), p. 295; DC 2240 (2001), p. 82.
[70] Cf. Prop. n. 32 : DC 2434 (2009), p. 1046.
[71] Benoît XVI, Deuxième Assemblée spéciale pour l’Afrique du Synode des Évêques, Méditation durant l’Heure de Tierce (5 octobre 2009) : AAS 101 (2009), p. 924 ; ORF 3104 (2009), p. 5.
[72] N. 55 : AAS 102 (2010), pp. 734-735.
[73] Cf. Prop. n. 45 : DC 2434 (2009), p. 1051.
[74] Benoît XVI, Discours aux membres du Conseil spécial pour l’Afrique du Synode des Évêques, (Yaoundé, 19 mars 2009) : AAS 101 (2009), p. 313 ; DC 2422 (2009), pp. 385-388.
[75] Cf. Benoît XVI, Exhort. apost. post-synodale Sacramentum caritatis (22 février 2007), n. 51 : AAS 99 (2007), p. 144 ; DC 2377 (2007), p.324.
[76] Congrégation pour la Doctrine de la Foi, Lettre aux Évêques de l’Église catholique sur la collaboration de l’homme et de la femme dans l’Église et dans le monde (31 mai 2004), n. 13 :AAS 96 (2004), p. 682.
[77] Benoît XVI, Message pour la Journée mondiale de la Paix 2008 : AAS 100 (2008), pp. 38-39 ; DC 2393 (2008), p. 3.
[78] Cf. Prop. n. 38 : DC 2434 (2009), pp. 1048-1049.
[79] Benoît XVI, Exhort. apost. post-synodale Sacramentum caritatis (22 février 2007), n. 79 : AAS 99 (2007), pp. 165-166 ; DC 2377 (2007), pp. 335-336.
[80] Cf. idem, n. 73.
[81] Cf. Jean-Paul II, Lett. apost. Novo millennio ineunte (6 janvier 2001), nn. 38-39 : AAS 93 (2001) pp. 293-294 ; DC 2240 (2001), pp. 81-82.
[82] Jean-Paul II, Exhort. apost. Familiaris consortio (22 novembre 1981), n. 39 : AAS 74 (1982), pp. 130-131 ; DC 1821 (1982), pp. 15-16 ; Paul VI, Exhort. apost. Evangelii nuntiandi (8 décembre 1975), n. 71 : AAS 68 (1976), pp. 60-61 ; DC 73 (1976), p. 16.
[83] Jean-Paul II, Homélie lors du Jubilé du « Troisième âge » (17 septembre 2000), n. 5 : AAS 92 (2000), p. 876 ; DC 2234 (2000), p. 856 ; cf. également : Lettre aux personnes âgées (1er octobre 1999) : AAS 92 (2000), pp. 186-204 ; DC2214 (1999), pp. 967-974.
[84] Cf. Deuxième Assemblée spéciale du Synode des Évêques pour l’Afrique, Message final (23 octobre 2009), n. 26 : ORF 3107 (2009), p. 25; DC 2434 (2009), p. 1031.
[85] Epistula 1, 11 : PL 65, 306C ; SC 487, p. 89.
[86] Cf. Jean-Paul II, Exhort. apost. Familiaris consortio (22 novembre 1981), nn. 25.43 : AAS 74 (1982), pp. 110-111 et 134-135 ; DC 1821 (1982), pp. 9-10 et 17.
[87] Cf. Prop. n. 45: DC (2009), n. 2434, p. 1051.
[88] Cf. Deuxième Assemblée spéciale du Synode des Évêques pour l’Afrique, Message final (23 octobre 2009), n. 26 : ORF 3107 (2009), p. 25 ; DC (2009), n. 2434, p. 1031.
[89] Cf. Conc. œcum. Vat. II, Const. past. Gaudium et spes, n. 67.
[90] Origène, Traité des principes, IV, 4, 10 ; SC 268 (1980), p. 427.
[91] Lett. apost. Mulieris dignitatem (15 août 1988), n. 29 : AAS 80 (1988), p. 1722 ; DC1972 (1988), pp. 1085-1086 ; cf. Benoît XVI, Rencontre avec les Associations catholiques pour la promotion de la femme (Luanda, 22 mars 2009) : Insegnamenti, V/1 (2009), p.484 ; DC 2422 (2009), pp. 402-404.
[92] Benoît XVI, Rencontre avec les Associations catholiques pour la promotion de la femme(Luanda, 22 mars 2009) : Insegnamenti, V/1,2009, p.484 ; DC 2422 (2009), pp. 402-404.
[93] Cf. Prop. n. 47 : DC 2434 (2009), p. 1052.
[94] Benoît XVI, Rencontre avec les associations catholiques pour la promotion de la femme(Luanda, 22 mars 2009): Insegnamenti, V/1 (2009), p.484 ; DC 2422 (2009), pp. 402-404.
[95] Deuxième Assemblée générale ordinaire du Synode des Évêques, Doc. Justitia in mundo (30 novembre 1971), n. 45 : AAS 63 (1971) p. 933 ; cf. Jean-Paul II, Exhort. apost. post-synodale Ecclesia in Africa (14 septembre 1995), n. 121: AAS 88 (1996), pp. 71-72 : cf. DC 2123 (1995), p. 847.
[96] Deuxième Assemblée spéciale du Synode des Évêques pour l’Afrique, Message final (23 octobre 2009), n. 25 : ORF 3107 (2009), p. 25; DC 3424 (2009), pp. 1030-1031.
[97] Benoît XVI, Message pour la Journée mondiale de la paix 2010, n. 12 : AAS 102 (2010) p. 49; DC 2437 (2010), p. 7 ; cf. Benoît XVI, Lett. enc. Caritas in veritate (29 juin 2009), n. 51 : AAS 101 (2009), p. 687 ; DC 2429 (2009), p. 780.
[98] Cf. Jean-Paul II, Lett. apost. Mulieris dignitatem (15 août 1988), n. 31 : AAS 80 (1988), pp. 1727-1729 ; DC1972 (1988), pp. 1087-1088; Lettre aux femmes (29 juin 1995), n. 12 : AAS 87 (1995), p. 812 ; DC 2121 (1995), pp. 721-722.
[99] Cf. Deuxième Assemblée spéciale du Synode des Évêques pour l’Afrique, Message final (23 octobre 2009), nn. 27-28 : ORF 3107 (2009), p. 25; DC 2434 (2009), p. 1031.
[100] Jean-Paul II, Lett. apost. Novo millennio ineunte (6 janvier 2001), n. 9 : AAS 93 (2001), p. 272 ; DC 2240 (2001), pp. 71-72.
[101] N. 104 : AAS 102 (2010), p. 772.
[102] Règle III, 3 ; cf. Jean-Paul II, Lett. apost. Novo millennio ineunte (6 janvier 2001), n. 45 : AAS 93 (2001), pp. 298-299 ; DC 2240 (2001), p. 84.
[103] Cf. Prop. n. 48 : DC 2434 (2009), p. 1052.
[104] Cf. Benoît XVI, Message pour la XXV° Journée mondiale de la jeunesse (22 février 2010),n. 7 : AAS102 (2010), pp. 253-254 ; DC2444 (2010), p. 355 ; Benoît XVI, Exhort. apost. post-synodale Verbum Domini (30 septembre 2011),n. 104 : AAS102 (2010), pp. 772-773.
[105] AAS 97 (2005), p. 712 ; DC 2337 (2005), p. 549.
[106] Jean-Paul II, Lett. enc. Evangelium vitae (25 mars 1995), n. 57 : AAS 87 (1995), p.466 ; DC 2114 (1995), p. 380.
[107] Les Pères synodaux se sont référés à diverses situations, comme, par exemple : les enfants tués avant de naître, les enfants non désirés, les orphelins, les albinos, les enfants de la rue, les enfants abandonnés, les enfants-soldats, lesenfants prisonniers, les enfants forcés à travailler, les enfants maltraités à cause d’un handicap physique ou mental, les enfants dits sorciers, les enfants dits serpents, les enfants vendus comme esclaves sexuels, les enfants traumatisés, sans perspectives d’avenir… (cf. Prop. n. 49).
[108] Cf. Jean-Paul II, Lettre aux enfants (13 décembre 1994) : Insegnamenti, XVII/2,1994, p. 1077 ; DC 2108 (1995), p. 54.
[109] Cf. Deuxième Assemblée spéciale du Synode des Évêques pour l’Afrique, Message final (23 octobre 2009), n. 30 : ORF 3107 (2009), p. 25 ; DC 2434 (2009), p. 1031.
[110] Paul VI, Lett. enc. Populorum progressio (26 mars 1967), n. 14 : AAS 59 (1967), p. 264 ; DC 1492 (1967), col. 679 ; cf. Benoît XVI, Lett. enc. Caritas in veritate (29 juin 2009), n. 18: AAS 101 (2009), pp. 653-654 ; DC 2429 (2009), p. 760.
[111] Cf. Prop. n. 20 : DC 2434 (2009), pp. 1041-1042.
[112] Jean-Paul II, Lett. enc. Evangelium vitae (25 mars 1995), n. 82 : AAS 87 (1995), p.495 ; DC 2114 (1995), p. 393.
[113] Cf. Prop. n. 53 : DC 2434 (2009), p. 1054.
[114] Cf. Prop. n. 52 : DC 2434 (2009), pp. 1053-1054.
[115] Cf. Prop. n. 51 : DC 2434 (2009), p. 1053.
[116] Cf. Deuxième Assemblée spéciale du Synode des Évêques pour l’Afrique, Message final (23 octobre 2009), n. 31 : ORF 3107 (2009), p. 25 ; DC 2434 (2009), p. 1031.
[117] Cf. Prop. n. 19 : DC 2434 (2009), p. 1041.
[118] Cf. Benoît XVI, Lett. enc. Caritas in veritate (29 juin 2009), n. 21 : AAS 101 (2009), pp. 655-656 ; DC 2429 (2009), pp. 754-755.
[119] Conc. œcum. Vat. II, Déclaration sur la liberté religieuse Dignitatis humanae, n. 13.
[120] Cf. Prop. nn. 17.29 : DC 2434 (2009), pp. 1040 et 1045.
[121] Cf. Deuxième Assemblée spéciale du Synode des Évêques pour l’Afrique, Message final (23 octobre 2009), n. 32 : ORF 3107 (2009), p. 26 ; DC 2434 (2009), p. 1032.
[122] Cf. Benoît XVI, Lett. enc. Caritas in veritate (29 juin 2009), n. 42 : AAS 101 (2009), pp. 677-678 : DC 2429 (2009), pp. 773-774 ; Prop. n. 15 : DC 2434 (2009), p. 1040.
[123] Deuxième Assemblée générale ordinaire du Synode des Évêques, Doc. Justitia in mundo (30 novembre 1971), Propositio 8a : AAS 63 (1971), p. 941 ; DC 1600 (1972), p. 18.
[124] Ibidem. Propositio 8b.8c : AAS 63 (1971), p. 941 ; DC 1600 (1972), p. 18.
[125] Cf. Prop. n. 22 : DC 2434 (2009), pp. 1042-1043.
[126] Cf. Prop. n. 30 : DC 2434 (2009), p. 1046.
[127] Cf. Congrégation pour la Doctrine de la Foi, Note doctrinale à propos de questions sur l’engagement et le comportement des catholiques dans la vie politique (24 novembre 2002).
[128] Le Catéchisme de l’Église catholique, n. 2419.
[129] Cf. Prop. n. 24 : DC 2434 (2009), p. 1043 ; Benoît XVI, Lett. enc. Caritas in veritate (29 juin 2009), nn. 58.60.67 : AAS 101 (2009), pp. 693-694, 695 et 700-701 ; DC 2429 (2009), pp. 783-784 et 787-788 ; Le Catéchisme de l’Église catholique, nn. 1883.1885.
[130] Cf. Prop. n. 25 : DC 2434 (2009), pp. 1043-1044.
[131] Cf. Prop. n. 26 : DC 2434 (2009), p. 1044.
[132] Benoît XVI, Lett. enc. Caritas in veritate (29 juin 2009), n. 43 : AAS 101 (2009), p. 679; DC 2429 (2009), p. 774.
[133] Cf. Prop. n. 54 : DC 2434 (2009), p. 1054.
[134] Idem.
[135] Cf. Prop. n. 55 : DC 2434 (2009), p. 1055.
[136] Cf. Prop. n. 54 : DC 2434 (2009), pp. 1054-1055.
[137] Cf. Prop. n. 28 : DC 2434 (2009), pp. 1044-1045.
[138] Cf. Benoît XVI, Discours aux membres du Conseil spécial pour l’Afrique du Synode des Évêques (Yaoundé, 19 mars 2009) : AAS 101 (2009), p. 310 ; DC 2422 (2009), p. 386.
[139] Cf. Benoît XVI, Lett. enc. Caritas in veritate (29 juin 2009), n. 62 : AAS 101 (2009), pp. 696-697 ; DC 2429 (2009), p. 785.
[140] Ibidem,n. 42 : AAS 101 (2009), p. 677 ; DC 2429 (2009), p. 774.
[141] Ibidem, n. 36 : AAS 101 (2009), p. 672 ; DC 2429 (2009), p. 770.
[142] Ibidem, n. 47 : AAS 101 (2009), p. 684; DC 2429 (2009), p. 777 ; cf. Prop. n. 31 : DC 2434 (2009), p. 767.
[143] Cf. Prop. nn. 10-13 : DC 2434 (2009), pp. 1038-1039.
[144] Confessions, VII, 10, 16 : PL32, 742.
[145] Cf. Prop. n. 10 : DC 2434 (2009), p. 1038.
[146] Conc. œcum. Vat. II, Déclaration sur les relations de l’Église avec les religions non chrétiennes Nostra Aetate, n. 2 ; cf. Prop. n. 13 : DC 2434 (2009), p. 1039.
[147] Conc. œcum. Vat. II, Déclaration sur les relations de l’Église avec les religions non chrétiennes Nostra Aetate, n. 3.
[148] Cf. Deuxième Assemblée spéciale du Synode des Évêques pour l’Afrique, Message final (23 octobre 2009), n. 41 : ORF 3107 (2009), p. 26 ; DC 2434 (2009), pp. 1033-1034.
[149] Cf. Prop. n. 12 : DC 2434 (2009), pp. 1038-1039.
[150] Cf. Benoît XVI, Message pour la Journée mondiale pour la paix 2011 : AAS 103 (2011), pp. 46-58 ; DC 2459 (2011),
pp. 2-9.
[151] Cf. Prop. n. 18 : DC 2434 (2009), p. 1041.
[152] Benoît XVI, Lett. enc. Caritas in veritate (29 juin 2009), n. 30 : AAS 101 (2009), p. 665 ; DC 2439 (2009), p. 766.
[153] Cf. Congrégation pour les Évêques, Directoire pour le Ministère pastoral des Évêques, Apostolorum successores (22 février 2004), nn. 33-48.
[154] Epistula, 33, 1 : PL 4, 297 ; L. Bayard éd.; Les Belles Lettres, Paris (1962²), p. 84.
[155] Benoît XVI, Discours aux Évêques de France (Lourdes, 14 septembre 2008) : Insegnamenti, IV/ 2, 2008, p. 321 ; DC 2409 (2008), p. 859.
[156] Prop. n. 3 : DC 2434 (2009), p. 1035.
[157] Cf. Prop. n. 4 : DC 2434 (2009), p. 1036.
[158] Cf. Idem.
[159] Cf. Prop. n. 39: DC 2434 (2009), p. 1049.
[160] Cf. Deuxième Assemblée spéciale du Synode des Évêques pour l’Afrique, Message final (23 octobre 2009), n. 20 : ORF 3107 (2009), p. 25 ; DC 2434 (2009), p. 1029.
[161] Cf. Prop. n. 39 : DC 2434 (2009), p. 1049.
[162] Cf. Benoît XVI, Discours à la Curie romaine à l’occasion de l’échange des vœux (21 décembre 2009) : AAS 102 (2010), p. 35 ; DC 2439 (2010), p. 109.
[163] Epistula, 66, 1 : PL 4, 398 ; L. Bayard éd.; Les Belles Lettres, Paris (1962²), p. 2.
[164] S. Ignace d’Antioche, Ad Magnesios, III, 2 : éd. F. X. Funk, 233 ; SC 10bis, p. 83.
[165] Benoît XVI, Exhort. apost. post-synodale Sacramentum caritatis (22 février 2007), n. 24 : AAS 99 (2007), p. 125 ; DC 2377 (2007), p. 313.
[166] Cf. Apologeticum, 50, 13 : PL 1, 603 ; trad. J.-P. Waltzing, Collection des Universités de France, Paris 1971, p. 108.
[167] Cf. Congrégation pour l’éducation catholique, Normes fondamentales pour la formation des diacres permanents (22 février 1998), n. 8 ; Congrégation pour le Clergé, Directoire pour le ministère et la vie des diacres permanents (22 février 1998),
nn. 6.8.48.
[168] Cf. Deuxième Assemblée spéciale pour l’Afrique du Synode des Évêques, Lineamenta (3 décembre 2007), n. 89 : ORF 2940 (2006), p. XI supplément ; DC2365 (2009), p. 858.
[169] Cf. Prop. n. 50 : DC 2434 (2009), p. 1053.
[170] Cf. Prop. n. 41 : DC 2434 (2009), p. 1050.
[171] Cf. Prop. n. 42 : DC 2434 (2009), p. 1050.
[172] Cf. Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n. 46.
[174] Cf. Prop. n. 40 : DC 2434 (2009), p. 1050.
[175] Ibidem.
[176] Cf. Lettre aux séminaristes (18 octobre 2010) : Osservatore Romano 45.585 (2010), p. 12 ; DC 2456 (2010), pp. 974-977.
[177] Benoît XVI, Discours aux membres du Conseil spécial pour l’Afrique du Synode des Évêques (Yaoundé, 19 mars 2009) : AAS 101 (2009), pp. 311-312 ; DC 2422 (2009), p. 386.
[178] Prop. n. 44 : DC 2434 (2009), p.1051 ; Cf. Jean-Paul II, Exhort. apost. post-synodale Ecclesia in Africa (14 septembre 1995), n. 91 : AAS 88 (1996), p. 57 ; DC 2123 (1995), p. 840.
[179] Cf. Jean-Paul II, Exhort. apost. post-synodale Christifideles laici (30 décembre 1988), nn. 15.17 : AAS 81 (1989), pp. 413-416 et 418-421 ; DC 1978 (1989), pp. 159-160 et 160-161.
[180] Prop. n. 37 : DC 2434 (2009), p. 1048.
[181] Cf. n. 103 : AAS 88 (1996), pp. 62-63 ; DC 2123 (1995), pp. 842-843.
[182] Benoît XVI, Deuxième Assemblée spéciale pour l’Afrique du Synode des Évêques, Méditation durant l’heure de tierce (5 octobre 2009) : AAS 101 (2009), p. 920 ; ORF 3104 (2009), p. 5.
[183] Ibidem.
[184] Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n. 1.
[185] Benoît XVI, Lett. enc. Deus caritas est (25 décembre 2005), n. 39 : AAS 98 (2006), p. 250 ; DC 2352 (2006), p. 185.
[186] Cf. Prop. n. 35 : DC 2434 (2009), p. 1047.
[187] Benoît XVI, Homélie à Nazareth (14 mai 2009) : AAS 101 (2009), p. 480 ; DC 2425 (2009), p. 583.
[188] Cf. Benoît XVI, Exhort. apost. post-synodale Sacramentum caritatis (22 février 2007), n. 49 : AAS 99 (2007), p. 143 ; DC 2377 (2007), p. 323.
[189] Cf. Prop. n. 36 : DC 2434 (2009), p. 1048.
[190] N. 103 : AAS 88 (1996), pp. 62-63 ; DC 2123 (1995), p. 843.
[191] Benoît XVI, Discours aux membres du Conseil spécial pour l’Afrique du Synode des Évêques (Yaoundé, 19 mars 2009) : AAS 101 (2009), p. 312 ; DC 2422 (2009), p. 387.
[192] Cf. Deuxième Assemblée spéciale du Synode des Évêques pour l’Afrique, Message final (23 octobre 2009), n. 31 : ORF 3107 (2009), pp. 25-26 ; DC 2434 (2009), p. 1031.
[193] Idem.
[194] Cf. Jean-Paul II, Exhort. apost. post-synodale Ecclesia in Africa (14 septembre 1995), n. 124: AAS 88 (1996), pp. 72-73 ; DC 2123 (1995), p. 847.
[195] Cf. Prop. n. 56 : DC 2434 (2009), p. 1055.
[196] Benoît XVI, Lett. enc. Caritas in veritate (29 juin 2009), n. 73: AAS 101 (2009), p. 705 ; DC 2429 (2009), p. 790.
[197] Ibidem, n. 73 : AAS 101 (2009), pp. 704-705 ; DC 2429 (2009), p. 790.
[198] Cf. Prop. n. 56 : DC 2434 (2009), p. 1055.
[199] Commentaire sur Isaïe, prologue : PL 24, 17.
[200] Cf. Prop. n. 46 : DC 2434 (2009), p. 1051.
[201] Cf. Benoît XVI, Exhort. apost. post-synodale Sacramentum caritatis (22 février 2007), n. 82 : AAS 99 (2007), pp. 168-169; DC 2377 (2007), p.337 ; Lett. enc. Deus caritas est (25 décembre 2005), n. 14 : AAS 98 (2006), pp. 228-229 ; DC 2429 (2009), p. 758.
[202] Cf. Prop. n. 8 : DC 2434 (2009), p. 1037.
[203] Cf. Benoît XVI, Exhort. apost. post-synodale Sacramentum caritatis (22 février 2007), n. 51 : AAS 99 (2007), p. 144 ; DC 2377 (2007), p. 324.
[204] Ibidem, n. 83 : AAS 99 (2007), p. 169 ; DC 2377 (2007), p. 337.
[205] Cf. Prop. n. 5 : DC 2434 (2009), p. 1036.
[206] Cf. Prop. n. 6 : DC 2434 (2009), p. 1036 ; Jean-Paul II, Exhort. apost. post-synodale Reconciliatio et Poenitentia (2 décembre 1984), n. 23 : AAS77 (1985), pp.233-235 ; DC 1887 (1985), pp. 15-16.
[207] Prop. n. 8 : DC 2434 (2009), p. 1037.
[208] Cf. Idem.
[209] Idem.
[210] Prop. n. 9 : DC 2434 (2009), p. 1037
[211] Benoît XVI, Lett. enc. Spe salvi (30 novembre 2007), n. 49 : AAS 99 (2007), p. 1025 ; DC 2493 (2008), p.36.
[212] Congrégation pour la Doctrine de la Foi, Note doctrinale sur certains aspects de l’Évangélisation (3 décembre 2007), n. 12 : AAS 100 (2008), p. 501.
[213] Cf.S. Thomas d’Aquin, S. Th. Ia-IIae, q. 106, a. 1.
[214] Benoît XVI, Exhort. apost. post-synodale Verbum Domini (30 septembre 2010), n. 122 : AAS 102 (2010), p. 785.
[215] Prop. n. 34 : DC 2434 (2009), p. 1047.
[216] Prop. n. 34 : DC 2434 (2009), p. 1047. Cf. Paul VI, Exhort. apost. Evangelii nuntiandi (8 décembre 1975), n. 21 : AAS 68 (1976), pp. 19-20 ; DC 1689 (1976), p. 5.
[217] Jean-Paul II, Exhort. apost. post-synodale Ecclesia in Africa (14 septembre 1995), n. 31 : AAS 88 (1996), p. 21 ; DC 2123 (1995), p. 824.
[218] Jean-Paul II, Discours aux Évêques membres du Conseil épiscopal latino-américain (Port-au-Prince, 9 mars 1983) : AAS 75 (1983), p.778 ; DC 1850 (1983), p. 438.
[219] N. 29 : AAS 102 (2010), p. 785.
[220] Benoît XVI, Discours aux membres du Conseil spécial pour l’Afrique du Synode des Évêques (Yaoundé, 19 mars 2009) : AAS 101 (2009), p. 312 ; DC 2422 (2009), p.387.
[221] Benoît XVI, Lett. enc. Spe salvi (30 novembre 2007), n. 1 : AAS 99 (2007), p. 985 ; DC 2393 (2008), p. 14.
[222] Benoît XVI, Homélie à la messe de conclusion de la deuxième Assemblée spéciale pour l’Afrique du Synode des Évêques (25 octobre 2009) : AAS 101 (2009), p. 918 ; DC 2434 (2009), p. 1024.
[223] Idem.
[224] Cf. Idem.
[225] Benoît XVI, Discours à la Curie romaine à l’occasion de l’échange des vœux (21 décembre 2009) : AAS 102 (2010), p. 34 ; DC 2439 (2010), p. 109.
[226] Cf. Prop. n. 57 : DC 2434 (2009), p. 1055.
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